Anonyme [1649], LA IVSTIFICATION DV PARLEMENT ET DE LA VILLE DE PARIS DANS LA PRISE DES ARMES ; CONTRE L’OPPRESSION & Tyrannie du Cardinal Mazarin. , françaisRéférence RIM : M0_1796. Cote locale : C_5_73.
Section précédent(e)

LA
IVSTIFICATION
DV PARLEMENT
ET DE
LA VILLE DE PARIS
DANS LA PRISE DES ARMES ;
CONTRE L’OPPRESSION
& Tyrannie du Cardinal Mazarin.

A PARIS,
De l’Imprimerie d’ALEXANDRE LESSELIN,
ruë vieille Bouclerie, prés le pont S. Michel.

M. DC. XLIX.

AVEC PERMISSION.

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LA IVSTIFICATION DV PARLEMENT
& de la Ville de Paris dans la prise des Armes ;
Contre l’oppression & tyrannie du Cardinal Mazarin.

LA deffence contre nos Ennemis, lesquels par
voye de fait & les Armes à la main, sans autorité
valable ny sujet legitime veulent opprimer
nostre liberté, nous oster la vie, l’honneur
& les biens, n’est pas seulement permise,
mais mesme commandée ; Et c’est vne lascheté honteuse &
punissable de ne pas repousser la force par la force, & de ne
pas opposer vne vigoureuse resistance à vne violence qui
nous est faite, cette maxime n’est pas seulement fondée
dans le droict natutel & des gens, mais mesme dans le droit
humain & diuin ; C’est par ces raisons que le Parlement &
le Preuost des Marchands & Escheuins de la Ville de Paris
maintiennent, soustiennent & iustifient leur deffence dans la
prise des Armes, pour asseurer leurs vies, leurs familles, leurs
biens, leur repos, leur liberté & celle de tous les François, &
conseruer leur honneur contre les mauuais & pernicieux desseins
du Cardinal Mazarin, Italien Sicilien, né subjet naturel
du Roy d’Espagne, lequel abusant du nom & de l’authorité
de la Reyne Regente, se sert de la plume & du sceau
du Roy, de ses Finances & de ses trouppes, pour opprimer
sans cause, sans suiet, ny raison legitime la liberté du Parlement
& de la Ville de Paris : leur rauir la vie & les biens, &
leur faire perdre l’honneur qu’ils ont tousiours eu, d’estre
les plus humbles ; les plus fidels & les plus affectionnez seruiteurs
du Roy, voulans les rendre criminels de leze-Majesté,
en imposant faussement au Parlement, que dans les dernieres
occurrences il a choqué l’authorité Royale, entrepris
sur sa puissance : Et à la Ville de Paris qu’elle a manqué de
respect enuers leurs Majestez dans les mouuemens qui sont
arriuez pour l’enleuement de Messieurs de Broussel &
Blasmeny tres-digne Officiers du Parlement.

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Pour iustifier de la raison de cette defence, il faut se remettre
en memoire, que dans le commencement de la Monarchie
Françoise & premiere race de nos Roys : Et c’est
vne des Loix fondamentales du Royaume, qu’ils n’ont pû
prendre aucune resolution importante à l’Estat sans assembler
les plus notables Personnages du Royaume, laquelle
assemblée a eu dés ce temps le nom de Parlement ; Mais comme
dans la troisiesme race le Royaume a pris vne meilleure
face, & a eu vne plus grande estenduë, les affaires croissans
& estant necessaire de pouruoir aux plus frequentes plaintes
& differends des François : Les Roys ont tenu aupres d’eux
certain nombre des plus considerables du Royaume pour
rendre la Iustice à leurs Subjets, lequel a retenu le nom de
Parlement, & a fait sa residence aupres de leurs personnes
iusques au regne de Louys dixiesme, dit Hutin, qui establit
& institua le Siege du Parlement de France & Cour des
Pairs en la Ville de Paris.

Auparauant cette institution & depuis iusques au regne
du deffunct Roy Louys XIII. le Parlement suiuant les Loix
iustes & legitimes de son establissement, a tousiours esté en
possession de prendre connoissance de tous les Edicts, Declarations,
Ordonnances & volontez de nos Roys, tant
pour le regard de la Iustice que des Armes & Finances, pour
les accepter, refuser, ou receuoir, auec telles conditions &
moderations qu’il a iugé raisonnables, principalement dans
le temps de la minorité de nos Roys, pendant laquelle les
desordres sont d’ordinaire tousiours plus grãds : Et les Roys
n’ont point entrepris de faire aucune leuée de deniers sur
leurs Subjets, d’establir aucun nouueau droict, ny rien innouer,
qu’en vertu d’Edicts & Declarations deuëment verifiez
dans les Cours souueraines de son Royaume, ausquels elles
ont tousiours esté adressées pour en connoistre la Iustice. De
sorte qu’il doit demeurer pour vne verité constante, qu’aucun
nouueau establissement ne peut estre valablement faict
qu’en vertu d’Edicts ou Declarations receuës & approuuées
par les Compagnies souueraines du Royaume. La
raison de cette Loy a esté entr’autres, pour empescher
que les Fauoris de nos Roys, portez par leur passion &
interest particulier, ou par vn mauuais conseil, ne changent

