Anonyme [1649], RELATION CVRIEVSE ET REMARQVABLE DE LA POMPE ROYALE DV IOVR DE LA SAINT LOVIS. Ensemble des Harangues & Ceremonies faites à nostre Dame: Et de tout ce qui s’est passé depuis l’heureuse arriuée du Roy iusques à present. , françaisRéférence RIM : M0_3103. Cote locale : C_9_23.
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RELATION CVRIEVSE DE LA POMPE
Royale du iour de la Saint Louis, & des Harangues
& ceremonies faites à Nostre-Dame ; Et de tout ce qui s’est
passé depuis l’heureuse arriuée du Roy iusques à present.

CE tres-celebre & renommé Philosophe
Pullion, en son sixiesme Liures des Gestes
des Romains, dit qu’vn tres-excellent
Peintre presenta à l’Empereur Octauian vn
Tableau, où estoient tirez en portraiture
tous les Roys vertueux, à laquelle representation cét illustre
Empereur tenoit le premier rang, ayant à sa gauche
Glycera la Bouquetiere, luy presentant vn bouquet richement
composé & embely d’vne grande varieté de
fleurs, pour symboliser ses hauts faits & genereuses actions,
assimilées dans la liaison de ces fleurs. Mais maintenant
il faudroit vn autre Peintre plus experimenté
dans l’Art, plus excellent qu’Appelles & plus sçauant
que tous ceux de l’Antiquité, pour nous representer par
la dexterité du peinceau, & par la delicatesse des traits &
par le coloris des peintures, la parfaitte Image de nostre
grand Monarque, sur le visage duquel paroissent les traits
de la diuinité & l’éclat & beauté de ses yeux, ne peuuent

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estre representez qu’artificiellement & non pas dans
leur lustre & excellence. A la droite de ce grand Monarque,
& non à la gauche comme Glycera, l’on voit cette
grande Reyne & tres-pieuse Princesse auec vn panier
emplit des fleurs les plus precieuses, plus agreables à la
veuë & les plus odoriferentes, leur verdeur, leur candeur,
leur colory & agreable beauté, symbolisent & éleuent
bien plus hautement les vertus heroïques de nostre
grand Monarque, que ne faisoit Glycera à l’Empereur
susdit par vn ramas de fleurs à demy flétries.

 

La Rhetorique n’a assez de figures, ny les plus éclairez
ny diserts. Orateurs assez d’élocutions ny déloquence
pour donner de suffisant éloges à la vertu, telle que possede
ce glorieux Monarque & fameuse Princesse, l’ornement
de ce siecle, le Prototipe & exemple de la Pieté,
& leurs actions paroissent plus Angeliques qu’humaines ;
car estant reuestus de corps, neantmoins (par vn
effet Prodigieux de la grace) ne se voit rien qui ne soit
éleué, & qui ne tienne du Diuin & spirituel. N’est-ce
pas vne merueille digne d’admiration de voir ce ieune
Monarque dans vn aage si tendre & iuuenale, de faire
des actions virils, appuyé d’vne prudence, qui donne autant
détonnement que de honte & confusion à ceux
qui croyent estre recommandables, tant par la longanimité
que de leurs charges & offices ; Et de voir ce ieune
Prince quitter ses plus innocens & legitimes plaisirs,
pour écouter & donner audiance à ceux qui luy representent
la misere de ces suiets, c’est vn parcroist d’admiration,

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& partant ie puis dire, qu’il commence de bonne
heure à diriger ses actions à l’imitation de Saint Louis,
duquel il est le surgeon (comme i’ay inceré au Triomphe
Royal de son arriuée,) afin de participer vn iour
dans sa felicité & beatitude consummée, mais d’autre
costé i’envisage cette illustre Princesse, les aduis de laquelle
ne sont pas moins salubres à ce glorieux Prince
de Dieu donné, pour la gloire de Dieu, pour l’acquit
de sa conscience & pour le bien public & repos de ses
Estats, qu’autrefois ceux que faisoit ce saint Roy à Iacques
son fils, & legitime successeur de son Royaume. Enfin,
il n’y a instruction que cette aimable Princesse n’imprime
dans l’esprit de ce grand Monarque pour le bien
de ses suiets, ayant moins de repos que le moindre de
tous, agissant incessamment pour diuertir les troubles
& établir vn regné de paix.

