Anonyme [1652], LA GVERRE DECLARÉE PAR SON ALTESSE ROYALLE ET MESSIEVRS LES PRINCES, AV CARDINAL MAZARIN, ET SES ADHERANS ; En vertu des Declarations & Arrests du Parlement. , françaisRéférence RIM : M0_1527. Cote locale : B_13_68.
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LA
GVERRE
DECLARÉE
PAR SON ALTESSE
ROYALLE
ET MESSIEVRS
LES PRINCES,
AV
CARDINAL MAZARIN,
ET SES ADHERANS ;

En vertu des Declarations & Arrests
du Parlement.

A PARIS,
Chez FILBERT GAVTIER, ruë Sarrazin
aux trois Estoilles.

M. DC. LII.

Auec Permission de son Altesse Royalle.

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LA GVERRE DECLAREES
par son Altesse Royalle & Messieurs les
Princes, au Cardinal Mazarin, & ses
adherans ; En vertu des Declarations &
Arrests du Parlement.

Comme s’estoit iadis vne coustume vsitée de ietter vne
fleche dans le pays auquel on enuoyoit declarer la guerre,
ceux qui la denoncent au Cardinal Mazarin luy portent le
reprochent de ces actions pour luy estre vne fleche dans son
cœur, & denoncent à tout le monde le iuste motif qui leur
ont fait prendre les armes pour la liberté publique, afin que
par la cognoissance des raisons qu’on a de se deffendre de ses
violences, vn chacun soit inuité de prendre ce party.

C’est au Cardinal Mazarin seul qu’on declare la guerre,
puis que les armes qui ont pour but la liberté de Princes, &
n’ont d’autre pensée que le seruice du Roy, que de se garantir
de l’oppression de celuy qui en la minorité du Roy a vsurpé
l’authorité Souueraine, & que de maintenir les Loix du
Royaume, & les Declarations de sa Majesté données au
mois d’Octobre I647. & en Mars 1649. & celle du 5. Septembre
I651. Et de fait l’armée que Monsieur de Nemours commande
s’est portée auec tant de moderation, que de peur de
donner le moindre soupçon, que sous ombre de se declarer
ennemy du Cardinal Mazarin, elle confondit le respect
qu’elle porte au Roy, auec le iuste subiet de haine contre le
Cardinal, elle se tient tousiours dans le respect duë à sa Maiesté,
& y demeurera, pourueu qu’il plaise à sa Maiesté de
faire reflection sur les tres-humble, remonstrances qu’il luy

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ont esté faire plusieurs fois des maux que la demeure du Cardinal
alloit causer à la France.

 

Mais le conseil de l’ennemy des Princes du Sang & de
l’Estat l’ayant emporté sur l’esprit de la Reyne, il a esté necessaire
enfin de s’opposer à ces violences, & d’entrer à main
armée contre l’infracteur des Loix du Royaume & des Declarations
de sa Maiesté, & contre la sang-suë des Peuples & le
perturbateur du repos public qui a desia esté declaré tel par
les Declarations du Roy & Arrest du Parlement, & que l’on
iugera tel encor à present, n’ayant rien changé en la forme
de son ministere tyrannique, estant certain & visible à tout
le monde, que le Roy n’a point de plus dangereux ennemy
de sa Couronne que le Cardinal Mazarin : car dans le temps
que le Conseil d’Espagne ne vouloit point la paix, quand le
plus passionné & afidé de tous ceux qui y assistent seroit venu
pour auoir le ministere en France, il n’eust sceu faire pis
à l’Estat que fait le Cardinal Mazarin.

Pour preuue de cette verité, quel conseil fust ce au milieu
des prosperitez dont Dieu auoit beny la France par le
moyen de Monsieur le Prince, celuy de ruiner la ville Capitalle,
comme le Cardinal Mazarin y auoit induit la Reyne,
conseil que l’on sçait n’estre procedé qué de luy, & ce qui
s’en est executé par le Comte d’Harcour & le Mareschal
d’Hoquincourt, est vne faute qui peut trouuer quelque excuse
par l’obeïssance aueuglée qu’ils ont rendu au cõmandement
de la Reyne, dont la bonté a esté surprise par les artifice
de cét Estranger ?

Quel conseil fust ce encore celuy d’enuoyer en suitte offrir
par le sieur Daumon le pillage de la Campagne à l’armée
du Duc de l’Orraine pour luy seruir de payement, qui eust
esté l’entiere ruine de cette Prouince ? Aussi le dessein du
Cardinal Mazarin n’est il que de destruire le Royaume,
comme il paroist encore auiourd’huy, qui fait faire vn long
& perilleux voyage au Roy, pour le rendre spectateur de la
desolation qu’il veut faire d’vne des plus considerable Prouince,

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à Vostre Altsse Royalle, la jonction de mes
Trouppes auec les vostres, afin de tesister à nostre
ennemys commun.

 

3. Il y a trop longtemps que nous soustenons la
Guerre, de peuple à peuple, elle ne valut iamais
rien, c’est pourquoy ie vous iure que ie ne suis
entre en France que pour d’estruire ses ennemis.