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par vne charge insupportable de leuées & imposts sur le
peuple, sous leur nom, leur domination douce & agreable
en tirannie : car quoy qu’ils ayent eu quelquefois dessein
d’apporter quelque violence à la liberté des suffrages du Parlement
& chãger cette forme establie par les loix du Royaume,
& que mesmes pour y paruenir ils ayent faict mander le
Parlement par nos Roys pour luy dire de bouche leurs intẽtions,
& qu’ils ayent cherché des moyens extraordinaires
pour faire reüssir de nouuelles leuées, neantmoins, ils n’ont
pû donner aucune atteinte à leurs sentimens, ny renuerser
vn establissement si iuste & raisonnable. Le Parlement a esté
pareillement en possession de representer aux Roys les iustes
plaintes de tous les Estats & Corps du Royaume par des
humbles Remonstrances, ausquels ils ont tousiours fait raison.
Il est encores à obseruer que le Parlement n’est point
obligé de deferer & n’a iamais deferé ny eu d’esgard aux Arrests
du Conseil & Lettres de Cachet portant quelques Ordonnances
importantes à l’Estat : comme estant cette procedure
contraire aux Loix fondamentales du Royaume, à
l’ordre ancien de France & aux Ordonnances. Et auparauant
le regne du deffunct Roy les peuples n’ont iamais souffert
aucunes leuées de deniers establis par Arrest du Conseil :
Mais au commencement de son regne & pendant sa minorité,
le feu Marquis d’Ancre, duquel la memoire a esté condamnée
par le Parlement, & doit estre en abomination à
toute la France : Cet Italien qui n’auoit aucuns biens de naissance,
bruslant d’vne conuoitise Italienne, n’a pas seulement
sous le credit & faueur de la deffuncte Reyne Marie de Medicis
Mere du deffunct Roy & Regente en France, espuisé
vne bonne partie des Finances que le bon mesnage d’Henry
quatriesme auoit amassé dans le Chasteau de la Bastille, fait
augmenter les leuées ordinaires de deniers, en establir de
nouuelles par des voyes extraordinaires qu’il a appliquées à
son profit par des Comptans : Mais encores sçachant que le
Parlement, pour son deuoir, vouloit prendre connoissance
des desordres qui s’estoient formez dans l’Estat par sa mauuaise
conduite. Il a osé entreprendre sur sa liberté & franchise
en titant les plus affectionnez de leurs Corps au bien
public de l’exercice ordinaire de leurs charges.

 

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Ce mal n’a pas pris fin par la fin malheureuse de la vie du
Marquis d’Ancre, mais il s’est beaucoup augmenté du temps
de ce fameux fauory le deffunct Cardinal de Richelieu, duquel
la memoire doit estre en horreur à tous les gens de bien ;
cet homme ambitieux, iusques à pretendre à vne Couronne
de laquelle il estoit né subjet naturel, ce Cadet de maison, de
Gentil-homme deuenu Duc & Pair de France, grand Maistre
& Surintendant general de la Nauigation & commerce
de France, Lieutenant general pour le Roy en Bretagne,
ayant soustenu soubs vn nouueau nom de vanité de premier
Ministre d’Estat, sa fortune contre les efforts iustes & legitimes
de la deffuncte Reyne sa Maistresse & bien-factrice, &
des Princes du Sang & plus grands du Royaume pour rendre
sa maison, laquelle estoit dans l’indigence la plus illustre
de la France en charges & qualitez, & la plus puissante
en biens, mesmes pour paruenir au Gouuernement absolu
du Royaume, a fait entrer la France dans vne guerre ouuerte
contre l’Espagne, de laquelle nous sentons encores les incommoditez,
& laquelle a produit nostre presente calamité,
afin que par des leuées extraordinaires & excessiues de deniers
sur les Subjets du Roy de toute sorte de condition, causées
du pretexte de la guerre, desquelles il a consommé la
plus grande partie par vn nombre infiny de Comptans,
& par le moyen des contributions volontaires de tous les
Monopoleurs de France, desquels il a tousiours authorisé les
propositions & protegé le party. Il fit vn fond prodigieux
de deniers pour rendre vn simple Fief, portant ce nom renommé
de Richelieu de deux mil liures de rente, le seul
gage des creantiers de sa maison : Vn Chasteau le plus superbe
bastiment de l’Europe, qui contient en soy les plus
riches despoüilles de la France, accompagné d’vne Ville
portant le Tiltre de Duché, Pairrerie, du reuenu de cent mil
liures : laisser à ses heritiers les Terres les plus Seigneurialles
de France & du plus grand reuenu : Donner à ses parens le
moyen de posseder les plus hautes charges & les plus beaux
biens du Royaume, mesme à vne vefue sa chere Niepce, de
laquelle le nom est si connu dans l’Histoire, pour auoir esté
fait l’obiet de l’amour conjugal de nos Princes du Sang,
mesmes de nos Roys, le scandale du public & la cause de nos

