Anonyme [1649], OBSERVATIONS CVRIEVSES, SVR L’ESTAT ET GOVVERNEMENT DE FRANCE. Auec les Noms, Dignitez & Familles principales, Comme il est en la presente année 1649. , françaisRéférence RIM : M0_2568. Cote locale : A_6_85.
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OBSERVATIONS
CVRIEVSES,
SVR L’ESTAT
ET GOVVERNEMENT
DE FRANCE.

Auec les Noms, Dignitez & Familles
principales, 

Comme il est en la presente année 1649.

A PARIS,
Chez GERVAIS ALLIOT, Marchand Libraire, proche la
Chappelle Sainct Michel, dans la Cour du Palais :
DENYS LANGLOIS, au Mont Sainct Hilaire, à l’enseigne
du Pelican.

ET
IACQVES LANGLOIS, Imprimeur du Roy, vis à vis la Fonteine
saincte Geneuiefue, à la Reine de Paix.

M. DC. XXXXIX.

AVEC PERMISSION.

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OBSERVATIONS
CVRIEVSES,
SVR L’ESTAT
ET GOVVERNEMENT
DE FRANCE ;
Auec les Noms, Dignitez & Familles
principales, 1649.

L’ESTAT & gouuernement de France est Monarchique,
les Roys y sont absolus & Souuerains,
& ne tiennent leur Couronne que de Dieu & de
leur espée. Ils entrent en ce grand heritage par
les degrez de la succession, & depuis 1227. ans,
soixante cinq ont heureusement continué leur
Regne sous trois races : A sçauoir de Meroüée, de Charlemagne, &
de Hucs-Capet, dont la Maison Royalle de Bourbon tire sa naissance,
estant sortie de Robert Comte de Clermont, dernier fils de
sainct Louys.

La Monarchie
de France fut
fõdée l’an 420.

Robert marié
auec la fille
vnique, & heritiere
d’Archãbauld
Baron de
Bourbon.

C’est elle que nous voyons assise sur le Throsne, malgré la ligue
& les factions Espagnolles, qui vouloient rauir cette legitime
Couronne à Henry IV. grand pere de Louys XIV. à present
regnant, par le decez du feu Roy Louys XIII. son pere, arriué
le 14. May 1643. à sainct Germain en Laye.

Louys XIII.
mourut 33. ans
moins vne heure
apres la mort
du Roy Henry
IV.

Icy seulement les Enfans ont cette prerogatiue de succeder à

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l’exclusion des femelles, suiuant la loy Salique. C’est pourquoy
les Anglois ont mauuaise grace de pretendre & appuyer les fondemens
d’Edoüard sur son droict maternel ; outre que cette querelle
fut decidée par les Estats generaux assemblez à Paris, qui
adiugerent la Couronne au Comte Philippe de Valois. La pluspart
des autres Roys sont Electifs ou fiefs de l’Empire ou de l’Eglise.

 

Les Roys de France sont Empereurs en leur Royaume, & autres
n’y peuuent faire des loix & Ordonnances, ny actes de Majesté ;
ce qu’on fit voir à l’Empereur Charles IV en la Ville de Lyon,
quand il voulut eriger en Duché la Comté de Sauoye ; & de peur
que les Vniuersitez de France ne fussent comme vn adueu de
leur authorité, les Loix des Empereurs Romains, & des Iurisconsultes
ne s’y enseignent que par permission de nos Roys, & ne
s’obseruent que comme conformes à leurs Ordonnances & à
l’equité.

Le Roy seul fait des loix & les interprete ; donne des lettres de
grace, de remission, de naturalité, de cottisation, de leuées de
deniers ; qu’il peut mesme par vn priuilege special imposer sur
le Clergé : Puisque par le droict commun les Princes Laïques
ne peuuent demander aucun don ny emprunt sur les Ecclesiastiques,
sans le consentement du Pape. Le Roy donc le peut en tout
cas de necessité, de laquelle interpretation l’arbitrage luy appartient
s’il est en aage de vingt ans ou au dessus : où s’il en a moins
aux Ministres principaux de son Estat : ce qui se pratique depuis
peu le Roy ayant pris sur tous les biens du Clergé, la sixiesme
partie, bien que le droict de conferer des Prebandes soit Spirituel :
toutesfois de plein droict sa Majesté confere des Benefices
qui n’ont pas administration d’ordre Ecclesiastique, nommé
aux Eueschez tel qu’il luy plaist, reçoit par les Officiers de la
Chambre des Comptes, leurs fidelitez & hommages qu’ils
prestent, ayant l’Estole sur le col & les mains sur la poictrine,
qui est l’estomach, pour la distinction des Officiers Laïques,
qui joignent leurs mains pour marque de leur subjection.

Le Parlement a
fait depuis peu
voir son authorité,
& le droict
qu’il prend à
cét arbitrage.

L’establissemẽt
du Conseil de
conscience, sẽble
preiudiciable
à cette nomination.

De mesme il a cognoissance des actions reeles entre personnes
Ecclesiastiques, & du possessoire des choses spirituelles, ou de celles
qui ont quelque annexe de Spiritualité, donc la Iurisdiction est
deffenduë aux Iuges spirituels.

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Par dispensation toute particuliere, il possede dignitez Ecclesiastiques
estant premier Chanoine de Lyon, de Poictiers, du Mans,
d’Angers & de sainct Martin de Tours.

Il a le pouuoir de prendre droicts de regale sur certains Eueschez ;
mais cette prerogatiue l’emporte sur tous les Princes ; ne
pouuant, comme eux, estre excommunié, ny son Royaume interdit ;
ce qui le met à couuert des Censures & Anathemes de Rome,
dont les Bulles ont esté souuent lacerées par Arrest de Parlement,
qui examine & controlle seuerement tout ce qui peut choquer
l’authorité des Roys, & les libertez de l’Eglise Gallicane.

Tesmoin ce qui
se passa entre le
Pape Boniface
VIII. & le Roy
Philippes IV.
dict le Bel.

Ils portent le tiltre de Tres Chrestien & Fils aisné de l’Eglise ;
non pas comme vn present venu de Rome, ainsi que les Roys
d’Espagne, qui depuis le Roy Ferdinand portent le nom de Catholique
que le Pape leur a conferé, pour auoir chassé les Maures
de leur Païs ; & comme les Roys d’Angleterre nommez Deffenseurs
de la Foy, depuis que le Roy Henry VIII. escriuit contre
Luther : mais le consentement de tout le monde & leur vertu,
les mit en possession de ce nom Auguste, ayans par les mains
de Clouis, Martel, Pepin, Charlemagne, & tant de braues
Princes sauué l’Estat de l’Eglise, & conserué ses Autels, de l’outrage
des Infidelles.

Il appartient au Roy seulement de seeler en cire jaune ; le
seel des autres estant en cire rouge, ou verte, & leurs grandeurs
ne recognoissent aucune Puissance plus Souueraine. Ils en communiquent
l’esclat à leurs Fils aisnez, qui en cette qualité
precedent tous les autres Princes Chrestiens ; Et si les Ambassadeurs
d’Espagne disputent aux nostres le rang, & l’honneur
de la preseance, ce n’est que depuis Charles le Quint,
qu’ils ont voulu vsurper cet auantage, qui par tous les Conciles,
Estats de Pologne & Iugement des Venitiens ont demeuré
en faueur de nos Roys, comme les plus Augustes & anciens
de la terre.

Qu’il le fait beau voir le iour de son Sacre, receuant ce Charactere
Royal, cette marque de Diuinité & de Religion, le Ciel
ayant pris soin du temps de Clouis, d’enuoyer pour ce Mystere la
Saincte Ampoulle, qui se garde tres-religieusement à Rhims, &
qu’vn Ange apporta miraculeusement.

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En cette ceremonie le Roy est habillé de trois sortes, en Diacre,
en Roy, & en Iuge, comme fait voir la figure du Roy Henry IV. à
sainct Denys en France.

