Monterbault Bouiu,? de [signé] [1650], APOLOGIE DE MESSIEVRS DV PARLEMENT. , françaisRéférence RIM : M0_103. Cote locale : D_1_31.
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APOLOGIE
DE MESSIEVRS DV
PARLEMENT.

VOVS qui jugez la terre, pouuez-vous
sans crime souffrir qu’elle vous condamne ;
Non non, beau Corps, dont toutes
les parties sont Nobles, puis qu’elles ne sont destinées
qu’à faire des actions souuerainement heroïques ;
& qu’il est vray de dire, que la Iustice est la
baze de toutes les dominations (Iustitia in sese virtutes
continet omnes) composé mistique de Cezars indontés,
de sagesses de Salomons, de constances
genereuses de ces grands Princes, Ducs & Pairs,
vrais Peres des oprimez, de Generaux Ecclesiastiques
Illuminez, & de ces courageux, splendides &
liberaux Officiers de la Couronne, pour monstrer
qu’elle ne s’en veut jamais separer ; Permettez-moy
d’escrire pour vostre deffence, puis que vostre merite
n’en daigne ny n’en doit prendre la peine contre
ses impies, qui veulent insolemment profaner
l’excellence de vostre pieté, & vous nommant Iustice
bandée, pour ne point voir la verité ; comme
si vous n’estiez pas la viue image de son principe ;

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Iuges vrayement mal-heureux, en seruant le public,
de vous leuer si matin pour ne chercher vostre
repos que si tard, comme dit l’Escriture, vous
estes abandonnez, mais ce n’est qu’à l’amour de la
charité, dont tant de veufues & orphelins, par
vous seulement & entierement restituez font foy ;
Vous estes pour nous juger ! ô tiltre glorieux digne
des Roys & de Dieu mesme ; puis qu’il viendra juger
les viuans & les morts ; Voyés les foudres que le
Ciel est prest d’élancer sur ces plumes criminelles,
qui tracent des desseins si funestes, & qui font courir
des écrits si enormes contre la veneration qu’on
doit à vostre celebre Compagnie ; Terre ouure-toy
pour engloutir ces esprits infernaux, puis que tes
abysmes ne sont autre chose que leur centre ; Et
toy lumiere, ne permet plus qu’on mette au jour
ces enfans de tenebres ; puis qu’il ne suffit pas pour
punition de ces pauures Scribes, contre l’apuy des
Parisiens, qu’ils soient condamnez comme les Pharisiens,
ny qu’ils ayent la confusion de n’oser se
nommer dans leurs méchantes œuures ; mais il faut
encore qu’ils soient effacez du liure de Vie, & qu’on
lise dans celuy de la nature, qu’elle n’a jamais rien
produit de si detestable, puis que suiuant les sentimens
de Plutarque, ils sont contrains d’auoüer
qu’il n’y a point de si grand crime que de s’attaquer
aux deïtez, & que leur sacrilege va jusques au poinct
de vouloir oster la Iustice du Catalogue des Dieux ;

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ne vous offencez pas tous puissants Interpretes de
ces Decrets, si ils veulent rauir la gloire qui vous
est deuë ; mais pour la forme faites-en vn exemple
si grande & de si haute importance, qu’elle
soit grauée dans les admirables Tables de la posterité,
& prenez garde qu’ils disent (deuinez à quel
dessein) que du temps de Pausanias les habitans
de la ville d’Epheze jetterent au feu la Statuë d’Apollon,
pour ce qu’elle auoit prononcé des Oracles
contre cette ville, comme si les Magistrats
deuoient toûjours estre contraints de suiure la passion,
dautant de differends sentimens, que les
peuples ont de diuerses enuies.

 

Cette dangereuse comparaison fait donc bien
voir que cette action furieuse fut plûtost conceuë
par vn desir de vengeance, que par vne emulation
de Iustice, ainsi que pourroit estre poussé quelque
miserable qui auroit perdu son procés, la raison
l’ayant de bouté de ses demandes ; ce qui donneroit
quelque lieu à la grace : mais de la luy
octroyer sans faire sçauoir à Paris & à toute la
France, que tout ce que ce pompeux Senat à resolu
dans toutes ses Assemblées, n’a esté qu’en sa faueur,
& pour la gloire de la Couronne ; ce seroit
connestre vn crime dont la grandeur surpasseroit
toute punition.

 


Et cependant s’entends que vostre illustre voix,
Dit nous leur pardonnons pour la premiere fois,

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En feignant à ignorer l’atrocité du crime,
Nostre interest ne veut qu’vn regret pour victime.