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diuisions intestines, de s’esleuer iusques à la qualité de Duchesse,
& de faire vn reuenu de quatre cents mil liures par an ;
& le Parlement s’estant voulu opposer pour le deub de sa
charge à ses leuées, il ne s’est pas contenté par la frequente
presence du Roy au Parlement de faire authoriser ses nouuelles
impositions, mais il s’est encor estudié à opprimer sa
liberté & aneantir son authorité, non seulement en establissant
de nouueaux droits & leuées par des Arrests du Conseil
contre les formes du Royaume & Ordonnances des
Roys, & en luy ostant la connoissance par vn ordre nouueau
contraire aux Loix fondamentales de l’Estat & non
iamais vsité en France de plusieurs Declarations portant
ses leuées de deniers, laquelle leur appartenoit naturellemẽt
& l’attribuant au Conseil, mais encores en interdisant des
Chambres entieres du Parlement, & esloignant de cette
Ville de Paris plusieurs de ses Officiers, mesmes des Presidens
au Mortier, ceux qu’il a crû estre les plus passionnez
Seruiteurs du Roy & Ennemis de son oppression. Le Parlement
a dissimulé ce diuertissement des Finances du Roy,
ces attentats contre son authorité, cette atteinte contre ses
Priuileges, Libertez & Franchises, L’iniure qui a esté faite
à ses membres & Officiers, craignant que son ressentiment
dans vn temps de Guerre ne luy donnast sujet de luy faire
des reproches de quelques mauuais éuenemens arriuez pour
auoir empesché la leuée de quelques deniers supposez necessaires
pour les despences de la Guerre, & ne fist naistre l’occasion
d’vn plus grand desordre ; Mais son decez estant arriué
auec vn tel bon-heur pour luy & ses parens, qu’au lieu que
le Parlement deuoit condamner la memoire de cet Eminentissime
hypocrite, bien plus iustemẽt qu’il n’a fait celle du défunt
Marquis d’Ancre, pour auoir volé à la France plus de
deux cents millions tant pour luy que pour ses parents, sans
y comprendre l’entretien ordinaire de sa Maison par chacun
an qui sur passoit celuy du Roy ; Faire le procez à son corps
mort, & se vanger sur les biens qu’il a laissez auec telle seuerité,
que la posterité en eust parlé auec estonnement, pour
apprendre à des Fauoris à ne plus vsurper insolemmẽt l’authorité
Royale, & partager auec luy sa puissance pour mettre
ses legitimes Subjets dans l’oppression & le Royaume

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en proye. Neantmoins il ne s’est pû deffendre d’assister aux
honneurs Funebres que quelques maximes d’Estat luy ont
fait rendre. Toute la France s’est consolée dans son mal
dans l’attente d’vn meilleur Gouuernement & du soulagement
du peuple qu’elle a estimé que sa mort apporter oit.

 

Le decez du défunt Roy ayant suiuy celuy du Cardinal de
Richelieu, on a esperé du bon naturel de la Reyne vn restablissement
de toutes choses dans son premier estat : On a crû
qu’elle seroit bien aise que le Parlement reprit son ancien ne
authorité pendant sa Regẽce, qu’elle ne souffriroit iamais les
desordres qu’auoit causé vn Fauory ambitieux & remply de
conuoitise ; Enfin qu’elle n’authoriseroit pas les actions
qu’elle auoit blasmées pendant le Gouuernemẽt du deffunct
Cardinal, mais sur tout qu’elle ne consentiroit iamais qu’vn
nouueau Ministre d’Estat prit soubs sa Regence le pouuoir
qu’auoit vsurpé le défunct Cardinal, auec lequel il auoit si
hardiment & insolemment entrepris sa persecution. Ce
sont les raisons qui l’ont porté à defferer à elle seule
la Regence absoluë du Royaume que le feu Roy luy
auoit donnée, limitée & conditionnée, mais il s’est trouué
trompé dans ces esperances : Car il s’est rencontré que le
Cardinal Mazarin, plus fourbe que le deffunct Cardinal,
abusant de la confiance que la Reyne prend en luy ; Cet
Estranger, que la trahison a esleué à la dignité de Cardinal,
& qui nous a esté laissé par le deffunct Cardinal, pour conseruer
sa famille en ses biens & honneurs, & acheuer la ruyne
de la France : Marchant sur ses pas & suiuant ses desseins,
porté d’vne mesme ambition pour luy en ses parens, & d’vne
plus ardente conuoitise, apres s’estre emparé de la personne
du Roy, sous vn nouueau Titre d’Intendant de l’education
Royale ; N’a pas seulement diuerty les deniers publics par
l’vsage des Comptans pour les employer à son profit & celuy
de ses parens, tant en Italie qu’en France : Mais encores
pour faire verifier au Parlement plusieurs grandes listes d’Edicts
& Declarations, à la foule & oppression de tous les
Subjets du Roy ; Il ne s’est pas contenté de faire enleuer de
la Ville de Paris les Presidens Gayen & Barillon (au dernier
desquels il a fait passer les Monts, ce que pas vn autre auparauant
luy n’auoit entrepris) Qui sont decedez, non sans