Cette figure est
au thresor de S.
Denys.

Tous les Princes & Pairs de France s’y trouuent, & chacun y a son
office & estat particulier.

L’Archeuesque de Rheims fait sa charge accoustumée, qui est
d’oindre & consacrer le Roy.

L’Euesque de Laon porte l’Ampoulle.

L’Euesque de Langres officie en l’absence de l’Archeuesque de
Rheims.

L’Euesque de Beauuais porte le Manteau Royal.

L’Euesque de Noyon la ceinture & le bauldrier.

L’Euesque de Châlons l’Anneau.

Notez que de tout temps ces Euesques sont Pairs de France ; &
que le Roy ayant depuis cõferé cette qualité à plusieurs Seigneurs,
il tire de ce nombre tel qu’il luy plaist pour representer les anciens
Ducs & Pairs, & conseruer leur lustre en cette action.

Vn sous le nom du Duc de Bourgogne qui porte la Couronne
du Roy.

Vn autre soubs le nom du Duc de Guïenne qui porte la Banniere
quarrée.

Vn autre soubs le nom du Duc de Normandie qui porte l’Espée.

Le Comte de Thoulouse les Esperons.

Le Comte de Champagne la banniere Royalle.

Et le Comte de Flandres representé par quelqu’vn, les Gantelets.

Vous remarquerez que l’Archeuesque de Rheims va prendre
la Couronne du Roy sur l’Autel, pour monstrer l’independance du
Roy qui ne releue que de Dieu.

Les Reynes sont seulement ointes au chef, d’autre Cresme que
de celuy de la saincte Ampoulle. Toutesfois la beauté des ceremonies
rend cette action magnifique : Mais celuy de Marie de Medicis
eut vn succez bien fatal par la mort de Henry IV. tué le lendemain.

Les Fils & Filles des Roys n’ont point d’autre surnom que de
France.

Les freres des Roys pour marque de leur grandeur se nomment
freres du Roy ; comme Gaston Iean Baptiste Duc d’Orleans, frere
vnique du feu Roy.

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Quand il y a plusieurs Enfans, l’aisné prend la qualité de Dauphin.
Imbert Prince du Dauphiné ayant donné la Couronne de sa
Prouince aux conditions qu’ils en porteroient toûjours le nom ;
comme estans heritiers presomptifs du Royaume ; ainsi qu’en Angleterre
l’aisné s’appelle Prince de Galles, à Nauarre Prince de
Vienne.

Le deuxiesme s’appelle Duc d’Orleans.

Le troisiesme Duc d’Anjou.

Le quatriesme Duc d’Alençon.

Le cinquiesme Duc de Berne.

Le sixiesme Duc de Valois.

Autresfois le nom de nos Roys estoit de Valois, dont le dernier
Henry III. Roy de France & de Poulogne, fut tué à sainct Cloud
par vn moine de l’Ordre de sainct Dominique.

Vous remarquerez que tous les Princes de France possedent
leurs terres & reuenus sous le nom d’Appannage, & non en proprieté ;
& que tous leurs biens retournent à la Couronne par le
droict de reuersion, afin que le Domaine demeure entier, & que
le partage ne vienne à le ruïner par la suite de ses diuisions. Les
Enfans qui descendent d’eux, retiennent le nom de leur Appannage ;
comme aussi la fille de Monsieur le Duc d’Orleans s’appelle
Anne Marie & Louyse d’Orleans, à cause que ce Duché est le tiltre
de Monsieur son pere.

Les filles des Roys portent le surnom de France, & la qualité de
Madame, du iour de leur naissance ; comme Elizabeth de France
qui a esté mariée au Roy d’Espagne, Henriete Marie au Roy de
la Grande Bretagne ; & Christine de France mariée au deffunct
Duc de Sauoye pere de celuy d’apresent, toutes trois sœurs du feu
Roy.

Les Reynes de France estans vefues ont le plus souuent les Duchez
de Bourbonnois, Auuergne, Angoulesme, & le Comté d’Evreux,
auec d’autres appointemens proportionnez à la grandeur de
leur condition ; & dans la minorité de leurs Enfans, elles ont le
Gouuernement de l’Estat sous le nom de Regente, qu’elles quittent
quand les Roys sont aagez de quatorze ans, qui est le temps
de leur majorité. Les Princes estans censez majeurs à dix-sept ans,
& le commun à vingt-cinq ans.

La Bretagne a
esté baillée à la
Reyne Regente
d’aprescat.

Il n’y auoit n’agueres en France qu’vn Prince du sang, à sçauoir

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Henry de Bourbon Prince de Condé, premier Pair de France, Duc
de Chateauroux, Gouuerneur de Bourgogne & de Berry, qui apres
de longues prisons de trois ans & trois mois, tant au bois de Vincennes
qu’à la Bastille, à fait voir qu’on ne profite iamais dans les
rebellions, & que les loix ne flattent personne au preiudice de l’Estat.
Il auoit espousé Charlotte Marguerite de Montmorency, sœur
du Duc de Montmorency, qui eut la teste trenchée à Thoulouse
en Octobre 1632 apres auoir esté blessé & pris en bataille par le
Mareschal de Schomberg, qu’il osa donner contre le feu Roy en
faueur de Monsieur le Duc d’Orleans en laditte année pres de Castelnaudarry.

 

Il en a eu trois Enfans, à sçauoir le Duc d’Anguien à present Prince
de Condé, qui a espousé la fille du Mareschal de Brezé, de laquelle
est né le Duc d’Albret à present Duc d’Anguyen ; & le Prince
de Conty qu’on appellera bien-tost Cardinal de Bourbon ; & vne
fille vnique appellée Mademoiselle de Bourbon mariée à Monsieur
le Duc de Longueuille, qui auoit espousé en premieres nopces la
sœur aisnée du Comte de Soissons, de laquelle il a eu trois Enfans ;
à sçauoir le Comte de Dunois & deux filles, dont l’aisnée est decedée.
Il a eu de sa premiere femme Mademoiselle de Longueuille.

Le Prince de Condé mourut le 26. de Decembre 1646. aagé de
58. ans & quatre mois.

Louys de Bourbon Comte de Soissons ; grand Maistre de France,
Gouuerneur de Dauphiné, de Champagne & de Brie, ayant
esté fugitif à Sedan depuis l’an mil six cens trente six, mourut en
l’an mil six cens quarãte & vn en la bataille aupres de la mesme ville.
Il n’a pas esté marié. Sa ieune sœur espousa le Prince Thomas
de Sauoye à present de Carignan, frere du feu Victor Amedée Duc
de Sauoye.

Le Duc d’Angoulesme anciennement appellé le Comte d’Auuergne
est fils naturel du feu Roy Charles IX. il porte le nom
de Valois ; Il a espousé en premieres nopces la sœur de Madame
la Princesse mere, ayant esté fait prisonnier auec le Mareschal
de Biron, apres vne prison de treize ans qui a expié ses
fautes, fut mis en liberté quelque temps auant la mort du Mareschal
d’Ancre. Il est marié en secondes nopces à vne fille de
la maison de Nargonne en Picardie.

Il signe Charles,
c’est à dire
bastard de Valois.

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Le Comte d’Alez son fils est Gouuerneur de Prouence ; c’est luy
qui arresta le Prince Casimir. Il a espousé la veufue du Comte de
Torigny qui fut tué en düel par le Baron de Bouteuille, qui depuis
en l’année mil six cens vingt-sept eut la teste trenchée en la
place de Greue, & le Comte de la Chappelle aussi, pour luy auoir
seruy de second en vn combat qu’il fit en la place Royalle contre
le Marquis de Bussi d’Amboise, fils en la premieres nopces de Madame
la Presidente de Mesmes, laquelle par ses soins les fit arrester
& executer à mort.

