N. I. T. / Jamin, Nicolas [?] [1649], LES GABELLES ESPVISEES A MONSEIGNEVR LE DVC DE BEAVFORT PAR N. I. T. , françaisRéférence RIM : M0_1462. Cote locale : C_5_23.
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LES GABELLES
ESPVISEES
A MONSEIGNEVR
LE DVC DE
BEAVFORT
PAR N. I. T.

M. DC. XLIX.

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LES GABELLES
ESPVISEES
A MONSEIGNEVR
LE DVC
DE BEAVFORT.
PAR N. I. T.

Depuis que la guerre est allumée dans vn
Royaume, il est bien difficile de l’esteindre,
& depuis qu’vn peuple s’est vne fois reuolté, il est
presque impossible de l’appaiser, comme on peut
facilement voir en ce petit Discours, que i’ay iugé
ne vous deuoir pas estre desagreable. Depuis
que la guerre a commencé par l’enleuement du
Roy, & que tous les habitans des Bourgs alentour
de Paris, ont esté pillez & ruinez de fond en
comble, on a veu aussi-tost les mesmes choses par
tout le Royaume : La guerre à commencé premierement
à Paris, & en suitte en toutes les villes du
Royaume, on a leué des gens de guerre, on a pris
des Generaux, & tout ce la pour rien faire, n’a-t’on

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pas descouuert que nous estions vendus à beaux
deniers comptans : mais trop tard ? n’a-t’on pas veu
la trahison d’vn Prince de Conty, d’vn Longueuille,
d’vn Delbœuf, d’vn Boüillon, & trois seuls
sont restez qui nous ont protegez, qui nous ont
sauuez la vie, & nous ont remis d’esclauage où
nous estions en nostre premiere liberté.

 

Le Parlement n’a-t’il pas fait tous ses efforts
pour nostre conseruation : mais il ne cognoissoit
pas que quelques vns de ce mesme corps si splendide,
& Auguste ternissoit par leurs trahisons la
gloire d’vn si fameux Senat.

Que n’a point faict vn Duc de Beaufort pour
nous soulager, que n’a point faict, dis-ie, vn Coadiuteur
si Illustre, qui marchoit le premier à la teste
de nos bataillons, ô actions dignes de remarques.
Dont la memoire ne tarira iamais tãt que le monde
durera : car n’est-ce pas estõner nos descendans
quand ils verront vn iour dans l’histoire que la
plus fameuse ville de tous l’vniuers, a esté conseruée
& defenduë par vn seul Prince digne de loüanges
immortelles : Mais pour reuenir à mon discours,
car le papier ne suffiroit pas si ie voulois
d’escrire tant d’actions heroïques qu’à faict ce
vaillant Duc de Beaufort nostre Protecteur, &
& pour n’oublier pas Monsieur le Marquis de la
Boullaye, à qui nous auons aussi vne grande obligation,
nous ayant fort bien secouru lors que nous

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estions en grand peril, lequel s’en estant allé dãs les
païs du Maine, Touraine & Anjou, où il c’est saisi
de toutes les Gabelles, & principalement de celles
de Tours, ou tout le menu peuple ne de sire autre
chose qu’vne reuolte generale, l’a où les Soldats
ne pouuant s’empescher de ioüer de la Harpe,
leur instrument ordinaire, ils ont tellement empesché
le traficq qu’on ne faisoit aucune chose dans la
ville de Tours, ce que voyant le menu peuple, &
principalement les ouuriers en soye qui ne faisoient
aucune chose que de songer là où ils trouueroient
dequoy viure, ils s’assemblerent donc
plusieurs auec des Mariniers iusques au nombre
de 200. & allerent à Nantes querir du sel, & en
amenerent telle quantité qui ne valloit que 30. sols
le boisseau rendu à Tours, ce qui faisoit grand
tort au Roy, d’autant que plusieurs ont vendus
iusques à leur vaisselle pour en acheter, & en faire
des magasins. Ce qu’ayant esté proposé au Roy,
à la Reine Regente, & tout le Conseil, on a faict
expresses defences d’y retourner dauantage à peine
de la vie, & que pour ce faire on commetteroit
des Gardes sur les chemins pour empescher lesdits
Fauxsauniers d’aller dauantage à Nante : Vous
sçauez que l’enuie est vne chose qui se rencontre
fort souuẽt dans les hõmes, & principalement dãs
ceux qui n’ont point de bien, & comme le bruit de

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cette voiture de sel fust allé iusques à Orleans :
Ceux d’Orleans ayant dessein d’en faire de mesme
s’accordent auec ceux de Tours, & font ce
complot ensemble, lesquels outre les defenses cy-dessus
faites, prennent du canon, s’attrouppent,
forcent vn passage qui estoit entre Nantes & Saumur,
& s’en vont encore audit Nantes, d’où ils apporterent
telle quantité de sel, qu’il leur en resta
encore plus de la moitié, n’est-ce pas la le moyen
de mettre tous les Greniers à sel, & de ruiner le
Domaine du Roy, n’a-t’on pas vendu le sel de tous
les Greniers pour payer les gens de guerre, & si
l’on ne met ordre à cette confusion : Ie croy fermement
que le sel ne vaudra que 20. sols le Boisseau,
dequoy tout le monde ne sera pas fasché
pour son profit : mais au desauantage du Roy,
puis qu’on ne paye plus ny sel, ny taille, & que
le peuple est tellement resout qu’il n’en payera
point que cét infame estranger n’ayt restitué à
Paris cét Illustre Thresor qu’il luy a rauy, & lors
qu’vn peuple vera qu’on n’a aucun dessein de faire
dauantage la guerre, alors il se mettra en son deuoir.
Ie croy qu’il ny a personne qui ne souhaitte
le retour du Roy à Paris, & qui ne voulust trouuer
occasion de luy tesmoigner, puis qu’ils sont
prests de verser iusques à la derniere goutte de
leur sang, pour luy rendre ses tres-humble deuoirs.

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Et pleust à Dieu que nous fussions tous en ses
peines, afin de le desabuser de ce qu’[1 lettre ill.]n, Faquin
Cicilien luy faict accroire tous les iours par ses
Magies & ses Characteres.

 

FIN.

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