Anonyme [1649], ODE SVR DOM IOSEPH DE ILLESCAS PRETENDV ENVOYÉ DE L’ARCHIDVC LEOPOLD. , françaisRéférence RIM : M0_2582. Cote locale : C_8_3.
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ODE
SVR
DOM IOSEPH DE ILLESCAS
PRETENDV ENVOYÉ
DE L’ARCHIDVC
LEOPOLD.

Mil six cens quarante-neuf.

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ODE SVR DOM IOSEPH
de Illescas, pretendu enuoyé de
l’Archiduc Leopold.

 


Espagnols nos bons amis,
(Au moins si l’on vous veut croire)
Ce que vous auez promis,
Est-il fable ? est-il histoire ?
Vous nous aimez, dites vous ;
Donc les brebis, & les loups
Sont en Paix dans la Campagne ;
Et l’on sçait en toutes pars,
Que le fiers Lyons d’Espagne.
Ne sont plus que des renards.

 

 


En vain pensant nous tromper,
L’on nous fait ce beau message,
Car pour se laisser dupper,
Toute la France est trop sage,
Vous pouuez en vn moment,
Reprendre facilement
Tant de villes occupées ;
Cependant, vous aymez mieux
Offrir mesmes vos espées,
Et vous soûmettre en ces lieux.

 

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O fourbes ! l’on voit auiour
Le motif de vos grimaces ;
Quoy ! les Huissiers de la Cour.
Ont-ils les clefs de vos Places ?
Rare exemple d’amitié !
Vn Mineur vous fait pitié,
Le peuple oppressé vous touche ;
Hypocrites, scelerats,
Dont le cœur dement la bouche,
Paris ne vous croira pas.

 

 


Dom Ioseph (sauf le respect
Que l’on doit à l’ambassade)
Ma foy vous m’estes suspect
De donner vne cassade ;
Vous le diray-ie en vn mot ?
L’Espagnol n’est pas si sot,
Que de passer la frontiere ;
Et s’il cherche le cercueil,
La France est vn Cimetiere
Bien digne de son orgueil.

 

 


Mais pour vous ouurir mon cœur
(Sans pourtant qu’il vous desplaise,)
Ie vous croys fils d’vn Ligueur,
A grand busc, & grande fraise :
Vous estes mal-desguisé
François Espagnolisé,
Et malgré vostre impudence,
Cette belle inuention
De la lettre de Credence,
N’a fait nulle impression.

 

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Or Espagnol ou Francois
Ou tous deux, vaille que vaille,
Vous estes tout d’vne voix,
Sifflé iusqu’à la canaille ;
L’escharpe d’incarnadin,
Ne pare en vous qu’vn badin,
Qu’vn homme à timbre malade
Et de loing comme de pres,
Le peuple fait pettarrade,
Dés qu’il voit Monsieur, l’Expres.

 

 


En vain Monsieur l’Enuoyé,
Pour eterniser nos noises,
Vous auez tant employé
Les Marguerites Françoises ;
En vain, peu ruse matois,
En assez mauuais parois
Vous faites ce preambule,
Où vous parlez d’vn secours,
Aussi foible & ridicule,
Que l’est vostre beau discours.

 

 


Vantez moins superbement
La puissance de Castille ;
D’Espagne on veut seulement,
Des gans, & de la pastille ;
La France la connoist bien,
L’on sçait qu’elle ne peut rien,
Que sa foiblesse est extréme ;
Sans la mort de Richelieu,
Vostre Monarque luy-mesme
N’auroit plus ny feu, ny lieu.

 

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Ce genereux inhumain,
Qui defend que le pain n’entre,
De son inuincible main
Vous a frottez dos & ventre ;
Quatre fois ce fier heros,
Qui vient si mal à propos
Camper trop pres de Gonnesse
A veu fuïr deuant luy ;
Les troupes de cette Altesse,
Que l’on nous offre auiourd’huy.

 

 


Vous nous porteriez mal-heur
A son nom l’Espagne tremble ;
Et malgré nostre valeur,
Nous serions battus ensemble ;
Oüy, vous estes des mocqueurs,
Les vaincus & les vainqueurs
Ne vont point sous mesme Enseigne,
Et ie vous trouue plaisans,
De pretendre que l’on craigne
Ceux qui nous ont craints douze ans.

 

 


Vingt mille contre ses coups,
Ne feroient pas plus que quatre ;
Nous nous battrons bien sans vous,
Si nous auons à nous battre ;
Enfin, Seigneur Dom Ioseph,
Pour vous le faire plus bref,
Remontez sur vostre Mule,
Ou, d’vn Peuple mutiné,
Pour ce discours ridicule
Illescas sera berné.

 

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Allez manger vos oignons,
Parmy vos plaines steriles,
Ou, les mains sur les roignons
Vous panader dans vos villes ;
Mais ne parlez plus si haut,
Pour amuser le badaut ;
Que vostre Archiduc ne bouge ;
Car, pour ne desguiser rien,
Vne Escharpe blanche & rouge
Fait horreur aux gens de bien.

 

 


Ce dessein est criminel,
Et les François sont fidelles,
Bruxelles n’est pas Broussel,
Et Broussel n’est pas Bruxelles ;
Lors que nous faisons les fous,
Cela se passe entre nous
Ce n’est que vapeur de bile ;
Mais si vous vous faites voir,
A dieu la Guerre Ciuile,
Tout ira vous receuoir.

 

 


Vous verrez confusément
Auancer vers la frontiere,
Vieux corps, nouueau Regiment,
Caualier, Porte-Cochere,
Piquez d’vn juste courroux,
Tout marchera contre vous,
Messieurs à la mine have,
Et d’vn avertin saisi,
Le Courtaut, qui fait le braue,
Ira jusqu’à Iuuisi.

 

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Enfin, Espagnol douteux,
Ne contez plus ces sornettes ;
Qui les croit, entre nous deux,
A teste à porter sonnettes ;
Ridicules Capitans,
Nains qui faites les Titans,
Plains de foiblesse & d’audace ;
Bientost iusques à Madrid,
Nous irons vous rendre grace
Du secours qu’on nous offrit.

 

FIN.

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