Questier, Mathurin, dit Fort-Lys [1649 [?]], SVITTE DV IOVRNAL POETIQVE DE LA GVERRE PARISIENNE. Dedié aux Conseruateurs du Roy, des Loix, & de la Patrie. Par M. Q. dit FORT-LYS. SIXIESME SEPMAINE. , françaisRéférence RIM : M0_1763. Cote locale : C_4_38_06.
SIXIESME SEPMAINE.
IVSQVES à quand, Seigneur, ton courroux irrité Chastira-il celuy qui ne l’a merité ? Auez-vous decretté de punir l’innocence, Et au lieu de vertu establir l’insolence ? Quoy ! voulez-vous sur nous, monstrer vos chastimens, En destruisans nos corps qui sont vos bastimens ? Non, grand Dieu, ce n’est pas ce que veut esperer Vostre peuple craintif ; qu’on veut desesperer.
Ie ne veux point parler icy de l’Angleterre, Chacun fait ce qu’il peut pour deffendre sa terre Natale ; de l’effort que fait vn ennemy, Dés lors que l’on luy void son visage blesmy. Ie ne parleray point de ce qu’on fit Dimanche A Monseigneur Molé ; car en ce lieu ie panche Du costé qu’il me faut tomber dans peu de temps, Ainsi que sur les fleurs d’vn gracieux Prin-temps : Ie diray seulement que le vis de mes yeux, Sacré dans la Sorbonne Euesque de Bayeux ; Et qu’il faisoit beau voir cette ceremonie ; Car les diuins accords d’vne douce harmonie, Rauissoient les esprits de tous les assistans, En ployant les rochers des cœurs plus resistans. Et vn chacun disoit, contemplant sa posture ; Que Dieu l’auoit esleu en cette prelature.
Mais en ce mesme iour le Prouost des Marchands Auec les Escheuins, firent que les Chamberlans, Comme les Chefs d’Hotel ; entretiendroient la garde, Quoy qu’ils n’eussent vaillans qu’vne pointe d’Hallebarde ; Et que si ils manquoient huict liures Parisis, Ils payeroient d’amande, où leurs meubles saisis, Satisferoient pour eux ; Aussi-tost l’on vid vendre Au profit de d’aucuns ; ce qu’on auoit peu prendre Au logis d’vn Maçon, qui languissoit de faim, Et tout sa famille en attendant du pain ; Cecy me fit horreur ; & ne me peus tenir, De former quelque plainte ; alors ie vis venir Vn tres-homme de bien ; disant, tout beau Messieurs, Vous faites-là vn traict qui n’est pas des meilleurs ;
I’escoutois tout cecy ; & dans ma fantaisie, I’aborrois, en mon cœur, vne telle saisie ; Et disois : ô grand Dieu, mettez fin à cecy, En enuoyant la Paix à ce Peuple icy ?
Le Prince de Condé enuoya vne lettre A Monsieur de Boüillon, afin de s’entremettre Enuers le Parlement, pour surseoit le Procez De ce bon Cheualier ; qui commit cét excez, En iettant des billets és ruës de cette Ville, Et ainsi recogneu pour vne ame imbecille : Mais toutesfois la Cour sur le champ ordonna Que ses meubles seroient vendus pour ce fait-là, Et que la quantité qu’il auoit de vaisselle, Seroient bien-tost changée en especes nouuelles. Voylà ce qu’on luy fit pour luy monstrer comment On peut bien chastier vn traistre sans tourment.
Monsieur le Mareschal de la Mothe-Houdancourt, Fut receu Conseiller honoraire en la Cour, Où apres auoir fait le serment eut seance Dedans le Parlement pour fruict de sa prudence.
Mais, quel orage vient icy se faire entendre ? Quoy ! Soissons as tu eu quelque enuie de te rendre
C’est donc icy Soissons, qu’il faut que tu te montre Vn miracle d’amour, en destruisant ce Monstre. Qui n’ayme que le sang, ne s’en pouuant souller, Mais qui sçait comme il faut les Autels soüiller ? Nous sçauons dés long temps que tu hays tous les traistres, Les ayans veu chez toy quelques fois estre Maistres. Tesmoin le Marquis d’Ancre en qui l’on se fioit ; Mais seulement Paris prudent s’en meffioit ; N’estoit-il pas venu du cœur de l’Italie, Ainsi que cestuy-cy, pour abreger ta vie ? Te fies-tu à ces dits, non plus qu’en ces escrits ? Ne sçais-tu pas qu’il trompe en tout temps les esprits ? Et que son naturel n’ayme aucune personne, En seruant indiscret celuy qui plus luy donne ? Ha ! que tu as bien fait d’ainsi te comporter, Sans te laisser tout vif, à ce mal emporter ? Tes Maire & Escheuins, pensant vendre ta Ville, Ont vendu laschement l’honneur de leur famille. Puis que s’estant monstrez en vers-toy si ingrats, Que de quitter ton lieu pour y placer des rats.
