Anonyme [1652], LE VERITABLE CONTRE LE MENTEVR. Mentita est iniquitas sibi Psalm. 26. , français, latinRéférence RIM : M0_3926. Cote locale : B_10_8.
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LE
VERITABLE
CONTRE
LE
MENTEVR.

Mentita est iniquitas sibi Psalm. 26.

A PARIS,

M. DC. LII.

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LE VERITABLE, CONTRE
le Menteur.

Psal.

IE ne sçaurois reuenir de l’estonnement,
qui me cause l’insolence & la lacheté de
certaine gens, qui se picquent de fidels François ;
& qui veulent faire passer leurs sentimens
pour desinteressez, quoy que dans tous
les Discours qu’ils s’empressent de faire du
Cardinal Mazarin, ils auoüent clairement
l’attache honteuse qu’ils ont à ce Ministre :
Ces gens veulent persuader toute la France des
vertus du C. au prejudice de toutes les soufrances
que nous cause ce cruel, qui est aussi
vuide de vertus que remply de vices : Ils veulent
que nous trahissions nostre malheureuse
experience, par la croyance qu’ils taschent
de nous donner, que nous sommes heureux,
& que le C. Mazarin ne verse dessus nous que
des influences pleine de paix, de repos, d’abondance,
& de toute sorte de biens : Ils le
veulent faire aussi parfait que Pandore, quoy
qu’il n’en aye que la boite funeste, qu’il a malheureusement
espanché sur nos testes.

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Celuy qui a fait les considerations des-interessées
sur la conduite du Cardinal Mazarin
est le sujet de ce discours, par lequel ie pretens
faire connoistre à toute la terre la flaterie & le
mensonge, desquelles ce lasche Autheur a
remply son ouurage : qu’il ne s’estonne point
si ie ne m’y suis donné plustost, mais qu’il sçache
que ie n’en ay eu part que lõg-temps apres
qu’il l’a fait mettre sous la presse : & que i’ay
douté si ie deuois perdre quelque peu de
temps à cette refutation, ne doutant pas qu’aucune
personne de sons, peut donner creance à
toutes les faussetez qu’il a estalées dans ces
considerations, & que ie ne m’y serois pas resolu,
si ie n’auois ou dessein de le guerir de la
vanité qui l’en pourroit auoir conceuë : & de
desabuser ceux qui voyent tant de differens
escrits qui se donnent maintenant au public,
se trouuent dans le doute du chemin de la verité,
ne sçachans où la rencontrer à cause du
masque & de l’habit, de la passion & de l’interest,
desquels elle se trouue tousjours desguisée
& reuestuë : ce que i’ay creu ne pouuoir
mieux faire qu’en l’opposant au mensonge,
que i’espere de decouurir si nuëment, que les
plus simples n’auront plus lieu de douter.

Ie ne m’arreste point à sa preface aussi ridicule
qu’esloignée de son suiet, en ce qu’il commence

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par l’authorité Royale, & de celle de la
France, superieure à celle des autres Estats, par
l’empire secret des cœurs, sur lesquels le Cardinal
Mazarin n’a aucun droict, tant par le defaut
du caractere, duquel il ne peut estre iamais
capable que par l’insuffisance & la malice
de son Ministere, duquel il sera tousjours
coupable.

 

Si doncques il s’est esgaré des la premiere
demarche, que doit on attendre tout le long
de sa carriere, sinon de le voir broncher à tous
coups, & sur la fin de sa course se ietter dans
quelque precipice affreux, dont il ne pourra
iamais sortir.

Il dit que ceux qui considerent les actions
du Cardinal Mazarin, sa conduite pour son
retour en France &c. ne luy rendent pas tous
les auantages qu’il merite, & ne conçoiuent
pas toute l’estime qu’ils doiuent auoir de cette
sagesse merueilleuse &c. Il veut qu’on appelle
conduite & sagesse merueilleuse toutes les
fourberies, toutes les ruses & toutes les intrigues
qu’il a employées pour reprendre la place
de premier Ministre contre les Declarations
du Roy, & Arrests rendus contre luy ;
contre ses protestations par ses insolentes
lettres au Roy & à la Reyne, à Son Altesse
Royale & au Preuost des Marchands, & lesquelles

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estant trop connuës auroient esté inutiles,
si on n’estoit pas demeuré dans le respect
qu’on a tousjours voulu garder au Roy,
pour la quelle raison on a preferé les Remonstrances
aux armes qu’on a pris que pour vne
extreme contrainte, & sans lesquelles considerations
cette pretenduë merueilleuse sagesse,
auroit passé pour vne extrauagante follie,
& pour vn moyen tout a fait inutil à son retour.

 

Il suit dans cette mesme page, & n’a aucune
peine à me faire auouër que l’Authorité
Royale est vne arme dangereuse dans vne
mauuaise main, la conduite honteuse, criminelle
& malheureuse du Cardinal Mazarin,
ne prouue que trop la verité de cette proposition :
Mais ie dis plus, car bien loing d’accorder
ce qu’il dit en apres, ie prie toute l’Europe
de faire reflexion sur tout ce qui s’est
passé depuis quatre ans, & ie suis asseuré que
chacun tombera d’accord que le Cardinal
Mazarin a esté timide où il a falu estre hardy,
& qu’il a eu trop de violence, où l’on auoit
besoin de beaucoup, de moderation ; ses fuites
& les enleuemens de Leur Majestez verifient
le premier deffaut & l’emprisonnement
des Officiers du Parlement, & le blocus de
Paris, marquent d’vn horrible caractere : Ie

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tais tout le reste, parce qu’ils ont esté assez
descripts & descriez, qu’vn chacun les a senty
ou connu, & que ie crains d’estre trop long.