 

Quels sont donc les respects & sumissions que les sujets
doiuent rendre à ces Maiestez, & quelles en sont les
reconnoissances ? c’est ce que ie vais d’écrire briefuement
reiettans toute prolixité, mesme la matiere qui iroit iusqu’à
l’infiny, quoy que bornée dans sa durée.

Le Ieudy dix-neufiesme Aoust, lendemain de cette arriuée
Royale, toutes les Chambres de ce grand Senat
qui ne composent qu’vn corps de cette venerable compagnie,
s’assemblerent & allerent auec leurs grandes
robbes décarlate rendre leurs deuoirs & hommages
deuës à leurs Maiestez, qui furent envisagez de bon œil,
& sortirent grandement satisfaits, estans reconduits par

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l’ordre de le Reyne, par des plus grands Seigneurs du
Royaume, qui témoignerent vne grande affection pour
cette vertueuse Compagnie, qui agit perpetuellement
pour le repos public, & qui apporte tous ses soins pour
vne paix generale, qu’on espere bien tost ; puisque cette
glorieuse Princesse passionnée pour le repos du Royaume,
& poussée d’affection & d’vn zele charitable pour
ses suiets, fait tous les deuoirs d’vne bonne Reyne pour
cette precieuse pacification, & outre les Princes & Seigneurs
qu’elle employe, qui s’interesse en cette vnion
& reconciliation, elle importune encore le Ciel par ses
vœux & prieres, afin que viuants tous dans le repos &
dans vne societé Chrestienne & dans vn negoce fraternel,
le nom de Dieu soit loüé plus que iamais.

 

Le Vendre dy suiuant, cette autre Auguste maiestueuse
& illustre Compagnie de Sorbonne, composée de
Docteurs & Bacheliers conduits par le Recteur de cette
Vniuersité & sacrée Faculté, allerent tous ensembles,
auec leurs longues robbes & fourures au Palais Cardinal,
où estans ils firent vne tres-docte & éloquente Harangue
digne de l’attention d’vn si grand Roy et d’vne si Religieuse
Princesse, ces vertueux et tres-celebres hommes
qui n’ont rien de commun auec les autres, pour leur
sainteté, pour leurs bons exemples, que pour la sublimité
et profondeur de la doctrine qu’ils professent, estans
des flambeaux qui éclairent toute la Chrestienté, et dissipent
toute la caliginosité et nuage des heresies, ils firent
à leurs Maiestez des submissions tres-respectueuses,

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les coniurans par leur bonté Royale d’auoir commiseration
de leurs suiets, de leur donner au plustost vne bonne
paix & sainte reconciliation, afin que les affaires estant
en bon état, les armes Françoises puissent prendre
leurs visées droit au Leopard pour venger l’attentat &
horrible massacre de ces execrables & perfides suiets,
qui ont tyranniquement trampé leurs mains parricides
dans le sang innocent de leur Roy & Seigneur, & puis
apres ces glorieuses armes ayant vengé cette querelle,
elles pourront prendre vn essort iusqu’aux terres du
Croissant, pour exterminer cette maudite engeance, qui
vomit des imprecations contre Dieu, suiuis de sacrileges,
prophanations & impietez ; n’y ayant guerre mieux
faites, ny armes mieux employées, ny sang plus glorieusement
versé, que pour la querelle de Dieu, pour
laquelle, il faudroit exposer mille vies, & cinq cens mondes
si on en estoit possesseur. Apres auoir receu grande
attention du Roy & de la Reyne & témoignage d’affection,
& que leur visite leur estoit tres agreables ; ils s’en
retournerent tres contant & satisfais reconduits comme
dessus pareil ordre.