 

O Senat glorieux, qui vous pourroit dignement
loüer, & que vostre science fait bien voir
l’imbecillité de vos temeraires accuzateurs au sujet
du Gouuernement ; On vous blâme dauoir eu
trop de patience ; C’est vn effet d’obeïssance & de
fidelité à vostre Roy, & de la bonté, qui est l’vn
des plus beaux Attributs de la diuine Essence ;
Vous estes accusez par vostre silence respectueux
d’auoir esté du temps du Cardinal de Richelieu
sans balance, pour pancher du costé de la faueur,
& d’estre aueugles à present que vous ouurez les
yeux pour voir la misere des peuples ; à cause (dit
on) que vous ne considerez pas la puissance des
Rois ; Voila qui est étrange, si vous estes bien venus
à la Cour, vous estes condamnez ; & si vous
voulez prendre cognoissance des affaires d’Estat,
comme vous faisiez il y a trois cens soixante quatre
ans ; pour cét effect on vous nomme criminels :
Si vostre Balance est d’vne matiere leiere,
pour estre plus indifferente ou plus prompte à
tomber ou l’equité le veut, on dit qu’elle se meut
au gré des vents, ou du desir des Princes, comme
elle fist au souffle de Cezar en allant au Capitolle
de Rome : Et si vous la rendez fixe pour s’afermir
contre la Verification des Edicts qui regardent
l’interest du Public, on dit que vous en estes

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les perturbateurs, voyez quelle ironie : En fin si
selon les Theologiens, il n’est permis de parler
que des actions publiques, comme ces esprits
satyriques citent : Eux mesmes dequoy, en bonne
foy, vous peuuent-ils accuser ; vos Arrests ne
sont jamais rendus en secret ; Et puis qu’ils sont
d’accord que la plus grande partie d’entre vous
est auguste, tant par la grande naissance, que par
la science & les eminentes qualitez ; Il n’y a donc
> point d’apparence de croire que la moindre aye
peu rendre aucune injustice, puis qu’elle est toûjours
contrainte de suiure la pluralité des voix ;
Il n’y a point non plus de raison de dire qu’elle
ozast prononcer autrement que sur le veu, & partant
il ne peut y auoir d’ignorans ny de malicieux
puissans dans ce judicieux Parlement ; Neantmoins
la moitié du monde s’en plaint souuent,
parce qu’il est impossible qu’à la fin des procés
toutes les deux parties puissent estre contentes, s’il
estoit asseuré, comme ils disent, que du temps des
des Grecs l’on eust osté la marque d’equité à la
Deesse Themis, il seroit donc necessaire de conclure
qu’elle auroit esté detrosnée ; & pourtant on
void que depuis ce temps-là elle a toûjours regné
dans toutes ces redoutables Cours Souueraines,
& notamment dans cette Ville capitale, qui possede
comme le Chef eminemment les auantages
de toutes ces autres parties ; & non seulement la

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force & la viuacité des plus sublimes argumens
pour la gloire de l’Estat, mais encore pour le soulagement
des peuples, la supresme sagesse de tous
les bons Conseils.

 

Car outre les incomparables Conseils ou preside
sa Majesté, le grand & Auguste, quoy qu’enbulant
y rend sa vertu sedentaire ; de sorte qu’il
est vray de dire, que sans eux le particulier ny le
general ne sçauroient en fin reussir dans aucune
entreprise, ny jouïr parfaitement de la beauté rauissante
de sa raison, dont ce necessaire Parlement
& tous ces dignes Magistrats de son Ressort, n’ont
jamais voulu ny deu pour quelque cause ou rencontre
que ce soit se separer ; Ainsi nous pouuons
assurer qu’elle y sera auec son Sceptre, ie dits auec
sa balance, jusques à la consommation des siecles :
Seroit-il vray semblable qu’vn si petit nombre
d’onze, ou quelque fois mesmes de sept Iuges,
eust depuis tant d’années prononcé des Arrests
contre tant de millions de personnes, sans estre
destruit s’il auoit mal jugé ; Non certes, nos François
sont trop prompts & trop vaillans pour cela ;
Mais comme il n’y a point eu de plainte pour la
perte d’vne chose juste, aussi n’a ton point veu
deffect violent.

Vous me direz qu’il y a eu plusieurs Requestes
Ciuilles contre leurs Arrests, il est vray, mais c’est
vne marque de leur sincerité, qui permet à la verité

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de se manifester en tous temps, apres auoir
esté offusquée ; & leur candeur est si bien recognuë,
que ces causes sont toûjours jugées par le
mesme Parlement, pour donner témoignage de
son integrité : Vous me répondrez que voicy des
plaintes qui ne traittent point de Requestes Ciuilles,
mais bien d’accusations tres-criminelles, &
que ce sont de fort mauuais auant-coureurs : Ie
vous auouë que ie voy quelques enfans perdus,
que des ames basses enuoyent courir les ruës comme
des insensez ou auides Contre-porteurs ; ou
plûtost que ce sont de ces Oyseaux de mauuais augure,
qui tomboient les premiers morts dans le
lac, sur lequel ils presageoient des malheurs, dont
les Antiens estoient le plus souuent preseruez, par
l’obseruation des aduis d’Aristote, qui dit, Que
le Sage domine l’Astre.