Le Roy Henry IV. a eu plusieurs Enfans naturels, qui en faueur
de leur legitimation verifiée en Parlement, passent pour Princes,
& portent le nom & armes de Bourbon ; mais auec vne barre qui
passe du costé gauche à trauers des trois Fleurs de Lys.

De Madame Gabrielle d’Etrée Duchesse de Beaufort, il a eu
Cesar Duc de Vendosme, auiourd’huy viuant heritier du costé de
sa femme de tous les biens de la Maison de Mercœur ; son frere
grand Prieur de France qui mourut prisonnier au bois de Vincennes,
& sa sœur mariée au Duc d’Elbeuf. Son autre sœur fut
pourueuë de ce magnifique Monastere de Fontevraut en Anjou,
lequel a esté donné à Mademoiselle de Romorantin, autre fille
naturelle de Henry IV. & de Madame la Mareschale de
l’Hospital.

Henry de Bourbon Marquis de Vernüeil Euesque de Mets,
Prince du Sainct Empire, Abbé de Sainct Germain des Prez
à Paris, est fils de la Marquise de Vernüeil, & a esté legitimé
en Parlement, comme le Comte de Moret, qui mourut en la
mesme bataille que ie vous ay marqué la prise du Duc de Montmorency.

Henry IV. eut encores deux filles de Madame des Essars,
auiourd’huy mariée à Monsieur le Mareschal de l’Hospital.

Monsieur le Duc de Longueuille porte le nom de Henry
d’Orleans, estant descendu de Iean Comte de Dunois, bastard
de la maison d’Orleans. En cette qualité neantmoins il est
consideré comme Prince, & deuroit preceder les Princes
estrangers, comme ceux de la maison de Lorraine qui sont
en France, Messieurs de Guyse, le Duc d’Elbeuf, & le Comte
de Harcourt, & ceux de la maison de Nemours.

Cette pretenduë
preseance
est encor indecise :
comme
beaucoup d’autres
en ce Royaume.

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De la maison de Mantouë depuis le mariage de la Princesse
Marie auec le Roy de Pologne, il n’y a maintenant en
France que la Princesse Anne, mariée auec le Prince Edoüard
de la maison Palatine, & vne fille.

De la Maison de Sauoye il n’y a plus que le Duc de Nemours
& le Duc d’Aumalle son frere, dont l’aisné est marié
auec Mademoiselle de Vendosme.

Allons au Louure pour y considerer l’ordre dans la diuersité
de tant d’offices. Il faut distinguer ceux de la Maison, de
la Couronne, & des Finances.

LE GRAND MAISTRE D’HOSTEL.

Feu Monsieur le Comte de Soissons auoit cette charge, &
apres sa mort feu Monsieur le Prince de Condé, en laquelle
comme en toutes les autres luy a succedé son fils aisné.
Il à la Sur-Intendance sur tous les Officiers de la Maison du
Roy ; c’est à luy toutes les années à regler l’Estat de cette
maison, d’appointer ou desappointer iusques aux moindres, si
bien qu’il a Iurisdiction sur tout, & personne ne se peut dispenser
de l’ordre de ses commandemens.

Sous luy il y a vingt quatre Maistres d’Hostel qui partagent
les soins de cette charge, portant pour marque de leur
authorité vn grand baston de canne garny d’argent doré par
les deux bouts, & deuancent les Gentils-hommes seruans.

Quand le Roy est mort, le grand Maistre rompt le baston
sur la fosse pour congedier tous les Officiers, & leur annoncer
cette triste nouuelle qu’ils n’ont plus de charge, parce que les
Offices chez le Roy ne sont pas hereditaires ; mais ils leur
sont toûjours conseruez par le succcesseur de sa Majesté.

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GRAND CHAMBELLAN.

Monsieur le Duc de Chevreuse, frere du feu Duc de Guise,
possede cette charge, en laquelle Monsieur le Cheualier
de Guise a esté receu par suruiuance.

La grandeur de la mesme charge se cognoist assez par son nom,
estant chef de ce qui concerne la Chambre du Roy, ayant le
pouuoir de donner ou refuser l’accez à ceux qui y veulent entrer,
& commandement sur tous les Gentils-hommes de la
Chambre qui seruent, comme tous les autres Officiers du Roy
par quartier ; c’est à dire, de trois en trois mois : Il y en a
quatre qui se disent premiers Gentils-hommes de la Chambre :
c’est à sçauoir,

Monsieur de Souuré.

Monsieur de Liancour.

Monsieur le Marquis de Mortemar.

Monsieur le Comte de Sault, fils de feu Monsieur de Canaples.

Le grand Chambellan a pareillement puissance sur tous les
Maistres & Valets de la Garderobe, dont il y en a plusieurs ; ce
sont Charges grandement lucratiues ; à eux appartiennent toutes
les dépoüilles & habillements du Roy, qui en doit auoir vn
neuf tous les iours. Et quoy que sa Majesté ne soit pas curieuse
de ce changement, si est-ce que la taxe en est faite, & cela se conuertir
au profit du grand Chambellan. Au reste c’est à luy à
chausser & tirer la botte du Roy, le iour de son Sacre, & dans les
seances publiques, comme aux Estats & au Parlement, ou le
Roy tient son lict de Iustice ; il est tousiours assis aux pieds de sa
Maiesté.

Monsieur le Marquis de la Force, & Monsieur le Marquis de
Roquelaure, sont Grands Maistres de la Garderobe, & l’vn d’eux
couche tousiours dans la Chambre du Roy ou aupres, ce qui donna
occasion de dire que le Comte de Chalais, ayant vne de ces
charges, auoit voulu attenter contre la personne du feu Roy, à
cause de quoy ; il eut la teste trenchée.

Le Marquis de
Roquelaure vẽdit
dernierement
sa charge
300000 liures
& acheta celle
de Monsieur
de Liancourt
500000 liures.

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GRAND ESCVYER.

Par la demission de Monsieur le Duc de Bellegarde, cette
charge fut à Monsieur le Marquis de Cinq-Mars, fils du Mareschal
d’Effiat, Sur-intendant des Finances, qui a eu l’honneur
de posseder l’esprit du feu Roy en qualité de son Fauory, & le
mal-heur de mourir sur vn Eschaffaut à Lyon, en l’an mil six cens
quarante deux.

Elle est à present possedée par Monsieur le Comte d’Harcourt ;
Il a sur-Intendance sur le premier Escuyer & autres Officiers de
l’Escurie, Pages, Cheuaucheurs & Mareschaux d’icelle ; de sorte que
tous les Cheuaux tant de seruice qu’autres sont sous sa puissance.

Aux entrées que les Roys font aux Villes, il marche au deuant
d’eux à cheual, ayant l’espée au bauldrier ; mais aux entrées des
Villes où il y a Parlement & non ailleurs, il porte vne Casaque de
velours azurée semée de Fleurs de Lys, & son Cheual caparassonné
de mesme.

Monsieur de Belinghen premier Escuyer de la petite Escurie, n’a
guiere moins de puissance que luy, & commande esgallement à la
grande & petite Escurie, où il y a cinquante Pages ; & tous deux
seruis par quatre d’iceux.

Ils auoient pouuoir d’asseoir les Postes par tout le Royaume ;
mais Monsieur de Nouueau Intendant general des Postes, est en
possession de cete dignité beaucoup lucratiue.

GRAND VENEVR ET FAVCONNIER.

LA Chasse est vn passetemps ordinaire aux Princes qui destruit
la paresse, & entretient la disposition du corps ; Nos
Roys l’ont tousiours aymée, & particulierement le feu Roy, qui
sembloit trouuer ses delices & son repos dans ce trauail.

