L. G. [signé] [1651], LA RESPONSE DES PARTISANS A LEVR CATALOGVE. Avec leur avertissement envoyé aux Partisans des Provinces de ce Royaume. , françaisRéférence RIM : M0_3420. Cote locale : D_1_48.
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LA
RESPONSE
DES
PARTISANS
A LEVR
CATALOGVE.

Avec leur avertissement envoyé aux
Partisans des Provinces de ce
Royaume.

M. DC. LI.

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LA RESPONSE DES PARTISANS
à leur Catalogue. Avec leur avertissement
envoyé aux Partisans de ce Royaume.

MONSEIGNEVR, il est difficile de croire que
nous aurons lieu de pardon aupres vostre Eminence,
apres la hardiesse de ce discours, suiuant nostre
Catalogue, qui n’a pas pour Autheur vn particulier,
mais tout vn Corps qui a de la peine à se contenir dans
l’extremité où il se voit reduit, estant plus abaissé que
par ci deuant il n’estoit esleué : Nous ne parlons pas,
Monseigneur, de l’honneur des peuples, qui nous estoit
renduë en faueur de nos charges, que nous auons deliurez ;
cela seroit peu, & ne nous empescheroit pas d’auoir
l’esprit tranquille & en repos ; ce qui nous fasche
dauantage, est la perte des biens que nous auons deliurez,
& le peu d’asseurance que nous en esperons ; desquelles
miseres vous estes seul autheur : car vous nous
permettrez de dire, s’il vous plaist, si vous vous fussiez
contenté, non pas de peu, mais de beaucoup d’argent
que nous vous auons deliuré, & que vous eussiez pris
le temps vn peu plus long que vous n’auez pas fait, vous
auriez toûjours possedé le cœur du public, en sorte que
de nuit (comme de coustume) nulle garde n’auroit jamais
esté interposé entre vous & nous ; & nous aurions

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acquis des biens en vous acquerant, puis que le seul
moyen de faire nostre profit, est de vous agrandir, &
de vous porter au plus haut degré d’honneur, comme
pere & protecteur, nous craignons vostre départ, vous
le deuiez craindre aussi, Monsieur, vous ne serez adoré
au lieu où vous irez, comme vous estes icy ; vn Temple
ne vous donnera pas le gouuernement d’vn Royaume,
les Princes & Seigneurs ne vous apprehenderons
pas & le peuple ne se soubmettra pas ? quel honneur
esperez vous auoir ; en quel estat esperez vous passer
le reste de vostre vie ; là vous n’aurez pas des fauoris semblables
à ceux que vous auez icy ; chacun vous abandonnera ;
ceux qui font profession de vous seruir maintenant
dans vostre miserable cheute vous delaisseront ?
que croyez vous donc deuenir ; nous disons ces paroles
les larmes aux yeux, vostre perte est la nostre infaillible,
vostre retraite est la nostre asseurée ; le chef
estant osté, le reste de ses membres ne fait que se consommer
& aneantir ; songez à vous, si l’asseurance de
vos justes fait que vous ne. vous souciez pas beaucoup
de l’amitié d’vn temps de l’authorité qui vous met en
main de la soubmission du peuple ; croyez que les none
sont pas enuironné de remparts pour resister à la
violence d’vn peuple qui n’aura pas de compassion de
nous rendre en l’estat auquel nous estions pendant nostre
bas aage ; il nous tyrannisera plus rigoureusement
que nous ne l’auons tyrannisé, il nous fera sentir tous
les effets possible de la misere, châque personne

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conspirera contre nous, nostre refuge ne peut
pas estre vers les Seigneurs & Princes, puis
qu’eux mesmes seront inuenteurs des maux qu’on
nous fera pâtir & endurer ; nous regrettons maintenant
le temps passé, nous souhaiterions le pouuoir
reparer par des actes tous contraires à ceux
de cruauté & de barbarerie, mais l’heure est passée
qui le pouuoit reparer ; c’est vn labyrinte, dans
lequel il faut demeurer, la pelotte est trop meslée
pour s’en pouuoir retirer ? O mal heur faut-il preuoir
nostre perte, nous deuons nous esloigner en
des païs pour éuiter la rage du peuple ? helas c’est
vne pauure pensée ! nous y serions aussi mal traitez ?
Quel aduis donc, ie vous prie, Monsieur,
quant l’on sçaura que nous serons vos emispheres
(diront-ils de cét infame Sicilien) quel quartier
esperons nous receuoir, point, Monseigneur, asseurez
vous, pour personnes qui suiuent vos maximes,
estans trop pernicieuses à l’Estat, & la perte
infaillible de tout vn peuple, auoüons maintenant
la verité ; l’effet de nos tyrannies a trop paru pour
esperer misericorde ; il falloit se contenter d’vn peu
moins de bien, non pas pousser nostre fortune
jusques aux extremitez. C’est assez discourir sur
nos mal-heurs, la matiere n’estant pas trop plaisante :
cherchons quelque pardon, de promettre
la remise de quelques imposts ; le peuple ne s’y fiera

