Anonyme [1652], LA RVZE MAZARINE DES COVVERTE, DEPVIS SA SORTIE DE PONTOISE iusques aux approches de la Ville de Chasteau-Thierry. Auec la deffaite de ses Trouppes proche le Bois de Morizet, distant d’vne lieuë de Charlis sur Marne. Par les Trouppes de Messieurs les Princes, Commandées par le Sieur Lardoüin, sous le Comte de Tauannes. , françaisRéférence RIM : M0_3570. Cote locale : B_13_56.
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LA RVZE MAZARINE DES COVVERTE,
depuis sa sortie de Pontoise, iusques aux approches de la
Ville de Chasteau-Thierry. Auec la deffaite de ses trouppes
proche le Bois de Morizet, distant d’vne lieuë de
Charlis sur Marne.

Par les Trouppes de Messieurs les Princes, commandées
par le sieur Lardouïn, sous le Comte de Tauanes.

CE n’est pas d’aujourd’huy que
le Ciel se vange des ennemis
du repos des habitans terrestres ;
toutes nos Histoires ne sont
remplies que de ses choses ; & les
exemples nous en sont si familieres,
que mesme les enfans les sçauent
presque par cœur : C’est pourquoy
ie ne m’arresteray pas icy à vous faire
vn grand narré ; afin de vous annoncer
ce qui c’est passé entre les
Trouppes de Mazarin & celles des
Princes.

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NVL ne peut ignorer que le C. Mazarin prit
congé du Roy & de la Reyne dans la Ville
de Pontoise, pour s’en aller au lieu à luy delegué,
comme on nous faisoit croire, qui estoit la Ville
de Mets ; mais ce n’estoit point son dessein ; car il
ne se sceut taire ; ains dit, vn soir en souppant ; qu’il
vouloit auparauant que de se retirer, communiquer
quelque chose au Comte de Paleau ; Ce qui
fit iuger a plusieurs de sa trouppe, qu’il n’auoit pas
enuie de se retirer au lieu de son exil. Vn Gentilhomme
peu affectionné à son seruice, fit sçauoir
cecy par vne Lettre de cachet, au sieur Lardoüin,
lequel commandoit quelques Trouppes des Princes,
sous le Comte de Tauannes ; luy mandant ;
Vous n’auez que faire de nous attendre puis que
nous ne passerons guere plus outre que Chasteau-Thierry,
afin de trauerser vne partie de Champagne
& Bourgongne, pour nous ietter dans le
Berry, afin de prendre Mouson, que nous croyons
estre aux abbois ; Et de là nous retournerons en
Cour : C’est pourquoy ie croy que nostre party est
meilleur que le vostre, quoy que ie ne l’ayme
guere. Ces paroles firent ouurir les oreilles au
sieur Lardoüin, lequel communiqua cette Lettre
aux Officiers de ce party, qui pouuoit estre compose
que de six à sept cens cheuaux, lesquels ne
manquerent de se mettre en embuscade, enuiron
vne lieuë de Chasteau-Thierry dans vn petit bois

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qui costoye la Riuiere de Marne, appellé le bois de
Morizet ; Là ils attendirent de pied ferme les troupes
Mazarines, qui estoient composées de mille
cheuaux sans son train ordinaire, lesquels ne sçauoient
pas qu’il y eust là des gens pour les Princes.
Ils aduancerent sans crainte & sans se donner de
garde de cette embuscade, laquelle les voyant approcher,
quitta son poste qui estoit dans le bois, &
vint les charger si adroictement, qu’ils en coucherent
sur le champ cinquante deux sur la place. Et
en suitte ce retirerent dans le bois. Mazarin, qui
n’attendoit pas vn tel rencontre, voulut retourner
vers Chasteau-Thierry afin de se mettre à couuert
des coups qu’il preuoyoit aduenir à ses trouppes ;
mais il en fut empesché par le neueu du Mareschal
d’Aumont, luy remonstrant, que si son Eminence
l’aschoit le pied pour vne si petite perte, qu’il y
auroit danger qu’il n’en souffrist vne plus grande
quand il viendroit à passer la riuiere : parce que les
Villes & les villages se banderoient toutes, afin
d’empescher son passage : Et qu’il falloit de necessité
combattre leurs ennemis, & leur faire quitter
le poste qu’ils occupoient en vn lieu si peu aduantageux.

 

Le Cardinal Mazarin trouua ce conseil bon, &
fit mettre ses gens en ordre pour tenter vne seconde
aduenture, laquelle luy reüssit aussi mal
que la premiere ; ce fut le Mercredy 21. iour d’Aoust,

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sur les deux à trois heures apres midy qu’il voulut
auoir son reuanche ; les trouppes de Monsieur de
Tauannes l’attendoient de pied ferme : si bien que
le second combat commença par de legeres escarmourches
lesquelles durerent iusques à quatre heures ;
puis ils s’approcherent & se batirent vertement
de part & d’autre : Sur les cinq heure & demie,
le party Mazarin voyant que celuy des Princes
leur faisoient front : ils l’ascherent le pied, &
commencerent à se battre en retraitte : Ce fut alors
que le combat fut plus sanglant : & qu’il y demeura
du costé Mazarin 48. homme sur la place,
auec cinquante six prisonniers, & le reste prit la
fuitte vers Chasteau-Tierry, les trouppes des Princes
n’estant assez fortes pour les poursuiure se retirent
en leur poste, assez capables de luy empescher
ses desseins. Il y eut en ce combat six chariots de
bagage pris sur les Mazarins, auec quantité de
cheuaux. Pour les morts tant de part que d’autre
ne sont pas considerables, vous sçauez seulement
que du costé des Princes, il ny a eu que trente
quatre hommes tant morts que blessez : Vous serez
aduertis que le bois ou estoit les gens des Princes
est entre Bonneille & Romegny à la veuë de
Nogen L’arthaut qui est de l’autre costé de la riuiere
de Marne, le susdit bois se nomme le bois
de Morizet, & les Mazarins ayant gagné le bois
des Escolliers au dessus d’Esonne, l’Abaye distant

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de Chasteau-Tierry d’vn quart de lieüe, ayant gagné
le Faux-bourg S. Martin, & de S. Crepin de ladite
Ville, le Gouuerneur l’ayant receu dãs le Chasteau
cy-deuant appartenant à Monsieur de sainct
Paul, & ses trouppes ayant passé le pont de Chasteau-Thierry,
sont restez proche de Nelle, village
proche le Faux-bourg de Marne, dõt il attend l’ordre
dudit Cardinal, qui est encore dans ledit Chasteau.
Attendant son depart nous vous en donneront
la suitte : de laquelle ie feray mon pouuoir de
vous en enuoyer la Liste au premier iour, lors que
ie l’auray receu par l’ordinaire de ladite Ville.

 

FIN.

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