Monsieur le Duc de Monbazon pere de Madame la Duchesse
de Cheureuse, est grand Veneur de France, & en cette qualité a
commandement sur tous les Gentils-hommes de la Venerie, Fureteur,
Perdrisseurs, Oyseleurs, Louuetiers, Archers, Vallets des
Chiens, & autres Officiers necessaire à la Chasse ; & pour conseruer
les plaisirs du Roy, il y a des Gardes des Forests & autres lieux, qui

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portent la liurée de sa Majesté, & empeschent la Chasse à ceux qui
n’en ont point de permission.

 

LE GRAND PANNETIER.

C’est Monsieur le Duc de Brissac, beau pere de Monsieur le
Mareschal de la Melleraye. Cette charge regarde les Officiers
qui seruent à la table du Roy ; anciennement il mettoit le prix &
la taxe sur les bleds, aujourd’huy elle a perdu ce priuilege deu aux
Magistrats des Villes.

Quand le Roy mange en ceremonie, vn Huissier l’appelle tout
haut pour se trouuer aux reglements découuerts, où il est assisté
des Gentils-hommes seruans, des Escuyers trenchans, & du Maistre
du Gobelet, qui fait essay du vin qu’on presente au Roy, &
les Pannetiers, des viandes qu’on sert à la table.

GRAND BOVTEILLER.

Cette qualité semble en quelque façon supprimée, quoy que
des plus anciennes de France, & les Comtes de Sancerre en
portent le tiltre & le nom, pretendant qu’elle est hereditaire en
leur famille.

GRAND PREVOST.

Cette charge a esté autrefois exercée par le pere de feu Monsieur
le Cardinal de Richelieu ; charge de grande importance ;
puisque son authorité s’estend non seulement sur les Officiers
de la Maison du Roy ; mais encores à six lieuës à l’entour de Paris &
de la Cour ; empesche les desordres qui sont ordinaires à la suitte,
entretient dans leur deuoir tant de personnes qui en composent le
nombre. Pour ce sujet il a sous soy deux Lieutenans des Sergens
qui se disent Sergens du Preuost de l’Hostel, ses Archers sont vestus
de Hocquetons ou Casaques de mesme que les Archers de la
Garde du Roy qui le suiuent, & vont poursuiure les criminels.

Outre cette Iurisdiction, c’est à luy à mettre prix au pain, au vin,
à la viande, au foing & à l’auoyne. Il cognoît des causes des Officiers
de la maison du Roy, en ce qui est purement personnel ; &
peut donner Lettres de Maistrise, dont les Tailleurs estrangers se
sçauent bien preualoir contre les Maistres Iurez de Paris, & ce n’est

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pas la moindre partie de son reuenu, donnant indifferemment
toutes sortes de lettres, dont on ne peut destourner la force, pour
quelque consideration que ce soit.

 

La Compagnie du Roy est de deux cents Gentils-hommes,
Gens-d’armes, qui aux iours des batailles & ceremonies, marchent
deux à deux deuant sa Majesté. Monsieur le Mareschal de l’Hospital
en est Lieutenant, le Comte de Sáligny sous Lieutenant, & le
sieur de Marais Enseigne.

LA GARDE DV ROY.

Elle est composée de François & de Suisses, comme aussi d’Escossois,
qui pour marque de leur fidelité, & ancienne confederation
auec le Royaume de France, n’ont besoin d’aucune Lettre
de naturalité.

Elle est composée des quatre Capitaines des Gardes du Corps,
seruans par quartier, comme i’ay dit que font tous les autres Officiers :
Sçauoir, Monsieur le Comte de Tresmes pere du Marquis
de Gesvres, Mareschal de camp dans l’armée du Roy, qui fut tué
à Thionuille, & de son cadet qui a eu la mesme Charge en l’armée
du feu Mareschal de Gassion, en l’année 1644.

Monsieur de Villequier Gouuerneur de Boulogne, Monsieur
le Comte de Charost Gouuerneur de Calais, fils de Monsieur le
Comte de Bethune, qui a esté deux fois Ambassadeur à Rome, &
frere aisné du feu Duc de Sully ; & Monsieur le Marquis de Chandenier,
mary de la Niece du feu Cardinal de la Rochefaucault.

Il y a cinq ou
six mois que le
Comte de Charost,
& le Marquis
de Chandenier
ont esté
priuez de leurs
charges, & le
Cõte de Noailles
&...
mis en leur
place.

Dans cette Compagnie des Gardes du Corps, il y a quatre cens
Archers, tous auec des casaques d’escarlatte, couuerts de passement
d’argent ; & parmy eux, il y a des Exemps des Gardes qui portent
le baston, & sont comme Capitaines d’escoüade ; les vns portent la
halebarde, les autres la carrabine, chasque place d’Archers vaut
1200. escus, ayant chacun 400. liures de gages, & de beaux priuileges
pour trois mois de seruice.

LA COMPAGNIE DES MOVSQVETAIRES.

Elle auoit pour Capitaine le Roy, & pour Lieutenãt Monsieur
de Trois-Villes, perpetuel & irrecõciliable ennemy du deffunt

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Cardinal de Riche lieu, & pour Soldats des Enfans des meilleures
familles de France, comme estoit vn fils de monsieur le
Duc d’Vsez, ou du moins personnes de choix & de courage, parmy
lesquels il est à remarquer, que le Roy Louys XIII. qui en
estoit l’instituteur ne voulut iamais admettre aucun rousseau. Ils
portoient vne casaque bleuë distinguée par des Croix d’argent.
Ils estoient cent cinquante qui suiuoient le Roy par tout, mesmes
quand il alloit à la chasse ; & fut supprimée en l’an mil six cens quarante
quatre, auec quelque recompense aux chefs, parce que le
sieur de Troisvilles Bearnois 192. noble, & d’vne vanité prodigieuse,
ne se voulut deffaire de sa charge à la semonce de monsieur
le Cardinal Mazarin, qui en vouloit faire gratifier par sa Majesté
le sieur Busaliny son parent ; en faueur de qui on parle auiourd’huy
de la remettre, sous pretexte que le Roy commence d’aymer
la chasse & la promenade.

 

On croid que
cete charge sera
infailliblement
remise lors de
la Majorité du
Roy.

LA COMPAGNIE D’ORDONNANCES.

Elle est de cent Maistres.

LE REGIMENT DES GARDES
FRANÇOISES.

IL est de trente Compagnies, chacune de deux cens hommes, &
la qualité de Capitaine y est plus honnorable, que celle de Mestre
de Camp dans vn autre Regiment, ayant cet auantage d’auoir
l’auantgarde dans toutes les occasions. Monsieur le Mareschal de
Grammond est auiourd’huy Mestre de Camp dans le Regiment
des Gardes : Auparauant luy c’estoit monsieur de Rambure, si celebre
pour ses belles actions, lequel fut tué au siege du Catelet en
Picardie.

LE REGIMENT DES GARDES SVISSES.

IL est composé de seize Compagnies, qui ont vn Colonnel à part,
aussi bien que leur Iurisdiction ne despendant aucunement du
Preuost general des bandes. Outre ce Regiment, il y a cent Suisses

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de la garde, qui portent la liurée du Roy, la tocque de velours,
& la Halobarde, marchant tous deux à deux, tambour battant deuant
le Roy.

 

Tous les iours il entre deux Compagnies, tant de François que
de Suisses en garde.

Ores entre vne si grande quantité de personnes qui suiuent le
Roy, on a estably en tiltre d’offices des Mareschaux des Logis &
des Fourriers, pour marquer les logis, tant du Roy que des Princes
& Seigneurs suiuans la Cour.

Venons aux charges de la Couronne.

LE CONNESTABLE.

Cette dignité a esté suprimée depuis la mort du Connestable
le Lesdiguieres, c’est pourquoy ie ne m’estendray point à
vous en deduire les grandeurs & les priuileges. Ie diray seulement
que c’estoit la premiere personne de l’Estat, & qui commandoit à
toutes les armées, mesme aux Princes, auec droict de Iurisdiction
particuliere, qui est demeurée à Messieurs les Mareschaux de
France.