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jamais, par force, le peuple s’animera toûjours
dauantage, & puis de plus ce ne seroit pas veritable
pardon, l’inimitié se pouuant tousiours
couuer dans l’ame par amitié il nous seroit malseam
à nous, qui semblent estre ennemis du repos
d’vser sur le bord du naufrage d’vne chose contraire
à nostre naturel : il nous faut donc entrer
dans le desespoir, puis qu’il n’y a point lieu de pardon :
car si nous ne l’obtenons sans doute nous
perirons ? quel remede, Monsieur, pour nous si
nous sommes capables de vous donner conseil,
vous ferez amand’honorable à la maniere accoustumée ;
demanderez pardon à Dieu, à la Vierge,
au Roy, à la Reine, aux Princes, au peuple de toutes
les impietez qui ont esté causée à nostre sujet ;
cela fait Dieu pourra toucher vn peuple, qui pardonne
facilement à son ennemy, de vous mettre en
quelques Abbaye, pour y pleurer vos pechez &
vous repentir de toutes infames lasches impudiques
actions que vous auez commis : nous aussi
ressentirons les effets de cette glorieuse action, le
peuple se contentera de cette soubmission & ne
nous recherchera plus : prions Dieu, Monsieur, que
cela puisse arriuer, ne feignez pas de vous exposer à
vne si belle action, afin de nous obliger à vous reconnoistre
pour vn homme qui nous a seruy au
peril de l’honneur du monde.

 

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ADVERTISSEMENT AVX
Partisans des Provinces de ce
Royaume.

MONSIEVR,

Puis que j’ay dequoy me faire rechercher des
Grands parfaitement, & honorer des mediocres
& des petits, je veux à la faueur de mes
vtiles & excellentes pensées, penettrer les voûtes
celestes, & forcer toutes les influences benignes
de donner à mes desseins des succez auantageux,
puis que toute la sagesse se doit reduire à ce poinct
d’éleuer nos pretentions au dessus du vulgaire, &
faire voir ce que peut vn esprit sublime, lors
qu’il se forme vn objet supresme, la terre est faite
pour les animaux qui ne font que ramper, mais
ceux que la Nature a rendus plus agiles, ils n’ont
des bornes que celles du Soleil ; ils vont d’vn Pole
à l’autre, & chosissent les climats plus propres
à leur espece ; ainsi vn homme ordinaire peut
demeurer dans vne condition limitée, mais ceux
qui comme moy ont des facultez de raisonner
auec subtilité d’esprit, ils peuuent tout se promettre
de leur merite, ou de leur science : pourquoy
aussi bien que beaucoup d’autres ne trouuerai-je

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le moyen de faire des Palais aux champs
& à la ville, & les meubles des plus exquis &
somptueux ornemens qui se puissent trouuer
dans l’vsage des Princes & grands Seigneurs, moy
qui leur donne vn aduis à remplir les coffres de
l’Espargne, & faire des profusions à contenter les
plus prodignes, qui m’empeschera de prendre
moy mesme vn train digne de ma grandeur, pour
brauer auec ma suite & mon éclat ceux qui me
prenne pour vn homme de neant. Il n’est point
de moment que mes imaginations ne rendent
des signalez seruices au Roy & au public, parce
qu’ils ne sont iamais sans contribuer par leur
recherche admirable à l’honneur de la France &
de la Couronne. le veux que tous les Elemens
se sousmettent à mes volontez & deliberations,
& il n’y aura point de forteresse que ie ne rende
tributaire de mes forces. Si on veux escouter
mes propositions vrayement, ie ne suis pas de
ceux qui censurent la pompe, la piaffe, & la superfluité
de nos Dames, & qui ont mis souuent les
defenses de la broderie d’or & d’argent, poinct de
Gennes & d’Espagne, passemens de Flandres,
au prejudice de nos belles Dames, qui ne s’en
parent que pour nous plaire, au contraire ie veux
que leurs beaux petits patins soient couuerts de
perles ; que les Lingeres portẽt le bas de soye, & que