C’est vn petit Conuoy de quarante charrettes, De farines, de bleds, & de liqueurs secrettes, Que la Boullaye conduit de Chastres sous Montlhery Estant de nos Bourgeois entierement chery ; Car de ce quartier-là sans cesse il nous ameine Tousiours assez de quoy pour nous oster de peine.
Monsieur le Duc d’Elbeuf auecque ses enfans, Vindrent de Charenton gaillards & triomphans ; Le Chasteau de Vincenne auec sa garnison, N’auoit aucune enuie qu’il vint en sa maison : Car l’ayant attaqué ; ie ne sçay pas comment Il en peust eschapper si courageusement ; Dautant qu’il se voyoit quantité d’ennemis Sur les bras, qui estoient tres-forts, & bien munis. Il ne perd point de temps, il tuë leur Conducteur, Auec plusieurs des siens, qui sentirent sa valeur ; En contraignant le reste qui tenoient vn bon ordre, De se sauuer soudain en vn tres-grand desordre.
Or dés le lendemain les trouppes Mazarines Entrerent à Charenton, pour prendre des farines, Qui venoient de la Brie ; ou bien pour enleuer De nostre Infanterie, quelque part ou quartier ;
Messieurs les Gens du Roy ayant eu passeport A Sainct Germain en Laye arriuerent à bon port. Nos ennemis, amys, tesmoigne l’esperance, De voir en les voyant le repos dans la France.
Cependant vn grand bruict vint frapper nos oreilles, Qui iamais ne fut creu ; Sçachant bien que les veilles Du Duc de Longueville n’auoient autre dessein, Que de faire loger la Paix dans nostre sein. Mazarin disoit on, le fera Connestable, En luy donnant l’espée. Il est trop ferme & stable ; Son cœur ne peut commettre vne lasche action, Il est pour nostre Roy, & pour la nation.
Ah ! mal-heur ? qu’est cecy, seroit il bien possible, Que Cohon fut retif ? Non, il est impossible ? Quoy ! seroit-il bandé contre nos Citoyens : Quoy ! veut-il ruyner les bons Parisiens ? Ha ! c’est par trop parler, d’vne nuisible affaire ? Toutesfois ie ne veux en cét endroict me taire ; Il est traistre, on le sçait, plus que suffisamment, Car Mazarin, son cœur, possede puissamment,
Leopold cependant enuoye de sa main, Vne lettre escritte encontre Mazarin, Remonstrant à la Cour sa noire trahison, Exhortant de chasser loing de nous ce poison, Qui si subtilement s’emparoit de nos veines, En nous faisant souffrir des langoureuses peines.
Aussi tost l’on nous dit, le Sieur de Noirmonstier, Est vn vaillant Soldat qui sçait bien son mestier ; Car il a emmené de l’abondante Brie, Des bleds, & des farines à sa chere Patrie ; En grande quantité ; sçauoir quatre à cinq cens Charrettes ; & dompta tous les empeschemens Que luy fit de Grancay, qui tira de Corbeil, Et de Lagny aussi ; auant que le Soleil
Resioüys toy Paris, dresse des feux de joye, Le Ciel pour leurs forfaits vne Paix il t’enuoye, Le trauail ne doit plus affoiblir ton franc cœur, Tu ne seras vaincu ; ains tu seras vainqueur, Ton Roy reuiendra tost, auec toute sa Cour, On ne parlera plus de sang ; mais de l’amour ; Nos Princes genereux, delaisseront les armes, Et on ne verra plus prés de toy des Gensd’armes ; Chacun trauaillera, & viuant tres-content, On n’ira plus garder les portes si souuent ; Le bon temps reuiendra ; & la noble Iournée Qui nous a dés long-temps promis vn Hymenée : Capable d’appaiser les cœurs audacieux Qui menassoient, dans peu, d’aneantir ces lieux.
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Questier, Mathurin, dit Fort-Lys [1649 [?]], SVITTE DV IOVRNAL POETIQVE DE LA GVERRE PARISIENNE. Dedié aux Conseruateurs du Roy, des Loix, & de la Patrie. Par M. Q. dit FORT-LYS. SIXIESME SEPMAINE. , françaisRéférence RIM : M0_1763. Cote locale : C_4_38_06.