Anonyme [1652], LES ARTICLES DES CRIMES CAPITAVX, DONT EST ACCVSÉ, le Cardinal Mazarin, & desquels il se doit iustifier. , françaisRéférence RIM : M0_418. Cote locale : B_12_22.
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ARTICLES DES CRIMES
Capitaux dont est accusé le Cardinal
Mazarin, & desquels il se doit iustifier.

I.

D’auoir surpris l’esprit de la Reyne abuse
de sa simplicité & inspire de mauuais
Conseils.

II. D’auoir vollé les deniers du Roy, & fait
iceux transporter hors du Royaume, & mis
aux Banques des Villes Estrangeres & la plus-part
ennemies de la France pour s’en seruir à
executer ses mauuais desseins.

III. D’auoir fait vn traffic sordide & honteux
des Benefices de ce Royaume qu’il a vendus
& deliurez à beaux deniers comptans, &
conferez à ses affidez & adherans, qui est vne
entreprise sur le droict du Roy, qui seul peut
nommer & donner les Benefices vacquans
aux terres & païs de son obeïssance.

IV. D’auoir fait prendre & émprisonner le
Duc de Beaufort ne son authorité priuée, sans
cause, raison ny sujet.

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V. D’auoir fait tuër le Sieur de S. Fgland
Gentil-homme du mesme Duc de Beaufort,
le prenant pour sa personne, en la ruë de S.
Honoré.

VI. D’auoir porté leurs Majestés à faire la
guerre à ceux de Bordeaux, qui ne respirent
que seruice, fidelité & obeissance au Roy,
pour vanger le seul interest du Duc d’Espernon,
qui veut faire son allié, & qui s’est rendu
par ses violences ennemy des Bordelois.

VII. D’auoir declaré que le Roy n’est obligé
de garder à ses sujets la foy & la parole qu’il
leur donne, comme il a fait voir au Traicté de
Paix que sa Majesté donna à la ville de Bordeaux,
de conseruer leurs Priuileges, & d’éloigner
ses gens de guerre de vingt cinq lieuës
loin du païs Bordelois, traicté qui fut violé
en moins d’vn mois apres.

VIII. D’auoir luy seul empesché la Paix
Generale, traictée, arrestée & preste à signer,
par les Plenipotentiaires en la ville de Munster,
& à fait deffendre à ceux de France de la
signer, quoy qu’ils eussent la plume en main
pour ce faite.

IX. D’auoir attenté sur les personnes de Messieurs

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les Princes de Condé, de Conty & Due
de Longueuille, les auoit faits prisonniers, &
transferez en diuers lieux, comme s’ils eussent
esté criminels de leze-Majesté, sans estre
neantmoins trouuez coupables d’aucune entreprise
ny mauuais dessein contre le seruice
ou Roy, comme la Declaration de leur innocence
fait assez cognoistre.

 

X. D’auoir fait attenter sur les personnes &
vie d’aucuns Officiers du Parlement de Paris,
de la Chambre des Comptes & du Grand
Conseil, pour ne vouloir souffrir sa tyrannie
ny ses entreprises contre le repos de l’Estat.

XI. D’auoir violé les Loix fondamentales du
Royaume introduisant aux Offices de la Couronne
& aux charges de l’Estat, des Estrangers
ses parens & affidez.

XII. D’auoir fait casser la meilleure Garde du
Roy, sçauoir sa Compagnie de mousquetaires
à cheual tous François naturels, & a mis prés
la personne de sa Majesté des Estrangers tels
qu’il a voulu.

XIII. D’auoir nuictamment fait enleuer le
Roy de sa bonne ville de Paris, disant faussement
la personne de sa Majesté ny estre pas
asseurée.

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XIV. D’auoir méchamment imputé au Parlement
de Paris, que dans leur Compagnie il
y en auoit qui auoient intelligence auec les
ennemis de l’Estat contre le Roy, ce qu’il a
fait publier de bouche & par escrit.

XV. D’auoir malicieusement offense le premier
Senat de France les appellants Fairfax &
Cromvuels, qu’ils vouloient faire de ce Royaume,
ce que ceux-là auoient fait d’Angleterre,
& traicter le Roy ainsi que ceux-là auoient
fait le leur.

XVI. D’auoir fait venir & entrer en France
des trouppes Estrangeres, comme Allemands,
Polonois, Lutheriens & Impies, & permis d’y
commettre les sacrileges, impietez & voleries
qui s’y sont faites.

XVII. D’auoir abusé du nom & de l’authorité
du Roy, & s’estre seruy de ses forces pour
exercer ses actes tyranniques, & se vanger de
ceux qui découuroiẽt ses trahisons & actions
violentes, barbares & detestables.

XVIII. D’auoir par son manquement de foy
& de parole, esté la cause de la Paix qui s’est
faite entre le Roy d’Espagne & les Estats des
Prouinces vnies des Pays bas, au grand prejudice
de la France,

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XIX. D’auoir mis les mesmes Estats & Prouinces
vnies en mauuais ménage auec le Prince
d’Orange en luy offrant toute assistance
pour se rendre maistre de la Zelande & de plusieurs
places dependantes desdits Estats, ce
qui les a mis mal auec la France.

XX. D’auoir tiré les garnisons Françoises des
places de Courtray, de Furnes, de Bergues, de
Landrecy, de Bourbourg & de Graueline,
pour faciliter aux Espagnols les moyens de les
reprendre, comme il eust fait.

XXI. D’auoir eu intelligence auec les Espagnols
au grand preiudice de la France, comme
il est apparu par les lettres & aduis de l’Archi-Duc
Leopold addressez au Parlemẽt de Paris.

XXII. D’auoir fait seruir le Port de Portolongone
en Italie pour en faire vne retraicte de Pirates
& de Corsaires, qui ont vollé & piraté les Marchands
Armeniens & autres, & est cause que l’Espagnol
& les Italiens ont repris sur le Roy, cette
place auec Orbitelle & Piumbino, qui auoient
esté acquises par les forces des armes de sa Maiesté.

XXIII. D’auoir violé la parole donnée aux Habitans
d’Angers de conseruer leurs priuileges, &
ne les charger de gens de guerre, lesquels au contraire,
il les y a fait entrer en grand nombre, y ont

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vefcu à discretion, a forcé les Habitans à donner
quantité d’argent.

 

XXIV. Qu’en tous les lieux où leurs Maiestez
ont esté, tant en Poictou, Saumur, Blois & autres
lieux, il a permis à ses soldats sans foy ny religion
de commettre des sacrileges, impietez aux lieux
sacrez, violer les filles, consacrer à Dieu, attenter à
la pudicité des femmes & des filles, ruiner, tourmenter,
bourreler, outrager & faire mourir plus
que martyrs quantité de pauures gens de tout âge
& sexe, voller, piller, & desoler les Villes, Bourgs
& Villages, sans vser d’aucune espece d’humanité,
& s’estre mocqué des aduis & remonstrances que
l’on luy en a faites.

XXV. D’auoir d’ébauché, corrompu, & gaigné
par argent, Charges & Benefices, grand nombre
de Capitaines & Officiers du Roy pour executer
ses vengeances sur la France, qu’il a traictée comme
son ennemy mortel, a fait outrager & detenu
captifs les Conseillers du Parlement de Paris qui
estoient enuoyez comme Deputez au Roy, en
quoy il n’a point eu de retenue de violer ainsi le
droict des gens inuiolablement gardé & obserué,
mesme par les natiõs les plus barbares de la terre.

FIN.

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