Anonyme [1652], L’INCONNV A LA REYNE. Où elle est suppliée, de chasser le Cardinal Mazarin, & monstré la necessité de son exil par des raisons infaillibles, & inneuitables, à cellefin d’auoir la Paix Generalle. , françaisRéférence RIM : M0_1693. Cote locale : B_16_25.
page précédent(e)

page suivant(e)

-- 7 --

Vn excellent Medecin du temps passé, ayant trouué à
vn malade, vn emplastre mis par vn Chirurgien sur la main,
il l’osta, & l’appliqua sur la nucque, qui ne sentoit aucune
douleur, à dessein que la force du medicament placé en cét
endroit ; Lequel est la source des nerfs qui se distribuent aux
autres parties du corps, se communicquat plus facilement à
la partie blessée. Ainsi Vostre Majesté ne peut se conseruer
elle mesme, sans maintenir toutes ses parties : Bien que vos
sujets soient incomparables à Vostre Grandeur, & que leur
bassesse se considere par Vostre hauteur, & par vos perfectiõs ;
toutesfois Dieu vous en a constituée leur chef, & vous
n’auez la qualité de Reyne, que par vos Sujets, comme vous
ne subsistez que par l’affection, & l’obeyssance qu’ils vous
portent. Donnez leur, MADAME, vne sainte Paix,
esloignez ce pertur bateur public, ne mettez point en consideration
les offenses qui vous pourroient sembler auoir
esté particulierement commises contre vous : Proposez vous
la gloire de Dieu la premiere, puis le bien, le soulagement,
& le repos de vostre Peuple. Ce n’est point vostre particulier,
qui vous fait éstre ce que vous estes : Ce n’est que l’affection,
l’vnion, & le consentement des hommes que vous
voyez diuisez en ces deux armées. Si vous auez perdu le
cœur de vos Sujets, si la guerre détruit les corps & ruine les
biens, surquoy s’étendra vostre domination ? Quand vostre
Frãce sera reduite en deserr, quelle Reine serez vous ? & quel
éclat donnerez vous à vostre fils pour maintenir sa Monarchie ?
quand elle sera habitée par les étrangers : estimez vous
qu’ils se soúmettent à vos loix ? ne diront-ils pas que le droit
des armes leur baille l’authorité sur le pays conquis ? Quand
bien vous les rendriez vostres, comment asseurerez vous vn
nouuel estat ? en combien de temps auez vous reparé les
ruines de cette guerre ! Non, non, Madame, il n’y a esperance
qui vous puisse promettre vne couronne plus belle que
celle que Dieu vous a mise en main. Il n’y a point d’Estrangers
qui vous puissent donner plus de forces, ny plus de
moyens que vous en auez dans le Royaume de vostre fils
pour le luy conseruer. Faites donc cesser toutes occasions



page précédent(e)

page suivant(e)