Anonyme [1652], LE PROPHETE VERITABLE DE MESSIEVRS DE PARIS, ENVOYÉE A LA REYNE, SVR LEVRS DERNIERES resolutions. , françaisRéférence RIM : M0_2908. Cote locale : B_4_10.
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LE
PROPHETE
VERITABLE
DE MESSIEVRS DE PARIS,
ENVOYÉE A LA
REYNE,
SVR LEVRS DERNIERES
resolutions.

A PARIS,
Ruë d’Escosse aux trois Cremailleres.

M. DC. LII.

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LE PROPHETE VERITABLE
de Messieurs de Paris, enuoyé à la Reyne
sur leurs dernieres resolutions.

MADAME,

Ie viens pour la seconde fois aduertir
vostre Majesté, du chastiment que Dieu prepare à
vostre sujet à son peuple : Ie ne suis pas icy venu pour
vous celler la verité, ma vie n’est rien, & par consequent
ie ne crains pas de la perdre : mais il vous plaira considerer
que celuy qui a permis que l’on vous mit la Couronne
de France & de Nauarre sur vostre teste, est
courroucé grandement contre vous. Il va destruire
vos desseins, & vous humiliera : il rompra les chaisnes
du peuple dont il semble estre lié : il aneantira le pernicieux
conseil de vostre tant aimé Ministre : il brisera
tous ceux qui le soustiennent, & fera voir des merueilles
à vostre confusion : L’on vous abuse, l’on vous
flatte, & mesme l’on vous conte des sornettes & des
paroles friuolles, lesquelles ne tendent qu’à l’entiere

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ruine & totale destruction de l’Estat : Vos iours sont
contez, vostre pouuoir va prendre fin, & vous ne
sçauriez où vous retirer, parce que l’Estre des Astres est
courroucé. Vostre orgueil sera confus, & vous ne
sçaurez que trop tard, ce que c’est d’humilités. Tous
les aduertissemens que l’on vous a donnez, ont passez
deuant vos yeux pour sables ; mais voicy les iours arririuez
que vous les prendrez pour des veritez : Le temps
des malheurs & tribulations veut tirer à sa fin, & vous
ne le voulés pas ? Vostre plus grand plaisir est de voir
espandre vne Mer sang innocent, & Dieu commence
à ce lasser de telles iniquitez & abominations ; il ne veut
plus que son peuple souffre & vous le voulez : Il luy
veut donner la Paix, & vous l’empéchés : il veut que l’on
extermine l’Autheur des troubles & vous le soustenez :
Vous semble-t’il peu de chose d’attirer l’ire de Dieu &
du peuple ; voulez-vous estre semblable à cette destructrice
des nations, representée en l’Apocalypse, ou
bien cette ennemie des gens de bien, Iezabel ; faut-il
que vous soyez cause de vostre propre mal’heur. N’auez-vous
pas le pouuoir de rejetter tant de conseils que
l’on vous donne ; Quoy ! voulez-vous perdre le Royaume
& nostre Roy ; N’auez-vous pas de honte, lors
que l’on vous couchera dans l’Histoire, pour vne desolatrice,
& non pas subernatrice des François ? Il est
temps que vous songiez à ses choses, le mal est en sa
plus forte cryse ; & le Medecin ne trouue plus de remedes

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propres pour son soulagement, qu’vne entiere
irreuerence que vos suiets vous pourront faire. Le
iour ne luyt que foiblement sur nostre Horison, &
semble desia que les horreurs d’vne nuict perpetuelle
vienne nous enuironner. Ie crains que vous ne soyez
ainsi que vostre peuple enuironné de ses tenebres ; Marchez
droictement pendant qu’il est iour, de crainte
que vous ne choppiez en pensant cheminer parmy
l’ennuyeuse obscurité, qui menasse vostre chef ; Et
vous voulez viure, laissés viure semblablement en paix
vos sujets & vos enfans. Il n’est plus temps que vous
regimbiés contre l’eguillon ; il faut la paix ; il faut exiller
la dissention & la guerre ; Punir les autheurs de
tant de maux souferts, de tant de meurtres, de tant de
vols & violement, de tant d’incendies & sacrileges :
Vn chacun sçait bien que ce n’est pas vous qui faite
ce mal, mais que peut-on esperer de vostre Majesté, si
vous le permetre ? Dieu est fasché d’entendre les cris,
les pleurs, & les lamentations de son peuple ; Il s’est
éueillé, & a entendu les plaintes des innocens, des
vefues & des orphelins, le sang des iustes a importuné
la milice celeste, & à prouoqué le Sainct des Saincts à
courroux ? Il ne faut plus de delay, il vous faut humilier
deuant luy, & terminer cette inestime guerre : Il
n’est pas que vous ne sçachies que Saül fut hay de
Dieu & destrosné pour auoir voulu conseruer l’ennemy

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capital des Israëlites : Considerés, s’il vous plaist,
Madame, si cette mesme puissance né peut pas vous
faire le semblable, puis qu’opiniastrement vous soustenés
vn Estranger, lequel deuore à belles dents les
Fleurs-de-lys qui nous ont esté enuoyés du Ciel. Il ne
sera plus temps d’y songer quand le jugement sera donné,
& que la desolation sera parfaite : nul ne peut éuiter
son malheur, quand il n’en est pas aduerty. Or ie
suis venu vers vous seulement pour ce sujet : ne veillés
pas mespriser mes paroles ? puis que ie ne les ay que
pour vostre repos, & celuy de la France. Il n’est plus
de saison de s’appuyer sur vos forces, puis que Dieu a
entrepris de les démembrer si vous n’appaisés son yre,
& le plustost ne sera que le meilleur, pour vous & pour
vos sujets, autrement vous vous verrés veufue d’enfans
& delaissée de vos seruiteurs. L’Espagne ne vous
receura pas : l’Italie ne fera que semblant de vous voir,
& la France nostre bonne Mere ne vous considerera
que pour sa perturbatrice. Songés, songés, grande
Reyne, à cecy, & ne vous plongés pas dans vn semblable
labyrinthe, vostre peuple ayme son Roy & vous
aussi ; amenés leur à Paris, ou du moins leur permettre
de l’aller querir, qu’ils puissent viure en paix en vous
obeyssant.

 

FIN.

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