Brousse, Jacques [?] [1649], LE THEOLOGIEN POLITIQVE, Piece curieuse sur les affaires du Temps, pour la defense des bons François. , françaisRéférence RIM : M0_3772. Cote locale : A_7_46.
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LE THEOLOGIEN POLITIQVE,
Piece curieuse sur les affaires du Temps, pour la
defense des bons François.

PVIS que la Nature a donné à l’homme auec la vie, le desir
de se conseruer, & que les Loix diuines & humaines, permettent
de repousser la force par la force. Il n’y a personne
qui ne iuge en faueur des Parisiens, & des autres bons
François ; que la defense qu’ils rendent aux cruelles attaques qu’on
leur fait, ne soit tres-iuste, tres-legitime & tres-necessaire. Et
quoy que cette guerre scandaleuse se fasse sous l’autorité du Roy,
mineur, regy par la Reyne sa Mere ; Et que les deux premiers Princes
du sang, soiẽt à present les Chefs de l’execution de cette funeste
& iniuste entreprise, pour appuyer l’Idole chancelante d’vn pernicieux
Ministre, qui apprehendant de perir tout seul, s’est voulu
souler du sang des François, auparauant que mourir, s’estant desia
gorgé de leur plus pure substance : Nous verrons bien-tost que Dieu
dissipera leurs conseils, destruira leurs forces, & leur faira connoistre
qu’il est le Protecteur inuincible des innocens, & qu’il confond
& renuerse les entreprises de ceux qui persecutent son Peuple.

Les raisons qu’ils alleguent pour donner vn pretexte plausible à
leurs barbaries, ont de si mauuais fondemens, qu’elles se destruisent
d’elles-mesmes, & ne paroissent deuant les yeux des Sages, que
comme des lumieres fausses & trompeuses, qu’on dissipe tres-facilement
lors qu’on est despoüillé de toute sorte d’interest, & de
passion.

Ils disent que le glaiue leur est donné de Dieu, pour en vser en
puissance souuerainne ; qu’ils sont les Maistres absolus de nos biens
& de nos vies, & qu’ils peuuent faire punir tous ceux qui resistent à
leurs volontez, & qui par Arrests & autres escrits, s’oposent à leurs
desirs & blâment leur gouuernement. Mais le Peuple leur respond,
Que ce glaiue qui leur a esté donné de Dieu, est pour en faire iustice
& non violence ; & qu’il a esté mis entre les mains des Roys, comme
Ministres de Dieu : pour nostre bien & pour nostre conseruation,
& non pour nous destruire, contre toute forme de droict &

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d’équité. Et quant à nos biens & nos vies, personne ne doute qu’ils
n’en puissent estre les Dispensateurs, pour ueu toutesfois, que ce soit
à la gloire de Dieu, au bion du Publie, & qu’on les employe auec
vne iuste & legitime moderation, à la conseruation de l’Estat ; Et
non pas qu’on exige l’vn & l’autre, pour contenter l’auidité, l’ambition
& la cruauté des Fauotis, & de mille autres sangsues qui enuironnent
les Princes. Et quant aux Arrests & autres defenses legitimes,
qu’ils qualifient du nom d’attentats à leur autorité, & de
medisance & irreurence enuers leurs personnes sacrées : Le Peuple
respond, Que les excessiues cruautez d’vn infidele Ministre, ou
plustost d’vn Tyran barbare, par lesquelles il apprehendoit d’estre
entierement accablé ; l’ont contraint, apres que sa patience a esté si
souuent irritée, d’auoir recours au Parlement, & le suplier de luy seruir
du rempard coutre la tyrannie d’vn Ministre Estranger, & representer
à la Reyne les horribles méchancetez qu’il a cõ mises au gouuernement
de l’Estat, & dans administration & employ des Finances
de tout le Rayaume : Que si la dureté des peines qu’on a fait soufroit
depuis si long-temps aux François, a arraché de leurs bouches
[1 mot ill.], quelques verités qui paroissent de mauuaise digestion ;
elles sont toutes fois beaucoup moins condemnables, que les flateries
& les tromeries, dont se seruent tant d’esprits pipeurs & [1 mot ill.]
qui [1 mot ill.] la Reyne, & qui luy deguisent tout ce qui se
passe le Royaume de son fils.

 

Le gouuernement appartient veritablement au Roy, & à ceux
qui agissent sous son nom & sous son autorité, mais c’est sous certaines
[2 mots ill.], autres que celles que leurs passions dereglées
leur peuuent suggerer ; car il n’est pas permis aux Roys de faire tout
ce [2 mots ill.], mais seulement tout ce qui est iuste, & profitable
aux Peuples, sur lesquels Dieu les a establis.