 

En apres, il tache de nous persuader, que
ce que le Cardinal Mazarin fit a Casal, est
vne haute entreprise, & vn ouurage digne
d’vne grande force d’esprit, quoy que tout
le monde sçache, qu’il ne fit rien de soy-mesme,
qu’il agissoit sous de plus puissans ressorts,
que ceux de son petit ceruelet & que se
mesler de la paix, soit le plus facile & le plus
plausible moyen pour trouuer creance parmy
les peuples : Mais helas ! ce meschant n’a trauaillé
à cette paix que pour trouuer moyen
de nous trauailler puis apres, par de plus longues
& de plus furieuses guerres : & bien que
le feu Roy luy ayt fait des honneurs capables
de saouler les plus grands & les plus ambitieux
de son Royaume, ce n’a pas esté par son
mouuement ny par l’aueu de ses bons seruiteurs,
mais par la persuasion tyrannique du
Cardinal de Richelieu, qui le voulant faire
succeder à la place qu’il tenoit dans le Ministeriat,
pour les raisons que chacun sçait ; &
sçachant la bassesse de son extraction, & la
honte de sa naissance, voulut couurir tous ces
deffauts de la pourpre, pour nous le rendre
moins haïssable.

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Ie ne m’arreste pas à cette vaine Rethorique,
à ces mots fastueux, & à ces termes empoulez,
dont il a grossi ses considerations, ie
veux seulement faire connoistre son esprit lâche
& flateur : & ce d’autant plus qu’il s’en défend
presque par tout, & notamment dans
cette page ; & comme ie crois par vn pur effect
de la synderese, & par la connoissance
qu’il a de choquer vne verité vniuersellement
connuë : tout ce fatras de discours inutils,
n’est que pour preparer son Lecteur à donner
quelque creance au mensonge qu’il veut
deduire.

Il veut qu’on sçache qu’il a le premier idolatré
le Cardinal Mazarin, en luy dediant il
y a quinze ans vn ouurage intitulé le protecteur
de la Maison de Dieu, en quoy il ne peut
empescher qu’on ne voye qu’il n’a aucune
connoissance de l’avenir, & qu’il a l’ame la
plus lache, & la plume la plus menteuse que
l’on aye iamais veuë : puis qu’il semble par
son ouurage nous auoir voulu faire croire
que le Cardinal Mazarin auroit en veneration
les Maisons de Dieu ; & cependant tous
les sacrileges & toutes les profanations que
nous voyons, sont commises ou sous son
pretexte ; ou par ses satellites, ou mesme par
ses ordres.

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Quand ie considere l’impudence & l’effronterie,
auec laquelle il ose comparer son
Maistre à ce sainct & venerable Pontise
Onias ; ie ne peux que ie ne m’écrie ; O lâche
menteur, ô flateur impudent, quel esprit
ou quel demon te fait mentir au S. Esprit ?
Quelle est ta foy, quelle est ta Religion ?
En quelle eschole a tu perdu le front, où a
tu appris à trahir la verité si honteusement,
ne rougis ru pas de faire vne comparaison
qui passe le ridicule, & qui est criminelle au
dernier poinct ? le Cardinal Mazarin ton
protecteur de la maison de Dieu, n’a-il pas
fait piller, & bruler les Eglises, & les maisons
de Dieu, des saincts Religieux, & des
chastes Vierges deuoüées au Seigneur, qui
ont estez violées par tout auec scandale, &
impunité ? N’a-on pas tué des Preffres sous
ses ordres, apres leur auoir fait souffrir mille
tourmens ? Que diray je des profanations
sacrilegues des saincts Lieux où les Autels
ont estez pollués, les Reliques des saincts &
le precieux corps du Sauueur foulé aux pieds,
mangé par les bestes : & par vne malice
inouïe depuis la trahison de Iudas, vendu à
beaux deniers comptans, lors qu’on n’a pas

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eu le temps de cacher ce Roy des Roys dans
la paille, & dans le foin, pour le garantir des
impietez de ces abominables ? Onias a-il
commis ces abominations ? Ignore-tu quels
témoignages les sacrez Cahyers rendent de
sa vertu, de sa pieté, & du zele dont il bruloit
pour la maison de Dieu, pour le testament
de ses Peres, pour les loix du pays, &
pour tout ce qu’il y a de sainct & d’honneste,
jusques à y auoir perdu la vie ? Ton
Maistre, lasche flatteur, maintien-il les loix
fondamentales du Royaume de France, auquel
il a plus d’obligation que tout le reste
des hommes ? Ne renuerse il pas autant
qu’il peut, tout l’ordre qui a acreu & conserue
ce grand Empire iusques à present ?
N’en veut-il pas abolir les loüables & anciennes
coustumes, receuës vniuersellement
par les François, pour y introduire les maximes
damnables, malicieuses & excommuniées
de Machiauel ? Ne l’a-il pas trouué le
plus puissant, & le plus florissant Estat de
toute la Chrestienté ? Ne l’a-il pas reduit à
la derniere calamité à vne extreme misere,
& à vne epouuentable pauureté ? Onias viuoit-il
voluptueusément & l’uxurieusement