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soupçon d’vne mort aduancée par poison : Mais encor il a
fait venir deux fois le Roy mineur au Parlement, pour par
sa presence l’obliger à les receuoir & aggréer ; & quoy qu’il
eust droit de s’opposer à ses venuës & enleuements, & d’empescher
l’effect de tels Edicts & Declarations : neantmoins
la consideration de la Guerre a encor empesché qu’il ne se
soit opposé à des entreprises si preiudiciables à l’honneur du
Roy, à la liberté des Cours Souueraines & bien de tout le
Royaume, dans l’esperance d’vne prochaine Paix, laquelle
restabliroit l’ordre dans l’Estat, & soulageroit la misere du
peuple, de laquelle le Cardinal Mazarin a tousiours entretenu
le Parlement & toute la France ; Mais voyant que le
mal s’augmentoit, qu’il entretenoit la Guerre par ses intrigues
au lieu d’auancer la Paix ; Que les deniers qu’on leuoit
sur le peuple n’estoient point employez au fait de la Guerre,
mais tournoient à sa seule vtilité, par le moyen de ses Comptans ;
Que le peuple ne pouuoit plus supporter les grandes
charges des Tailles & Impositions, desquelles il estoit opprimé ;
Qu’il vouloit despoüiller tous les Officiers de France,
mesmes ceux des Cours Souueraines de leurs biens en leur
ostans leurs gages ; Qu’on refusoit mesmes de leur en donner
quelque portion pour leurs aliments ; Que les Tailles
estoient tombées en party contre l’ordre prescript par les
Ordonnances & les Loix du Royaume ; Que par ce moyen
elles se leuoient auec des rigueurs insupportables & des frais
excessifs ; Que les Traittans auoient auancez deux années
& plus du reuenu du Roy, desquelles auances il auoit absorbé
la plus grande partie ; Qu’il choquoit continuellemẽt
l’authorité, liberté & priuilege du Parlement par des Arrests
du Conseil & autres nommez du Conseil d’enhaut, desquels
il se seruoit pour l’oppression du peuple ; Que les Baux des
Fermes du Roy & les Traittez des parties qui se faisoient au
Conseil n’alloient pas à leur iuste prix & valeur, à cause des
grandes sommes de deniers qu’il tiroit des Fermiers & gens
d’affaires lors de l’adiudication desdits Baux & Traittez, à la
charge desquels ils s’adiugeoient, & du tribut Annuel qu’il
tiroit d’eux pour la faueur de sa protection, & que par ce
moyen par des voyes illicites, il faisoit de grands fonds de
deniers au preiudice des Finances du Roy & de la chose publique ;

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Enfin que toute la France estoit à la veille d’vne ruyne
totalle & d’vn mal sans remede, & que son gouuernement
rendoit la domination du Roy, fascheuse & insupportable
à ses Subjets & odieuse aux Estrangers, receuant
de continuelles plaintes de tous les Corps & Estats
de la France. Il est enfin reuenu de son assoupissement,
& se ressouuenant du pouuoir que les Loix de cet Estat luy
donnoient, duquel il sembloir auoir perdu la memoire,
de ce qu’il deuoit au Roy & à son Royaume dans sa minorité,
que par la disposition de nos mœurs & coustumes, il est tuteur
naturel de nos Roys, principalement pendãt le temps de leur
minorité, & iugeant qu’vne plus grande tollerance le rendroit
coupable enuers le Roy deuenu majeur ; Il s’est senty
obligé de chercher les moyens conuenables pour remedier
aux abus que l’ambition & l’auarice du Cardinal Mazarin auoit
formé dãs l’Estat. Et pour cet effet s’estãt vny aux autres
Cours Souueraines, nonobstant l’exil de quelqueue Officiers
desdites Cours à la sollicitation du Cardinal Mazarin, & de
tous les artifices imaginables pour l’empescher : Et leurs Deputez
ayant trauaillé ensemble vtilement à la recherche de
ces abus & au moyen de les corriger. Le Cardinal Mazarin
ne pouuant souffrir cette reformation, laquelle luy ostoit
les moyens de continuer le pillage des Finances du Roy par
des Comptans, & rendoit le Monopole sans credit & exercice,
apres auoir entretenu le Parlement & les autres Cours
Souueraines par des Conferences, pour eluder l’effect des
propositions arrestées par les Deputez, lesquelles ne contenoient
que deux Chefs : Le premier, les inexecutions & contrauentions
faites aux Ordonnances : Et le second, des iustes
Remonstrances au Roy & à la Reyne pour le soulagement
de tous les Estats & Corps du Royaume. Il a fait venir
le trentiesme Iuillet dernier, pour vne troisiesme fois, le Roy
mineur au Parlement, pour faire authoriser par sa presence
vne Declaration par luy dressée sous le nom du Roy, contenant
quelques Chefs desdites propositions : Mais la presence
du Roy l’ayant renduë suspecte au Parlement, puis qu’elle
n’est necessaire pour luy faire approuuer les Edicts & Declarations,
lesquelles tendent au bien de la France & soulagement
de la misere du peuple, & ayant esté reconnu par la