Que [1 mot ill.] Roys contreuiennent à ce qu’ils sont obligez de faire
pour leurs subiets, il est sans doute permis aux subiets, par vne
[2 mots ill.], de ne leur rendre pas l’obeyssance iniuste, qu’ils
[3 mots ill.] plustost que par iuste douceur ; Et l’on ne blâmera
[1 mot ill.] les brebis qui s’eslognent du chemin que leur voudra
faire tenir leur meschant Berger, si elles sont asseurées que c’est
pour les liurer à la gorge des loups, & des autres bestes saguinaires,
estant vn des principaux points de la regle de Charité, de destourner
& d’éuiter la violence, qui tend à la ruine du public : Outre
qu’il est tres-certain, que comme nous deuons toute forte d’obeyssance
à de bons Roys, qui n’exigent de nous que des choses iustes

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& raisonnables, comme estans les veritables Lieutenans de
Dieu ; nous ne deuons aussi aucune obeyssance à ceux qui suiuans
les pernicieuses maximes des Demons, ne nous commandent
qu’iniustices & que cruautez.

 

La Reyne Regente & son infidele Ministre, n’ont deschainé
la guerre & la famine contre les Parisiens, que pource qu’ils ne
leur ont pas voulu liurer les plus gens de bien, & les plus sages
Senateurs du Parlement ; & a present ils ne continuent leurs fureurs
contre eux, que pour les obliger à s’en saisir, pour les leur
mettre entre les mains, ou du moins à leur courir sus, & les rẽdre
de cette sorte les dénaturez Boureaux de leurs passions, & leur
faire commettre la plus lasche & la plus horrible ingratitude
qu’on se pourroit imaginer, contre leurs plus affectionnez Concitoyens,
& contre ceux que nous pouuons tres-iustement appeller,
les Peres du Peuple, & les glorieux Defenseurs de la liberté
des biens & de la vie des François.

Il a esté bien plus iuste & plus honorable de se joindre tous ensemble,
pour s’opposer à ces execrables Monstres, qui se seruent
iniustement de l’autorité d’vn Roy mineur, pour nous accabler :
Et il a bien fallu prendre les armes, puis que toutes autres
voyes ont esté inutiles, pour le salut de nos vies, & la conseruation
de nos libertez, pour pouuoir ouurir les passages aux
viures, qu’ils nous ont fermé de tous les costez par leur bloqus,
& aussi pour tascher de secourir & de venger nos Compatriotes,
qu’ils saccagent, qu’ils violent, & qu’ils tuent dans la
campagne, auec des fureurs & des cruautez, qui fairoient honte
& horreur aux Demons ; En vn mot, nous auons trouué bien
plus glorieux de mourir les armes à la main, en faisant teste &
taschant d’exterminer la Tyrannie, que d’estre continuellement
tourmentez par mille nouuelles concussions, & d’estre
bruslez dans nos lits, & consumez auec nos femmes & nos enfans,
dans l’embrasement vniuersel qu’ils ont tasché d’allumer
par tout la Ville de Paris : Attentat & trahison horribles s’il en
fut iamais & qui paroistront incroyables aux siecles à venir, &
qu’on ne croira iamais estre entrez que dans des cœurs abandonnez
de Dieu, & possedez de toutes les Furies de l’Enfer.

L’Escriture nous enseigne. Que Dieu promit à Loth de pardonner
aux habitans des villes de Sodome & de Gomorre, quoy

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qu’ils fussent coupables de crimes horribles & abominables,
pourueu que parmy eux il se trouuast dix iustes, pour l’amour
desquels il retireroit ses vengeances, & ne les consumeroit
point, comme il fit, par le feu & par le souffre ; Mais helas ! la
Theologie de ceux qui nous attaquent, fait bien le contraire ;
car pour cinq ou six, que tres-iniustement ils qualifient iniustes,
ils veulent perdre & faire mourir par la guerre & par la famine
(qui sont les plus rudes chastimens dont la cruauté des hommes
se puisse seruir) six millions de personnes innocentes, qui gemissent
à present sous ces deux fleaux ; & qui rendans le bien
pour le mal, prient sans cesse Dieu pour ceux qui leur courrent
sus ; & qui au lieu de les proteger, comme fideles subjets, tâchent
de les destruire, comme s’ils estoient les plus barbares
Mahumetans.

