Anonyme [1652], TRES-HVMBLE REMONSTRANCES FAITE AV ROY ET A LA REYNE : PAR MESSIEVRS LES GENS du Roy, Deputez par la Cour de Parlement, pour le traicté de la Paix. , françaisRéférence RIM : M0_3820. Cote locale : B_16_41.
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TRES-HVMBLE REMONSTRANCE
faite au Roy & à la Reyne par
Messieurs les Gens du Roy, Deputez de
Messieurs du Parlement, pour le traitté
de la Paix.

SIRE,

Les Officiers de vostre Eslection
de Paris, viennent des derniers se prosterner aux
pieds de vostre Maiesté, & luy rendre leurs tres-humbles
submissions : Mais si le rang leur auoit
esté donné suiuant le zele & l’affection qu’ils ont
pour vostre seruice, ils auroient esté des premiers
à s’acquitter de leur deuoir.

Ils sont icy pour tesmoigner à Vostre Maiesté
la part qu’ils prennent à la resiouïssance publique,
& luy faire entendre les esperances qu’ils ont conceuës
du succés fauorable de vostre Regne. Vostre

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Estat durant vostre Minorité, ayant esté tres-dignement
conduit par les soins & prudens conseils
de la Reyne, Nous voyons à present, auec
ioye, Vostre Maiesté, dés le premier moment de
sa Maiorité, nous asseurer de sa propre bouche,
qu’elle va prendre les resnes de son Empire, & le
conduire auec pieté & iustice. Cette resolution,
SIRE, est digne d’vn Roy Tres-Chrestien, d’vn
descendant de Sainct Lovïs, d’vn petit fils de
HENRY LE GRAND, & d’vn legitime heritier de
Lovïs LE IVSTE. Ces deux vertus si necessaires à vn
grand Prince, seront l’appuy & l’affermissement de
vostre Couronne : La Pieté vous doit rendre agreable
à Dieu le Protecteur des Rois, dont l’assistance
ne vous manquera iamais ; & par ce moien vous
attirerez sur vostre Roiaume la benediction du
Ciel, & l’abondance de la Terre. La Iustice vous
fera regner dans le cœur de vos Suiets, la faisant
garder, vous releuerez l’espoir abbatu de tous
les Ordres de vostre Estat, & particulierement
de ceux qui sont contribuables aux Tailles
& Subsistances. Permettez-nous, SIRE,
de faire voir à Vostre Majesté, l’estat mal-heureux
de ces pauures miserabes, & comme la
pauvreté, la misere & la faim, les ont reduits
aux dernieres extremitez. Ces mal-heureux,

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dont l’industrie & le travail apporte les
richesses & l’abondance par tout ; qui sans qu’il
soit besoin d’aller courir aux Indes, font sortir
de la terre des tresors qui remplissent vos coffres,
se trouuent à present en telle necessité, qu’ils
sont contraints de broûter l’herbe comme des
animaux. Cependant, SIRE, & Roy ce sont
vos Subjets, & vostre Majesté qui est obligée tant
par sa Pieté que par sa Iustice de les proteger, &
de ne permettre pas qu’ils soient entierement
ruinez. L’exemple du meilleur de nos Roys qui
regnoit il y a cent cinquante ans, & dont Vostre
Majesté porte le nom, doit estre icy representé
deuant vos yeux pour l’imiter. Ce grand Prince
ayant en moins de quatre mois conquis le
Royaume de Naples, subjugué l’Italie, & triomphé
dans Rome, refusa les noms de Conquerant,
de Victorieux & d’Auguste que ses belles
actions meritoient, pour prendre celuy de Pere
du Peuple, qu’il estimoit beaucoup plus,
preferent l’amour de ses Subjets à tous ces auantages,
Et Nature ayant manqué à luy donner
des enfans, l’affection reciproque de son peuple
luy en fit naistre vn nombre presque infiny
d’autres, qui luy conseruent jusqu’à present
le nom de Pere. Henry le Grand ayeul de Vostre

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Majesté, qui fut la terreur de ses Ennemis
& l’Arbitre de la Chrestienté, auoit de pareilles
tendresses pour ses Subjets : apres que ce Roy
victorieux eut reconquis son Royaume à la pointe
de l’espée, abbatu l’orgueil des Espagnols, &
contraint le Roy de luy demander la paix, lors
qu’il estoit question pour la necessité publique
de faire quelque leuée dans ses Estats, il s’informoit
si en ce faisant, son peuple l’aimeroit
tousjours. Nous n’aurions pas entrepris, SIRE,
de vous parler du pitoyable estat de vos Subjets,
n’estoit que vostre Majesté nous a constituez
en charge pour estre les arbitres de leurs fortunes :
Nous imposons tous les ans ce qu’il
vous plaist de leuer sur eux, nous sommes obligez
de vous en rendre compte, estant necessaire
que Vostre Majesté le sçache pour l’acquit
de sa conscience : puisque les Roys, quelques
grands qu’ils soient, seront vn jour comptables
au Ciel de ce que leurs Officiers font en terre.
C’estoit la croyance d’vn Roy qui estoit selon
le cœur de Dieu, qui luy demandoit pardon
de ses pechez cachez : Ce sont, Sire, les fautes
que font les Officiers quand ils n’informent
pas le Prince des necessitez & des miseres de son
peuple. Nous connoissons, SIRE, les causes des

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maux qui le reduisent au desespoir, s’il ne plaist à
Vostre Majesté d’y apporter les remedes, luy accordant
vn peu de repos & de soulagement. C’est
dequoy nous la supplions tres-humblement, & de
commencer par là les actes de pieté & de justice,
que vous aués promis solennellement de pratiquer
durant vostre Regne. Pour nous, Sire, protestons
à Vostre Maiesté, que nous la seruirons de tout
nostre pouuoir, auec zele, fidelité & respect, comme
nous y sommes obligés, tant par nostre naissance,
que par le deuoir de nos charges : Et nous permettrés
de nous dire, sans aucune reserue, les tres-humbles,
tres-affectionnés & tres-obeïssans seruiteurs
& subiets de Vostre Maiesté : les Officiers de
l’Election de Paris.

 

FIN

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