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lecture d’icelle qu’elle n’estoit satisfactoire, mais captieuse
& pleine de fraude, comme estant son ouurage, en ce que
soulageant d’vn costé le peuple par la remise de quelque
partie des Tailles, d’vn autre elle l’opprimoit dauantage en
confirmant plusieurs droicts non verifiez, & speciallement
des droicts d’Entrée sur le Vin & autres Marchandises entrant
dans la Ville de Paris & autres Villes du Royaume, se
montant à de grandes sommes, contre & au preiudice d’vn
Arrest rendu le 20. dudit mois de Iuillet en la presence de
Monsieur le Duc d’Orleans, venu au Parlement de la part
du Roy & de la Reyne, portant reuocation de tous les droits
non verifiez, & entr’autres desdits droits d’Entrée ; Et qu’vn
nouueau Tarif seroit fait de tous les droits à prendre sur toutes
les Marchandises du Royaume : Enfin qu’elle n’apportoit
pas tous les remedes necessaires aux desordres presens, obseruez
par les cahiers des Deputés des Cours Souueraines, ny
le soulagemẽt que le peuple en esperoit, & qu’elle n’estoit le
fruict esperé & attendu des Conferences des Deputez des
Cours Souueraines auec Monsieur le Duc d’Orleans & les
principaux Officiers du Conseil : Il fust resolu en la presence
de mondit Seigneur le Duc d’Orleans, Que suiuant ledit
Arrest du vingtiesme dudit mois de Iuillet il seroit procedé
à vn nouueau Tarif ; & que pour le composer Messieurs de
Broussel & Ferrand Conseillers du Parlement se transporteroient
au Palais d’Orleans, où il a esté trauaillé plusieurs
iours en la presence de mondit Seigneur le Duc d’Orleans,
Monsieur le Chancellier & Mr le Surintendant des Finances,
Deputez de la Reyne pour vacquer à dresser ledit Tarif :
MAIS LE DIEV des Armées nous ayant donné vne signalée
victoire sur nos Ennemis, le Cardinal Mazarin au
lieu de receuoir ce bien du Ciel auec des reconnoissances
telles qu’il debuoit, & de s’en seruir pour procurer le soulagement
du peuple, Il s’en est seruy pour faire esclater sa colere
contre le Parlement, & elle luy a donné la hardiesse de
faire enleuer de la Ville de Paris pour vne seconde fois des
Officiers du Parlemẽt : Et entr’autres lesdits sieurs de Broussel
& Blasmeny, & en faire propscrire quelques autres ; Mais
le procedé duquel il a vsé pour paruenir à cette propscriptiõ
& enleuement merite d’estre consideré, & nous rappelle la

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memoire des Trahisons & Vespres Sicilienne. Sçachant que
c’est la coustume lors que nos Roys vont en l’Eglise de
Nostre Dame de Patis, pour rendre des actions de graces
des victoires remportées sur leurs Ennemis, de faire mettre
sur leurs passages toutes les Compagnies des Gardes Françoises
& Suisses en armes : Il a pris le iour destiné â cette
ceremonie pour le remerciment enuers Dieu du gain d’vne
si grande bataille pour faire executer cet enleuement projecté ;
Car se seruant de l’occasion des Compagnies des
Gardes Françoises & Suisses, lesquelles auoient occupé
toutes les places du passages du Roy de son Palais iusques
en l’Eglise de Nostre Dame ; A peine cette action
de grace à laquelle le Parlement fut inuité & assista, fut-elle
acheuée le vingt-sixiesme du mois d’Aoust dernier,
qu’au mesme moment faisant aduancer quelques soldats
vers les aduenuës du logis de Monsieur de Broussel scitué
aux enuirons de l’Eglise de Nostre-Dame, l’vn des plus sages
& des mieux intentionnez Conseillers de la Cour pour
le seruice du Roy & le bien public : Il le fit enleuer à main
armée de sa maison, Monsieur le President de Blasmeny,
receut au mesme temps vn pareil traitement, & le mesme
iour il fit exilet plusieurs autres Officiers de ce Corps par
des Lettres de Cachet, Que peut-on dire de cette action,
ou plustost de cette lascheté, laquelle a changé le matin dudit
iour dedié à vne resioüissance publique en vn soir de
tristesse & de pleurs ; Sinon que le Cardinal Mazarin
par vne trahison Italienne a changé vn Sacrifice de
loüange en vn Sacrifice sanglant ; s’est seruy d’vne saincte
action pour violer la Foy publique, a terny le lustre d’vne
iournée glorieuse, changé le repos en trouble, la lumiere en
tenebres ; Enfin qu’il a voulu immoler à sa fureur des Officiers
du Parlement comme des victimes.