 

Si les gens de bien pouuoient aborder la Reyne, & que mille
flateurs qui empoisonnent sans cesse son cœur & ses oreilles, ne
tinsent la verité enchaisnée : il se trouueroit assez de bons François
qui parleroient hardiment à sa Maiesté, & qui luy fairoient
voir l’horreur des honteux precipices, & la ruine certaine ou
ces ames perfides poussent sa personne, sa reputation, son autorité
& son ame : L’on luy fairoit connoistre qu’il y a beaucoup
plus de iustice & de gloire, de conseruer pour son fils, Paris & le
reste de son Royaume, dans le lustre & la grandeur ou il estoit,
qu’à le plonger dans vn abisme de desolation, d’où toute la prudence
humaine aura peine de le retirer. Et ce qui est plus deplorable,
c’est que les maximes pernicieuses de ces Demons
qui obsedent cette pauure Reyne, ont desia tellement occupé
& enuenimé son cœur, que prenant la paille pour l’or, l’ombre
pour le corps, les fausses maximes, & le mensonge mesme,
pour la plus saincte verité, elle croit ces artificieux Hypocrites
comme des Oracles ; & se persuade qu’elle periroit, si elle ne
suiuoit aueuglement leurs conseils.

Si donc nous voyons clairement que l’iniustice & l’iniquité,
ont abatu la Iustice de son Tribunal pour la fouler aux pieds ;
que le vice veut chasser la Vertu ; que l’impieté & le scandale
ont desia pris le masque de la veritable Religion ; que la cruauté
des meschans demande à se gorger du sang des iustes, & en vn
mot que la Tyrannie est en campagne auec toutes ses forces,

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scortée de ses plus redoutables Bourreaux ; à sçauoir, de l’Auarice,
de la Fourberie, de la Vengeance & de la Cruauté ; Et
qu’elle tient en main des torches allumées, & des armes funestes
& sanglantes, pour embraser & renuerser le Trosne de nostre
ieune Monarque ; & au lieu de cette douce & iuste domination,
dont luy & ses Predecesseurs nous ont regy iusques à present,
nous voir accablez de fers, de chaisnes & de tourmens ; Si,
dis-je, nous voyons la main des meschans leuée en haut pour
nous exterminer, ne nous sera-t’il pas permis de parer le coup,
& d’opposer vne legitime defense, à de si iniustes & violentes
attaques ; puis que Dieu & la Nature, comme nous auons dit,
nous ont apris que la conseruation de la vie & de la liberté, contre
l’oppression inique, est non seulement licite, mais aussi equitable
& saincte.

 

Il faut donc se resoudre, Genereux François, pour empescher
les mauuais desseins du Tyran, & tascher de le faire tomber
dans le fosse qu’il a creusé, pour y faire perir tant de gens de
bien ; car ce n’est pas assez de dire en souspirant, que c’est grand
pitié, lors que vous voyez les iniustices & les barbaries qu’on
exerce contre vous ; il faut plustost y apporter vn prompt remede,
& ne chercher point nostre conseruation en temporisant ; il
ne faut point laisser perir par nostre patience & par nos longueurs,
vne si bonne & si iuste cause, à faute de prendre de bonne
heure, l’Espée de iustice & le Bouclier de salut, pour éuiter
& repousser les darts enflamez des Demons, armez à nostre
ruine.

Et lors que nous aurons vne fois leué le masque de cette honteuse
& lasche crainte, qui nous a retenuë iusques icy dans la
souffrance ; & que nous ne nous amuserons pas seulement à resister
à l’attaque de ces Loups acharnez & de ces Monstres, mais
qu’aussi nous nous monstrerons assez courageux & assez forts,
pour les aller attaquer dans leurs tanieres, & dans leurs repaires ;
nous attirerons à nostre secours toutes les Prouinces, &
mesmes les Princes voisins nos Alliez, ne nous manqueront pas,
si nous leur faisons vne fois connoistre, que nous mettons à bon
escient la main à l’œuure, pour reparer les ruines de l’Estat,
pour rendre à Louys XIV. à nostre Dieu donne, le Trosne de
ses Ayeuls, aussi ferme & aussi esclatant qu’il fut iamais ; & finalement

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pour en exterminer ceux qui ont si long-temps fomenté
la Guerre & esloigné la Paix & le repos vniuersel de la Chrestienté.

