Anonyme [1652], LES QVATRE NOVVELLES TRAHISONS DESCOVVERTES TRAMEES, A PONTHOISE Par le Cardinal Mazarain & ses Emissaires. , françaisRéférence RIM : M0_2936. Cote locale : B_12_36.
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LES QVATRE NOVVELLES
TRAHISONS
DESCOVVERTES
TRAMEES, A PONTHOISE
Par le Cardinal Mazarain &
ses Emissaires.

A PARIS,

M. DC. LII.

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LES QVATRE NOVELLES
Trahisons descouuertes, tramées
à Pontboise par le Cardinal
Mazarain & ses Emissaires.

QVELQVE desir que nous ayons de la
Paix, nous deuons pourtant la craindre
lors qu’elle est plus dangeureuse que la guerre.
Il est tres certain que le Conseil dont la Royne
& le Cardinal Mazarin sont les chefs a resolu de
perdre Paris, & s’il se trouue quelqu’vn qui reuoque
en doute cette verité il n’a qu’a faire reflexion
sur la conduite de la Cour, & voir les
moyens dont elle se sert ou pour le ruiner en
peu de temps en le surprenant, ou pour l’afoiblir
peu à peu & renouueler l’Hystoire de Charles
5. qui fit emporter les chaisnes dans Vincennes,
desarmer les Parisiens & apres les auoir
fait mourir tous de peur dans l’Isle du Palais en
fit pendre grand nombre dans les Hasles.

Pour empescher que les Bourgeois ne contribuent

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la taxe qui a esté ordonnée dans l’assemblée
de la Maison de Ville. On fait publier par
leurs Emissaires la Paix, & neantmoins nous
ne voyons que des aprests & des preparatifs
pour nous perdre.

 

I. Par Lettres du Cachet du Roy toutes les
Cours sont ou interdites ou trãfferées hors de la
Ville, afin de l’espuisser d’argent on a estably
des Bureaux à tous les enuirons où ceux qui portent
des viures sont rançonnez faisant payer
quatre liures pour chaque sac de Bled qui est
amené à Paris, & pour tesmoigner que la Cruauté
a preualu contre l’auarice.

Il a esté donné vn Arrest le 13. du present
mois par lequel il est deffendu sur peine de la
vie de porter des Bleds ou autres viures à Paris.
Apres ce cruel Arrest qui condamne tant de
millions d’hommes à mourir de faim, les Bourgeois
de Paris, seront si credules que d’adjouster
foy aux paroles de quelques traistres qui ne
machinent que nostre perte.

II. Apres cette trahison il s’en est decouuerte
vne autre, deux Officiers de l’Artillerie estant
entrez dans la Ville & s’estant logez dans l’Arsenac
auec l’ayde de quelques Emissaires, qui
sont en tres grand nombre en cette ville auoiẽt
complotté de faire entrer les Troupes du Mareschal

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de Turenne par l’Arsenac, où l’on a trouué
60000. gros doubles pour estre marqués &
deuoient estre mis pour trois deniers.

 

En suitte de cette trahison qui fust decouuerte
le 14. vn autre autant ou plus dangereuse
a esté decouuerte dans la Maison de Ville.

La Cour a fait toucher à vn Conseiller dudit
Hostel 45. mille liures pour gaigner les voix de
ceux qui deuoient deliberer dans l’assemblée
s’il falloit laisser la nomination des Escheuins à
la disposition de la Cour selon l’Arrest de Ponthoise,
ce Conseiller auoit déja distribuë 15.
mille liures lors qu’il fut descouuert auec vne
Lettre de Cachet du Roy, mais nonobstant cette
trahison deux Marchands de Fer à sçauoir
Messieurs Geruais, & Horry, furent Esleux &
conduits par le Gouuerneur de Paris, Monseigneur
le Duc de Beaufort & Monsieur de Broussel
Preuost des Marchands au Luxembourg,
où ils presterent serment de fidelité à son A. R.