 

Dans cette occasion laquelle causa en mesme temps vne
émotion populaire les Habitans & Bourgeois de la Ville de
Paris, Quoy qu’ils eussent tous sujet de prendre les Armes,
pour s’opposer à vne violence si publique, qu’ils sçeurent n’auoir
esté executée que par les Ordres du Cardinal Mazarin,
ayans eu raison de croire qu’on en vouloit à leur liberté puis
qu’on attaquoit celle du Parlement, & qu’on emprisonnoit

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les plus gens de bien de ce Corps, & ses meilleurs Concitoyens,
desquels ils estoient obligez de prendre la deffense
par les raisons d’amitié de voisinage, & les obligatiõs recẽtes
qu’ils auoient au Parlement, pour auoir beaucoup trauaillé
au soulagement particulier de la Ville de Paris, par la reuocation
qu’il auoit procuré de plusieurs taxes faites sur la
meilleure partie des Habitans de la Ville de Paris, à cause du
Toisé & de l’Abonement du domaine, & rendu l’accez d’icelle
libre à tous les Subjets du Roy, que des taxes solidaires leur
auoiẽt interdit, & plusieurs autres bõnes consideratiõs pour
le seruice du Roy & bien de l’Estat ; NEANTMOINS ils
n’ont pris les Armes que pour empescher que cette émotion
populaire ne causast le pillage de la Ville de Paris, les Bureaux
des receptes du Roy, mesmes des maisons des Partisans,
& de celle du Cardinal Mazarin. CAR ce qui est arriué
en l’Hostel de Luynes, & ce qui s’est passé à l’endroit de
Monsieur le Chãcellier est desaduoüé de tous les Bourgeois
& Habitans de la Ville de Paris : Et comme cette émotion
populaire a cessé par le retour de Messieurs de Broussel & de
Blasmeny & des exilez accordez aux humbles prieres du
Parlement, dans le mesme moment la Ville de Paris a posé
les Armes ; Tout le monde a estimé que ce retour auoit pacifié
toutes choses : MAIS le Cardinal Mazarin se tenant
offensé, des seruices qu’auoit rendu au Roy la Ville de Paris
en cette occasion & à luy mesme ; Pour se venger de l’injure
qu’il a crû luy auoir esté faite par les vns & les autres, il
a fait sortir precipitamment le ROY de sa bonne Ville de
Paris vn Dimanche treisiesme iour de Septembre dernier.
Ce depart precipité & inopiné suiuy de l’emprisonnement
du sieur Chauigny & de l’exil du sieur Goulas, a donné vn
nouueau sujet au Parlement de defiance des desseins du Cardinal
Mazarin : mais ce nouueau trouble suscité par sa malice
s’est trouué aussi-tost appaisé par l’entremise des Princes
du Sang, auec lesquels les Deputez du Parlement estans demeuré
d’accord à sainct Germain en Laye des articles d’vne
nouuelle Declaration conuenable à la dignité Royale à sa

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bonté enuers ses Subjets, & conforme aux propositions de
toutes les Cours Souueraines, elle a esté enouyée au Parlement,
& verifiée auec vne acclamation publique le vingt-quatriesme
Octobre dernier, au grand contentement & satisfaction
de la Ville de Paris & de tout le Royaume, puis
qu’outre le soulagement qu’elle a apporté à toute la France,
elle a produit le retour du Roy en sa bonne Ville de Paris,
qui calma le perilleux orage dont l’Estat estoit deslors menacé.

 

Tous les gens de bien se sont persuadez que ce retour, sollicité
mesme en apparence par le Cardinal Mazarin apporteroit
le repos à toute la France, & principalement au Parlement
& à la Ville de Paris : Mais l’euenement a fait voir
que le Cardinal Mazarin n’a consenty à ladite Declaration
& au retour du Roy, que pour prendre vne occasion plus
fauorable à ses desseins & au party des Monopoleurs ; Qu’il
n’est reuenu en cette Ville de Paris, que pour pendant le
temps qu’il y a sejourné, ESBRANLER les esprits des plus
fermes au seruice du public, corrompre la fidelité des plus
affectionnez Seruiteurs du Roy ; diuiser les Officiers du Parlement
entr’eux les autres Cours Souueraines d’auec le Parlement,
& negotier des intelligences secrettes : Car en suitte
de plusieurs contrauentions faites à la Declaration derniere
par de nouuelles leuées sur le peuple sous pretexte d’estapes,
sçachant que les Ennemis auoient mis leurs Troupes
en quartier d’Hyuer. Il a fait secrettement aduancer toutes
les Troupes de Flandre aux enuirons de la Ville de Paris ; Il
en a mesme tiré d’Italie & de Catalogne pour les faire approcher
de la Ville de Paris ; Fait distribuer des deniers aux
Officiers de guerre pour faire des recreuës ; Fait enuoyer les
Ordres de tenir leurs Trouppes prestes au premier mandement ;
Fait faire vn fonds de quatorze millions pour le payement
d’vne puissante armée ; Et enfin voyant tous ses
desseins en estat de reüssir, outré au dernier point que la
Chambre des Comptes n’a pas voulu passer vne Declaration
portant le restablissement de l’vsage des prests & aduances,