 

Que si nous voulons montrer auec plus d’efficace & auec des
preuues plus conuainquantes l’iniustice de ceux qui taschent
d’establir la Tyrannie au preiudice de la veritable & tres-Chrestienne
Royauté : nous dirons auec Saint Paul chap. 13. Que les
Princes nous sont donnez de Dieu, & ce grand Roy des Roys
veut que la Police Ciuile soit conseruee, premierement par la
pieté & par la crainte de son Nom, & en suitte par l’amour & par
la charité enuers le prochain : & tous les Philosophes moraux &
les plus excellents Legislateurs, & Machiauel mesme (quoy
que remply d’ailleurs de mauuaises maximes) ont esté de ce sentiment.
C’est cette excellente iustice, qui regarde ce que nous
deuons à Dieu & puis à l’homme, qui establit & maintient par
sa force les Monarchies & les Republiques. Aristote au 3. liu. de
ses Politiques, dit, Que les Roys & ceux qui regissent sous eux
ne doiuent point chercher leur profit particulier, mais celuy de
leurs suiets.

Et comme le gouuernement Monarchique a esté tousiours
estimé le plus excellent par les plus habiles Politiques, il faut
confesser aussi que c’est le plus glissant & duquel il aduient plus
de maux lors que le Prince ou ses Ministres sont meschans ;
car on est à la mercy des bestes farouches, ausquelles il semble
qu’on n’ose contredire : Et le sage Salomon dit, Que tels
Princes ou tels Dominateurs sont semblables à des Lyons
& à des Ours affamez, & en suitte il dit. Que ceux qui s’adonnent
à extorsion se precipitent dans leur ruine sans qu’on
les puisse retenir : & tout au contraire il promet à celuy qui a en
horreur le gain des honneste la prolongation de ses iours, & dit
que celuy qui chemine en integrité, demeurera en toute seureté.

Prouer
chap 28

En vn mot, si les Princes veulent regner heureusement, &
attirer la benediction de Dieu & les loüanges de leurs Peuples,
il faut qu’ils limitent leurs puissances & celles de leurs Ministres
& fauoris, dans certains limites qui ne se doiuent point outrepasser ;
car il n’y a point de Royaume ny d’Empire infiny que celuy
de Dieu, qui n’est suiet à aucun changement ny diminution :

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car pour ce qui est d’vn Prince Terrien il n’est qu’vne loy parlante,
comme dit Pomponius Cætus : mais la Loy est vn Prince
muet ; ce qui fait voir qu’il est dessous la Loy, & que ses suiets
ne sont obligez de luy obeyr, qu’entant que ses commandemẽs
se trouueront conformes aux Loys fondamentales de son Estat.
Pour cét effet, nous apprenons dans l’histoire sacrée, que dans
le Royaume d’Israël, duquel Dieu auoit esté le fondateur, il y
auoit des puissances inferieures, à sçauoir les Anciens qui auoiẽt
pouuoir de s’opposer aux volontez illicites & effrenée des Roys :
& la prophane nous enseigne que l’Empereur Trajan (qu’on
peut prendre pour le veritable mode le d’vn sage Prince (commandoit
à ses Lieutenans s’il decernoit choses iustes d’y obeyr,
& d’employer le glaiue pour l’execution d’icelles : mais que s’il
leur commandoit de faire iniustice, qu’ils le tournassent contre
luy. Iustinian apres luy ordonna que le decret qui prouiendroit
de luy ne fut point receu, s’il n’estoit plein de iustice & d’équité.
Plutarque au Traité des Dits notables des Capitaines dit,
que les Roys d’Egypte, suiuant vne ancienne coustume, faisoient
iurer les Iuges, quand ils les instaloient en leurs Offices,
que quand mesme le Roy leur commanderoit de iuger iniustement,
qu’ils ne le fissent pourtant pas.

 

Les Roys & les Princes, quoy qu’ils se qualifient Souuerains
& indespendans, sont donc suiets aux Loix diuines & à celles de
l’équité naturelle imprimee au cœur de tous les hommes : Et les
Edits & Ordonnances qu’ils donnent à leurs suiets ne sont ou
n’en doiuent estre que les expositions. Demostene en ses Philippiques,
dit, que la Loy est vn don de Dieu, & vne inuention
& Ordonnance des Sages, pour reprimer les malefices & maintenir
la Republique ; a la reigle de laquelle Loy chacun doit
dresser & continuer le cours de sa vie. Et Ciceron en la Harangue
pour Cluence dit, que le soustien & la conseruation de la
Republique estans situez dans les Loix, il faut necessairement
que le prince y soit suiet, d’autant que son autorité tire sa source
delà, & ne se maintient que par l’inuiolable obseruance de la
Iustice. Et puis que nous sommes sur les alegations qui prouuent
la préeminence des Loix pardessus les Princes, nous dirons
encore auec Chrisippe que la Loy est la Reyne & la Souueraine,
tant des choses diuines qu’humaines, & qu’elle preside sur ce

