D. B. [signé] = Cyrano de Bergerac, Savinien de [?] [1649], REMONSTRANCE DE LA NOBLESSE A LA REYNE REGENTE. POVR LA PAIX. , françaisRéférence RIM : M0_3312. Cote locale : A_8_25.
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qui disoit que les Dieux vouloient qu’a chaque pas qu’il faisoit,
il se ressouuint de son triomphe. Nous ne murmurons
donc pas contre nos blessures quelques larges & quelques
profondes qu’elles puissent estre, puisque ce seroit murmurer
contre nostre gloire ; au contraire, nous continuërons
dans nos respects & dans nos seruices ; & pour la seureté
de vostre personne, & pour celle de cette grande
Monarchie, nous n’aurons deuant les yeux que cette
belle maxime de l’vn des Sages de Grece, qu’il ne faut
s’estudier que pour estre loüé durant sa vie, & pour estre
creu bien-heureux apres sa mort. Celle-cy ne nous a point
fait encore trembler depuis que l’honneur & la iustice nous
ont mis les armes en main, & nous auons assez bien vescu
iusques icy, pour persuader aux plus incredules, que nous
n’auons iamais eu tant de peur des loix que de l’infamie.
Mais ce n’est plus des guerres passées que nous nous plaignons,
Madame, nous ne parlons que de celle qui s’allume
auiourd’huy dans nostre foyer, qui partage toutes les
familles, qui porte le pere contre l’enfant, qui arme la
moitié de vostre Royaume contre l’autre, & qui ne peut
estre profitable qu’aux voleurs, aux estrangers, & aux traistres.
Les mauuais Ministres qui l’ont conseillée à vostre
Maiesté, ont creu qu’il estoit des François, ce qu’il estoit
des Romains du temps d’Hannibal qui disoit qu’ils ne
pouuoient estre vaincus que dans leur pays ; & comme ils
ne sont deuenus sçauans qu’a faire le mal, & qu’ils y sont
extraordinairement adroits, c’est d’eux & de leurs semblables
que parle l’Apostre, quand il dit que ces Sages periront
auec toute leur sagesse. Leurs conseils semblent tous
estre appuyez de raisons tres aduantageuses, ils donnent
des aduis qui surprennent & qui esbloüissent ; mais quand
on les a bien examinez, on treuue enfin que qui les suit, ne
s’esloigne iamais gueres de son malheur, & qu’il en est


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