Anonyme [1649], LA LETTRE DV ROY D’ESPAGNE, ET CELLE DE L’EMPEREVR, ENVOYEES AVX PARISIENS, touchant les motifs de la Paix generale. , françaisRéférence RIM : M0_2146. Cote locale : A_5_58.
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LA LETTRE DV ROY D’ESPAGNE,
& celle de l’Empereur, enuoyées aux Parisiens, sur les
motifs de la Paix generale.

GRAND peuple, l’ornement de la France,
la gloire de son Monarque, & l’appuy inébranlable
de son Estat. Nous auons cy-deuant
donné des certitudes & asseurances
infaillibles de nostre affection & bien-veillance,
à la gloire des Parlemens, qui est celuy qui est enclos
dans le sein de vostre grande ville : Mais nous aurions
creu n’auoir entierement satisfait au desir inuiolable
que nous vous portons, si nous ne vous en auions fait
participant, vous apprenant que nous n’auons de
plus forte passion que pour le bien de nos Suiets, &
& de leur repos, qui ne peut estre sans celuy de la
France ; Et pour y paruenir il conuient faire vne bonne
paix generale & vniuerselle, ce qui sera facile ayant
osté les interests des particuliers qui s’opposent à vn
bien, d’autant plus grand & signalé qu’il est souhaitté
de toute l’Europe, qui gemit sous la tirannie d’vn pernicieux
Ministre, qui doit estre chastié par la rigueur
de nos Loix, comme estant vn de nos vassaux, & partant
iusticiable ; neantmoins ie remets nos interests
& la punition entre les mains de ce grand Senat François ;

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Et pour cét effet, nous luy auons enuoyé le procès
criminel, auec les motifs & raisons qui nous ont
meus à ce faire. L’Empereur mon allié, s’est declaré
partie complaignante & denonciatrice afin que le
tout estant veu par ces Iuges equitables (& le Procureur
du Roy sur ce interuenu par ses conclusions)
ils puissent prononcer selon les crimes & excés de ce
mauuais Ministre, qui a esté à cette cause declaré perturbateur,
veu qu’il est le seul fauteur qui a des-vny
nos Couronnes, & semé du trouble dans nos Estats,
n’ayant eu que des sentimens de guerre, & nous ayant
empesché plusieurs fois de nous reconcilier par vne
bonne pacification auec le Roy tres-Chrestien, duquel
il est ennemy pour auoir ruïné son Estat & deserté
ses Prouinces, lesquelles ne peuuent estre remises
que par vne solide concorde : Et on n’y peut paruenir
qu’apres auoir esté purgé de ce venin Cecilien & Mazariniste,
qui a voulu par prieres, presens & promesses,
attirer nos armes (comme nous auons ja mandé)
pour perdre la France, & saccager le Senat) ce qui ne
nous sera iamais imputé, que nous ayons succombé
aux pernicieux desseins d’vn si celebre criminel.

 

Nous vous faisons donc sçauoir derechef que nostre
intention est que son procés luy soit fait & parfait
en diffinitif, sinon cét Auguste Senat nous en permettra
l’euocation ; Sçachez donc peuple fidelle, que nous
n’auons point d’armes que pour soustenir vos interests,
reïterant nos promesses Royalles, de vous assister
de nos forces, si besoin est. Ie louë le zele & affection

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que vous portez à vostre Roy naturel & vni que
Seigneur, en voulant oster de sa Monarchie son
oppresseur & tiran, continuez & croyez que ie suis
tres-affectionné.

 

Lettre de l’Empereur.

Tres chers & aimables Seigneurs & Cõcitoyẽs,
Vous auez veu nostre denonciation, par
laquelle vous pouuez iuger quel est le sentiment que
nous auons preconceu contre le Tyran commun,
contre lequel nous aspirons à la decision de son procés.
Le Roy d’Espagne auec lequel i’ay fait vne si heureuse
alliance, sa Maiesté m’a communiqué les ressentimens
qu’elle a des iniustices & faits d’hostilité de
Mazarin, contre lequel nos peuples ont conceu vne
iuste indignation conforme à nos conseils, au moyen
dequoy il vous a esté de par nous enuoyé son procés
criminel pour estre ioint. Le Ciel sçait, & nostre
Empire est tesmoin, que nostre intention estoit il y a
long-temps de faire vne bonne paix auec la France,
laquelle a esté diuertie par la perfidie & mauuais ministere
de ce cruel Politique ; qui n’a rien tant haïst
que les Suiets de son Roy, lesquels il a ruinez, &
maintenu la guerre : ce sont les mesmes plaintes du
Roy tres-Catholique, lequel il a suscité, comme il
vous a donné aduis, afin de vous perdre par ses armes,
& consequemment la France. Et pour faciliter sa demande
criminelle, il a vsé de prieres suiuies de promesses,

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de donner sommes immenses & de rendre
les places assuietties à la France, mais ce cœur royal a
mesprisé ces iniustes demandes : ce que voyant, s’est
addressé à nous, & ayant receu nos refus, pour faire
voir l’extremité de ses passions de vengeance a eu recours
au Duc Charles pour impetrer le mesme secours
par les mesmes promesses, & de le remettre
dans son bien, ce Prince luy a fermé les oreilles &
s’est rendu inexorable à ses vœux ; tant s’en faut, il est
disposé aussi bien que nous à vous donner tout secours
& ay de en cas de besoin, suiuant son mandement,
& afin que vous ne teniez nostre promesse
Imperiale pour suspecte, il vous sera donné ostage
suffisant, tant il est vray que nous sommes iustement
indignez contre ce perfide, qui a fomenté la guerre,
& plusieurs fois violé nos Ordonnances & cassé nos
Traictez de paix, qui n’auroit esté faite par les obstacles
par luy apportées : n’eust esté les soins & heureuse
conduite du Prince de Longueville, & de la
circonspection & prudance des Ambassadeurs &
Deputez. Nous sçauons que l’ire de Dieu ne peut
estre flechie par nos prieres, ny par les vœux de nos
suiets, que nous n’ayons vne paix solide & generale,
qui ne peut estre que les obstacles de Mazarin ne
soient leuez, cela ne peut qu’a sa perte. A quoy nous
aspirons auec le Roy tres Catholique, qui n’a iamais
fait volontairement la guerre aux François, y ayant
esté poussé pour la deffence de ses propres interests
que ce Tyran a voulu rauir par le faict de la guerre

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qu’il a enflammée, & qui ne peut estre esteinte que
par la perte de sa vie Nous protestons n’auoir plus
grand ennemy au dedans & au dehors de nostre Estat
Imperial que luy, adioustez donc foy à ces presentes
depesches comme si elles estoient signées de nostre
main propre, nostre volonté & dessein estant de faire
voir à la France, combien nous sommes affectionnez
pour son bien & repos ; Et à cet effet la presente sera
imprimée, afin que par sa lecture & examen, les peuples
reconnoissent que nous n’auons que des souhaits
de bien-veillances, ne voulant en recompences
que ses prieres : L’efficace desquelles nous attendons,
auec le succés d’vne bonne & inuiolable paix.

 

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