N. R. Ch. [signé] (Rozard, N.) [1649], PANEGYRIQVE ROYAL, OV LE TRIOMPHE DE LA PAIX. SVR LE RETOVR DE MESSIEVRS les Deputez du Parlement. Auec ce qui s’est passé de plus memorable. DEDIÉ AV ROY. , français, latinRéférence RIM : M0_2669. Cote locale : C_6_49.
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PANEGYRIQVE ROYAL,
OV
LE TRIOMPHE
DE LA PAIX.

SVR LE RETOVR DE
Messieurs les Deputez du
Parlement.

SIRE,

Puisque la Nature a basty de la sorte le Corps humain,
que le chef qui est la teste, doit sçauoir ce qui
touche le pied, & que l’Art de Police qui imite la Nature,
a ainsi fait les Monarchies, que le Roy comme
Chef de ses Peuples, soit aduerty de tout ce qui greue
le moindre d’iceux. Mais vostre Minorité a empesché
que vostre Majesté n’ait veu à découuert le tort que le
Cardinal Mazarin a fait à la France, luy rauissant la
Fleur des trois Lys, qui ont esté éclos dans le Paradis.

Grand Roy, vous estes comme le portrait du Peintre
Phidias, qui lioit en telle maniere les parties de la

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Statuë de Minerue qu’on ne la pouuoit enleuer, sans
voit tout aussi tost la piece en mil morceaux. On la veu
par experience par ce cruel attentat, qui passe pour sacrilege
en cette Royale personne, qui est l’image viuante
de la Diuinité, & qui est vn Soleil brillant, qui ayant
disparu, a mis tous vos Sujets dans des troubles causez
par cette obscurité.

 

Vous estes, SIRE, le Mignon du Ciel, qui doit arrester
le cours de tous les malheurs. Permettez moy de
dire à vostre Majesté, qu’ainsi que les bestes les plus farouches,
s’addoucissent à l’aspect d’vne ieune pucelle,
pour l’hommage qu’elles portent à la candeur. De mesme
la verité vierge, conduite par vn cœur Royal dans sa
Minorité, la France sera tost changée en vn Sanctuaire
de saincteté, & cét Astrre dissipera l’orage dont elle étoit
menassée par ce Politique Italien.

France, quelle faute as-tu commise, & quel crime
as-tu perpetré (contre ce Ministre) digne de t’enleuer
ton Roy ? Est-ce à cause qu’il a enuahy tous tes biens,
pour satisfaire à son ambition, & pour enuoyer en son
pays ? Ou bien, n’est-ce point qu’il a hay tellement ton
Prince, & le bonheur de sa Couronne, qu’il a tasché à
luy oster de sa teste sacrée, en ruinant sa Monarchie ?

Peut estre que c’est pour se venger de ce glorieux Senat,
l’appuy & le bonheur de cette Monarchie, & qui l’a
fait subsister, à cause qu’il a mis des obstacles à ses desseins :
& à cét effet pour vindication, il minutte sa perte,
du moins il a tasché par des efforts violens & non communs,
de le sapper en ruine, & en faire vne holocauste,
sacrifiée à sa vengeance & à ses passions : n’ayant d’autres
motifs que l’opposition de cette saincte Societé, au
torrent impetueux de sa rage.

Ou pour mieux dire, SIRE, c’est pour l’auoir éleué
aupres de vostre Maiesté, dans des dignitez qu’il ne meritoit
pas, & honoré d’vn glorieux ministere, duquel il
estoit indigne : il s’est rendu si insolent & insatiable
dans ses desseins, qu’il a vuidé les coffres de vostre

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Espargne, preferant ces interests aux vostres, & empeschant
par ce furt la solution de vos Armées, donnant par
là lieu aux Soldats de les rendre desertes, & ainsi obliger
l’Ennemy de vostre Estat à triompher de vos Armes,
tant il est vray qu’il hait la France, & le bien de vos Suiets
qui vous ayment à vn tel poinct, qu’ils voudroient
sacrifier mille vies pour vous, estant leur Dieu donné, &
digne reietton de Sainct Louys, la gloire des Rois.
Neantmoins par vn acte de blaspheme, aussi impie que
criminel, pour oster à vostre Maiesté l’estime qu’elle
doit auoir de l’affection de ses Suiets, luy a imprimé
dans l’esprit, du moins à celuy de la Reyne Regente,
que le Peuple, ou bien quelques particuliers, auoient
conceu de mauuais desseins, contre vne Personne si sacré,
qui est l’Oinct du Seigneur, de luy establie pour
gouuerner les Peuples qui luy sont sousmis.

 

Ce stratagesme duquel il s’est seruy, est vne malice
plus diabolique, qu’humaine, n’y ayant pas vn seul
François, qui n’ait dans la bouche, aussi bien que dans
le coeur, Viue le Roy, pour lequel on n’a que des submissions
tres respectueuses, des souhaits tres parfaits, &
dignes de veritables vassaux.

