Anonyme [1649], COPIE DV II. BILLET IMPRIMÉ A S. GERMAIN EN LAYE, QVI A ESTÉ SEMÉ DANS PARIS PAR LE CHEVALIER DE LA VALETTE. TENDANT A FAIRE SOVSLEVER les Parisiens contre le Parlement. , françaisRéférence RIM : M0_796. Cote locale : C_1_39.
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COPIE
DV II. BILLET
IMPRIMÉ A S. GERMAIN EN LAYE,
QVI A ESTÉ SEMÉ
DANS PARIS
PAR LE CHEVALIER
DE LA VALETTE.

TENDANT A FAIRE SOVSLEVER
les Parisiens contre le Parlement.

M. DC. XLIX.

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COPIE DV SECOND BILLET IMPRIMÉ
à Sainct Germain en Laye, & semé dans Paris
par le Cheualier de la Valette.

A qui aime la verité.

LE Parlement veut dépoüiller le Roy de son authorité
pour s’en reuestir ; les Princes qui se sont vnis au Parlement
voudroient bien s’accommoder de son bien & de ses
Places.

Et vous, pauures Bourgeois de Paris, sacrifiez vostre repos,
hazardez vostre vie, vuidez le fonds de vos bourses,
vous reduisez à la faim, vous prenez les armes contre vostre
Roy, & ne trauaillez qu’à vostre ruine, pour appuyer, sans
le sçauoir, les iniustes pretentions des vns & des autres ; c’est
bien se tourmenter pour se rendre criminels & malheureux
toute vostre vie, quoy qu’il arriue : car, ou le Roy demeurera
le Maistre, comme il y a grande apparence ; & si auant
cela vous ne reparez vostre crime, & ne regaignez son affection
par quelque marque de la vostre, il vous fera seruir,
vous & vos familles, d’exemple à la posterité, par vn chastiment
memorable de la rebellion que vous commettez ; ou
le Parlement & les Princes auront le dessus (ce qui fait horreur
seulement à le penser à tout bon François) & au lieu
d’vn Roy, d’vn legitime Souuerain qui vous cheriroit auec
tendresse, & ne songeroit qu’à vostre soulagement, & à
vous rendre heureux, vous aurez quatre cens Tyrãneaux

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qui vous déchireront & vous opprimeront de mille taxes
cõme ils ont des-ja commencé, & vostre opiniastreté
n’aura seruy qu’à allumer & nourrir vne guerre ciuile, qui
rendra la France la proye de ses Ennemis, & changera vostre
Ville la plus belle du monde & la plus heureuse, en vn
theatre d’horreur & de miseres.

 

Le Cardinal est vn méchant homme, parce qu’il n’a pas
voulu consentir à la destruction de la Royauté, où aucuns
du Parlement visent pour gouuerner eux-mesmes. C’est vn
perturbateur du repos public, parce qu’il n’est pas tombé
d’accord de contenter Nouion, Blancmenil, Viole, Broussel
& autres, ny les Princes en ce qui leur estoit venu à la
teste de pretendre. Il trouble le Royaume, luy qui a incessamment
trauaillé & auec succés à le conseruer en tranquillité
pendant toute la Regence, & à la procurer au dehors.
Il n’a ny luy, ny aucun de ses parens, place, ny charge,
ny Gouuernement, ny establissement ; & c’est vn ambitieux,
vn interessé, vn perfide. Les autres pretendans
n’ont rien contribué comme luy aux conquestes qui ont
esté faites, & ne laissent pas de demander les meilleures
places du Royaume, & des graces qu’ils n’ont point meritées.

Le Cardinal s’entend auec les Espagnols pour trahir
l’Estat, pour les en rendre Maistres : il faut qu’il soit bien
habile, & qu’il les dupe bien finement, de conseruer
ainsi leurs bonnes graces lors que le Royaume s’accroist
toutes les années de Places, & par fois de Prouinces entieres
à leurs despens. Si le bon Dieu nous assiste d’auoir
tousiours des Ministres si méchans, nous mettrons bien
tost en chemise le Roy d’Espagne de son consentement.

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Le Cardinal est vn cruel, vn violent, vn sanguinaire :
cependant on void la Bastille remplie depuis quinze
iours de plus d’Officiers & seruiteurs du Roy, qu’elle n’a
esté de méchans & de criminels dans les six années de la
Regence ; ou ie ne sçay pas qu’il y ait eu autre sang répandu
que celuy d’vn Italien qui donnoit des aduis aux
Espagnols.

Le Cardinal est vn Crœsus, vn voleur de deniers publics,
il a englouty tout l’argent de France : cependant
nous apprenons qu’il n’a pas dequoy viure, & que sa
maison est tous les iours sur le poinct de renuerser. Il
faut qu’il soit bien cruel à soy-mesme, de ne mettre
pas ses tresors au iour dans cette occasion où il y va du
tout pour luy, & où il ne luy seruiroit de rien de les
auoir sauuez, s’il se perdoit.