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les Diamens soit aussi communs parmy nous
que la pierre de taille la bronze & le Lierre,
enfin ie veux faire voir en effet que toutes les
descriptions qui ont esté faictes du Palais d’Apolidon
& de Lisle ferme, seront moindre en
valeur que les bastimens des Tailleurs & des
Condonniers & il ny aura celuy qui ne l’aduoüe
lors qu’il aura veu ce que ie veux faire
pour l’embellissement du monde, ie ne m’amuseré
pas à prendre vn sols sur les dentées
cela est bon pour ses grossiers qui ne sont pas
capables des grandes choses, mais moy a qui il
appartient d’operer noblement, ie puiseré les
richesses auec plus de facilité, qu’on ne puise de
l’eau dans vne fontaine, & si ie defie tous les
Financiers de me treter comme il fit aux autres
de ma profession a qui ils disent nous s’auons
il y a longtemps ce que vous nous dites
la ma pensée & le moyen de la faire reussir me
sont propres exclusiuement au reste des hommes
en parle qui voudra, mais dans le fonds
ce n’est que moy a y pouuoir atteindre, & ie
veux que dans toutes les Biblioteques du
monde mon nom y soit en aussi grande reuerence
que si i’auois composé toute la Philosophie
la Iuris prudence la medecine & la
Theologie ie suis l’honneur de ce temps le
precepteur des foux l’exemple & le guide de

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tous les feneants, mais apres auoir par vn admirable
nombre d’années arpenté le Pont
neuf la grande Sale du Palais, le Louure, & le
Palais Royal, enfin comme si c’estoit vne Rosse
d’or tombée dans ma ceruelle me suis trouué
tres-plain de toute felicité temporelle mon
cerueau c’est vn autre corne d’abondance ou
croissent à l’enuy mil inuentions auautageuses
pour la commodité vniuersele de tous les
hommes c’est a ce coup cheres pensees que
vous auez trouué le secret de banir la misere
du siecle & de satisfaire tant d’honnestes gens
qui se plaignent de la necessité, ie veux que
tout le monde ce resiouïsse & boiue à ma santé
& qu’on publie que sans sortir de mon Cabinet,
ie donné l’ordre & la felicité à la nature
heureuse les Prouinces qui nous ont donné
l’estre & la mere qui m’a enfanté puis qu’elle
à produict vne personne rauissante vn esprit
prodigieux & auec tout cela vne tres bonne
personne, mais quand i’auray faict ces dignes
Metamorphoses de changer les Artisans en
des Seigneur qui seruira de Cuisinier & le
reste des autres Offices necessaires voyla qui
me trouble, & si encore iusques a l’entiere
conclusion il faudra ce seruir des pauures
gens pour trauailler a ceste grande entreprise
[illisible.] aussi cela estant acheué nous pourrons

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dormir a nostre ayse les voleurs & les
creanciers ne nous donneront nulle alarme
chacun sera riche & content de son partage,
& si peu de trauail rendra les terres tres fertiles
les domaines seront aux mantez & le Roy
verra alors ses veritables seruiteurs & sa Majesté
ne sera plus importuné de tant de demande
ridicules, mais ie voy bien que tout
le monde attend impasiemme c’est heureux
& celebre auis & ie m’accuse d’estre si long
a le produire mais n’importe, vn bien de ceste
importance n’est iamais trop payé, en fin nos
hiuers n’auront plus des glaces que nous ne
fassions fondre les saisons n’auront plus rien
de rude, parce que chacun trouuera chez soy
le charme de toute incommodité, esprit des
esprits c’est toy qui pensent a tes peines malaisées
& rappellant par tes obseruations iudicieuses
tous les siecles passez tu as sagement
conclu en faueur des auantages publiee que
les metaux croisses tousiours dans les entrailles
de la terre, il faut necessairement qu’il
s’en trouue plus apresent qu’il ny en eut iamais
outre cela, les Mers contiennent vne
grande & large estenduë que si cela estoit escoulé
& decesché ses nouuelles terres donneroit
de si grandes abondances des fruits, qu’on
ne sçauroit plus qu’en faire, outre cela, en

