Louis (XIV), De Guénégaud [signé] [1651], DISCOVRS, QVE LE ROY ET LA REYNE Regente, assistez de Monseigneur le Duc d’Orleans, des Princes, Ducs, Pairs, Officiers de la Couronne & Grands du Royaume, ONT FAIT LIRE EN LEVRS presences aux Deputez du Parlement, Chambre des Comptes, Cour des Aydes & Corps de Ville de Paris, au sujet de la resolution qu’ils ont prise de l’esloignement pour tousiours du Cardinal Mazarin hors du Royaume, Et sur la conduite presente, de Monsieur le Prince de Condé, le 17. iour d’Aoust 1651. , françaisRéférence RIM : M0_1142. Cote locale : B_13_27.
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DISCOVRS, QVE LE ROY ET LA REYNE
Regente, assistez de Monseigneur le
Duc d’Orleans, des Princes, Ducs, Pairs,
Officiers de la Couronne & Grands du
Royaume,

ONT FAIT LIRE EN LEVRS
presences aux Deputez du Parlement, Chambre
des Comptes, Cour des Aydes & Corps de Ville
de Paris, au sujet de la resolution qu’ils ont prise de
l’esloignement pour tousiours du Cardinal Mazarin
hors du Royaume, Et sur la conduite presente,
de Monsieur le Prince de Condé, le 17. iour
d’Aoust 1651.

A PARIS,
Par les Imprimeurs & Libraires ordinaries du Roy.

M. DC. LI.

Auec Priuilege de sa Majesté.

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DISCOVRS : QVE LE ROY ET LA REYNE
Regente ont fait lire en leurs presences aux Deputés du Parlement,
Chambre des Comptes, Cour des Aydes & Corps
de Ville de Paris, le 17. iour d’Aoust 1651.

C’est auec vn extréme déplaisir, qu’apres
toutes les Declarations que nous auons cydeuant
faites auec tant de solemnité contre
le retour du Cardinal Mazarin ; Nous voyõs
que les ennemis du repos de l’Estat, se seruent encores
de ce pretexte pour y fomenter les diuisions qu’ils y ont
allumez : C’est ce qui nous a obligé à vous enuoyer querir,
pour vous declarer de nouueau, que nous voulons
& entendons exclure pour iamais ledit Cardinal, non
seulement de nos Conseils, mais de nostre Royaume,
Pays & Places de nostre obeissance & protection : Faisant
defenses à tous nos subiets d’auoir aucune correspondance
auec luy : enjoignant tres expressément, que toutes
personnes qui contreuiendront à cette nostre volonté,
encourent les peines portées par les anciennes
Ordõnances des Roys nos predecesseurs, & par les derniers
Arrests de nos Cours Souueraines, voulans que
toutes Declarations necessaires pour cela, soient expediées.
Apres vous auoir donné ces asseurances, & à tous
nos subiets, Nous ne pouuons plus dissimuler sans blesser
nostre authorité, ce qui se passe. Vn chacun sçait les
graces que la Maison de mon Cousin le Prince de Condé,
& luy en particulier, ont receuës du feu Roy de glorieuse
memoire, mon tres-honoré Seigneur & Pere, &

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de la Reyne ma tres-honorée Dame & Mere Regente.
Apres auoir accordé sa liberté aux instantes prieres de
mon tres cher & tres-aymé Oncle le Duc d’Orleans,
& aux tres-humbles supplications de mon
Parlement de Paris : Apres luy auoir rendu le rang
qu’il auoit dans mes Conseils, restitué le Gouuernemẽt
des Prouinces & Places que luy & les siens tiennent dãs
mon Royaume en si grand nombre, qu’il est aisé de
iuger que celuy qui les a desiré, vouloit plustost prendre
le chemin de se faire craindre que de se faire aymer
Apres auoir restably les troupes leuées sous son nom,
capables de composer vne armée : Apres luy auoir accordé
l’eschange du Gouuernemẽt de Bourgogne auec
celuy de Guyenne, luy ayant permis de retenir les places
qu’il auoit dans la Prouince qu’il laissoit, ce qui ne
s’estoit iamais pratiqué : Apres luy auoir fait payer les
sommes immenses qu’il disoit luy estre deuës d’arrerages,
de pensions, d’appointemens, de desinteressemẽs,
de monstres de ses troupes & garnisons, qui sont telles
que pour le contenter, on a esté contraint de diuertir
les fonds destinez à l’entretien de ma Maison, & subsistance
de mes Armées : Bref, n’ayant rien obmis de ce
qui luy pouuoit apporter vne entiere satisfaction, &
le disposer à employer les bonnes qualitez que Dieu
luy à données, & qu’il a fait paroistre autre-fois
à l’aduantage de nostre seruice, Nous auions conceu
cette esperance, lors qu’à nostre tres-grand regret,
elle a esté trompée par des actions bien contraires
aux protestations qu’il nous auoit faites solemnellement
dans l’Assemblée de nostre Parlement.

