Saint-Julien,? [?] [1649], LE DOVZIESME COVRRIER FRANCOIS, TRADVIT FIDELLEMENT en Vers Burlesques. , françaisRéférence RIM : M0_2848. Cote locale : C_2_42_12.
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LE DOVZIESME
COVRRIER
FRANCOIS,
TRADVIT FIDELLEMENT
en Vers Burlesques.

A PARIS,
Chez CLAVDE BOVDEVILLE, ruë des Carmes,
au Lys Fleurissant.

M. DC. XLIX.

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LE DOVZIESME
COVRIER FRANCOIS
EN VERS BVRLESQVES.

 


Mercredy de Mars le dernier,
De S. Germain vint vn Courrier
Portant Ordonnance Royalle,
Que pour vne paix generalle
Et pour nostre tranquillité
Sa Tres-Chrestienne Majesté,
Veut que la garde continuë,
Tant qu’vne bonne paix venuë
Et selon son intention,
On cesse toute faction.

 

 


Le mesme iour ont esté leuës
Des lettres qui nous sont venuës
Du Parlement de Languedoc
Qui sur le tard iette le froc,
Ces braues Messieurs de Thoulouse
Par vn Arrest rendu le douze
Ordonnent qu’on remonstre au Roy
Qu’il deuoit mieux garder sa foy
Que n’enseignoit le Pere Faure
(Digne ame d’vn Turc ou d’vn More)
Et qu’ainsi l’execution
De l’ample declaration
Du mois d’Octobre soit permise,
Cõme vn commandement d’Eglise,

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Estant plein de sainteté,
Et faite par sa Majesté.

 

 


Le premier d’Auril l’Audience
Deuint belle par la presence
Du vaillant Prince de Conty,
Et des chefs de nostre party,
Où Boüillon prenant la parole
Dit tant au President Viole
Qu’à tous Messieurs, attention,
I’ay bonne procuration
D’auancer ce que ie vais dire,
Et nul ne me voudroit dédire,
Lors vn Huissier ayant dit paix,
Boüillon poursuit Messieurs la paix
Est si fort de nous desirée,
Que bien loin d’estre differée,
Nous autres Chefs sommes tous prests
D’abandonner nos interests :
Ie ne puis vous dire autre chose,
Et là ce Duc fit vne pose.
En suitte à haute voix fut leu
Ce que respondre il auoit pleu
Au Roy, sur toutes les demandes
De ces braues Chefs de nos bandes.
Lors les gens de sa Majesté
Au Parlement on presenté
Sa declaration donnée
Sur les troubles de cette année,
Par laquelle il est ordonné
Que tout acte qu’a decerné
La Cour ou Messieurs de la Ville,

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Est reputé comme inutille,
Que tout Arrest, Commission
Aura de la cassation,
Lettres, escrits ; traittez, libelles
Ne seront que des bagatelles,
Depuis le sixiesme Ianuier
Et fadaises que le Courrier,
Sans que pour chose aucune faitte
Personne en soit plus inquiette,
Le tout non aduenu censé,
Demeurant sans estre cassé,
L’Arrest dont personne priuée
Par Messieurs fut gratifiée,
Et tel ou Monsieur Meliand
A daigné parler quand & quand

 

 


Lecteur icy ma Muse ahanne
Pour ne sçauoir point la chicanne,
Decret d’adiudication,
Et d’Officiers reception,
Que le Roy rend continuelle,
Est du haut Allemand pour elle !
Mais franchissons ce mauuais pas,
Et ne nous decourageons pas ;
Acheuons de tourner en rime
Le Traitté d’vne Paix qu’estime
Sans raison quelque esprit mutin
Item donc pour parler Latin
(Car pour sortir de ce passage
Ie m’aideray de tout langage)
Le Roy veut qu’au Conseil d’enhaut,
N’ait pas esté comme il faut

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Arrest, ny bien expediée
Lettre de cachet, publiée
Si l’on a Declaration,
Qu’apresent son intention
Est qu’elle reste supprimée,
Et que sa mamman bien aimée
Veut au premier beau iour d’Esté
Enuoyer au fleuue Lethé
Quelqu’vn qui de cette eau rapporte,
Qui fasse oublier toute sorte
D’vnions, Ligues & Traittez,
Sans que puissent estre heurtez,
Ceux qui pour faire telle Ligue
Non contents de faire vne brigue.
Ont leuez soldats, pris deniers
Tant publics que particuliers.
Mesmes que Princes, Gentils hommes
Seigneurs, Prelats, tous autres hommes
Qu’on sçait auoir contribué,
Ou quelque Mazarin tué,
Soient maintenus dans leurs Offices,
Honneurs, biens charges, Benefices,
Au mesme estat qu’ils se trouuoient
Quand les Parisiens beuuoient,
La nuit des Rois, & qu’ils perdirent
Le vray pour mille faux qu’ils firent :
Pourueu qu’ils mettent armes bas,
Et ne s’opiniastrent pas
Aux ligues s’ils en ont aucune,
Sous couleur de cause commune,
Soit hors la France, soit dedans.

