Anonyme [1650], LA FOVRBERIE DESCOVVERTE OV LE RENARD ATRAPÉ , françaisRéférence RIM : M0_1405. Cote locale : A_9_7.
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LA
FOVRBERIE
DESCOVVERTE
OV LE
RENARD
ATRAPÉ

M. DC. L.

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LA
FOVRBERIE
D’ESCOVVERTE
OV LE
REN ARD
ATTRAPÉ.

 


Par vn prodige qui surprend
Le plus petit & le plus grand,
La fourberie est descouuerte,
De ceux qui tramoient nostre
perte,
Et ne se treuuent en estat
De troubler encore l’Estat :
Où regne cette Auguste Princesse.
Qui joint a la haute sagesse
Tout ce que l’on à veu iadis

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la valeur des Amadis,
Quoy que l’Espagne l’ait veu naistre
Elle nous fait assez conneistre
Qu’elle ayme le Throsne François
Ou se sied le plus grand des Roys,
Qui des autres sera le Maistre
Car quoy qu’enfant, il fait parestre
Que l’on dira de toutes parts
Louys surpasse les Cesars,
Et tout ce que le siecle antique
A prosné de plus heroique,
oit des Grecs, ou soit des Romains,
Et les plus fameux Escriuains
Pour celebrer ces hauts trophées
Deuiendront cõme autant d’Orphées
Dans le dessein de le loüer
Et desia l’on doit auoüer
Qu’vn aymable & noble Genie
Prend soin de conseruer sa vie
Et veut destruire les lutins
Qui combatoient nos bons destins,
L’Histoire en est assez cognuë,
Pourtant d’vne plume ingenuë
Ie veux tracer d’vn vers mocqueur.
Tout ce qui me tient sur le cœur,
Et tout ce dont i’ay connoissance
Dans l’amour que i’ay pour la France
Et pour Paris où ie suis né
Paris qui m’a veu destiné,
A cultiuer la Poësie,

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(Aymable & douce frenaisie)
Dont tout bon esprit est espris
Et qui sçait plaire à mes esprits,
Lors que i’eus beu dans Castalie
Mais ce mestier plein de folie,
Combien qu’il ayt beaucoup d’appas
N’apporte point vn bon repas,
Soyez m’en tesmoins ie vous prie,
Vous dont la charmante industrie,
S’applique souuent [illisible]art.
Vous Gomés, & vous cher Ciuart,
Qu’on monstre au doigt dedans le
Louure,
Deuant qui chacun se descouure,
Comme deuant vn bon esprit
A qui nostre Apollon apprit,
A faire vers, à faire rire,
Auez vous, chez vous dequoy frire ?
Vostre long silence en ce point,
Me dit nous n’en auons point
Me dit nous n’en auons point
Et toy Nerueze Damoiselle,
Qui te vante d’estre pucelle,
Quoy qu’aussi vieille que Gourné
As-tu chez toy vn bon disné,
Dis-moy de grace si ta prose,
Ta iadis donné quelque chose,
Mais ie m’esloigne sans raison
Et pourrois passer pour Oyson.
Car ie mescarte de l’histoire

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Que ie voulois rendre notoire,
Du fin Renard qu’on a duppé,
Du matois qui fust attrapé,
Luy qui pensoit prendre les autres,
Pourra dire ses Patenostres
Dans Vincennes tout à loisir
Si ce n’est qu’il vueille choisir,
Les Liures du grand sainct Hierosme
Qu’il pourra voir rome, apres Tome
Sainct Auguste, ou bien Tostat,
Sans penser aux choses d’Estat,
Il aura le temps de le faire
On ira point là le distraire
Tout le monde le croit ainsi
Et pour moy ie le pense aussi,
Il n’entendra pas les Cantiques
Qu’on fit pour ses faits Heroyques,
Lors qu’il combatoit comme vn Mars
Au plus chaud de mille hazards,
Et certes ce grand Capitaine
A qui fit peur Samaritaine,
Alors qu’il creut qu’on eut dessein
De mettre la mort en son sein,
Mais ce n’estoit que pure feinte
Et quand il fit voit cette crainte
Chacun tout haut le condamna,
En plein parquet on le berna,
Estant bien digne de la berne
Et qu’en vn bouchon de tauerne

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On transmua tous les lauriers
Que iadis pour ses faits guerriers,
Chacun offroit à sa personne
(Qui n’estoit pas ma foy trop bonne)
Qui n’eut iamais trop de doucent
Et qui fuyoit son Confesseur,
Mais maintenant qu’il est en cage
Peut-estre il deuiendra plus sage.
Pleust à Dieu qu’il en soit ainsi
De bon cœur ie le dis icy,
I’en fais à tous humble priere,
O ? vous des Ss. troupe guerriere
Qui suiuistes les estendars
Et de Belonne & du Dieu Mars
Intercedez pour ce bon homme
Qui souuent ce mocque de Rome,
Et de tout ce qu’on y prescrit
De viue voix, ou par escrit,
Car maintenant qu’il est en cage
Peut-estre il deuiendra plus sage.
Celuy qui nous fit tant de mal
Qui fut à Paris si fatal,
Qui nous causa tant de famine.
Qui dans l’eau ietta la farine
Et qui fit cent fois en effet
Ce qu’Allemand n’auroit pas fait
Maintenant qu’il est a Vincenne
Peut estre aura l’Ame plus saine
Nous le voyons à cette fois

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Puis qu’il est au milieu des bois
Il y viura en solitaire
Sans que rien le puisse distraire
Dans le repos d’vn si bon lieu
De songer bien souuent à Dieu.

 

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