Mais vostre Maiesté me permetra, s’il luy plaist, de luy
dire qu’elle a des obligations tres speciales, à son Senat
de luy auoir conserué par sa fidelité, & le zele qu’il luy
porte, de l’estat deplorable auquel sa Monarchie estoit
menassée par la violence Mazarine qui a esté refrenée
par l’heureuse conduite de ces illustres Magistrats.

Ils ont, SIRE, apporté tous leurs soins pour vous la
conseruer, aussi la tuition & droict qu’ils ont sur vostre
sacrée Personne, de laquelle ils sont tuteurs : ils sont en
consequence obligez, selon Dieu & Iustice, à ce sainct
deuoir.

Ils ne visent qu’à rendre vostre Estat plus florissant
que iamais, en consequence d’vne bonne Paix, qui mettra
tous vos Suiets en repos : Pour y paruenir, ils ont
employé tous leurs soins, mesme hazardé leur vie, laquelle

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ils mesprisent pour conseruer la plus noble de
toutes les creatures.

 

Ces Iuges d’honneur, ces equitables Senateurs & glorieux
de posts de vostre sacrée personne pendant son bas
âge, ont triomphé & emporté la victoire sur ce mauuais
Politique, par le traitté de Paix qu’ils ont fait, qui
a resiouy d’autant plus le Peuple, qui est vn acheminement
à vne Paix generale auec l’Espagne, qui auroit esté
contractée il y a long-temps, n’eust esté les obstacles formez
par ce Ministre preallegué, qui a trouué ses interests
dãs la guerre, ayant espuisé vos Finances, dõt il est
comptable à vostre Majesté de plus de trois cens millions,
sans preiudice du butin qu’il a extorqué à la Frãce,
qui excedent cent millions, ainsi que Dieu vous fera
la grace de connoistre, quand vous serez Maieur, auquel
temps, vostre Illustre Parlement sera reconneu de
vostre Maiesté, pour luy auoir esté tres fidele & exact
obseruateur de vos Ordonnances, lesquels ont fait vn
heureux Mariage & conionction de la Paix auec la
Iustice, en eux se iustifie la parole du Prophete : Ces
debonnaires s’esiouyront en abondance de la Paix, la Iustice
& la Paix ce sont entrebaisée. Le Tout puissant
commande de la souhaiter. Et ce bon Roy Ezechias ne
demandoit à Dieu, que la verité & la Paix pendant son
regne.

Psal. 36. &
84.

Zach B.

La Iustice, la Paix, & debonnaireté, sont les trois
Fleurs de Lys & les trois precieux ioyaux que vos Predecesseurs
vous ont laissé, & que Dieu leur a donné par
preciput sur tous les Rois de la terre, qui ont obligé
leurs Suiets à les surnommer Augustes, Conquerans,
Victorieux, Pere du Peuple, & Grand, comme d’heureuse
memoire, Henry le Grand, vostre grand Pere, la
merueille des Rois.

SIRE, vous estes celuy qui miraculeusement (plustost
que par vn effet de la Nature) a esté accordé de
Dieu, & donné aux François selon leurs prieres, comme
estant vn don tres precieux, & le plus grand de tous les

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Princes & Rois Chrestiens, & par dessus eux tous.

 

Tanquam lenta solent inter viburna cupressi.

Virgil.

Vous estes comme vne Estoille du matin, plus esleuée
que les hauts Ciprés sur les basses viornes, vous estes le
Tres-Chrestien, Fils Aisné de l’Eglise, qui paroissez cõme
vn second Soleil, Iustitia indutus, pour rendre verité
& misericorde gouuernée par la Iustice, appellée par les
Grecs, Collaterale à leur Iupiter, & Pindare l’appelle
Reyne du monde : C’est pour cela que ces Nobles Conseillers
qui sont constituez de cette haute dignité, doiuent
estre venerez, comme ceux qui maintiennent le
repos en ce monde, en toute honnesteté, pieté, & Religion
de nos Peres, car cela est agreable à Dieu, qui veut
sauuer tout le monde, & que tous paruiennent à la connoissance
de verité.

Diuus Faulus.

En vostre Maiesté, paroissent ces tiltres & qualitez
d’honneur, grandeur, puissance, victoires, triomphes,
que Dieu vous donne vn aussi heureux regne, que celuy
d’Auguste, les forces de Gyas remplisse vostre Royaume
de felicité, la submission de vos Suiets, vous donne
les années de Hestor suiuies de prosperité, & succez
tres heureux dans toutes les affaires de vostre Estat, que
la terre soit remplie de vos loüanges, le Ciel de vœux &
prieres pour vostre santé, & que vostre Maisté soit comblée
dautant de gloire & d’eternelles felicitez, que luy
en peut souhaitter,

SIRE,

De vostre Maiesté,

Le tres humble, tres-fidele, &
tres-obeyssant seruiteur &
Suiet, N. R. CH.

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N. R. Ch. [signé] (Rozard, N.) [1649], PANEGYRIQVE ROYAL, OV LE TRIOMPHE DE LA PAIX. SVR LE RETOVR DE MESSIEVRS les Deputez du Parlement. Auec ce qui s’est passé de plus memorable. DEDIÉ AV ROY. , français, latinRéférence RIM : M0_2669. Cote locale : C_6_49.