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laquelle estant verifiée luy eust donné le moyen de tirer
de l’argent comptant de tous les Traittans & Partisans du
Royaume, & de porter la derniere main aux Finances du
Roy pour rendre l’année malheureuse par vn malheureux
commencement ; Il a enleué le Roy, ce sacré depost mis entre
ses mains, & confié à ses soins à deux heures apres minuit
de sa bonne Ville de Paris le sixiesme du present mois de
Ianuier, & dans le mesme temps la Ville de Paris s’est trouuée
inuestie & enuironnée de gens de Guerre, les passages
des viures occupez, la liberté des chemins ostez, la campagne
couruë par des Caualiers qui ont traitté les Subjets du
Roy comme des rebelles, & plus mal que ne feroient les
plus cruels & les plus declarez Ennemis de l’Estat : Cette
nouuelle a surpris le Parlement autant qu’on peut s’imaginer,
& sur le sujet d’icelle, s’estant le mesme iour extraordinairement
assemblé, quoy qu’il eust tout sujet de croire que
cet enleuement estoit vne declaration assez precise de la
mauuaise volonté du Cardinal Mazarin contre le Parlement
& la Ville, mais vn dessein tout formé de la ruïne totale du
Royaume ; Neantmoins pour ne pas manquer de respect enuers
leurs Majestez, & vsant de sa prudence accoustumée,
ayant appris que le Cardinal Mazarin, pour couurir le crime
de cet enleuement sous le nom du Roy, auoit escrit aux Preuosts
des Marchands & Escheuins de la Ville de Paris : Que
les desseins d’aucuns Officiers du Parlement contre son seruice
& mesme contre sa personne pour la mettre entre les
mains de ses Ennemis auec lesquels il les accusa d’auoir eu
intelligence, l’auoient obligé de se retirer de la Ville de Paris,
quoy qu’ils ne deussent point se mettre en peine de cette
calomnie laquelle se destruit assez de soy mesme ; NEANTMOINS
ils ont deputé le lendemain septiesme du present
mois de Ianuier les Gens du Roy vers leurs Majestez à saint
Germain en Laye, pour sçauoir de la Reyne les raisons de
l’esloignement du Roy, & apprendre d’elle qui estoient les
Officiers du Parlement qui auoient eu de mauuais desseins
contre son seruice & sa personne pour leur estre fait & parfait

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leur procez, l’asseurer des humbles seruices du Parlement
& de ses obeïssances, & la conjurer auec toutes les instances
possibles de ramener le Roy en sa bonne Ville de
Paris : Mais le procedé duquel l’on a vsé enuers eux ausquels
on a refusé toute audiance, mesmes comme à des personnes
priuées ; le traittement inhumain qui leur a esté fait par les
Ordres du Cardinal Mazarin, & l’enuoy par luy de certaines
lettres Patentes sous le nom du Roy au Parlement pour
la translation d’iceluy en la Ville de Montargis, ont fait connoistre
que ce specieux, mais faux & supposé pretexte qui
n’a iamais esté crû de personne du mõde, comme trop esloigné
du sens commun, estoit vne pure inuention de l’esprit
malicieux du Cardinal Mazarin pour diuiser le Parlement
d’auec soy-mesme, jetter la discorde entre les Cours Souueraines,
& principalement entre le Parlement & la Ville de
Paris, pour plus facilement les perdre estans attaquez diuisément ;
Ce que voyant le Parlement, & que le Cardinal
Mazarin entreprenoit, non seulement sur leur vie & liberté,
mais encor sur celle de la ville de Paris (laquelle est en
sa speciale protection) qu’il auoit commencé à vouloir opprimer
par des Taxes faites, à cause du Toisé & de l’Abonement
du Domaine, pour en suite acheuer son dessein d’assujetir
ses Bourgeois à souffrir toutes les impositions, lesquelles
sont payées par les villes taillables & Habitans
du Plat-païs, veillant pour sa seureté & son salut, laquelle
est la cause commune, elle luy a ordonné de prendre
les armes pour la garde de la ville, & pour s’ouurir les
passages des viures, faire retirer les gens de guerre, lesquels
en leur ostant la commodité des viures veulent reduire le
Parlement & la ville de Paris à rachepter leur vie, leur liberté
& le repos de leurs familles, en liurant au Cardinal Mazarin
les plus gens de bien du Parlement & de la ville de Paris,
les plus affectionnez & zelez seruiteurs du Roy, qu’il veut
sacrifier à sa haine & couroux comme des malheureuses
victimes.

 