MARESCHAVX DE FRANCE.

DV commencement cette qualité ne s’estoit pas renduë commune
comme à present. Il n’y en auoit qu’vn ; apres deux,
apres quatre, Et en fin le Roy pour recognoistre le merite, & animer
le courage de ceux qui le seruent bien, a communiqué cet
honneur aux principaux de son Royaume, voicy leurs noms suiuant
l’ordre de leur reception.

Le Mareschal de Chaulnes.

Le Mareschal d’Estrée.

Le Mareschal de la Force.

Le Mareschal de Brezé.

Le Mareschal de Scomberg.

Le Mareschal de la Melleraye.

Le Mareschal de Grammond.

Le Mareschal de la Motte Haudancourt.

Le Mareschal de l’Hospital.

-- 17 --

Le Mareschal de Turenne.

Le Mareschal du Plessis Praslin.

Le Mareschal de Rantzau.

Le Mareschal de Villeroy.

C’est de ce nombre que l’on tire les Generaux d’Armée, & deuant
eux que les querelles des Seigneurs se terminent. Ils ont Preuost
ou Lieutenant dans toutes les bonnes Villes de France, & des
Archers, pour tenir la Campagne libre, & cognoistre de tous excez
& delicts qui se iugent Preuostablement ; c’est à dire sans appel.
On ne peut leur oster leurs charges qu’auec la vie, comme nous auons
depuis peu veu par la mort du Mareschal de Marillac, qui eut la
teste trenchée en Greue. Ils portent deux bastons azurez, semez
de Fleurs de Lys, & croisez autour de leurs armes.

ADMIRAL DE FRANCE.

Cette charge estoit possedée par feu Monsieur le Cardinal Duc
de Richelieu, en qualité de grand Maistre, Chef & Sur-Intendant
de la Nauigation, & du Commerce de ce Royaume ; &
aux mesmes honneurs, prerogatiues, authoritez, pouuoirs, &
droicts de cy-deuant Admiraux de France, tant par le commandement
des armees nauales, que pour la Iurisdiction de la Marine ;
& depuis sa mort par le Duc de Brezé, nepueu dudict feu Cardinal
Duc, auec les mesmes honneurs, fonctions & priuileges. Elle
appartient à present à la Reyne Regente.

GRAND MAISTRE DE L’ARTILLERIE.

C’est Monsieur le Mareschal de la Melleraye, qui a pour son
Palais l’Arcenal, & pour sa Iurisdiction la Table de Marbre à
Paris. Cette charge est honnorable, & lucratiue, & va de pair auec
les Mareschaux de France. Tout ce qui concerne la conduitte du
Canon, l’attiral des Cheuaux, des poudres & munitions de guerre
passent par son ordre.

Elle a ses Lieutenans, Capitaines du charroy, & Archers, qui
font vn grand nombre.

Il a la disposition
de 800.
Offices.

Il a le maniment de cinq millions de liures tous les ans, sans qu’il
soit tenu d’en rendre compte.

-- 18 --

COLONNEL GENERAL DE L’INFANTERIE.

C’est vne des belles charges du Royaume, mais non des plus
necessaires. Monsieur le Duc d’Espernon la possede toutesfois
sans fonction, & le dessein du feu Roy estoit de la suprimer.
Il a droict de prendre huict sols sur la monstre de chaque
Soldat.

LE COLONNEL GENERAL DES SVISSES.

Monsieur le Mareschal de Bassompierre, auoit long-temps
exercé cette charge deuant sa prison, pendant laquelle il
fut contraint par le deffunct Cardinal de Richelieu d’en prendre
quatre cent mil liures de recompense, & de s’en deffaire en faueur
du Marquis de Coaslin, apres la mort duquel elle fut venduë au
Comte de Nancey, ou de la Chastre ; mais apres la mort du feu
Roy, elle fut renduë par la Reyne Regente, gratuitement, &
en pur don à ce braue & incomparable Mareschal, qui l’a exercée
dans vne grande approbation de la France, & de ses fidelles Suisses,
ausquels il a liberalement & sans interest, distribué les charges
vaccantes, n’ayant égard qu’au seul merite des personnes,
iusques à son decez, arriué à Prouins en Brie, au mois d’Octobre,
de l’année 1646, au grand regret, non seulement des François &
Suisses ; mais aussi de toute l’Europe. Depuis lequel Monsieur le
Mareschal de Schomberg, en a esté pourueu par sa Majesté Tres-Chrestienne.

Apres sa mort
Monsieur le
Marquis de
Villeroy, a esté
fait Mareschal
de France.

Il a Iurisdiction sur les Suisses, tant de la garde du Roy, que
ceux qui seruent aux Garnisons, & leur commande aux batailles
& occasions.

LE GENERAL DES GALERES.

LE petit Duc de Richelieu en est pourueu ; la qualité est grande,
& apporte grand reuenu à son Maistre.

Il y a ordinairement quatorze Galeres à Thoulon en Prouence,
sur les costes de la Mer Medyterranée, pour empescher les courses
des Pirates, & tenir la frontiere libre. On enuoye aux Galeres

-- 19 --

les prisonniers, & on conuertit le supplice de mort en ce genre, autant
honteux que penible, quand le seruice du Roy l’exige.

 

GRAND PRIEVR DE FRANCE.

Cette qualité estant beaucoup releuée, se trouue souuent entre
les mains des Princes : Le Duc d’Angoulesme l’a longtemps
possedée, le frere du Duc de Vendosme, vn de la Maison de
la Vallette, le sieur de la Porte, oncle maternel du Cardinal de
Richelieu : Le Comte du Bussy la possede à present, son Palais est
au Temple, autrefois la demeure des Cheualiers Templiers.

Parlons maintenant ;

DV GOVVERNEMENT ET DIRECTION
DES FINANCES.

Depuis la disgrace du sieur d’Emery Particelli, arriuée au
mois de Iuillet 1648. Monsieur le Mareschal de la Melleraye,
a esté fait Sur-Intendant des Finances : Il y a outre le Sur-Intendant
des Finances deux Directeurs ; à sçauoir les sieurs d’Aligre
& de Maurangis. Vn Controlleur general & quatre Intendans,
qui sont les sieurs Tubeuf, Mauroy, le Charon & de Monterailles.

Trois Tresoriers de l’Espargne : à sçauoir les sieurs de Guenegaud,
de la Basiniere, & de Castille-Ianin.

Quatre Secretaires du Conseil : à sçauoir les sieurs de Bourdeaux,
Bordier, Roüer de Fonteine & Payen, chacune de ces quatre
charges, vaut du moins 800000. liutes.

Il y a quatre Tresoriers des parties casuelles qui reçoiuent les
deniers qu’on finance pour les Offices de ceux qui sont morts sans
payer le droict annuel, vulgairement appellé la Paulette.

Il y a vn Receueur general des Decimes ou Clergé de France,
qui met annuellement vn grand fond dans les coffres du Roy, estimé
4500000. liures.

Les Tresoriers de France & generaux des Finances, sont distribuez
en generalitez ou Bureaux, où il y a Presidens.

-- 20 --

Les Generalitez sont au nombre de vingt deux : à sçauoir,
Paris.
Caën.
Dijon.
Soissons.
Tours.
Lyon.
Thoulouse.
Bourges.
Chaalons.
Riom.
Angers.
&
Roüen.
Orleans.
Grenoble.
Amiens.
Poictiers.
Bourdeaux.
Montpellier.
Alençon.
Moulins.
Montauban.
Limoges.

Aux Receueurs generaux de chaque Generalité, les Receueurs
particuliers des Villes, apportent les deniers prouenans des Tailles,
que les Esleus de chaque Eslection imposent sur les Parroisses,
& que les Collecteurs nommez en chacune d’icelles y reçoiuent.
Ainsi tous ces ruisseaux font des riuieres, qui se viennent rendre
dans ce grand Ocean de Paris ; d’où se tirent aujourd’huy les subsistances,
& entretenemens de plusieurs armées que le Roy a sur
pied, dont le gros fait plus de cent mille hommes diuisez, ayant
vne Armée en Allemagne, vne en Italie, vne en Catalogne, vne
en Flandres, & vne sur la mer, sans y comprendre les garnisons.