Le President Chartron lequel auoit paru si
zelé pour le bien public ayant esté gaigné par
le Coadjuteur est deuenu vn Emissaire Mazarin
& comme il est homme d’authorité & vn des
seize Cononels il pretendoit à l’Office de Preuost
des Marchands, le Coadjuteur luy auoit
fait esperer cette dignité croyant de persuader

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son A. R. de le preferer à Monsieur de Broussel
[1 mot ill.] raison de la vieillesse de l’vn & du courage
martial de l’autre, neantmoins ce President
ayãt esté rebuté de depit qu’il en a eu a diffendu
aux Officiers de son Regiment de payer la
taxe ordonnée par l’assemblée de la Maison de
Ville.

 

IIII. Encores qu’il ny ayt aucune apparence à
l’esloignement du C. Mazarin hors de France,
sans espoir de retour & conformement à la Declaratiõ
& aux Arrests dõnés contre luy neantmoins
on le publie & la plus part le croyoient
par ce qu’on le voudroit qui amant sibi somma
figunt mais ceux la ne le croyront pas qui viendront
à considerer. [illisible] que le C. traitte le Mariage
de ses deux Niepces auec le Duc de Candal,
& le Marquis de la Melleraye, 20. que sa
retraitte à Metz, est impossible veu l’opposition
que le Chapitre de l’Eglise Cathedrale a
fait sur sa permutation pretenduë alleguant ledit
Chapitre ses Priuileges qui sont que la nomination
de leur Euesque leur appartient que
le Roy Henry le Grand, leur a confirmé ce Priuilege
leur ayant demandé ladite Euesché pour
Monseigneur Henry de Bourbon son Fils, &
que le C. Mazarin ne peust estre nommé à ladite
Euesché, sans enfeindre les Status de leur

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Eglise qui portent que l’Euesque doit estre
Noble de trois races, & que le Mazarin est fils
d’vn pauure l’aridon de Sicile.

 

Pour rompre tous les bons desseins des
Princes, La Cour fait semblant d’entendre à la
Paix Generalle & se dispose pour conduire le
C. Mazarin à Compiegne & fait courir le bruit
qu’on doit traitter la Paix Generale à Peronne,
cependant l’Archiduc Leopold, a protesté ne
vouloir point traitter de la Paix qu’auec sa Majesté,
les Princes & le Parlement & non point
auec le C. Mazarin, cette fourbe est appuyé
d’vne trahison que le Coadjuteur à tramé auec
Monsieur de Chasteau-neuf, les Duchesses de
Cheureuse, & d’Eguillon, leur dessein est de
persuader, Monsieur le Duc d’Orleans, de s’acheminer
à la Cour apres le departement du
C. Mazarin & sont tous leurs efforts de le detacher
des interests de Monsieur le Prince son A.
R. auoit quasi presque esté surpris par leurs ruzes,
& Monsieur le Prince commençoit à songer
à se retirer en Guyenne, quelques vns mesmes
de ses Officiers estoient partis. La Reine
auoit escript vne Lettre à Madame la Duchesse
d’Orleans, par laquelle elle luy donne à entendre
quelle persuade Monsieur d’effectuer la parolle
que son A. R. auoit donnée d’aller trouuer

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aussi tost que le C. Mazarin seroit hors de
France l’asseurant que le Roy partyroit le 19 du
courant. Les Emissaires du C. Mazarin ont trauaillé
pour faire l’accord du Coadjuteur auec le
Duc de Beaufort, on a voulu diuiser les Princes,
Mais ils sont plus vnis que jamais.

 

La Cour n’a d’autre dessein que de perdre
Paris, mais les Parisiens estant vnis n’ont rien à
craindre & quoy que le C & la Reine, le Coadjuteur
& la Cheureuse puissent mettre ville-Iuif
dans Ponthoise, qu’ils sachent que Paris est
trop grand pour l’y faire contenir tout entier.

FIN.

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