 

Le lendemain Samedy 21. Leursdites Majestez allerent
à Nostre Dame, pour rendre en cét auguste & celebre
lieu, leurs actions de graces, pour le bon succez des
affaires de ce Royaume, & pour les bons éuenemens &
bonne reception & tesmoignage d’affection de leurs Sujets,
& aussi pour impetrer de nouuelles graces pour l’obtention
d’vne tranquillité causée par vne fauorable Paix,

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& estans paruenuës en ce pieux & respectueux lieu, les
Majestez susdites furent aussi doctement que disertemẽt
haranguée par Monseigneur le Coadjuteur, où cét incomparable
Prelat ne manqua pas de rendre vn grand
tesmoignage d’affection, & n’oublia pas de representer
la misere publique, & les torts qu’auoient apporté à leurs
Estats les fauteurs de la guerre, & l’iniustice qu’auoit
receu vn Peuple tres-innocent & zelé pour leur seruice ;
& apres que sa Harangue fut finie & que ce docte
Prelat eut conclu toutes ses periodes, qui ne tendoient
qu’au repos de la France & pour la gloire de Dieu,
il se r’assit ayans ses habits Pontificaux, circonuenu de
tout le Clergé & Chanoines, fut faites de grandes ceremonies,
suiuies des prieres ordinaires & d’vne grande
Messe en Musique, entenduë deuotement par Leurs
Maiestez, à la fin de laquelle elles sortirent escortées du
Regiment des Gardes, entouré d’vne grande foulle de
peuple qui crioit incessamment, Viue le Roy, comme
aussi ceux qui remplissoient les fenestres qui estoient
tapissées, comme aussi les ouans, depuis le Marché-neuf
iusques audit Palais Cardinal. Et la Reyne receut vne
grande satisfaction du Peuple.

 

Le lendemain Dimanche, le Roy prit son diuertisse
ment comme aussi tous les Princes à voir dãcer Gilles le
Niais sur la corde, & à faire les sauts perilleux, à marcher
auec des eschasses éleuées de six pieds de haut, se promener
auec par dessus les imperialles des carosses ; auec vn
Ballet qui fut fait ensuitte par le mesme Gilles accompagné

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de Gazette ; Tous les spectateurs témoignerent
vne grande satisfaction à cét innocent diuertissement,
puis qu’il est commun à tout le monde ; Apres quoy, les
Acteurs s’en retournerent faire vn autre grand Ballet
qui est celuy des postures, au Theatre dressé prés la porte
du Temple.

 

Ie n’obmettray de dire que le Lundy suiuant, les Mariniers
& enfans de Neptune enuieux des honneurs
publics, & y voulans participer, ils s’assemblerent & firent
vn corps composé de plus de cinq cens, s’armerent
de crocs & bourdons, peints de blancs & rouges, enrichis
d’vne pomme à l’extremité majeure, reuestue en
or, ayans chacun vn pourpoinct de satin blãc, auec hauts
de chausses de riches estoffes, ayans sur leurs chappeaux
plusieurs liurées & gallands de diuerses couleurs, specialement
le rouge & le bleu, l’vn qui signifie l’affection,
& l’autre est celuy de la Royauté, ils marchoient en bon
ordre Militaire, Enseignes de taffetas blanc déployées,
Tambours battans, allerent audit Palais Cardinal rendre
leurs hommages à leurs Majestez, auec prieres de
leur departir vn don, pour la subrogation d’vn droict
Royal imposé sur les batteaux, lesquelles prieres furent
enterinées par ses bontés Royales. Ce qui donne beaucoup
de rejoüyssances à ces Compagnies mercenaires, &
apres cette issuë, d’autres y retournerent auec pareil ordre
& équipages, pour faire les remercimens conuenables
a vne telle liberalité, qui est vn preiugé, que si ce n’estoit
les vrgentes affaires martiales, que ce grand Monarque

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& illustre Princesse ne refuseroient les mesmes
liberalitez, que celles qui les mettent en estime, & rendent
recommandables parmy leurs Sujets.

 

Mais si ie laisse sous silence ce qui se passa le iour de
la saint Barthelemy (auquel iour le Roy alla disné à saint
Germain en Laye auec la Reyne d’Angleterre) c’est afin
de m’étendre plus au long & indiquer plus amplement ce
qui se passa le iour de la saint Louys feste de nostre grand
Monarque, sa pieté & sa deuotion iointe auec celle de la
Reyne, estoient comme ces deux astres lumineux dont
la nature en admire l’excellence, leurs Maiestez receurent
le Roy des Roys, & le Souuerain des Souuerains,
dans cette Metropolitaine Eglise de la Chrestienté, qui
est l’Eglise de Paris appellée Nostre Dame, les Princes qui
sont comme les Planettes parmy ces deux Astres, ont
esté témoins oculaires des deuotions Royales, qui doiuent
seruir d’exemple à ceux qui viuent dans l’infidelité,
& qui ne font paroistre qu’vne tiedeur dans le Christianisme.
C’est vn effet diuin quand l’on voit le Prince qui
gouuerne ses Sujets leur donner de bons exemples : car
ordinairement les enfans suiuent les prestiges & les bons
ou mauuais exemples des Peres qui les gouuernent.