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comme le Cardinal Mazarin ? Faisoit-il des
eauës de senteurs, & des pommades que
l’Escriture saincte appelle vnguenta Meretricia,
parfumoit-il des gands & des singes,
faisoit-il milles singeries, comme le Cardinal
Mazarin ? faisoit-il venir des pays eloignez
à grands frais des Commediens, pour
endormir le peuple, lors que d’ailleurs il luy
coupoit la bourse, & luy suczoit le sang
par des guerres, qu’il a mechamment continuées,
& par l’opposition formelle, qu’il
a fait à la paix, tant necessaire, & tant desirée
des gens de bien ? Va meschant imposteur,
Va lasche flateur ! cache toy, tu es
indigne de voir le Soleil, & apres cette bassesse,
je te crois capable de tout, de seruir
ton Maistre dans ses plaisirs secrets, & de
flechir le genoüil deuant cét infame & fameux
Baal, tu es capable du Sabath, & ie
ne connois rien que toy de plus lasche que
ton Maistre.

 

Peuples malheureux, fidels infortunez,
qui auez eu vn tel Predicateur, quoy que la
parole de Dieu soit saincte, elle ne laisse
pas sa permission de se soüiller, lors qu’elle

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passe par des canaux remplis de superbe, d’auarice,
de flatterie & de mensonge, & comme
ce Predicant marque trop par ses escrits,
qu’il est taché de tous ces vices, je
crains fort pour vous, qu’il ne vous aye
déguisé la verité dans ses predications, &
qu’il ne se soit plus estudié à vous flater
& chatouiller l’oreille, qu’à exiter vos
consciences à la haine du vice, & à l’amour
de la vertu, & qu’il n’aye ressemblé
à ces Chirurgiens, lesquels par ignorance,
ou par vne indiscrete complaisance
donnent la mort au lieu de la santé, en
aplicant des anodins sur vne partie gangrenée
qui a besoin d’escharotics.

 

Apres avoir dit qu’on ne la pas veu parmy
la foule des Adorateurs du Cardinal
Mazarin, il publie qu’il en a receu vn diamant
pour recompense du liure qu’il luy
a dedié, marquant par cette declaration
hors de propos, que s’il n’a suiuy la Cour
c’est qu’il ne l’a peu, ou par faute de subsistance,
ou pour d’autres raisons qui ne paressent
pas, & qu’il pretend que cette ridicule
apologie, luy doit tenir lieu d’vne grande

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assiduité, & luy donner la possession de ce
que son auarice luy faisoit esperer, eleuant
ce present afin d’en attirer vn plus considerable,
& voulant faire passer le Card. Mazarin
pour vn Genereux, quoy que tout le
monde connoisse le contraire, & comme
dit vn Seigneur de la Cour, qu’il a vne inuention
qui luy est toute particuliere, de
donner tout d’vne si méchante maniere,
qu’on ne luy en a aucune obligation : que
si par cét ouurage il pretend acquerir quelque
reputation, ie crois auec tous les gens
de bien & de sçauoir, qu’il s’est entierement
mécompté, son suiet, & son trauail estant si
deffectueux qu’il n’en peut iustement atendre
que du blasme, encor sera-t’il fauorisé de
ce qu’il n’en receura aucun chastiment par
les mains de la Iustice : Peut estre a-t’il eu
dans cét occasion la pensée de ce fameux
Incendiaire, qui brusla le Temple d’Ephese ;
& du Cardinal Mazarin qui par ses fautes &
par ses crimes veut estre connu à la posterité :
mais ie crois qu’il n’en sera rien, & que
de crainte, que de si funestes Exemples,
n’attirent quelques imitations, on tirera
leurs noms & leurs actions du Corps de l’histoire,
& on les condãnera a vn eternel oubly.

 

Il poursuit & veut qu’on sache qu’il est Parisien,
pour moy ie n’en croy rien : mais plutost

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qu’il est vn Pharisien, flateur, hypocrite,
parricide, ou si vous voulez patriccide, où
cõme il parle vn Espagnol trauesty, ou François
Italianisé, ou Mazarinisé, n’estant pas
possible qu’vn veritable François & Parisien,
soit l’Apologiste du plus grand de tous les
Ennemis des François, & des Parisiens.

 

Il remplit tout son ouurage des lumieres
eclattantes, des diuins ressorts qui causent l’extase
de la force d’esprit, de l’auarice de ce grand
Ganie, & tels autres qui ne paroissent qu’aux
yeux de ce flateur, & de ses semblables, tout
le monde sachant trop veritablement, par
la calamité generale de la France, qu’il n’y
eut iamais vn si sot, si ignorant, & si impertinant
personnage que le Cardinal Mazarin,
qui n’a aucune capacité qu’en fourberie,
qu’en tromperie, & qu’en mille sorte de badineries,
qui luy font hayr & mêconoistre les
gens de sçauoir, de vertu & de merite.

Y a-t’il rien de plus ridicule, que de vouloir
estaller les vertus d’vn homme, qu’on
auouë ne connoistre pas, n’auoir iamais parlé
à luy, ny à ses gens, & n’auoir eu aucune
participation de ses pretenduës Lumieres,
comme cét impertinent Autheur confesse
naïuement ; il fait bien voir par là, que toutes
les qualitez qu’il luy attribuë, ne luy sont pas
deuës, & quand la mauuaise reussite, de toute

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sa conduite dans le Ministeriat, n’en seroit
pas vne preuue conuainquante, cette sotte
deposition faite auec liberté, & comme ie
crois, grande oisiueté, nous persuade assez
cette mal-heureuse verité.