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qui est honneste & vilain, & prescrit la regle aux choses iustes &
iniustes, monstrant ce que la nature bien reglée commande,
pour viure en paix & en ciuile societé, & faisant voir ce qu’elle
deffend. Et il est tres-certain que si le vertueux s’adonne au
bien par la bonne semence de la nature & par la sage inclination
qu’il a à le Iustice : le meschant aussi s’y porte malgré luy par
la crainte des Loix. Pyndare dit que la Loy est Reyne des mortels
& des immortels, & que cela ne soit Dieu qui est le Souuerain
Prince du Monde & le Roy des Roys, quand il a donné ses
Loix à son peuple ne s’est-il pas en quelque façon soumis à icelles,
puis qu’il luy promet de demeurer son Dieu, de le garantir
contre ses ennemis, de l’instruire, de le benir, de le conduire
& de le nourrir, pourueu qu’il obserue ses commandemens :
& lors qu’il a fait alliance auec son Peuple ne s’est-il
pas engagé par serment à la tenir inuiolablement. Nous lisons
au Deuteronome, le Commandement que Dieu fit au
Peuple. Tu establiras, dit-il, sur toy pour Roy vn d’entre tes frères,
& ne pourras establir sur toy vn homme Estranger. Et puis
il commande au Roy, de ne faire point trop grand amas de cheuaux,
de ne prendre point aussi plufieurs femmes, afin que son cœur
ne se destourne point, & qu’il ne s’amassera point beaucoup d’argent
ny beaucoup d’or. Il luy ordonne aussi, d’escrire cette Loy
en vn Liure, le prenant des mains des Sacrificateurs, & il luy
commande de lire en iceluy tous les iours de sa vie, & à prendre
garde à toutes les paroles de cette Loy & à ces Statuts, pour les
faire, afin que l’on cœur ne s’esleue point pardessus ses freres, &
qu’il ne se destourne de ce Commindement ny à droite ny à gauche,
& moyennant cela il luy promet, d’alonger ses iours en son
Regne & à ses enfans au milieu d’Israel. Ainsi suiuant cette Loy,
la chose se pratiquoit, entre Dieu, le Roy & le peuple ; Dieu
tesmoignoit par la bouche du Sacrificateur qu’il reconnoissoit
les Israëlites pour son peuple, le Roy promettoit de regner selon
Dieu, & le peuple suiuant cela de luy obeyr : comme cela
fut pratiqué au couronnement de Ioas & autres Roys. Et lors
que les Roys par le desreglement de leurs passions, par les alechemens
des femines, ou par le mauuais conseil de leurs fauoris,
mespriserent ces Loix & s’escarterent de cette droite voye,
Dieu leur enuoya mille sorte de maledictions & les liura plusieurs

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fois entre les mains de leurs ennemis, où ils furent tenus
en tres-dure captiuité.

 

Ch. 17
v. 15. &
suiuans.

Toutes ces excellentes raisons appuyees de textes formels de
l’Escriture Sainte, (qui ne peuuent estre reiettez que par des
impies,) font assez connoistre que le but que nous nous proposons
en ce discours est de faire voir, que la Reyne est au dessous
des Loix, & que ceux qui agissent sous elle contrarient formellement
aux Loix diuine, en faisant vne cruelle guerre au Sanctuaire,
aux Prestres, aux Religieuses & aux Innocens : & qu’ils
violent les Loix fondamentales de la Monarchie, en accablant
de concussions insupportables, & ruinant par le fer, par le feu
& par la famine, leurs plus fideles & plus affectionnez subjets.

Arriere donc la crainte que pourroient auoir quelques lâches
& timides scrupuleux, & gloire & loüange pour ceux qui d’vn
cœur genereux & veritablement François, employeront leur
sang & leur vie au maintien de leur liberté ; qui retireront leur
Patrie de l’esclauage ou on la veut reduire ; qui vangeront le
sang innocent qu’on a respandu ; qui chasseront la tyrannie &
estoufferont le Tyran Estranger ; qui redonneront à la France
desolée sa premiere splendeur ; qui rendront à Louys XIV. sa
legitime autorité, & qui par leur valeur ayderont à ce ieune
Monarque à conquerir les Nations infidelles, comme il a desia
gagné les cœurs, non seulement de ses suiets, mais de tous les
Peuples Chrestiens, qui attendent sous son Regne de iouyr des
felicitez d’vne longue Paix.

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