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Nous ne dirons rien de ce que aussi tost apres sa liberté, l’ardeur
de ses poursuites nous porta à faire les changemẽs que
vous auez veu dans le Conseil : Cette entreprise luy ayant
reüssi, il prist la hardiesse d’accuser, & se plaindre de la conduite
de trois de nos Officiers, ou de la Reyne nostre tres-honorée
Dame & Mere, laquelle leur commanda de se retirer
non seulement de nostre Cour, mais de nostre bonne
ville de Paris, pour oster à nostredit Cousin tout pretexte de
plainte, & pour estouffer les tumultes qu’il excitoit. Nous esperions
que toutes ces graces le disposeroient à nous complaire
en quelque chose, ou pour le moins l’empescheroient
de continuer ses mauuais desseins, lors qu’auec vn extréme
regret nous auons veu des effects tous contraires à ceux que
nos bontez auoient tasché de prouoquer. Nous auons remarqué
qu’apres que nostre tres-cher & bien-aymé Oncle
le Duc d’Orleans, luy a donné de nostre part, & a porté à
nostre Parlement nos paroles Royales, qui luy offroient
toutes les seuretez qu’il pouuoit desirer & qu’il auoit requises,
il demeura quelques iours sans se pouuoir resoudre à
nous voir, quoy qu’il se fut rencontré vne fois à nostre passage.
Enfin pressé par nostre tres-cher & tres-aymé Oncle
le Duc d’Orleans, & par nostre Parlement, de nous rendre
ses deuoirs, il prit resolution de nous voir vne seule fois, où
il fut receu par Nous & par la Reyne nostre tres-honorée
Dame, Mere & Regente, auec toutes les demonstrations
d’vne parfaite bien-veillance, qui eust esté capable de le
guerir de ses apprehensions, si elles ne venoient plustost de
sa propre cõscience, que des mauuais offices qu’il veut croire
luy estre rendus. Nous sommes obligez de vous dire ce qui
est venu en nostre connoissance, touchant ses menées, tant

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au dedans, comme au dehors de nostre Royaume. Pour
commencer par les choses qui sont publiques, chacun a veu
que nostredit Cousin s’est absenté depuis deux mois de nos
Conseils, qu’il les a descriez dans nos Parlemens & par tout
ailleurs, disant qu’il ne se pouuoit fier en Nous, ny en ceux
qui nous approchoient, ayant escrit à tous nosdits Parlemens
& à quelques-vnes de nos bonnes Villes, pour leur
donner de mauuaises impressions de nos intentions ; engageant
en mesme temps dans toutes nos Prouinces plusieurs
Gentils hommes & soldats à prendre les armes aussi-tost
qu’ils en seroient requis de sa part Il a aussi dans nostre bonne
Ville de Paris, qui donne le mouuenent à toutes les autres,
fait semer de mauuais bruits de nos intentions. Nous
auons appris aussi, qu’il renforçoit les garnisons des Places
que nous luy auons confiées, les munissoit de toutes choses
necessaires, & faisoit sans nos ordres trauailler en diligence
aux Fortifications, employant à cela nos Subjets, & les contraignant
d’abandonner leurs recoltes. Il a fait retirer nos
Cousines, sa femme & sa sœur, dans le fort Chasteau de
Mouron. Il a ramassé de toutes parts des sommes notables
de deniers ; enfin il pratique publiquement tout ce qui nous
peut donner sujet de croire ses mauuaises intentions. Nous
auons esté cõfirmez en cette croyance par les aduis certains
que nous auõs receu de diuers endroits, des intelligẽces qu’il
formoit auec les ennemis, tant à Bruxelles auec l’Archiduc,
que dans le Camp auec le Cõte de Fuensaldagne, faisant escorter
ses Couriers iusques dans les portes de Cambray, par
quelque Caualerie tirée des troupes, qui n’obeïssẽt qu’à luy
seul. Ces pratiques estãs faites à nostre insceu, sans nos passeports
& contre nostre volonté, qui peut douter de son intelligence