 

François, souffrirez-vous sans trouble,
l’impudence de ce lâche Aduocat, qui a bien
le front d’escrire, que le C. M. pese les choses
Ecclesiastiques au poids du Sanctuaire, apres
que toute la terre est remplie du sa le & simoniaque
trafic qu’il fait de tous les Benefices,
n’en ayant iamais conferé vn nettement, &
sans reserue de pension ou d’aumosne applicable
à son E. & n’ayant iamais consideré le
merite, & la vertu de ceux ausquels il les a
donné, mais le besoin qu’il auoit d’eux : ou le
seruice qu’il en auoit receu, ou celuy qu’il en
esperoit.

Et quant à celles de la Maison Royale, les
desordres qu’il y a fait naistre, les injustices
qu’il y commet n’en demandent-elles pas
son éloignement, qu’on en consulte Madame
de S. Maigrin, ie suis asseuré qu’elle sera de
cét auis, & qu’elle ne sera pas ébloüie des
lumieres, qui ont aueuglé ce flatteur, qui en a
la ceruelle si troublée, qu’il ne sçait ce qu’il
dit, & qu’il ne dit & redit tousiours qu’vne
mesme chose.

Il veut faire passer le Card. Maz. pour vn

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Geant, il a raison dans le sens ordinaire, que
l’Histoire saincte & prophane donne à ce
mot, par lequel elle entend vn Superbe, vn
Reuolté, vn Ambitieux, vn Auare, vn Tyran,
bref vn homme chargé & noircy de toutes
sortes de crimes.

 

Il le fait en apres vn grand General d’armée,
mais il n’a pas consulté ce grand foudre
de guerre, le Mareschal de Gassion, auquel
on a entendu dire cent fois, qu’en matiere de
guerre, le C. M. ne fut iamais qu’vn fat.

Il a grand tort d’accuser de foiblesse les
émotions populaires, s’il auoit bien leu l’Histoire,
il auroit remarqué que dans tous les
siecles passez, elles ont esté redoutées & redoutables,
& nous en auons chez nos voisins
de tres-pernicieux exemples ; qu’il considere
quelque mespris qu’il en fasse, qu’elles ont
fait lascher prise, & prendre la fuite au C. M.
& qu’elles pourront bien à la fin luy donner
vne honteuse & douloureuse mort.

Quant aux liens qui attachent les Mazarins
à S. E. il a encor grand tort de croire, que ce
soient les connoissances de ses vertus, qu’il
en iuge par foy-mesme, & s’il ne s’en veut
croire, qu’il croye toute la terre, qui sçait
que ce ne sont que des Benefices, des Pensions,
des Charges, des Dignitez, des Gouuernemens,
& tels autres interests, dont le

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C. M. s’est rendu dispensateur par la bonté
de la Reyne, & par la trop grande ieunesse du
Roy.

 

Les folles entreprises, & le dechet de
l’authorité Royale, marquent trop euidemment
la foiblesse, l’ignorance, & l’impertinence
des conseils du C. Maz. & qu’ils sont
aussi esloignez de la gloire de la Couronne,
qu’attachez à sa fortune ambitieuse & auaricieuse ;
cét Autheur prend pour caution de
sa flatterie les yeux du Roy, qu’il sçait que le
C. M. a surpris par ses prestiges, & auquel il
sçait que l’aage n’a pas encor dõné le moyen
de faire ce tant necessaire & important discernement ;
& puis pour suiuant auec ses pensées
embrouïllées, il fait vne capilotade de
la Politique auec l’Oeconomique, & vn mélange
confus, qui ne fait que marquer sa passion
& son ignorance, plustost que sa raison
& sa science.

p. 9. La page suiuante n’est qu’vne enarration
ennuyeuse & injurieuse de la difference des
Partis, où contre ses sentimens il est aisé de
voir que les Partisans du C. M. n’agissent que
par interest, estant tels que ie les ay dépeint
cy-dessus : Et que ceux de l’autre party n’agissent
qu’en veuë du bien public, en demandant
le bon ordre, la Iustice, & la Paix,
qui ne peuuent subsister dans la presence de

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cét hõme, que le Roy n’a pas choisy, ny peu
csioisir n’estãt pas en age de pouuoir faire ce
choix, par la cõfession méme de cét Autheur.
p. 10. Ces redittes me choquent, & cõme ie
les lis encor dans cette page, ie doute si
i’auray assez de perseuerance pour acheuer
de les refuter, ie ne m’areste pas a cette cõparaison
des eaux auec le Peuple, mais a ce
qu’il dit qu’vn Pilote peut mesme s’escarter
de son Vaisseau, le conduire de l’œil, &c. Qui
est vn point de l’art nautique, que ie n’auois
pas encor veu, & qui n’est nullement reccu
parmy ceux qui n’ont pas fait diuorce auec
le sens commun, comme ce Mazarin.

 

Il compare auec autant d’irreuerance,
qu’auec peu de raison & de verité, la fuite
du Cardinal Mazarin a celle du Sauueur, qui
n’a marqué que l’humanité, auec laquelle il
deuoit menager nostre Salut, & le C. Mazarin
vne ruse d’impuissance, pour éuiter vn
danger qui luy estoit present, & mediter de
nouueaux moyens pour se vanger, & nous
perdre par son cruel & insolent retour.

p. 11. Dans cette page, il dit, qu’il est impossible
de Gouuerner au gré de tous : Il est vray,
mais de dire qu’apres qu’elques progrés ausquels
toute la France apris part, par la fidelité,
& l’affection quelle porte à son Souuerain,
il faille metre les François à l’esclauage,

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& que ces pauures Peuples ne s’y opposent
point ; c’est ce que personne de bons sens
n’a peu accorder, & partant le seul motif
qui a augmenté l’auersion, que les maunais
déportemens du C. M. auoient commencez,
& qui ã donné la necessaire resolution de s’en
deffaire ; il n’a que faire de citer les emprisonnemens
des Officiers du Parlement, car
c’est vne des principales pieces de sa condãnation,
l’Armement subit qui s’en ensuiuit
est vn pur effet de cét esprit qui remplit tour,
& non pas vn resultat de cabale, comme il
allegue impudemment & faussement.

