Anonyme [1652], LA PVCE A L’OREILLE, OV LA CABALE MAZARINE DESTRVITE PAR l’Arriuée de l’Archiduc Leopold. , françaisRéférence RIM : M0_2926. Cote locale : B_11_32.
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LA PVCE
A L’OREILLE,
OV LA
CABALE MAZARINE
DESTRVITE PAR
l’Arriuée de l’Archiduc
Leopold.

A PARIS,
Chez MARTIN MAVRY, au Mont S. Hilaire.

M. DC. LII.

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LA PVCE
A L’OREILLE,
ou la Cabale Mazarine détruite
par l’arriuée de l’Archiduc
Leopold.

LE Ciel se couure d’vn manteau obscur
& noir, afin de ne plus regarder nos calamitez ;
& les angoisses que nous supportons
tous les iours. Il se lasse d’esclairer des
traistres, des perfides, & des perturbateurs
d’vn peuple innocent, lequel est pourtant
aymé & chery de Dieu.

Le feu ne se rencontre chez nous, que
pour nous consommer, & ainsi il paroist
necessaire pour seruir à la destruction
de nos ennemis : Mais il seroit à propos
de n’en pas trop approcher, de peur d’en
sentir ses plus vehementes ardeurs, qui sans
doute, nous pourroient dans peu de temps

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reduire en cendre ; & nous faire connoistre
ce que peut valoir sa puissance.

 

L’air n’a aucun contentement dans ses
facultez ordinaires, puisque mesme les
hommes, lesquels ne peuuent respirer ny
viure sans luy, luy font continuellement
la guerre par leur rage & effeminée colere ;
car ce bon air ne termine point de lieu
parmy nous, il est contraint d’en chercher
ailleurs ; & c’est ce qui nous tuë.

L’eau semblablement nous nuit, quoy
qu’elle soit amie des creatures, car elle seule
peut conseruer le genre humain : N’est-il
pas vray qu’elle nous destruit ; puis qu’elle
permet que nos destructeurs passent aysément
sur les seillons de son dos entierement
aquatique : Il semble en ce cas qu’elle nous
veüille trahir ; Point du tout, elle nous offre
ces forces pour la conseruation d’vn
peuple qui a demandé l’ay de de ces Princes,
afin de s’opposer à la tyrannie mazarine.

Et la terre que faut-il qu’elle fasse ? pour
tesmoigner le desir qu’elle a pour l’entretien
de ses creatures, sinon que de s’ouurir
charitablement pour engloutir celuy qui
ne peut viure sans deuorer ces Enfans : Son

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desir est de ne les plus voir flestrir ses nobles
habillements, & croit qu’elle aura droit de
les cacher, de crainte que ces bastards ou
auortons ne les pillent Elle se tient sur ses
gardes, & nul ne l’oseroit approcher : Elle
se rend redoutable, & nul du monde n’en
sçait la cause ny le suiet. Et toutesfois elle le
declare par ce diction,

 


Je suis la Mere des Viuans,
Ie donne mes grains tous les ans,
En saison à mes creatures,
Mais ie me treuue en ces lieux
Remplie de diuerses aduentures,
Qui troublent les hommes & les Dieux.
Chers compatriots, qui est cette Mere des
Viuans, que la Noble Ville de Paris : Ne
donne-elle pas tous les ans les grains, c’est
à dire, la subsistance à ces Citoyens, en
temps propre & opportun ; c’est pourquoy
cette Ville gemit sous le faix de ses souffrances,
& partant elle a droit de publier à tout
le monde qu’elle est chez elle, remplie de
toutes sortes d’aduersitez : qui semblent menasser
& la terre & la voute ætherée. Voila le
sujet de sa plainte, & qui bien la cõsidereroit,

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il prendroit peine à ne luy pas donner lieu
de faire ou former de tels ou semblables deuis.
Elle se fasche de voir le sang de ses enfans
respandre si prodigalement ; elle ne se
peut taire, elle publie hautement l’Autheur
de ses desordres : C’est Mazarin, dit-elle, &
sa faction, qui me rend tous les iours veufue,
& qui destruit le fruict que mon ventre a
porté, Ce Serpent a regardé mon tallon &
l’obserue sans cesse Il me surprendra à la fin,
si l’on ne me deffend, il dresse mesme des embusches
& des pieges contre celle qui la enfanté.
Maudite semence qui me destruis, ie
n’eusse iamais creu porter en mes entrailles
vn si dangereux fruict ; Mais puisque le Ciel
la permis, ie feray tous mes efforts pour
le reduire au neant, duquel tu es sorty. Malheureux !
tu crois que mes fleurs ne sont
pas dignes de paroistre deuant tes yeux ; sçache
que leur splendeur t’aueugleront, &
que la plus petite sera capable de te rendre
inuisible à son aspect.

 

Mal-heureux qui deuore les beautez de
mes jardins, & ne les ensemences que d’yuroye,
qui seul a le pouuoir d’enyurer les
plus sçauants & gens de bien de ce siecle.

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Mal heureux ! qui te vante que Dieu t’a
commis pour estre le Fleau de tout l’vniuerselle
Monde ; Il n’est pas vray, car
Dieu ne fut iamais autheur du mal, &
partant il t’est fort mal seant de nous faire
gouster les effects de ta tyrannie. Où as
tu les yeux, faut-il que tu mette le feu
dans vn Royaume qui n’a peu iamais sentir
les moindres odeurs d’vne legere fumée.
Ta Cabale est destruite, le combat sanglant
qui se fit à Charonne le monstre assez ;
Et en suite tes Partisans lesquels causerent
la mort des plus honnestes gens en
cette Ville le Ieudy ensuiuant, monstre assez
que la punition Celeste tombera bientost
sur ta teste, que sans aucune doute
elle l’escrasera. Tu mets la Puce à l’oreille
à tout le monde, mais tues asseuré que ce
mesme monde la rejettera sur toy, & te picquera
si sensiblement, que les rongeurs paroistront
visiblement sur ton visage.

 

Nos Princes ne seront plus suiets à tes
maudites Loix ; Ils seront exempts de tes
crimes, le Roy te chassera dés aussi tost
qu’il aura reconneu tes fourberies & nul
n’osera iamais plus parler de ton nom qui se

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rencontre & rencontrera tousiours parmy
nous estrange & scandaleux. C’est à quoy
tu deurois songer, en te rendant inuisible
parmy nous, & tres-apparent dans les Enfers.
C’est ce que te souhaitte celuy qui fut
tousiours ton amy.

 

FIN.

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