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deceschant ses eaux tant de tresors qui sont
tombés dans la Mer, se retrouueront si bien
qu’il ny aura rien au monde qui ne flechisse
deuant celuy qui a de si excelens hommes
pour subjets, ie ne parle pas de la bondance
de poisson qu’on aura pour rien pui que a
cõsiderable, les Maisons les Bourgs & les Villes
ne sufiront pas pour contenir nos richesses
& la pauureté apresent si meprisée, ne sera
plus que pour ceux qui la chercheront volontairement,
mais ie veux qu’a l’honneur de
mon Cabinet où i’ay tant cherché ma Subsistance,
en faire construite vn autre où il ny
ait ny chaux ny bois : mais seulement ce Roy
des metaux Diamans d’azur & de pierrerie,
auec cét escrit sur la porte. C’est icy le noble
Cabinet des Partizans qui a ramené
parmy les hommes la Paix, l’Amour & la Ioye :
& comme la misere rendroient les esprits chagrins
& les humeurs fascheuses, l’abondance
chasse toute tristesse, nous agirons desormais
par amour l’esclauage & la tyrannie ne se trouuera
plus entre le valet & le Maistre, ceux qui
auront plus de conduite auront plus d’amis &
daides dans leur besoins, cette suite des pages
& de la quais ne seront plus l’enseigne des
grandeurs, les veritables grandeurs seront à la
personne & l’iniustice ne fera plus de desordre

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parmy nous. Ie dirois que le siecle d’or est reuenu
ou qu’il approche : mais il faut trouuer
des termes plus expres pour vn bon heur : qui
n’a pust estre gousté que par moy, tout ce
qu’on dit de l’heur des premiers siecles n’a rien
d’aprochant du nostre : parce qu’ils ont esté
incapables d’vne merueille si douce, l’air sera
plus sain ayant moins de brouillars, il ny aura
ny procez ny maladie au monde, au moins
dans le beau Royaume de France, & tous
ceux qui s’en sont pris aux Maltotiers & donneurs
d’auis seront contraints de ce repentir
de les auoir blasmez : mais, ie me trompe, ie
croy qu’il ny a personne si ennemy de soy-mesme
qui ne souhaite du bien à celuy qui
doit chasser tout le mal, & qui doit porter auec
plaisir vn preseruatif de douleur pour tous les
termes de l’année, tous nos pas seront des promenades
& nos paroles des chansons il ny aura
que Commedie & chacun entrera sans rien
donner pour son entrée quelle liesse ie commence
de me partager le premier dans ceste
source de felicité on dit que les premiers
hommes ont vescu iusques a mille ans, ie pretens
que par mon moyen les hommes iront
iusques là estans bien nourris sans peine n’y
desir, ie croy certainemant que la vie en sera
prolongee, mais ie trouue bien iuste que l’on

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m’accorde les honneurs que nous meritons à
ceste heure Roituriers Artisans nous serons
logez au supresme rang des esleuations & des
loüanges, attendant cette aymable saison.
Nous manger nostre pain sec & bis, auec paix
& ioye & prefereront aux bisques de ceux qui
craignent tout par leurs fauces prudence deuë
politique d’angereuse, & il y a du danger à
trop esperer, il y en n’a moins que de tout
craindre en tout cas le pris qui nous peut arriuer
c’est qu’il ne vendra rien de tout ce qui
pense, si ce mauuais succez me surprend ie
tascherons a resoudre ceste disgrace & de
prendre dans la suffrance de nos maux la fermeté
contre leur rigeur, ie ne blesse personne
par nos illusions, & si ie ne sommes hommes
de biens & d’honneurs il ne tient pas à
nos souhaits puis qu’ils l’ont sans cesse dans
leur visee, si tous nos Camarades estoient aussi
fidelles & obligeans de leurs pensées & qu’ils
voulussent en faire part au public, il y auroit
autant d’autheurs que des donneurs d’auis &
faiseurs d’affaires, de moy ie trouue qu’il y a
du plaisir d’en dõer aux autres les plus grands
biens sont les plus communicatif, ie ne sommes
pas des Maltotiers cupides, nous sommes
des esprit maginatifs qui tasche nous contenter
lors que touts les perils de la vie nous

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attaquent qui me croira fort, ie luy diré que
si sa folie & la mienne estoient balancées ie
ne sçay laquelle tomberoit sous le poids,
heureux qui se peut satisfaire si ce n’est en effect
au moins en apparence puis que toutes
les choses du monde ayant deux visages c’est
estre sage de les prendre du plus fauorable.

 

Fait à l’Assemblée des Partisans le 22.

Auril, 1651.

FIN. L. G.

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