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auec ceux contre lesquels nous sommes en guerre
ouuerte ? Il n’a voulu non plus faire sortir les Espagnols de la
ville de Stenay, ainsi qu’il s’estoit obligé de le faire, cette
seule condition ayant esté exigée de luy lors qu’il fut retiré
de prison. Sa conduite est cause que Dom Esteuan de Guemarre
s’est approché de la Meuse auec son Armée, qu’il a
rauitaillé Mouson & s’est conserué le passage de Dun, qui
met en cõtribution vne partie de la Champagne, pour donner
aussi plus de moyen à nos ennemis d’entreprendre contre
Nous, & arrester les progrez que nostre Armée plus puissante
que la leur pourroit faire dans les Pays-Bas, par vne
entreprise qui n’a iamais esté veuë dans nostre Royaume,
quelques ordres exprez qui ayent esté dõnez. Ceux qui commandoient
ses troupes, n’ont iamais voulu obeïr aux commandemens
que nous leur auons faits, de ioindre les siennes
au corps d’Armée où ils auoient esté destinez par Nous &
par nostre Oncle le Duc d’Orleans ; ce qui a renuersé iusques
à present tous nos desseins, tant à cause de la iuste deffiance
que nous auons euë de ceux de nostre Cousin ; comme aussi
parce qu’il a donné loisir aux ennemis de se reconnoistre &
de se mettre en estat de s’opposer à nos forces, outre que
leur resolution s’est augmentée par les esperances, ou pour
mieux dire par les asseurances qu’on leur a données de quelque
mouuement dans nostre Royanme. Nous ne pouuons
nous empescher de vous dire, toutes les desolations que les
gens de guerre commandez par nostredit Cousin ont faites,
& qu’ils continuent de faire, en se maintenant entre la Picardie
& la Champagne, qu’ils acheuent de ruiner, au lieu
d’estre dans les pays ennemis à leur faire la guerre. La liberté
que ces trouppes prennent de piller nos Subjets, fait aussi

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que plusieurs de nos Soldats abandõnent nostre Camp pour
viure dans la licence, qui est dans le sien. Nous auons bien
voulu vous donner part de toutes ces choses, encores que
la plus grande partie vous fust déja connuë. Nous croyons
que vous iugerez par ces deportemens publics de nostredit
Cousin, que ses menées secretes ne sont pas moins dangereuses :
La connoissance que nous en auons ne nous permet
pas de le pouuoir dissimuler plus long-temps sans abandonner
le Gouuernail de cét Estat, que Dieu nous a mis en main
& que nous sommes resolus de tenir auec fermeté. Nous sçauons
que si nous n’apportons vn prompt remede aux desordres
qu’on veut ietter dans nostre Estat, nous ne pouuons
obliger nos ennemis d’entendre à la Paix que nous desirons
de conclure, ny reformer les abus qui se sont glissez dans
nostre Royaume, ainsi agité par tant de pernicieux desseins
& entreprises, si nous ne les preuenions & en arrestions le
cours, comme nous sommes resolus de faire, par les moyens
que Dieu nous a mis en main, dans l’asseurance que nous auons,
& que vous nous auez tousiours tesmoignée de vostre
fidelité & affection à maintenir nostre authorité, entretenir
nos Sujets dans l’obeyssance qu’ils nous doiuent, & que
nous nous asseurons que vous continuerez à apporter tout
ce qui dépendra de vos soins, pour faire valoir nos bonnes
intentions, pour le bien & repos de nostre Royaume. FAIT
à Paris le dix-septiesme iour d’Aoust mil six cens cinquante-vn.

 

Signé LOVIS,

Et plus bas, DE GVENEGAVD.

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Louis (XIV), De Guénégaud [signé] [1651], DISCOVRS, QVE LE ROY ET LA REYNE Regente, assistez de Monseigneur le Duc d’Orleans, des Princes, Ducs, Pairs, Officiers de la Couronne & Grands du Royaume, ONT FAIT LIRE EN LEVRS presences aux Deputez du Parlement, Chambre des Comptes, Cour des Aydes & Corps de Ville de Paris, au sujet de la resolution qu’ils ont prise de l’esloignement pour tousiours du Cardinal Mazarin hors du Royaume, Et sur la conduite presente, de Monsieur le Prince de Condé, le 17. iour d’Aoust 1651. , françaisRéférence RIM : M0_1142. Cote locale : B_13_27.