 

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Item, le Roy veut que nos gens
Soient purgez auec de la casse
Quoy que nul mal ne les menace,
Qui demande les Medecins,
A la reserue des plus sains,
Donc le Roy veut ses forces croistre,

 

 


Item, que tous ceux mis en cloistre,
(Car ie confons cloistre & prison)
Retourneront en leur maison
Que le Roy la presente année
Et deuant l’autre terminée,
Pourra par an si besoin est,
Douze millions prendre en prest,
Ledit prest estant volontaire
Sans qu’on puisse pour autre affaire
Que pour la presente employer
Ces sommes, ny debtes payées,
Bref n’en pourront estre acquitées
Les vieilles debtes contractées ;
Estant taxez les interests
Au denier douze de tels prests.

 

 


C’est presque tout : Quelqu’autre chose
Dont le sens requiert de la prose
Est dans la Declaration.
Telle qu’est la suppression
Du Semestre de Normandie,
Enfin veux tu que ie te die,
Cher Lecteur, si ie ne poursuis
Ie suis malade & ne puis

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Et s’il m’est permis de tout dire,
Il m’est impossible de rire ;
Que du bout des dents, d’vne Paix
Ou deuient plus grand que iamais
Mais brisons là. La Cour ioyeuse
D’vne fin de guerre ennuyeuse,
L’enregistra, la publia,
Verifia, ratifia ;
Foin, tous ces termes de prattique
Donnent à mes vers la colique :
Bref fut conclu que compliment
En guise de remerciment
Allast vers la Reine Regente,
Où l’on mettra que suppliante
La Cour est, que leurs Majestez
Rendent à Paris ses beautez,
Sa splendeur & son eminence
En l’honorant de leur presence.

 

 


Le Vendredy deux on sema
Certain bruit qui nous allarma,
Sçauoir que l’Archi-Duc aduance,
Et bien qu’vn Mareschal de France
Empesche qu’il ne passe l’eau,
Qu’il ne luy man que qu’vn batteau,
Outre que le Seigneur Duc Charles
Se campe entre Ve[1 lettre ill.]uins & Marle,
Et l’Archi-Duc aupres de Laon,
Si bien que l’on craint que cet an
Les Villes d’Ypre & de Dixmude
Ne souffrent quelque assaut bien rude,

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Laon s’estant mis fort en deuoir
De n’estre pas en leur pouuoir.

 

 


Samedy trois veille de Pasques,
Il vint par la porte S. Iacques
Vn Courrier disant qu’à Callais
N’ayant que deux ou trois vallets
Est venuë vne grande Dame
De Monsieur de Rantzau la femme,
Que Destrades homme d’honneur
Et de Dunquerque Gouuerneur
A piteusement renuoyée
Hors la place, de pleurs noyée
Pour la prison de son espoux,
Qui perdit, œil, bras, pied pour nous.
Or ce mesme iour firent gille
Les prisonniers de la Bastille.
Autre aduis de Roüen venu,
Dit que Matignon si cognu
Est allé ioindre en cette Ville
Monsieur le Duc de Longueuille.

 

 


Ce mesme iour furent payez
Nos soudarts & licentiez,
Ayant fait monstre generalle,
Sauf à sa Majesté Royalle
D’en garder ceux qu’il luy plaira,
Qu’à present elle souldoira.

 

 


Ce fut ce iour-là qu’aux Bons-Hommes
Se rencontrerent deux grands hommes,

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Monsieur le Prince de Condé
Dont la valleur a secondé
Le rang de feu Monsieur son pere
Le Prince de Conty son frere,
Ensemble Madame leur sœur
Qui s’embrassent de grand cœur
Ou le Duc de Boüillon malade,
Au Prince vint faire accollade.

 

Fin du Courrier Burlesque.

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