LE CONSEIL SECRET.

IL est composé des plus hautes intelligences de cet Estat, comme
du Roy, de la Reyne Regente, de Monseigneur le Duc d’Orleans,
de Messieurs les Princes de Condé, de Conty & de Longueuille,
de Mõsieur le Cardinal Mazarin, & de Monsieur le Chancelier.

Il y a quatre Secretaires d’Estat ; à sçauoir, Monsieur le Comte
de Brienne, qui a les affaires estrangeres ; Monsieur de la Vrilliere,
la pluspart des Prouinces de France ; Monsieur de Guenegaud
la Maison du Roy ; Monsieur le Tellier les affaires de la guerre.

LE CONSEIL PRIVÉ.

IL est consideré en deux façons. Quand on y traicte purement
les affaires d’Estat, le Roy y assiste souuent en personne,

-- 21 --

les Princes & le Chancelier, auec les Conseillers d’Estat, dont
le nombre n’est borné ny limité, le Roy communiquant ce tiltre
d’honneur & de recompense, au merite des plus grands personnages
de son Royaume.

 

Icy on termine les affaires, tant de paix que de guerre, & generalement
tout ce qui concerne la Couronne. Quelquefois on y
traite des causes de consequence, qui sont pendantes au grand
Conseil & au Parlement.

Cette assemblée est la plus auguste de France, ou en l’absence
du Roy president Monsieur le Chancelier.

CHANCELIER DE FRANCE.

C’est Monsieur Seguier, cy-deuant President au Parlement de
Paris, dont l’authorité ne void rien au dessus de luy, qui est
comme seuere censeur des Ordonnances, Edicts, Volontez &
Commandemens du Roy, le Souuerain Magistrat de la Iustice.
C’est luy qui despesche les Graces, Dons, Offices & autres semblables
choses que les sujets requierent ordinairement, & toutes
Despesches qui sont sans Sceau sont de nulle valeur.

S’il arriue quelque mescontẽtement aux Roys contre le Chancelier,
à cause que le nom en est sainct & inuiolable, & le caractere
en quelque façon indelebile, on leur donne des Substitus, qui
portent le nom de Garde des Seaux, d’autant que la qualité de
Chancelier ne leur doit estre communiquée ; du viuant de celuy
qui a esté pourueu & honoré de cét Office : Et ainsi nous auons
veu Monsieur de Marillac & Monsieur de Chasteau neuf, tous
deux Garde des Seaux, pendant que Monsieur le Chancelier
d’Aligre a vescu. Depuis sa disgrace & apres sa mort, Messire
Pierre Seguier a pris le tiltre de Chancelier, qu’il exerce auiourd’huy
auec vne approbation generalle de tous les gens de
bien.

C’est luy qui a fait voir ce que peut l’authorité de certe charge,
ayant interdit le Parlement de Roüen, & seuerement puny toute
la Prouince de Normandie, pour auoir entrepris contre les loix
& volonté du Prince, ayant chasse les plus rebelles, & cassé les
Priuileges, dont les Villes jouyssoient auparauant leur desobeyssance.

-- 22 --

Vous remarquerez que iamais le Chancelier ne porte le dueil,
ny pour pere, ny pour femme, ny autres considerations particulieres,
ne deuant estre sensible à d’autres interests qu’à ceux du
Peuple. Il porte tousiours la robbe de velours noir, doublée de
panne cramoisie, & deuant luy marchent deux Huissiers auec de
grosses chaisnes d’or & d’autres auec des masses d’or sur l’espaule.

MAISTRES DES REQVESTES.

IL y en a auiourd’huy 70. & chaque Office vaut 70000. escus.
Ils sont comme Assesseurs du Chancelier, estans du corps de la
Cour de Parlement de Paris, & sont assis apres les Presidens deuant
les Conseillers. Mais il faut noter qu’il n’y en peut auoir que
deux en mesme temps ; Ils ont le priuilege de presider au grand
Conseil, en l’absence des Presidens d’iceluy, & en toutes les Senechaussées
& Baillages. Ils rapportent les Requestes de Iustice,
& vont rapporter quelquesfois des affaires des Finances ; mais les
Intendans d’icelles se reseruent ce rapport.

Leur Iurisdiction est vniuerselle par tout le Royaume, tiennent
le Secl de la Chancellerie quand ils vont és Villes de Parlement ;
& quand il se presente des Commissions dignes de leur employ, ils
vont auec main forte pour conseruer l’authorité du Roy, qu’ils representent :
souuent parmy eux on choisit les Ambassadeurs pour
enuoyer aux païs estrangers, & des Intendans de Iustice dans les
Prouinces & armées.

Le Conseil est ordonné pour pouruoir aux plaintes & remonstrances
des Villes, iuger les recusations des Parlements, voir les
Mercuriales touchant leur ordre & discipline, auiser sur les traictez
des bleds, & des vins, sur toutes les marchandises qui entrent
au Royaume ou en sortent, sur les Doüanes & impositions mises
dessus ; pouruoit au cours & aloy des monnoyes, a esgard sur le
Domaine de la Couronne, Aydes, Tailles, rabais des Fermes,
les deschargeant auec cognoissance de cause, & informations
precedentes jointes aux aduis des Tresoriers generaux de
France.

-- 23 --

LE GRAND CONSEIL.

LE Chancelier y est né President. Cette Compagnie est composée
de quatre Presidens, & 150. Conseillers qui seruent par
Semestre ; c’est à dire de six en six mois. Elle cognoît Souuerainement
des euocations & differends, qui procedent des contrarietez
d’Arrests, Indults des Cardinaux, Archeuesques, Euesques,
Abbez, Maladeries, Hospitaux, Prieurez, Electifs ou Conuents,
des autres Benefices, dont la nomination appartient au Pape, ou
autrement la totale prouision, collations, ou presentations au
Roy, qui à dans cette Cour son Aduocat & Procureur general : Les
Offices de President y valent 200000. liures, & des Conseillers
100000. liures : leur Iurisdiction a son Palais prez du Louure, &
les Aduocats qui sont receus en cette Compagnie, peuuent playder
par tous les Parlemens, Cours Souueraines & ressors du Royaume.

PARLEMENTS.

Mais apres tout, il faut aduoüer que les Parlements ont quelque
chose de Sainct & de venerable. Il y en à dix en France ;
à sçauoir,

Le Parlement de Paris, pour les Prouinces de France, Champagne,
Picardie, Berry, Poictou, Anjou, Touraine, Orleans,
Auuergne, Angoulesme, Lyonnois, Forests, Beaulse &
autres.

Roüen pour la Normandie.

Thoulouze pour le Languedoch.

Bourdeaux pour la Guyenne.

Grenoble pour le Dauphiné.

Dijon pour la Bourgogne.

Aix pour le Prouence.

Paû pour le Bearn & Nauarre.

Rennes pour la Bretagne.

Metz pour la Lorraine.

Le Parlement
de Metz est à
present en la
Ville de Toul.

Toutes Cours Souueraines, instituées par diuers Monarques.

-- 24 --

Ie diray en passant que c’est vne chose remarquable, que
nos Roys ausquels Dieu a donné vne puissance absoluë, ayent
voulu reduire leur Majesté, sous la ciuilité de la Loy, & en ce
faisant que leurs volontez & decrets passent par l’Alambic des
Parlements, encores plus admirables que délors que quelques
Ordonnances y ont esté passées & verifiées : Les Peuples François
y adherent sans murmure, comme si cette Compagnie estoit le
bien qui renouë l’obeïssance des subiects auec le commandement
du Prince.