L’apres disnée dudit iour sur les trois heures, leurs Majestez
allerent à saint Louys de la rue saint Anthoine, afin
d’y entendre les Vespres & le Sermon, les ruës estoient
tellement remplies de Peuples parmy la confusion
des Carrosses qu’à grand peine on pouuoit passer,
toutes les fenestres & ouans estoient tapissez comme i’ay

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ja dit, les voix animées d’vn nombre indicibles de poulmons
iointes auec celles des fenestres, faisoient vn Echo
iusqu’au milieu des nuës auec ces paroles viue le Roy, lequel
estoit monté sur vn petit cheual blanc, ayant vne
housse tissuë d’or, accompagné de plusieurs Princes &
Seigneurs qui estoient aussi montez sur des cheuaux de
haut prix équippez à l’auenant, & le nombre du monde
qui a paru, a semblé exceder celuy de l’arriuée Royale.
Sa Majesté estoit suiuie de tous les Princes & Princesses
du sang, à l’amboucheure de la Cousture sainte Catherine,
qui regarde l’Eglise saint Louys, & la grande place
prés la Fontaine y auoit vne si grande affluence de Peuple,
qu’on ne pouuoit se tourner, on y auoit dressé plusieurs
theatres, pour camper les spectateurs, qui estoient
tellement entassez que les échaffauts ne pouuans supporter
le poid de ceux qui y estoient, tomberent à bas, les
imperiales des Carrosses, les rouës, le deuant & le derriere,
mesme les cheuaux estoient surchargez de Peuples,
les marches & montées de ladite Eglise estoient si
extraordinairement remplies & couuertes de Peuples,
que les vns ne pouuans supporter les autres à force de
pousser, tomboient à bas, ce qui procedoit aussi de l’effort
des Suisses qui gardoient la porte.

 

Au deuant de ladite fontaine du costé des boucheries
de saint Paul, on fit iouër huict petits canonneaux auec
plusieurs petites boëtes, à l’aspect du Roy, lequel estant
prés d’entrer dans ladite Eglise, & entendant le bruit
qui s’accordoit auec l’agreable harmonie des Trompettes,

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(quoy qu’auec different ton.) Sa Majesté retourna
& voulu rassasier ses yeux, à la beauté qui paroissoit par
les bluettes de ce feu artificiel, que par la belle économie
& direction de ses Autheurs, & cette Majesté Royale
prist vn singulier plaisir & agrément, à entendre les exclamations
du Peuple, & à envisager à loisir vn si grand
nombre de bons Sujets, qui semblent n’auoir plus grand
contantement qu’en la veuë de leur Monarque, lequel
salua par diuerses fois le Peuple, mettant la main au
chappeau auec des remerciments de cet honneur ; Monsieur
de Montbazon le tenoit par la main droite ; à sa gauche
estoient Messieurs les Princes de Condé & de Conty,
auec d’autres Princes qui furent aussi long-temps que le
Roy à regarder la contenance du Peuple, Monsieur de
Beaufort estoit dans l’Eglise, la Reyne arriua aussi tost, le
Roy la prist par la main, & entrerent ensembles dans cette
Eglise, où leurs Majestez entendirent le Sermon &
les Vespres. Au partir de ce lieu le Roy s’en retourna
au Palais Cardinal, on auoit tapissé la place Royalle de
pareile tantures qu’au saint Sacrement, y auoit des chandeliers
& plaques sur les fenestres, tous entourez de perles
& diamans, qui faisoient admirer leurs richesses par
leurs brillants, croyant que sa Majesté y passeroit.

 

Le soir duquel iour pour cloture de cette Pompe Royale
on fit vn feu artificiel dans ledit Palais ; l’iniure du temps
n’empescha pas l’effect de cet agreable spectacle.