Enfin, les autres mettent tout s’en dessus dessous, font
prendre les armes au peuple contre leur Roy : cependant
ils ne sont ny perturbateurs ny méchans, ny gens
qui se remuënt pour autre interest que pour le bien public.
Pauure peuple desille tes yeux ; permettras-tu d’estre
sacrifié pour des interests particuliers de nulle consideration,
& de plus pour des gens qui se mocquent de
toy dans le temps mesme que tu sers à leurs fins ? Ne
sçais-tu pas que ces braues Princes passementez & brodez
à tes despens, boiuent tous les iours l’vn à l’autre
à la santé des Badauts de Paris ? L’vn d’eux disoit il y a
quelques iours, qu’il faloit prier Dieu qu’ils fussent long
temps dupez : l’autre, que c’est faire vne guerre bien
commode d’auoir beaucoup d’argent, coucher dans de
bons draps, & ne se battre point. Où sont ces deux cens

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mil hommes qui doiuent sortir pour engloutir d’vn
morceau les troupes qui t’affament ? Pour toutes les taxes
qu’on a faites sur toy, dont le Roy auroit pû leuer
cent mil hommes, qu as-tu encore que deux mil méchans
fantassins, & huict cens cheuaux de mesme, qui
n’osent monstrer le naiz hors la ville, sans se recongner
aussi tost dans tes portes, témoin la belle équipée
de Corbeil ? Si tu ne m’en crois pas pour le nombre, donne-toy
la peine de les compter aux reueuës, & ne t’estonne
pas apres cela si tous leurs exploits ne vont qu’à faire
cuire quelque pain aux Faux-bourgs & à l’escorter à la
Halle, pour persuader aux niais qu’ils l’ont conquis à la
pointe de l’espee en rase campagne.

 

Tes Generaux & autres Chefs, n’ont pas laissé de toucher
quatre à cinq cens mil escus : Il est vray que la pluspart
d’entr’eux clinquantez comme ils sont, valent bien
pour le moins les troupes qu’ils s’estoient chargez de leuer.
On controle les actions du Roy quand il donne mil
escus à des Officiers qui vont répãdre leur sang à la campagne
contre les Ennemis de l’Estat ; c’est vn prodigue,
vn dissipateur : les Finãces sont mal administrées, quand
on donne deux mil escus pour leuer vne Compagnie de
cheuaux legers qui va en des païs éloignez pour le seruice
de sa patrie ; & c’est estre fort moderé, grand œconome
& bon mesnager des deniers publics, quand on donne
icy des cinquante mil francs en pure gratification à
des particuliers qui ont pris party contre leur Souuerain,
quand on paye des quinze mil francs pour leuer vne
compagnie seule. Tu peux facilement t’éclaircir de ces
veritez, & si tu en doutes tant soit peu, la seconde touche

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qu’on se prepare de donner à ta bourse, ne t’en rendra
que trop certain, comme la troisiéme & la quatriéme qui
suiuront bien tost les autres, acheueront de te mettre aux
abois, si tu ne prens auant cela quelque resolution genereuse,
pour rompre les fers de la tyrannie qu’on t’impose. Pourquoy
souffrir si long-temps vn ioug si rude qu’il ne nous
soit pas seulement permis de parler ? parce que ceux que
nous faisions volontairement nos Maistres, ne trouuent
pas bon que nous le puissions faire que comme ils nous sifflent.
Ils en veulent au Cardinal : cependant qui ne sçait
que s’il eust voulu satisfaire les Chefs du party du Parlement
que ie t’ay nommez, & conseiller qu’on donnast Sedan,
le Havre, Montreüil, & autres choses de pareille nature,
le bien public se fust bien porté, il n’en seroit pas le perturbateur,
il auroit esté le meilleur Ministre qui fut iamais,
il faudroit le canoniser.

 

Est il possible apres cela que tu sois encore dupe, &
que tu laisses si long temps abuser de ta bonté ? Vange
plustost ton Roy desobey, mal traité, offensé, attaqué ;
Vange-toy toy mesme des maux que tu souffres, & de
ceux où l’on ne se soucie guere de te plonger à l’aduenir.
Quand tu n’aurois autre chose à craindre que de
perdre pour tousiours la presence de ton Roy, ce qui
t’est infaillible si tu t’opiniastres en ta rebellion. Ne
consideres-tu point quelle seroit pour toy la grandeur
de cette perte, & que cette presence est ce qui t’enrichit,
& te donne la splendeur & l’opulence par dessus les autres
villes. Où irois-tu chercher le payement de tant
d’argent que la Cour te doit ? Ne t’apperçois-tu point
que si elle faisoit son sejour en quelqu’autre ville, tous

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ces Artisans seroient à la faim, & qu’il se dépenseroit à
Paris moins de douze millions de liures par an, qu’on ne
fait.

 

Declare-toy seulement, & tu seras le Maistre de ces
factieux criminels qui t’ont armé contre ta patrie ; tu
auras les benedictions du Ciel, les graces de ton Roy, &
l’applaudissement de tous les bons François. Oblige le
Parlement à sortir de Paris, & tu obligeras ton Roy à y
retourner, & auec luy le bonheur, l’abondance, le commerce,
la tranquillité, la seureté, & enfin toute sorte
d’opulence, de felicité & de contentement.

Le Des-interessé à Paris.

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Anonyme [1649], COPIE DV II. BILLET IMPRIMÉ A S. GERMAIN EN LAYE, QVI A ESTÉ SEMÉ DANS PARIS PAR LE CHEVALIER DE LA VALETTE. TENDANT A FAIRE SOVSLEVER les Parisiens contre le Parlement. , françaisRéférence RIM : M0_796. Cote locale : C_1_39.