 

p. 12. Au cõmencement de cette page il veut
faire le procez aux Officiers du Parlement,
sur la mauuaise administration de leurs charges,
sur vne simple accusation, sur vn soupçon,
& veut que ces Messieurs ne soient pas
en droict, & en pouuoir de connoistre & de
punir les concussions, les pirateries, les voleries,
les incendies, les meurtres, les violemens,
les sacrileges, & tous les maux qu’a
commis & causé le C. M si l’on auoit fait
passer ce ridicule des interessé (ce sont ses
termes) comme vn lasche flatteur & fauteur
d’vn Tyran, personne n’en diroit mot ; mais
lors que contre tout droict & justice, vn insolent
Ministre voudra faire des violences, il y
trouuera tousiours de la resistance, & lors

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qu’il parle du Souuerain, qu’il se souuienne
tousiours, que pour tenir le Roy prisonnier
le C. M. n’a aucun droict à la Souueraineté, si
l’on eut souffert les violences faites aux Officiers
du Parlement, on n’auroit plus veu
qu’vne continuelle prescription des gens de
bien, vne hideuse fourmilliere des François
dans les prisons ; & si son Predecesseur &
Compatriote fit dresser quelques gibets,
pour faire peur, le C. Maz. en auroit remply
toute la France pour faire du mal, & comme
il a mis aux fers plusieurs personnes sous tiltre
d’Aisez, quoy que la pluspart ruïnez ; il
en auroit fait mourir dauantage comme criminels,
quoy qu’innocens, pour auoir par
confiscation le reste des biens de tous les
François ; aussi crois je que sa fin sera plus tragique
que celle de Conchiny.

 

p. 13. Les importans seruices rendus à la
Reine par vn grand & sage Prelat, ont esté les
premiers obtacles à l’establissement du C. M.
& il creut ne pouuoir s’affermir aupres de la
Reyne, qu’en luy ostant ce fidel & ancien seruiteur ;
& par ce coup, il donna vn prejugé de
tont le mal qu’il deuoit faire ; aussi vit on
aussi-tost la Cour changer de face & de langage,
& les plus sage, & les plus gens de bien
predirent vne partie des maux que du depuis
nous auons souffert.

-- 21 --

Cette page n’est qu’vne continuelle bagatelle,
indigne d’obseruation & de responce, & il finit
ce fatras, en meslant come cy-deuant, la Politique
auec l’Oeconomique, sans en faire la distinction,
qui est toûjours à faire en ce rencontre.

p. 14.

Il se mesle d’authoriser les emprisonnemẽs d’vn
Prince & d’vn Officier de la Courõne, quoy que
toute la terre en connut l’injustice, & que le Roy
par ses Declarations en aye marqué l’innocence.

p. 15.

Il croit auoir grande raison de parler de la necessité
qu’on a eu d’augmenter les imposts, nous
voulant persuader, que ce n’estoit pas pour satisfaire
à l’insatiable auarice du C. M. comme si
nous deuions plustost deferer à la fausseté de sa
plume, qu’à la verité des témoignages qu’en a
rendu la Chambre des Comptes, qui verifia
qu’on auoit leué sur le peuple cent quarante-quatre
millions, & qu’il n’en falloit que trente-six
pour payer entierement les troupes, la Maison
du Roy, les Officiers, les Pensions, & generalement
toute la despense, & aux plaintes de
tous les interessez qui n’en ont rien touché

p. 16.

Cét Apologiste veut descharger le C. M. du
blocus de Paris, pour en charger S. A. R. & le
P. de Condé ; & toutefois chacun sçait que la
bonté de l’vn, & le courage de l’autre n’ont fait
que luy prester la main, croyant qu’il y alloit du
seruice du Roy, quoy que depuis ils ayent bien
connu qu’ils luy auoient innocemment aidé à

-- 22 --

executer vne vengeance qu’il auoit medité dés
la premiere opposition qu’on fit à sa violence ;
& si son dessein de fuïr n’estoit que pour ne point
voir les maux qu’il causoit, plustost que la crainte
du chastiment qu’il attendoit, pourquoy est-il
reuenu, & pourquoy ne s’en va-t’il pas, pour ne
reuenir iamais, puisque par son funeste retour il
nous a plongé dans de plus grands desordres, &
dans des maux desquels nous n’esperons sortir
que par le moyen de quelque heroïque Main,
qui nous fera present de cette Teste, si precieuse
dans l’esprit de ce Menteur.

 

p. 17.

Qu’il garde ses victimes pour d’autres que pour
nos Prince, c’est vne beste immonde, qu’on ne
peut immoler aux Protecteurs du bien public,
mais plustost à son Moloch, où on ne luy dõnera
point d’autre Sacrificateur qu’vn Bourreau ; &
qu’il n’aye pas la temerité de vouloir approuuer
leur detention, & condamner leur innocence,
contre ce qu’il a paru par la suite, & par la Declaration
du Roy verisiée au Parlement, s’il ne
veut qu’on le croye Mazarin à vingt-cinq carats.