Hercule par ses longs trauaux & par ses peines, apres
sa mort, s’est acquis l’immortalité, & Auguste apres

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auoir sur monté les Espagnols, & remporté la victoire,
est retourné glorieux dans la ville de Rome, Alexandre
s’est vanté d’auoir possedé tout le monde : mais non pas
les cœurs, comme nostre grand Louys la fleur des Roys,
que Nerée vienne dans la France auec sa cheuelure dorée,
pour captiuer les ames, neantmoins ne fera aucune
impression sur les volontez comme cet illustre Monarque,
ce redoutable Hercule que i’ay cité a bien donné
de l’amour aux amateurs de sa valeur, mais il s’est rendu
odieux par sa propre estime, Philippe de Macedoine a
forcé beaucoup de villes, & subiugué des Roys, & corrompu
la foy des Capitaines, & gagné le cœur des Pirates
cruels, mais ces actions ont passé pour tyrannie, il
n’y a qu’vn seul Roy au monde, duquel les Fais & Gestes
passent pour Heroïques, qui n’est autre que Louys de
Dieu donné, qui dechassera dans peu de temps ce triste
accent de ce fatal oyseau nommé Pare, qui ne presage
par son chant lugubre que de tristes aduantures, ie veux
dire arrieres la crainte des troubles, puisque ce Prince
pacifique expulsera la guerre, aneantira la tristesse, & substitura
la Paix, & la fera voir iusque dans son Trosne, &
les prodiges les plus menaçans ne la pourront ébranler.
Ce grand Monarque promet dans ses ans vn regne d’Auguste,
faut-il s’etonner si les Peuples s’empressent pour
voir à qui mieux mieux, pour contempler la face de cet
aymable Seigneur, la naissance duquel est toute miraculeuse ?

 

Adieu les aueuglez mouuemens & boutades d’Eurus,

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& des vents pestilentiels, qui ont voulu submerger le
vaisseau, lorsque ces Montagnes d’eau bouffies de gloire,
batoient furieusement les riues de la Seine, & lorsque
les flots creuans d’orgueil, venoient rompre contre
les escueils. A Dieu pour la seconde fois, puis qu’vn
agreable vent Oriental a dissipé ces funestes tempestes,
qui ont paru iusqu’à l’excés, maintenant ce bel Astre,
sa presence plus transparante que l’Aurore dechasse tous
les orages, au grand contantement de tous les Nautonniers,
c’est dequoy ils se coniouïssent & congratulent, &
les motifs de remerciment, & actes de recognoissance
enuers cet agreable Flambeau, qui est inextinguible &
qui a vne beauté inestimable, est qu’en déchassant les tenebres,
il apporte le iour.

 

Que Littagus vn des sept Sages de Grece & cet excellent
Poëte Alcée chantent tant qu’ils voudront la gloire
d’Ephese & de Corinthe, pour moy ie ne desisteray iamais
de publier la gloire du Roy, & feray tant par mes
fais, qu’vn iour à la faueur du Ciel & de quelque amy,
il se souuiendra du nom de Rozard ; puisque ie n’ay autre
passion, que de me faire cognoistre de mon Roy &
vnique Seigneur dans le temps.

Mais pendant que ie fais vn si long proiet, ie fais inspection
sur Compiegne, laquelle ie vois auec autant
de duëil, que Paris est comme absorbé dans la ioye, cette
desolée ville se prostituë, dans les chants Lugubres,
pendant que Paris se consomme dans la ioye : aussi cette
petite cagote n’estoit pas digne d’enfermer dans l’enceinte

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de ses murailles vn si grand Roy, ie ne puis m’empescher
de dire par Analogie, que c’est comme vn petit
Bethleem ; qui n’eut la vision de Paix, & le Seigneur vniuersel
qu’vn temps momentané. Mais Hierusalem c’est
à dire Paris, possedera tousiours ce grand Monarque,
Que Compiegne & les autres villes pleurent incosolablement,
& qu’elles se noyent si bon leurs semble dans
l’amertume de leurs larmes, neantmoins elles seront
priuées de ce riche depost & de ce precieux ioyau.

 

L’on parlera à iamais de ce glorieux Triomphe, &
des deuoirs rendus par de si bons Sujets, qui ont attiré
par leurs deuoirs & submissions, l’amitié & bien-veillance
de leur Roy, auquel soit honneur & gloire à iamais.

FIN.

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