Anonyme [1652], LE DERNIER EXORCISME DV CARDINAL MAZARIN, PRESENTÉ A LA REYNE. Pour l’obliger à sortir au plustost de la France. Par vn de ses meilleurs Amis. , françaisRéférence RIM : M0_1016. Cote locale : B_13_36.
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Deust-elle enfin perdre la vie
A voir ton Empire finir,
Vas-t’en pour ne plus reuenir.

 

Vas-t’en, Mazarin, ie te le dis maintenant en Prose, aprés te
l’auoir mille fois dit en Vers ; & te veux traiter quelque temps
d’homme raisonnable, aprés t’auoir osé traiter de Demon. Vas-t’en,
dis-ie, laisse nostre France en repos, & donne ce contentement
à tant de personnes, qui dans la haine mortelle qu’elle te
portent, pensent que leur salut ne dépend que de ton éloignement,
ou de ta mort. Ainsi, Mazarin, ne sois pas moins genereux
qu’Othon, lequel se voyant en possession de l’Empire où il
auoit souhaité de paruenir, pour iouyr auec plus de liberté de
toutes sortes de plaisirs, se priua volontairement de l’empire de
la vie, pour ne r’allumer les feux d’vne Guerre Ciuile, en vne
occurrence où l’ardeur de ses soldats presents, & des armées qui
s’auançoient de tous costez à son secours, luy faisoient esperer
vne prompte Victoire fut ses Ennemis, s’il n’eust embrasse plûtost
la resolution d’vne belle mort. Que s’il importe à tant de
monde, ou que tu t’en aille, ou que tu meures, ne sois point paresseux
à partir, puisque chaque moment où tu tarde, adiouste
à nostre peine & à la tienne. Ne t’asseure point, au reste, à
l’Armée du Roy, qui trauaille à ton rétablissement ; Sçachant
que Henry le Grand mesme, auec plus de troupes, & mieux
aguerries ; aprés auoir gagné tant de batailles, & pris tant de Villes
dans la France, dont il estoit Roy legitime, ne pût iamais s’en
rendre tout à fait Maistre, tant que son esprit parut infecté de
l’heresie, à qui l’on te peut iustement comparer. C’est pour
te dire, ô Mazarin, que tu ne peux iamais esperer de voir le Roy
paisible en son Royaume, ny la Reyne bien vouluë des Peuples,
tant que tu les suiuras comme tu fais pour te mettre à l’abry des
orages qui te menacent de tous costez. Que si c’est vn effet de
prudence de témoigner qu’on fait de gré, ce qu’autrement on
seroit obligé de faire de force, ne differe point à prendre cette
resolution, & fais que nous deuions ainsi plustost le bonheur de
ta retraite à ta prudence mesme, qu’à la violence d’vne extrême
necessité. Mais i’ay tort de te faire cette Exhortation, sçachant



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