Anonyme [1652], L’HEVREVSE ET TRIOMPHANTE ARRIVEE DE MONSIEVR LE PRINCE DANS LA VILLE DE PARIS. , françaisRéférence RIM : M1_126. Cote locale : B_7_7.
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L’HEVREVSE ET
TRIOMPHANTE
ARRIVÉE DE MONSIEVR
LE PRINCE
DANS LA VILLE DE
Paris,

IE ne doubte point que les Bourgeois de Paris,
ne soient surprins d’estonnement, ou plustost
que la joye n’occuppe d’abord toutes les facultez
de leur ame entendant que celuy qui leur a gaigné
des Victoires, vient luy-mesme en pesonne pour
leur en faire le recit. Les ennemis de cét Estat,
auoient fait semé le bruit par leurs Emissaires, qu’il
n’y auoit point eu de Combat. Et si l’on ne sçauoit
que c’est vne ruse commune de Cour, de couurir les

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desaduantages du party Mazarin, plusieurs se
seroient persuadez ce que les Emissaires du Mazarin
ont voulu faire croire, assauoir qu’il n’y a eu
qu’vne legere escarmouche & que du costé du Mazarin,
il n’y est demeuré que dix huict hommes
dont la perte n’est que trop recõpensée par les blessures
du Duc de Nemours ; Mais les Couriers qui
sont venus les vns apres les autres, Et qui ont confirmé
la deffaite du Mareschal d’Hocquincour, les
particularitez de la Bataille, la Liste des morts &
blesses, le nombre de prisonniers, ont estonné tous
les Partisans. Et il n’y a que les incredules qui puissent
reuoquer en doute vne si esclattante Nouuelle.

 

Monsieur le Prince ayant paru infatigable
dans toute sa conduitte, apres auoir donné la
chasse à ses Ennemis, & laissé quatre mille Mazarins
sur la Place, a voulu venir en personne
pour partager sa joye, où plustost pour la redoubler
auec son Alt. Royalle, & tous les Bourgeois
de Paris. Il enuoya hier Ieudy vn Courrier pour
aduertir son Altesse Royalle de ses approches lequel
arriua vne heure apres Midy dans le Luxem-Bourg.
Son Altesse n’eust pas plutost apris la
Nouuelle de cette approche qu’il commanda

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d’atteller son Carosse. Et qu’il vouloit luy aller au
deuant. La joye parut si grande sur son visage qu’il
en estoit tout transporté d’aise deslors. Son cœur
fut comme dans vne inquietude. Le plaisir de cette
entreueuë tant desiré commenca a posseder cette
grande Ame. Et ie remarquay que quelque grauité
qu’il y ait dans toutes ses actions, neantmoins
la joye vouloit estre la Maistresse & tous les momẽs
luy estoient de-ja des longueure, & preuoyant que
le mouuement du Carosse ne se conderoit pas celuy
de son cœur, il demanda vn Cheual pour
joüyr plustost des accollades & des ambrassades de
nostre Prince Victorieux. Il partit donc a deux
heures, auec grand nombre de Noblesse, paroissant
sur son Cheual blanc, auec vne Majesté veritablement
Royalle, & ie vous asseure que le voyant
en cette esquipage, ie pleuray de joye & croyois
en le voyant, Voir le Pere du Peuple Romain,
assauoir Trajan, Tel que Pline nous le depeint
dans la vigueur, & force de son aage faisant paroistre
sur son Visage toutes les vertus qui sont requises,
pour commander. Si son Altesse eust peu
emprunter le Char du Soleil pour se transporter en
moins d’vn moment, au lieu ou estoit nostre
Triomphateur, ils l’auroit fait neantmoins dans

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peu d’heures, ils arriua au deuant du Princes vers
Lonjumeaux de voux exprimer les accollades &
les ambrassades de ses deux grands Princes. Cela
surpasse mes forces, ie ne vous diray sinon que ces
grandes Ames parurent si satis-faites, que toute
l’assistance pleura de joye, & fut rauie de leurs
contentements. De la estant venus au soir à Paris,
dans le mesme Carrosse. Ils furent receus d’vn
nombre infiny de populace qui accourut à la
nouuelle de cette arriuée. Paris doit tesmoigner
aujourd’huy, que ce iour doit estre mis parmy
ses fastes, & vn chacun de nous peut dire comme
cet Hebrieu, lequel ayant apris la deroutte des ennemis
du Peuple de Dieu, disoit que c’estoit vn
iour de bonne nouuelle, que le silence seroit vn
crime, hæc dies boni nunty si tasuerimus secleris
arguemur. Disons donc que les Parisiens doiuent
auiourd’huy remercier premierement le Dieu des
Armées & des Batailles pour l’heureux succez de
la Victoire, que Monseigneur le Prince à emporté
sur l’ennemy de l’Estat, qu’ils doiuent en faire des
vœux pour la conseruation de son Altesse Royalle
& de Monseigneur le Prince, qu’ils doiuent renouueller
leurs vœux & faire de nouuelles protestations
de viure & de mourir pout leur seruice. Et

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que la victoire de ces Grands Princes, leur doit
apporter la Paix, Et la Paix toutte sorte de prosperité,
ils doiuent receuoir en Triomphe celuy
qui vainquant le plus fier & le plus dangereux ennemy
de l’Estat, la conserué dans son entier pour
le Monarque, & nous doit procurer vn Regne
dont la Gloire, la paix, & la tranquilité ne soit
iamais interrompuës.

 

FIN.

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