Les feux de ioye qui ont marqué le ressentimẽt
des maux, & des fourberies que le peuple a souffert,
doiuent faire apprehender au C. M. de tomber
entre ses mains, puis qu’il est persuadé qu’il
en est le premier mobile ; & si il a instamment demandé
la liberté des Princes, ça esté pour auoir
des Protecteurs, qui le garantissent de sa tyrannie,

-- 23 --

qui se réueilla insolemment par le succez de
l’affaire de Rethel, de laquelle il s’attribua toute
la gloire, quoy qu’il n’y eut aucune part ; & qui
luy donna l’impudence de parler méchamment
des Grands, du Parlement, & du peuple en la
presence de S. A. R. pour en faire naistre au Roy
vne auersion, pour lequel seul crime (dont la
consequence est tres-pernicieuse) il merite tous
les supplices imaginables.

 

p. 18.

Ie ne peux tomber dans son sens, non plus que
pas vn hõme de sens, car ie craindrois qu’on ne
m’accusast d’auoir perdu le sens comme cét interessé,
lors que tout Parisien qu’il se dit, il parle
de tous les maux que i’ay déduit auec autant de
froideur & d’insẽsibilité, que s’il traitoit de quelque
question de Physique, ou de quelque autre
entretien d’Escole, mais bien plus il semble y
mesler la raillerie, & parle de ces Illustres prisonniers,
qu’il appelle tres grands Genies de
la Guerre, du Conseil, & de l’Eglise, pour
rendre leur emprisonnement plus celebre, &
l’Autheur de cét attentat plus insolent.

Si son Mazarin estoit vn grand Medecin, ou
vn excellent Politique, nous n’aurions pas veu
de, si notables fautes que celles qu’il a faites ; &
les cruelles & inconsiderées seignées qu’il a fait
dans l’Estat, marquent assez qu’il n’est qu’vn
Charlatan, & vn Empirique ignorant, qui a peu
de soin de remettre l’Estat en santé, en force, &

-- 24 --

en vigueur, pourueu qu’il satisfasse à son ambition
& à son auarice ; & pour ces raisons, ce lasche
Aduocat deuoit taire cette comparaison.

 

p. 19. A quoy tout ce qui suit, à quoy cette cheute
de murailles, à quoy ce Dragon qui de sa
queuë entraisne des Estoiles, à quoy ces Montagnes
frappées, à quoy ce debordement des
eaux ? est-ce pour nous persuader que le Cardinal
Mazarin est l’Antechrist ? cela est superflu,
nous n’en doutons pas, sa honteuse & sale
naissance, ses crimes, & les maux qu’il nous
fait souffrir, les richesses qu’il a, & les adorations
qu’il demande, nous en ont suffisãment éclairci.

Ie prie le Lecteur de considerer, comme ce lâche
Partisan du C. M. ne peut dissimuler son attache ;
il met le Ministeriat à l’encan, il y fait interuenir
des concurreurs auec son Maistre, &
veut qu’il l’emporte sur tout le reste des hõmes,
luy qui n’a rien au dessous de luy que ce vilain &
infame Escriuain, qui ne sçauroit donner au C.
Maz. vn meilleur conseil, que de sortir pour iamais
du Royaume, afin que toutes les creatures
ne s êleuent contre luy, & ne le fassent perir, &
qu’on ne se souuienne plus des maux qu’il nous
a fait, & qu’on puisse dire qu’il a esté capable
vne fois en sa vie de quelque chose de bon, puisque
cét Escriuain est Predicateur, qu’il luy inculque
l’exemple de Ionas, il fera bien mieux que
de perdre du temps par son Apologie interessée.

-- 25 --

Si le Cardinal Mazarin auoit gardé vne mediocre
judice, dans la distribution des graces,
que la faueur du Roy luy a donné ; Il auroit peu
ou point d’ennemy pour ce regard : Mais ce qui
est conneu à tous, & qui a esté dit cy-deuant
fait voir le mensonge de son Aduocat, qui attribuë
tousiours à la force de son esprit, ce
qu’il doit à la bonté de la Reyne & à la jeunesse
du Roy, desquels la protection qu’ils donnent
à ce Ministre, est totalement ruineux à l’Estat ;
& lequel est plus accusé de s’estre aquis ce bõheur,
par l’vsage des charmes, que par aucune
qualité naturelle ; puisque d’vn commun accord,
on ne luy en trouue aucune de recommandable.

p. 21.

Il ne faut que se souuenir de la perte de Gralines,
du Catelet, de la Capelle, de Trin, & de
tant d’autres places ; Il ne faut que voir comme
celles de Barcelonne, de Cazal, & de Donquerque,
sont ineuitables, pour juger si le defenseur
du M. est receuable & veritable ; & si l’on est mal
fõdé, de l’accuser d’intelligence auec les Ennemis,
auec lesquels il se veut bien mettre, pour
trouuer vn Azile, quand Dieu aura exaucé nos
vœux, & donné la force à nos armes, de le
chasser de ce Royaume, si on ne luy fait finir
ces iours honteusement.