4. Mes Trouppes sont auancées, & pourtant ie
n’ay aucun commandement de vostre Altesse
Royalle de luy prester secours, si sur ma foy & fidelite
vous me la donnez, ie proteste deuant
Dieu & vostre Altesse Royalle que i’en viendray
à bout, & qu’vn Sicilien mal connu n’aura point
le pouuoir de faire succomber mes Armes : elles
sont eleuées pour la Paix de la France, de l’Espagne
& de la Lorraine, (mon Heritage) c’est pour
ce sujet que ie les treuues justes, & qu’il est necessaire
d’acheuer ce que nous commancons,
autrement n’esperez plus que la Frãce soit nommée
France, l’Espagne, Espagne : n’y la Lorraine,
Lorraine. Il est donc temps de remedier à tous
ces desordres, mon tres-cher Frere & Cousin,
afin que toute l’Europe se sente d’vn perpetuel
repos, durant nos jours.

5. Il est donc necessaire de s’opposer aux Ennemis
de nostre liberté, vous ne sçauez que trop
que nos aduersaires ont attaqué de la journée
d’hyer la bonne & franche ville d’Estampes, que
Mazarin à dessein ne la saccager. Voulez vous me

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permettre que j’empesche tous ses obstacles &
& lors ie vous feray voir que ie suis plus François
que Lorrain, & ainsi nous aurons la Paix.

 

6. N’est-il pas permis de se saisir du Roy, dans
de telles occurences, pourueu que la conseruation
de sa personne soit le premier motif, nul ne
peut empescher (si vous me voulez croire)
que nous ne luy tendions vne Chaisne d’honneur,
afin qu’estant tombé entre nos mains,
nous les portions sur son Trosne que les Ennemis
des Royaumes luy veulent spolier, à qui
tiendra-il, Monseigneur, si nous ne d’estruisons
cet Hydre, lequel c’est bien osé vanter de d’estruire
& consommer vne petite ville ; laquelle ne luy
a iamais fait aucun mal : Mais il ne sçay pas que
c’est vn mecanique lieu qui rend à neant les
grand hommes, & les fait semblables au foin qui
croit dans ces Prairies, pour moy ie vous proteste,
que ie ne suis venu que pour mettre le repos dans
la France, qu’il faut que Mazarin perisse ou moy,
que j’accompagne le Roy dans son Paris, que ie le
reuoye establir sur son Trosne, & parce moyen,
que ie me trouue en seureté aupres de luy. Or
ne doutez point que nous n’ayons assez de forces
pour resister & empescher que Mazarin ne deuore
ce morceau. Tauannes est prest de le deffendre,
& Clinchampt, n’est pas propre de luy ceder,
vous connoissez, Monseigneur, ces deux
courages ; & ie vous puis asseurer que i’en ay dans

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mes Trouppes iusquea à douze pareils, desquels
vous sçaurez les noms lors qu’ils se seront pour la
France sign lez. C’est tout ce que ie vous puis
testifier de mon zele, asseuré qu’il ne sera jamais
autre que celuy que ie vous ay tousiours juré.

 

CHARLES DVC DELORAINE.

Incontinent ces propositions leuё il vint vn courrier, apportant
vne Lettre de Cachet à Monsieur le Prince,
touchant les affaires de la ville d’Estampes, telle que s’en
suit.

MONSIEVR, & tres-aymé Cousin,

Vous sçauez que ie n’ay autre desir que de conseruer
la France, & de m’opposer à celuy qui l’a
depuis si long-temps detenuё en captiuité ; Ie
vous faits sçauoir que ie faits auancer en diligence
mes trouppes, pour le secours, non d’Estampes
seulement ; mais pour l’entiere deffence de
l’Europe, oppressée sous la tyrannie d’vn Tyran,
simulant estre Ecclesiastique ; ayant vsurpé par
ses magiques occupations le tiltre de Ceremonial ;
& comme iceluy a fait courir vn bruit aupres
de vous, que ie menois vne plus grande
quantité de femmes que d’hommes auec mes
trouppes, i’ay consideré exactement ce que le
tout en pouuoit estre : Or pour vous tesmoigner
de la verité, il faut que vous sçachiez que perquisition

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& visite faite, il ne s’en est ttouué que trente-huict,
toutes lesquelles auoient leurs maris
dans mes trouppes, & se mesloient d’apprester,
en payant le boire & manger de mes soldats ; Cela
doit estre permis dans les armées ; & en quelque
siecle que ce soit, nous ne trouuons point
que l’on ait pu empescher ces choses. Mais ie
veux bien vous faire scauoir que dans ce rencontre
ie reconnus que deux soldats de mes Trouppes,
auoient fait courir ses bruicts pour fauoriser
le party Mazarin, iceux ayant consenty qu’ils
estoient tels ; le Conseil de guerre fut dauis de les
faire passer par les armes, s’estoient deux Italiens,
lesquels se jetterent de mon party, & pourtant i’ay
reconneu depuis que ce n’estoit que pour me trahir
C’est dequoy i’ay bien voulu vous auertir
afin que vous vous donniez de garde de ne point
prendre dans vos Trouppes aucuns Estrangers
parce qu’ils sont tellement dissimulez, que l’on’
ne s’en scauroit donner de garde : & particulierement
les Italiens c’est dequoy ie vous auerty en
sincerité de cœur, celuy qui est, & qui sera toute
sa vie.

 

Monsieur & tres-ayme Cousin,
CHARLES DVC DE LORAINE.

Escrite du Chesi de Fisme, ce 28. iour de May

FIN.

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