Magnien, Charles [signé] [1649], REFLEXIONS CONSCIENCIEVSES DES BONS FRANCOIS, SVR LA REGENCE DE LA REINE. , français, latinRéférence RIM : M0_3061. Cote locale : C_9_18.
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A
MONSEIGNEVR
MONSEIGNEVR
DE LIONNE,
CONSEILLER DV
ROY EN SES CONSEILS
d’Estat, Secretaire des Commandemens
& des Finances de la
Reine Regente.

MONSEIGNEVR,

C’EST vn axiome en bonne Philosophie,
que le bien commun doit estre
preferé au particulier : Platon dit que
nostre naissance est partagée, vne partie pour nostre

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patrie, vne pour nos parents, & vne autre pour
nos amis : Senecque tient que celuy-là ne vit point
pour soy, qui ne vit pour personne : Auincenne recommande
aux Legislateurs de ne point permettre
d’oiseux dans les villes. C’est pourquoy,
MONSEIGNEVR, voulant fuïr l’oisiueté, viure plus
pour d’autres, & premierement pour mes bienfacteurs
& amis, que pour moy ; I’ay toûjours
fait profession de ne rien redouter, pour deffendre
dans mes actions publiques, & conuersations particulieres,
selon la portée de mes forces, le juste
procedé de la Reine, & l’integrité de ses mœurs.
Depuis quelque temps, la malice de certains, & le
libertinage des autres, se sont renduës si grandes,
que sans aucune consideration d’honneur & de respect
aux Majestés, on a injustement calomnié
les actions & la Regence de cette tres-vertueuse
& tres-auguste Princesse : C’est, MONSEIGNEVR,
ce qui m’a contraint par deuoir de conscience,
de fidelité, & de recognoissance, de publier à tout
le monde les verités que ie sçay, pour les auoir
veuës ou appris auec certitude, contraires aux mensonges
& calomnies des méchants ; afin de desabuser
ceux qui pechent par ignorance, & fermer
la bouche aux malicieux (s’il est possible) au
moins d’empescher qu’on les croye si legerement :
Pour cét effect, j’ay joint mes pensées auec les Reflexions
consciencieuses des bons François, que

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Messieurs les Parisiens ont témoigné par les regrets
de la sortie de leurs Majestés hors de leur bonne
ville de Paris, les souhaits & supplications pour
leur retour, acclamations publiques & réjouissances
inexplicables pour leur arriuée. Ces sentimens,
MONSEIGNEVR, ne peuuent paroistre en public
que sous les auspices fauorables de celuy qui est
zelé pour la verité, & affectionné pour l’innocence :
Partant agreés, s’il vous plaist, que ie me
serue de vostre nom & appuy, que ie vous les
consacre & dedie : Ils vous appartiennent tres-particulierement,
tant à cause de la bonne part
que vous prenez aux interests de la Reine, que pour
le zele de vostre Iustice, & pour les singulieres
obligations que j’ay à vostre bien-veillance : Car
comme la Reine par vn traict de sa prudence a
fait choix de vostre Personne pour luy donner en
depost ces plus augustes & souueraines ordonnances,
& l’execution de ces volontés ; De mesme
par vne juste recognoissance & fidelité genereuse,
vous ne pouués souffrir qu’on ternisse la candeur
de sa vie, & l’equité de sa Regence. Ceux-là calomnient
la vefue & l’orphelin, contreuenant à la
Loy diuine écrite en Zacharie, chapitre 7. ils
suscitent des diuisions & fomentent des guerres,
pechants contre le Sainct-Esprit, Zacharie chapitre
18. ils ont des esprits d’erreur, choquant la
charité, dit sainct Iean en sa premiere chapitre

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quatriéme ; Ils méprisent leur salut, rejettans la
verité, enseigne le Sage chapitre 15. de ces Prouerbes,
& ne parlans que par soupçon, ils se damnent
de guet à pans, dit Dieu par la bouche de
l’Ecclesiastique, chapitre treize ; Ils dissimulent
vouloir publier la verité & le mensonge tue leurs
ames, dit le Sainct Esprit aux Prouerbes chapitre
12. & parce qu’ils sont ruzez, ils cachent la
verité, & blessent la Iustice, ne disans pas ce qu’ils
sçauent, ainsi que témoigne le Sage, Prouerbe 12.
Mais, MONSEIGNEVR, vous n’auez des
oreilles que pour entendre, & vne langue que pour
publier la verité, obeïssant au Sainct Esprit, Eccles.
3. Partant vous approuuerez aysement tout ce
que ie dis, qui n’est que le moins de ce que vous sçauez
des vertus heroïques & perfections eminentes
de nostre tres-chaste & prudente Princesse, puis que
vous estes l’vn des premiers bons François, des plus
sçauants, plus fidelles & genereux de ces domestiques.
Vostre approbation seruira autant que milles
autres, à cause de vostre bonne conscience, de l’integrité
de vostre vie, éloignée du mensonge, de vostre
noble sang & aliance : Ie n’entreprends pas icy vos
loüanges, le sujet est trop odieux à vostre modestie,
& contraire à ma profession : Vous sçauez mieux
faire les choses loüables, qu’entendre vos loüanges ;
car la force Lionine qui vous porte aux actions glorieuses,
vous manque pour en receuoir la gloire. Vos

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Armoiries icy affichées publient assez l’antiquité,
la Noblesse, & le lustre de vostre Maison &
alliance : Ie passe sous silence les dignités, charges
& emplois honorables de vos parents & alliés, l’eminent
degré Episcopal de MONSEIGNEVR
vostre Pere, lequel sert de parfait modelle de pieté,
de doctrine & de vertus à ses Oüailles, comme aussi
de fleau & de terreur aux Ennemis de l’Eglise ;
Les conditions sublimes que tiennent, les grands seruices
que rendent continuellement au Roy & à la
Couronne, Messeigneurs vostre Oncle & Frere, dans
la France, en Allemaigne, & en Italie, tant pour
l’administration souueraine de la Iustice, que pour
le traitté de la Paix Generalle auantageuse à la
France. L’honneur que vous aués d’estre appellé au
Ministere & Office de Secretaire de la plus Auguste,
plus Vertueuse & Debonnaire Reyne de l’Europe,
fait mieux le paranymphe de vos Grandeurs,
que l’eloquence des hommes ; La douceur toute singuliere
de vostre agreable naturel, la naïfueté judicieuse
de vostre entretien, la sincerité de vos
actions, la fermeté de vos promesses, le bon heur de
vostre protection charment les cœurs de châcun, gaignent
leurs amours & respects, & attirent sur Vous
& sur les Vostres, vne infinité de benections : C’est
MONSEIGEVR, ce qui me cause vne joye aussi
grande, que ie tiens honorable la faueur de me protester
publiquement & à jamais, comme ie dois &

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ay des ja fait particulierement, offrant mes prieres
à Dieu, pour vostre prosperité & de toute vostre
noble Maison,

 

MONSEIGNEVR,

Vostre plus humble, plus affectionné,
& tres-obligé seruiteur, Frere
CHARLES MAGNIEN.

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