Anonyme [1649], RESPONSE DE LA PLVS FAMEVSE COQVETTE DE L’VNIVERS, A LA LETTRE DV PLVS MALHEVREVX Courtisan de la Terre. Auec plusieurs Questions qu’elle luy fait, pour sçauoir l’explication de ce qu’il veut dire. , françaisRéférence RIM : M0_3393. Cote locale : C_3_21.
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de vingt ans, elles ayent eu plus des seruiteurs que d’amis, & que
leur Siecle s’en soit seruy comme d’vne fable à vostre conte, il se
peut dire sans mentir, qu’elles ont trouué leur perte dans vn bon
chemin, & qu’il y a des saisons où la vertu se trouue peu considerée.
Personne n’a iamais pris part à mes interests sans vous mettre
en ieu, & sans vous accuser d’impertinence. En vn mot, si ie
ne rougis pas de vos mauuais discours, c’est que vostre mauuaise
vie me fait plier de honte. Cessez plustost de representer vos sotises
que mes deffauts, aussi ne me sçauriez vous accuser que d’estre
sourde à vos plaintes. N’esperez pas d’éterniser vostre nom par des
actions odieuses, sa durée ne sçauroit aller au delà du temps que
la Nature vous a prescript, que par vne voye toute comblée de
malediction, malgré tous les artifices que vous sçauriez mettre en
vsage pour ce faire. Et quoy que mon humeur ne soit pas medisante
comme la vostre, ie dis que si vous desaprouuez le vice que
c’est, ou parce que vous n’estes pas complice de celuy qui le fait,
ou parce que l’action ne vous semble pas estre assez odieuse. Aussi
ne faites vous iamais estat de la Vertu, si elle ne cesse d’estre pour
vous complaire. Et si vous n’eussiez eu le iugement depraué, vôtre
plume se fut occupée à publier les Vertus d’vne personne, qui
vous a fait plus d’honneur, que vostre merite n’en eut iamais sceu
pretendre, de qui que ce puisse estre. Si mes volontez dependoient
de celles que vous me reseruez, ie croy que ie serois la plus miserable
de toutes les creatures de l’Vniuers, & la bien-aymé d’vn Caualier
que ie hay plus que la peste. Ceux que ie dois cõsiderer, sont
aussi glorieux de voir que ie conserue mon honneur, que faschez
d’entendre parler continuellement de vos impudences. Ie vous,
confesse que mes caprices surprennent l’adresse des plus galands
lors qu’ils se méconnoissent, & que ie suis si rigoureuse, sans considerer
que les indulgences sont destinées pour ceux qui se veulent
remettre en grace, comme vous sçauez fort bien dire, que ie,
iuge toutes les actions qui sont de la nature des vostres incapables
de remission, & dignes du feu la plus part de celles que vous sçauez
faire. Ce sont des sentimens que l’esprit de Dieu me communique :
car faillir sous esperance de misericorde, c’est accroistre le
nombre des réprouuez, selon les meilleurs Casuistes du Monde.
Mais de grace, n’auez vous pas dessein de me iustifier contre vos
calomnies, lors que vous dites que ie suis extremement auare de


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