-- 26 --

Il fait le Predicateur, & auec raison ; les
Gens de bien, & d’honneur sont d’accord
auec luy, touchant la medisance ; & puis qu’il
a commancé à prescher, qu’il acheue, & qu’il
exhorte son Mazarin à son deuoir, qu’il luy
fasse ressouuenir que malheur à celuy par qui
scandale arriue ; & qu’il luy conseille de se retirer ;
Il verra que l’ordre, prenant la place des
desordres, que causent la presence du Cardinal
Mazarin, l’on empeschera bien ces chansons,
& toutes les choses qui se font contre
l’honneur, & le respect deu aux Souuerains.

p. 22.

I’ay desia respondu à ce qu’il dit, touchant
les moyens du retour du Cardinal Mazarin,
qu’il ne faut attribuer qu’au pouuoir que la
Reyne a sur le Roy, à la tendresse respectueuse
de S. A. R. aux intrigues des Partisans interessez
au retablissement de ce Cardinal, & à l’obeïssance
des Peuples, qui ont espere que le
Roy la recompenseroit en renuoyant cet Ennemy
de sa Majesté & de l’Estat.

p. 23.

Qu’il ne mette pas de difference, entre ceux
qui ont chanté nous ne voulons pas de Mazarins ;
Toute la France a esté de ce concert, à
la reserue de ce flateur, & de ses semblables,
& si l’on n’a pas veu le Riche, auec le Pauure,
crier dans les ruës, c’est par ce que cela ne se

-- 27 --

voit iamais, & que ceux-là font par retenuë,
ce que les autres ont coustume de faire auec
toute licence, s’il s’estoit trouué dans les Compagnies
des gens d’honneur, il auroit veu que
les entretiens alloient à mesme fin, & sans Cabale :
Cette façon d’agir n’est bonne que chez
les Mazarins : Il n’en faut consulter que les Manes,
de la Raliere, qui tascha de gagner le Bateliers,
quand on ramena ce Bateleur de Compiegne.

 

Il marque icy fort ponctuellement tous les
moyens que le Cardinal Mazarin a pratiqué,
pour s’aquerir les Partisans, & exciter les seditions,
comme il a fait en plusieurs rencontres,
que ie tais, parce que tout le monde les sçait, &
que ie suis desia trop long.

p. 23.

Il se trompe au commencement de cette Page,
car bien qu’il n’y aye que trop de cette Mazarinaille,
ils ne sont pas en si grand nombre,
que si l’on vouloit faire main basse, il n’y en auroit
que pour vn dejeuner.

p. 24.

C’est à la suite de cette Page, où ie prie le Lecteur
de considerer, quel personnage fait ce
pretendu Predicateur, voulant mettre tout en
vsage, pour le seruice de son bon & genereux
Maistre : Il blasme les Confreries, & les assemblées
que font les personnes deuotes, pour trouuer

-- 28 --

le moyen de donner du pain aux pauures,
ausquels le Cardinal Mazarin a tout esté ; & ne
voye pas que par ce moyen, il declare pour ennemis
de son Maistre, tout ce qu’il y a de gens
remplis de pieté, de charité, & de toute sorte de
vertus ; & veut oster la vie, en empeschant l’aumosne,
qu’on ordonne à ces pauures miserables,
ausquels le Cardinal Mazarin a oste tout
le bien : Cet homme qui blasmoit maintenant
la medisance, parce que le Cardinal Mazarin en
estoit l’objet, s’emporte dans vn torrent enragé
de haine, à blasmer, & reprendre l’ordre qu’on
apporte, pour la distribution des aumosnes,
accusant les vns d’ignorance, & les autres d’infidelité.

 

p. 26.

Il poursuit tousiours dans ces mesmes pensées,
qu’il accompagne d’vne insuportable hardiesse
de traiter nos maux d’imaginaires, contre
tout ce qui paroist trop reellement, & acheue
en rantrant dans les speres lumineuses de ce
Rayonnant Ministre, qui n’a de feu que pour
que pour embraser l’Estat.

p. 27.

Il continuë, & donne au C. M. ce que l’on
doit aux solides raisons, de quelque peu de gens
de bien, qui ont l’honneur d’estre aupres du
Roy, & dans ses Conseils ; par lesquelles on a fait
connoistre à sa Majesté, quels maux nous causeroit

-- 29 --

ce retour mal-heureux.

 

p. 28.

Il veut que le C. M. aille du pair, voire-mesme au
dessus du Cardinal de Richelieu, il a raison en vn
point, c’est qu’ils n’ont iamais rien valu tous deux,
& que ce fut esté vn grand bien à la France, s’ils eussent
estez abortifs : mais au reste la differance y est
notable, en ce que le Cardinal de Richelieu estoit
Frãçois, sçauãt, & habile ; & celui-cy vn Italien, sujet
du Roy d’Espagne, ignorant, & le plus fat de tous
les hommes ; & qui n’auroit iamais eu aucune part
dans les Conseils du Roy, s’il n’auoit comme il a
desia esté dit, employé des moyens surnaturels, punisables,
& damnables.

p. 29.

Ie ne suis pas Mazarin comme il paroist, (Dieu m’en
garde) mais ie ne luy cõseilleray pas comme son Apologiste,
de chercher à se justifier, car s’il s’y presente
dans les formes, & qu’on laisse la liberté aux Iuges,
ie gageray qu’on le verra.

 


Dans peu sur vne Rouẽ
Au Ciel faire la mouë

 

p. 30.

Il ment icy à son ordinaire, nous voulant tousiours
faire croire, que le C. M. a eu toutes les non noissances
necessaires, pour la conduite de ce grand Estat, &
pour discerner les differentes humeurs, des peuples
de ce Royaume, estant veritable, que iamais homme
ne s’y prit si mal, & que cela fur le commancement
de l’auersion generale, qu’en ont conçeu tous
les François.