Le Parlement
de Paris a droit
de cognoissance
des Finances,
sans que la
Chambre des
Comptes s’y
puisse opposer ;
comme il a paru
la Sepmaine
passée derniere
de l’année 1648.

Ils sont esgaux en authorité & Iurisdiction, concernant la distribution
de la Iustice Ciuille & criminelle, sauf pour les procedures
criminelles des Princes, Princesses Ducs & Pairs de France ; la cognoissance
desquelles, & la reception des grands Officiers de la
Couronne appartient priuatiuement au Parlement de Paris, comme
à la premiere Compagnie de France, & la plus collaterale des
Roys, de laquelle les Iugemens ne sont pas mesmes bornez par
les Frontieres, mais ont passé iusques aux nations estrangeres,
par la submission volontaire des plus grands Princes de la
Chrestienté.

Et cela à lieu
principalement
pendant la minorité
des Rois.
C’est pourquoy
le Parlement de
Paris, est appellé
le Parlement
des Pairs, ou la
Cour des Pairs.

Leur premiere & principale authorité, est de voir & verifier les
Edicts, Ordonnances & Lettres patentes, qui n’ont aucune authorité
qu’apres la verification qui s’en faict par la libre deliberation
des Parlements. L’on a veu plusieurs Edicts refusez, & d’autres
receus auec clauses expresses, marquans la violence & contraincte
qu’on leur faisoit. Toutesfois quelque pouuoir & authorité que
les Roys leur ayent concedée, ils se sont reseruez cinq actes de suprême
souueraineté ; sçauoir, faire les loix, creer Offices, arbitrer
la paix & la guerre, auoir le dernier ressort de la Iustice, & fabriquer
monnoye.

Il est vray que sa Majesté permet à ses principaux Officiers, soit
des Cours Souueraines, soit des Villes de faire des Reglemens
chacun au faict de leurs charges, qui ne sont pourtant que prouisoires,
& faictes, sous l’adueu & plaisir du Roy, auquel seul appartient
faire les loix absoluës & inuiolables ; c’est deuant ce tribunal
ou l’Appanage des Fils & Freres des Roys de France, sont
reglez & verifiez, comme des Erections de Duchez, &
Comtez ; toutes Lettres de Naturalitez, Graces, Remissions
& Pardons, tous Contracts, & Transactions faictes par

-- 25 --

les Roys auec Princes & Republiques, erections & fondations
d’Abbayes, Chapitres, Colleges, & Ordres de Religion,
leur Iurisdiction s’estend sur les personnes Ecclesiastiques,
& quand le Pape enuoye en France ses Legats, ses
letres sont leuës en la Cour, examinées & publiées soubs les
modifications qu’elle iuge necessaires pour le bien du Roy
& du Royaume, & conseruation des libertez de l’Eglise
Gallicane. Ils cognoissent des appellations comme d’abus,
& la passion des Papes a souuent rougi deuant cét Auguste
Senat, qui en a fait brusler les anathemes & censures, comme
i’ay remarqué cy-dessus. Les Reglements entre Preuosts,
Baillifs, Senéchaux, sieges Presidiaux, & autres Iuges ordinaires
& leurs Lieutenans competent priuatiuement de la
mesme cognoissance des Gouuerneurs, & Lieutenans generaux
des Prouinces, parce qu’ils n’ont point de iurisdiction
contentieuse. Ils cognoissent de toutes appellations, Sentences,
& condemnations à mort, mutilations de membres,
condemnations aux galeres, au foüet, amende honorable,
& bannissemens.

 

Tellement qu’ils ont entre les mains les biens de toutes
personnes, tant grandes, que petites, du Royaume.

Dans le Parlement de Paris le nombre des Presidens &
Conseillers est certain & limité, & celuy des Aduocats &
Procureurs innombrable.

Les Euesques y ont droict de seance, mais non pas de
voix deliberatiue, excepté l’Archeuesque de Paris & l’Abbé
de S. Denis, comme tous les Princes, Ducs & Pairs de
France. C’est pourquoy par vn titre particulier il s’appelle
le Parlement de Paris, & toutes leurs Chambres sont
commises à la grand Chambre, laquelle seule en cognoit.

Ceux de la Religion pretenduë reformée ont par la concession
de nos Roys vne Chambre my-partie, ou de l’Edict
pour y estre leurs instances & differents terminez.

La Tournelle seule cognoit des crimes, & condamne à
mort.

Les Presidens
& Conseillers
de la Tournelle
se prennent
des autres
Chambres ;
mais les Presidens
ne se prenent
que de la
grand Chambre.
Et le mesme
se doit doresnauant
practiquer pour la
Chambre de
l’Edict.
Il y a 5. Chambres
des Enquestes,
& deux
des Requestes
du Palais, dont
les Conseillers
achetent la Cõmission
pour
cinq ans, aprés
lesquels ils la
doiuent vendre,
ou perdre le
priuilege d’aller
aux autres
Chambres selon
leur reception.
Cette
cõmission couste
30000. liu.
parce que le lucre
y est grand,
à cause du grãd
nõbre de ceux
qui ont leurs
causes commises
aux Requestes
du Palais.

La charge de premier President se donne ; Messire Matthieu
Molé l’Aristide de ce siecle, & cy-deuant Procureur
General, en est pourueu.

-- 26 --

Les autres Offices de Presidens à Mortier au nombre de
huict, qui sont tous de la grand’Chambre, s’achetent tous
600000. liures.

Les Offices de Conseiller valent 120000. liures.

Dans les ouuertures du Parlement le 12. Nouembre, &
aux Assemblées publiques, ils portent la robbe rouge, comme
aussi aux enterremens des Roys, pour monstrer l’authorité
des Roys viuante en leurs personnes.

LA CHAMBRE DES COMPTES.

Ces Messieurs ont leur Iurisdiction destachée du Parlement,
establie souuerainement pour cognoistre, iuger,
& decider, clorre & arrester les comptes de tous Receueurs,
Tresoriers, Payeurs, & generallement de tous
les Officiers comptables, & qui ont receu ; pris & manié
en quelque sorte que ce soit les finances du Royaume, &
autres imposts & leuées sur le Peuple, & au temps qui leur
est enjoint par les ordres de cette Cour, à laquelle en consequence
du pouuoir & iurisdiction souueraine qu’elle a de
l’administration des finances, toutes Lettres, Edicts, Ordonnances,
Chartres, Titres & Documens concernans le
fait d’icelle, doiuent estre leus, registrés & verifiés.

Premierement toutes lettres d’amortissement, commissions,
naturalitez, legitimations, affranchissemens, dispensations,
annoblissemens, priuileges, dons de rachats,
quints & requints, deniers d’amende, gardes nobles, regale,
confiscations, nouueaux acquets, tous rabais, moderations,
& dons d’aucunes sommes, Aydes, Tailles & autres
impots, tant aux Habitans des Villes qu’autres leurs
Iusticiers.

Quints & requints.

Les Vassaux particuliers & Iusticiers du Roy sont tenus
de faire en ladite Chambre les foy & homage qu’ils doiuent
à sa Majesté pour raison de leurs fiefs, terres & Seigneuries,
& bailler leurs adueus & dénombremens, & si
procedant à l’audition & closture desdits comptes, il y a
supposition, fausseté, abus ou nullité aux rooles, mandemens,
certifications, quittances & autres pieces sur ce

-- 27 --

rapportées, la verification en est faitte par les Commissaires
députés par la Chambre.

 

L’autherite de cette Cour souueraine est si grande qu’elle
dispute le passage & l’honneur à Messieurs du Parlement,
tesmoin les querelles arriuées depuis quelques années dans
l’Eglise nostre Dame sur la contestation à qui marcheroit
desiant, toutes deux estans Souueraines & creées par vn
mesme Roy Philippes le Bel, en mesme temps, & logées en
mesme Palais.