Cette deffence, laquelle est l’effet d’vne longue patience

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iniustement outragée, ne peut estre blasmée auec
raison, mesmes des plus malicieux esprits & des plus
interessez à la fortune du Cardinal Mazarin, par ce que
l’on ne sçauroit legitimement & auec sujet accuser le Parlement
& la ville de Paris d’auoir manqué de respect & de deuoir
enuers leurs Majestez, ny d’auoir blessé en quelque sorte
& maniere que ce soit l’authorité Royale dans tout leur
procedé & conduite en ses dernieres affaires, puis que pour
ce qui est du Parlement, tant s’en faut qu’il ayt fait autre
chose que ce que les Loix du Royaume luy ont permis &
qu’il a deub faire pour l’honneur de leur charge & acquit de
leur conscience, qu’au contraire, le Roy dans sa majorité &
ceux qui luy doiuent succeder peuuent vn iour luy reprocher
de n’auoir pas monstré assez de vigueur, & de generosité à
s’opposer aux leuées excessiues de deniers faites depuis la
guerre, soubs le pretexte des despences necessaires pour la
supporter, & de n’auoir pas empesché comme il pouuoit
vne si prodigieuse dissipation de Finances, puisqu’il est notoire
que par vn bon mesnage auec la moitié des deniers qui
ont esté leuez sur le peuple, on pouuoit entretenir la guerre
& satisfaire à toutes les charges du Royaume, & pour ce
qui est de la ville de Paris sa conduite dans les mouuemens
populaires, s’est trouuée si legitime & si aduantageuse au
bien du seruice du Roy, qu’elle a merité des remercimens
de la propre bouche de la Reyne, deffence dautant plus legitime,
qu’outre les raisons qu’elle a de sa necessité, elle est
specialement entreprise pour se garentir de la tyrannie dans
laquelle le Cardinal Mazarin pour assouuir sa cupidité &
contenter son ambitiõ veut reduite tout le Royaume, en opprimãt
la liberté publique auec les forces du Roy, de laquelle
les Romains & toutes les peuples de la terre ont esté si jaloux
que pour conseruer vn bien qui leur a esté si cher & si
precieux, ils n’ont espargné ny leur biens ny leur vie, qu’ils
ont tousiours hazardé librement & courageusement pour la
défendre, mais sur toutes les nations les François, cét ancien
peuple d’Allemagne, ont esté amateurs de leur liberté, car

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pour marque de la passion qu’ils ont eü de maintenir leur
liberté, ils ont pris ce nom de gloire & d’ambition de francs
ou François, pour montrer l’auersion qu’ils ont eü de la tyrannie,
si ennemie de la nature de l’homme si opposée aux
Loix du Christianisme, & au nom & empire d’vn Roy Tres-Chrestien ;
Enfin deffense dautant plus iuste qu’elle est encor
entreprise pour empescher le renuersement des Loix
fondamentales de tout le Royaume qu’il medite & prepare
restablir les choses dans leur premier estat, retirer le Roy
qu’il nous a volé de ses mains, de la personne duquel le Parlement
est respõsable à tous les Estats du Royaume & à tous
les Princes de la terre, & paruenir a son retour en sa bonne
ville de Paris, si desirée de tous les gens de bien &
pour lequel on fait tant de prieres à Dieu, comme estant
celuy qui doit changer nos iours d’affliction en des iours de
joye & de réjouissance, rapporter la tranquillité passée &
donner moyen au Parlement & à la ville de Paris de luy
continuer ses seruices & deuoirs accoustumez.

 

Et que les Partizans, ces oyseaux de proye, ces tyrans du
Peuple, ne disent point que le Parlement a cherché la reformation
de l’Estat dans vn temps hors de saison, & que leurs
deliberations ont apporté vn notable preiudice aux affaires
du Roy, & ont empesché la leuée des deniers, & qu’ils ne
comparent point cette defence à des Ligues, Traittez & confederations,
lesquelles ont eu leur Cours de temps en temps
depuis l’establissement de la Monarchie ; Car lors que le
parlement à trauaillé à la reformation de l’Estat, le mal
estoit dans l’extrémité, & il eust esté sans remede si on eut
tardé dauantage d’y apporter la guerison, pour ce qui est de
la leuée des deniers, elle a esté seulement retardée & non
empeschée & les quatorze millions que le Cardinal Mazarin
a amassez depuis la declaration, font bien voir qu’elle
n’a point fait de tort aux affaires du Roy, & qu’au contraire,
elle y a beaucoup seruy, & les Partisans qui se pleignent
du parlement pour leur interest particulier pour voir que le
recouurement des deniers par eux auancez est reculé ne

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s’en doiuent prẽdre qu’à eux seuls pour auoir esté la cause de
la dissipassiõ des Finãces, pour raison de laquelle ils meritent
auec justice la perte de leurs aduances ; D’AILLEVRS le
gain de la derniere bataille arriué dans le temps de cette reformation,
a fait voir que Dieu benissoit les actions du Parlement,
& il faut s’asseurer qu’il continuera ses benedictions
pour faire reüssir ses intentions, lesquelles ne vont qu’au
bien de l’Estat, à la conseruation de l’authorité Royale, & à
la gloire du Roy & du Royaume.

 

Enfin toutes les Ligues & Traittez cy-deuant faits
en France n’ont point de rapport auec cette deffence,
elle n’a point d’exemple dans l’Histoire, & tous
ces Traittez ont eu leurs interests particuliers détachee
de celuy du Roy & du Royaume : Mais le Parlement
ne peut auoir d’autres interests que celuy du
Roy & de la France, pour maintenir sa puissance
& authorité Royale contre des Fauoris, comme
le Cardinal Mazarin qui l’vsurpe insolemment,
pour establir sa tyrannie ; il ne peut auoir autres
desseins que la conseruation de l’Estat pour maintenir
les peuples dans leurs immunitez & franchises,
rendre au Royaume cette ancienne felicité de nos
Peres, & le restablissement de son ancienne & entiere
liberté.

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Anonyme [1649], LA IVSTIFICATION DV PARLEMENT ET DE LA VILLE DE PARIS DANS LA PRISE DES ARMES ; CONTRE L’OPPRESSION & Tyrannie du Cardinal Mazarin. , françaisRéférence RIM : M0_1796. Cote locale : C_5_73.