 

Ces pauures Autheurs asseurent, que les Princes
font ce qu’ils veulent, ces Senateurs n’y sont
donc pas retractaires ; Que les Iuges ne font pas
le bien qu’ils veulent, c’est donc faire ce que dit
Sainct Paul, Que les Peuples font ce qui les ruine ;
Et pourquoy ne se deportent-ils pas de leurs émotions,
qui ne font que rompre leur commerce
sans leur aporter aucune vtilité.

En fin Senat bien empesché ; Si sa Majesté fait
ce qu’elle veut, on dit que vous estes corrompu ;
Et si vous luy faites de tres-humbles Remonstrances,

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on dit que vous n’estes pas de bons Politiques
de vouloir chocquer vne puissance que vous
ne sçauriez destruire ; comme si vostre Corps vouloit
ou pouuoit aneantir contre l’ordre de la Nature
cette belle Ame de la Monarchie, ce grand Roy
seul est le digne objet de vostre Amour : Cela ne
tient rien du bon sens ; mais en fin l’enuie ne manque
point de matiere pour entretenir son feu malheureux ;
De sorte que de quelque façon que vous
puissiez agir, elle ne sçauroit estre satisfaite de vos
bonnes mœurs ; cela ne doit pourtant pas faire
vos soings, suffit de sçauoir que vous n’auez point
besoin d’autres termes ny d’autres armes que celles
de vos propres ennemis pour les destruire ; Et
de lire dans leurs miserables libelles diffamatoires,
que le plus grand de vos crimes pretendus, est d’auoir
cessé de parler, lors que ce grand Oracle de
la France, ce grand Armand, commença d’armer
contre l’heresie, & à proferer ces paroles pour le
soustien & l’agrandissement de l’authorité Royale :
Et qu’apres tout ce que leur rage a peu projetter
contre vostre integrité, vous estes toûjours par
leur adueu mesme les Puissances de la Terre pour
la juger, comme dit Sainct Augustin : Malheur
donc, suiuant ce beau passage de lob, à cette pauure
Argille qui s’esleue contre ses incomparables
POTIERS & NOVIONS, qui luy donnent non
seulement la forme, dont ils sont les admirables

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obseruateurs, mais luy font voir la pratique de
toutes les Vertus en cét Illustre CHEF de tous ces
dignes Senateurs, qui font gloire d’estre DE
MESME, quoy que sous de differents noms ; mais
encore les biens, l’honneur, la liberté, la mort,
ou la vie, à châcun selon qu’il a merité, comme les
Dieux, puis qu’ils ne laissent point de meffaits
impunis : Tremblés, tremblés, esprits maudits,
foibles & abominables Autheurs, qui taxés d’aueuglement
vne si belle lumiere que celle d’vn premier
Parlement, soustien de la plus grande Monarchie
du monde ; Craignez faux Prophetes, à qui
l’escriture deffend d’ajouster foy, qu’en voulant
predire des maledictions à ces pures intelligences,
qui meuuent les Cieux de cette florissante & bien
faisante Cour, qu’elles n’induisent ces Astres à respandre
sur vous & sur vos familles ses plus mauuaises
influences, & ne doutés point qu’elles n’en
ayent le credit ; puis que leur souueraine puissance
dés leur naissance, fidelité, prudence & bontés incorruptibles,
sont les cheres confidentes de l’estre
increé, pour nous communiquer par leur second
moyen ses immenses grandeurs, & le pouuoir absolu
que sa justice a sur toutes les creatures, comme
diuine mediatrice entre les supplications des
peuples à l’authorité des Roys : Pleurés, pleurés,
trop perfides ingrats sur vos testes criminelles, ou
sur les tenebres de vostre ignorance, filles de Ierusalem,

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mais non pas sur ses augustes arbitres de la
paix & de la guerre de l’Vniuers, tous resplandissants
d’equité pleurez.

 

SANTVRIE.

 


NON ce n’est point assez pour punir leur offence
Les feux seroient trop doux ; que tous les Elemẽs
Viennent exterminer ces monstres de la France,
Ou plustost vos enfers inuentez des tourmens.
Vous ne le voulez pas Parlement debonnaire ;
Sçachés donc que ce mal que l’on negligera
Deuiendra si pressant pour vn bien necessaire
Que malgré vos pardons le Ciel vous vangera.

 

Par la Dame DE MONTERBAVLT BOVIV.

A PARIS,

Chés GVILLAVME SASSIER, Imprimeur & Libraire
ordinaire du Roy, & de Mr le Gouuerneur
de Paris, ruë des Cordiers, proche
Sorbonne, aux deux Tourterelles.

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