[illisible]

Il y a dix Presidens, dont le President Nicolay est le premier :
cette charge s’estant conseruée depuis 220. ans de
pere en fils dans cette maison ; il en a refuse 1400000. liures
du sieur d’Emery.

Il y a 70. Maistres des Comptes, leur Office vaut 60000.
escus.

Il y a 80. Auditeurs de 100000. chacun.

Quand le Roy sied au Parlement, le premier Prince du
sang sied à la Chambre des Comptes, où sa Majesté ne va
iamais.

LA COVR DES AYDES.

C’EST aussi vne Cour Souueraine, à laquelle appartient
de cognoistre & iuger priuatiuement à tous autres,
tailles, aydes, octrois, cruës, leuées, gabelles, impositions,
traictes foraines, fortifications, decimes, dons
gratuis, & autres Ordonnances par les Bureaux generaux
des Finances, Receueurs d’icelles, & generallement tous
autres deniers mis & à mettre pour fait d’aydes & subuention
de guerre ou autrement par tous les ressorts & Iurisdictions
du Royaume, de tous procez sur ce informez.

Cette Cour est composée de trois Chambres depuis la
derniere augmentation qu’en a fait le Roy de 25. Conseillers
& deux Presidens. En chacune les Offices y sont presque
aussi chers comme au Parlement : ils iouyssent dés mesmes
priuileges & prerogatiues.

-- 28 --

REQVESTES DV PALAIS.

CE sont Conseillers de la Cour du Parlement qui sont
enuoyez en cette Compagnie, pour cognoistre des
procez & differens concernans le titre de tous les Offices
Royaux de France, tant de iustice, domaine, finances, que
de la maison du Roy au dessous de 5000. liures, les autres
ayant leurs causes commises aux Requestes de l’Hostel.

COVR DES MONNOYES.

ELLE est establie pour cognoistre, iuger & decider en
dernier ressort de toutes les monnoyes de France : &
pareillement des fautes, abus & maluersations qui se commettent
au fait d’icelles, tant par les Maistres, qu’Officiers,
qui sont en grand nombre distribuez par les Prouinces &
places du Royaume.

TABLE DE MARBRE.

DEVANT que le Palais fût bruslé il y auoit dans la grande
Salle vne Table de Marbre, qui donne encore le
nom à deux grandes Iurisdictions, l’vne concernant les Eaux
& Forets : l’autre pour la Marine, Havres & Ports maritimes.
Celle des Eaux & Forets a son grand Maistre, qui s’appelle
Monsieur de Fleury. Il l’est par toutes les riuieres, forets &
communautez de France, presque dans toutes les villes il y
a Siege establi pour ce mesme fait, & des Iuges qu’on apele
Maistres des Eaux & Forets.

SIEGES PRESIDIAVX.

IL y en a plusieurs en France, en chacun desquels il y a vn
Seneschal, ou Baillif, vn President, vn Lieutenant Ciuil,
vn Lieutenant Criminel, vn Lieutenant Particulier, vn Assesseur,
25. Conseillers, vn Procureur, & deux Aduocats
du Roy.

-- 29 --

BAILLAGES.

CE sont Iustices Royalles, mais moindres que les Presidiaux :
elles ont vn Lieutenant General, Ciuil & Criminel, 5. ou six
Conseillers, Aduocat & Procureur du Roy.

Deuanceux releuent les appellations des Iuges Subbalternes &
Chastellenies ; c’est à dire des Seigneurs qui ont droict de Iustice,
dont le nombre est infiny.

LE BAN ET ARRIEREBAN.

Dans les publiques necessitez ; & quand les forces estrangeres
semblent menacer l’Estat, nos Roys ont le Ban, & Arriereban ;
c’est à dire la conuocation des Nobles, & de ceux qui possedent
terres & fiefs ; & c’est aux Baillifs & Gouuerneurs des Prouinces,
de donner ordre qu’ils se rendent au lieu de l’assignation,
& des commandemens du Prince, comme nous auons veu en
l’année 1635. quand les Espagnols entrerent dans la Picardie, &
que nous fumes contraincts de considerer sainct Denys en France,
comme vne Frontiere de Paris.

GOVVERNEVRS DES PROVINCES.

Les principaux Gouuernemens de ce Royaume sont,
Le Gouuernement de Paris & de l’Isle de France, & est à
monsieur de Montbazon.

Celuy de Guyenne, à monsieur le Duc d’Espernon.

Celuy de Bourgogne, à monsieur le Prince de Condé.

Celuy de Languedoc, à Monseigneur le Duc d’Orleans.

Celuy de Dauphiné, à monsieur le Duc de Lesdiguieres.

Celuy de Champagne, & de Brie, à monsieur le Prince de
Condé.

Celuy de Picardie, à monsieur le Duc d’Elbeuf.

Celuy de Normandie, à monsieur le Duc de Longueuille.

Celuy de Bretagne, à la Reyne Regente.

Celuy de Bearn, au Mareschal de Grammond.

Celuy de Prouence, à monsieur le Comte d’Alez.

-- 30 --

Celuy d’Auuergne, au Duc de Chaulnes.

Celuy d’Orleans & du pays d’alentour, à monsieur le Marquis de
Sourdis.

Celuy d’Anjou, au Mareschal de Brezé.

Celuy du Mayne, au Comte de Tresmes.

Celuy de Lyon, au Mareschal de Villeroy.

Celuy de Berry, à monsieur le Prince de Condé.

Celuy de Poictou, au Comte de Patabele.

Celuy de la haute & basse Marche & pays d’Aulnis, à monsieur de
Brissac.

Les autres Gouuernemens sont moins considerables.

Remarquez que quand les Gouuemeurs vont presenter leur
lettres à la Cour de Parlement de leur ressort, ils sont receus à la
charge, qu’ils n’entreprendront rien contre l’authorité du Parlement,
ny de la Iustice ordinaire, sur laquelle ils n’ont droict que
par vsurpation.

Il est bien vray qu’ils peuuent tuer vn Ennemy estranger, s’il
vient troubler la Prouince, ou vn seditieux, sur le fait de la sedition ;
mais non faire le procez à personne.

Ces Gouuernemens ne sont pas Offices, mais Commissions ; &
en consideration de cette qualité, chacun a droict de seance en la
Prouince qu’il gouuerne.

L’ASSEMBLEE DES ESTATS.

L’ouuerture s’en fait par le Chancelier, en la presence du Roy,
qui remonstre les motifs de cette conuocation.

La Noblesse est la plus belle moitié de France, & le rempart qui
asseure son repos contre les puissances estrangeres.

Le Clergé possede beaucoup plus d’vn tiers du reuenu de
France.

Le Clergé à de
reuenu annuel
32000000. Ie
veux dire trois
cens millions,
& douze mille
liures sans les
reserues.

DE L’EGLISE GALLICANE.

Sans m’estendre dauantage, sur les priuileges & libertez, qui
ont donné subiect à tant de liures & tant de ialousie à nos Ennemis.

-- 31 --

Vous remarquerez, qu’il y a en France 116. Archeueschez ou
Eueschez.

La Religion entra auec Clouis, laquelle s’est depuis 100, ans
diuisée par la Secte de Caluin.

La Sorbonne est vne puissante colomne contre les nouueaux
Religionaires. Elle doit sa Fondation à Sainct Louys Roy de France,
sa gloire au zele de quantité de Prelats qui s’aduoüent Enfans
de cette mere ; & la beauté de ses Edifices au feu Cardinal de Richelieu,
qui a donné de grandes sommes pour les faire construite.

FIN.

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Anonyme [1649], OBSERVATIONS CVRIEVSES, SVR L’ESTAT ET GOVVERNEMENT DE FRANCE. Auec les Noms, Dignitez & Familles principales, Comme il est en la presente année 1649. , françaisRéférence RIM : M0_2568. Cote locale : A_6_85.