-- 30 --

La suite confond, & deshonore tousiours de plus
en plus, la conduite du Cardinal Mazarin, & marque
puissamment, que la haine des François, est fondée
sur les maux que son insuffisance, & sa cruauté leur
a fait souffrir, & qu’ils seroient dãs vn horrible desespoir,
s’ils n’attendoient de la misericorde de Dieu,
qu’aprés les auoir suffisamment chatié, il fera perir
l’instrument de ses vangeances, & le fleau auec lequel
il les a voulu punir, & c’est ce qu’attendent tous les
gens de bien, & pourquoy ils dressent continuellemẽt
vœux au ciel.

p. 31.

Dans la fin de cette page, il a grand peine a donner
quelque part à Dieu, de tour ce qu’il donne au Cardinal
Mazarin, en disant, c’est luy enfin pour ne pas dõner
tout à la sagesse & prudẽce humaine du Cardinal
Mazarin, & par l’a l’on doit juger de la Sainteté de ce
Predicant ; & comme il agit en desinteressé, & que
puis qu’il a peine à donner à Dieu vn sacrifice de loüãge,
ce que les Princes, & les gens de bien ennemis
du Cardinal Mazarin, doiuent attendre de cette ame
venale.

p. 32.

Il poursuit en faisant l’Orateur, le Predicateur, le
le Prophete, le Medecin, & l’Astrologue ; & fait plûtost
vne montre de sa vanité, de laquelle son esprit
est tout boursouflé, que de la fidelité de laquelle vn
Escriuain doit estre remply : Et semble en apres estre
marry, de ce qu’il y a encor quelque coin en France,
qui n’a pas souffert les desordres des Troupes du Cardinal

-- 31 --

Mazarin ; mais ie crains fort, que sa plainte
n’aye plus de lieu ; & que si le Roy n’a la bonté d’escouter
les nostres, il n’y aura nulle patt dans l’Estat,
ou ce serpent furieux, n’aye vomi son empesté venin.

 

Il finit par vn vœu conforme au nostre en apparence,
mais tres-notablemens different, en ce qu’il
se prepare, à plier sous telles mains, qu’il plaira au
Roy ; & qu’il prie Dieu pour la conseruation de ses
Ministres ; & nous, nous en excluons le Cardinal
Mazarin, & ses mains rapineuses ; & ne luy donnons
dans nos prieres, que tout ce qu’il en peut pretendre
du Christianisme, pour sa conuersion, & le salut de
son ame ; nostre ressentiment, n’allant pas iusques à
blesser nos consciences, ny le respect, & l’obeïssance
que nous deuons au commandement de Dieu.

La derniere ligne de ce vœu, est selon nostre esprit,
& nous prions le bon Dieu tres-ardemment, & de
tout nostre cœur, qu’il luy plaise par sa Bonté &
grande misericorde, de donner la tranquillité au public,
le repos au Royaume, & la paix à tout le Christianisme ;
& par addition qu’il luy plaise donner au
Roy, vn bon, fidel & salutaire Conseil, dans lequel
son Saint Esprit, puisse tousiours presider, à la gloire
de Dieu, au salut du Roy, & pour le bien public.

C’est icy que ie finis, en priant le Lecteur, d’excuser
ma longueur, & de considerer, que si j’auois voulu tout
examiner articulément, il auroit fallu employer des volumes,
& cette sorte d’ouurage qui se fait, & qui se lit
tousiours auec precipitation, ne demande pas cette estẽduë,

-- 32 --

& qu’il considere en apres auec moy, ce que peut
l’interest sur vne ame venale, dequoy est capable vn
lasche flateur, vn Aueugle adorateur de la Fortune ; puisque
la bassesse, & l’aueuglement, va iusques à vn tel
poinct, qu’on ne regard pas de quelles mains on reçoit
les presens de cette inconslante, & qu’on s’expose à tout
pour n’atraper peut estre du vant, & que dans vn temps
ou toute la France souffre, & se trouue à la veille de sa
totale ruine, par la Tyrannie du Cardinal Mazarin ; Il
se trouue vn homme qui se dise Parisien, & qui a l’impudence
de faire le Panegyrique, du plus meschant, &
du plus cruel de tous les hommes, dans l’esperance
d’attraper quelque Benefice, ou quelque Bijou, comme
celuy qu’il a desia attrapé ; voulant par cette pompeuse
production de son oysiueté, reueiller la lethargique
mesquinerie du Cardinal Mazarin ; & tascher d’en
tirer quelque chose par forme testamentaire, le croyãt
à la fin de sa vie, ou de son credit ; & pour cette raison,
il sort de la raison ; & du sentiment, de tout ce qu’il y a
de gens de bien, de raisonnables, & de bon François.

 

Quant à moy que l’interest n’a peu encor fleschir, ny
faire flechir le gedoüil deuant cét Idole de Dagon, j’exhorte
tous les bons François à reprendre de nouuelles
forces ; & à s’vnir tres-fortement, pour la détruction de
ce Monstre, & de tous ses Adherans, protestant que j’y
contribueray, tout ce qui me sera possible ; & que ie cesseray
plûtost de viure, que de cesser d’estre ennemy mortel de tous
les Mazarins.

FIN.

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Anonyme [1652], LE VERITABLE CONTRE LE MENTEVR. Mentita est iniquitas sibi Psalm. 26. , français, latinRéférence RIM : M0_3926. Cote locale : B_10_8.