Baltasard, Christophle [1645], TRAITTÉ DES VSVRPATIONS DES ROYS D’ESPAGNE, SVR LA COVRONNE DE FRANCE, Depuis le Regne de Charles huictiesme. ENSEMBLE VN DISCOVRS SVR LE COMMENCEMENT, progrez, declin, & démembrement de la Monarchie Françoise, droicts, & pretentions des Roys Tres-Chrestiens sur l’Empire. AVGMENTÉ D’VN SOMMAIRE DES DROICTS de ceste Couronne, sur les Comtez de Bourgongne, Cambray, Haynault, de Genes & Luxembourg. ET LES VICTOIRES ET CONQVESTES DES ROYS LOVIS XIII. dit le IVSTE, & de LOVIS XIV. dit DIEV-DONNÉ, sur les Espagnols, & les Austrichiens, en Italie, Alsace, Flandres, Luxembourg, & Comté de Bourgongne, Catalogne & Roussillon. Par C. BALTASARD. , françaisRéférence RIM : Mx. Cote locale : D_1_6.
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son Oncle le Duc de Sauoye, ligué auec l’Espagnol, pour despoüiller
Monsieur de Mantouë de ses Estats : le Roy prit le Pas de Suse, ruïna les
Barrieres des Alpes, & se fit iour parmy ces passages affreux pour aller secourir
Casal.

 

Puis repassant en France, où sa presence estoit necessaire pour couronner
sa gloire : car sçachant que les rebelles de Languedoc, souz le Duc de
Rohan, s’imaginant que sa Majesté se verroit obligée à vne longue guerre
contre l’Espagnol & le Sauoyard, pendant quoy ils auroient moyen
de reprendre par les armes ce qu’ils auoient perdu, tenoient la campagne,
fortifioient leurs places en intention de maintenir leur liberté : mais il en
arriua autrement ; car elle se resolut de mettre la derniere main aux armes,
& de les reduire en tel estat qu’ils ne peussent à l’aduenir se releuer. Pour
cet effet elle fit assieger Priuas, la força, chastia ceux de dedans, & reduisit
la place en cendres : puis marchant auec son armee en Languedoc, entra
aux Seuenes, d’où les rebelles tiroient leurs meilleurs soldats, & s’imaginoient
qu’à cause des forteresses, & chaste aux bastis entre des rochers inaccessibles,
l’armee du Roy n’y pourroit subsister : mais ils se trouuerent deceuz :
car sa Majesté y estant entree, rien ne fut capable de luy resister, ses
soldats grimpans les plus hautes roches en denichoient les rebelles. Anduse
& Alés, les deux meilleures places du pays, ne voulurent attendre le
siege : ce qui obligea le Duc de Rohan à toutes les places rebelles, demanderent
humblement la paix, que sa Majesté leur donna, à la charge de souffrir
la demolition des nouuelles fortifications de toutes leurs places.

Et apres auoir ainsi redonné le calme au Royaume, le Roy porta sa pensee
à faire iouïr ses alliez d’vne pareille felicité, se porta pour la deuxiesme
fois en Piedmont, afin d’obliger le Duc de Sauoie de lui tenir parole. Il
conquit sur lui Pinerol, & que Brigeras, qui craignãt la perte entiere de ses
Estats, & voiant son Duché de Sauoie pris par les François, se trouua
trop heureux d’estre derechef receu en la grace de sa Majesté : car apres
auoir veu Veillane, Carignan, & Saluces emportees par les Generaux, ce
fut lors qu’il pensa auoir besoin de conseruer ce qu’il lui restoit de places,
en abandonnant le parti des Imperiaux & Espagnols, pour entrer en celui
du Roi.

C’estoit au temps que l’Espagnol tenoit Casal assiegé par le Marquis de
Spinola, qui en apparence eust esté prise sans le puissant secours que le Roi
y enuoia, lequel en passant au Montferrat força les barricades que l’Espagnol
auoit faites au passage du Po, prés Saluces, défit les ennemis, & s’aduança
vers Casal ; ce que voiant les Espagnols, aimerent mieux quitter le
siege, & iouir de la paix, que hazarder par vne bataille la perte euidente de
leur armee.



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