N. P. T. [?] [1652], LA LETTRE ESCRITE AV ROY, PAR DES ANCIENS ESCHEVINS DE PARIS, Sur les asseurances d’vne bonne & veritable Paix generale, suiuant la Declaration de son Altesse Royale & de Messieurs les Princes du 22. Aoust 1652. & aussi sur le prochain Retour de sa Majesté en sa bonne ville de Paris. , français, latinRéférence RIM : M0_2213. Cote locale : B_2_11.
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LA
LETTRE
ESCRITE
AV ROY,
PAR DES ANCIENS
ESCHEVINS
DE PARIS,

Sur les asseurances d’vne bonne & veritable Paix
generale, suiuant la Declaration de son Altesse
Royale & de Messieurs les Princes du 22. Aoust
1652. & aussi sur le prochain Retour de sa Majesté
en sa bonne ville de Paris.

A PARIS,
Chez IEAN RICHARD, au haut de la ruë des
Carmes proche S. Hilaire.

M. DC. LII.

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LA LETTRE ESCRITE AV ROY,
par les anciens Escheu ns de Paris, sur les asseurances
d’vne bonne & veritable Paix generale,
suiuant la Declaration de son Altesse Royale amp;
de Messieurs les Princes, du 22. Aoust 1652. amp;
aussi sur le prochain Retour de sa Majesté en sa
bonne ville de Paris.

SIRE,

Bien que vostre Majesté ne doute point de la
joye que l’espoir de vostre prochain Retour en
vostre bonne Ville a produite dans les cœurs de
tous les Parisiens, nous nous sentons forcez par
vn secret transport de vous persuader vne verité
qui seroit incroyable, si vostre Majesté ne sçauoit
bien que les François n’ont vn Roy que pour en
faire l’objet de toutes leurs affections.

Vostre Nom, SIRE, qui explique vostre
pouuoir, condamneroit l’insolence & la timerité
de nos plaintes, si nous ne protestions deuant
que de les faire que ce sont des plaintes d’amour,
qui ne retranchent rien des respects que nous

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deuons à Vostre Majesté, ny de l’estime que nous
faisons de son Conseil. Permettez nous donc,
SIRE, de vous dire que durant vostre absence,
Paris est vne veufue inconsolable, dont les
enfans souspirent incessamment pour le Retour
de leur Pere. Nos interests sont de trop petite
valeur pour en mettre la perte au nombre de nos
deplaisirs ; nous ne contons à rien la ruine & suspension
des affaires, l’interruption du commerce
& la necessité pressante de tant de mille ames,
qui languissent & qui ne subsistent que par la
presence de Vostre Majesté. Nous n’auons point
d’autres lumieres pour voir ce qui nous creue les
yeux que celles que la raison fournit à ceux qui
regardent vostre bonne ville de Paris dans l’idée
de Dieu, pour connoistre la fin pour laquelle sa
prouidence a donné pour Apanage à la France cét
abbregé de l’Vniuers.

 

Il semble que ce soit se contredire que d’asseurer,
que les Roys sont nez pour les Peuples, & les
Peuples pour les Roys, car cette proposition se
contrariant dans ses membres, se destruit en s’establissant
& n’asseure point de Souueraineté où
elle parle d’vne dependance reciproque, qui obligeant
les Subjets d’exposer leur vie pour la gloire
de leur Prince, veut que le Prince affronte la mort
pour l’intetest de ses Subiets. Neantmoins il est
tres-certain que les veritables Couronnes sont faictes
de lauriers, & que le Sceptre des Roys n’est

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qu’vn baston pour appuyer leur Estat. Quoy ! ceux
dont les Testes sont si cheres à leurs Subjets, doiuent-ils
auoir des bras pour les punir ? Certes, il est
autant fascheux qu’il est veritable, que ces creatures
qui sont sur la terre, ce que le Createur est au
Ciel, soient pour d’autres que pour elles, & que
ceux qu’on doit adorer, doiuent s’immoler aux
interests de ceux dont ils peuuent faire autant de
victimes à leur authorité. C’est pourquoy ce ne
sont point de veritables Roys, que ceux qui ne
peuuent asseurer le repos de leurs Peuples, que par
des soins dangereux à leurs personne : Mais où en
trouuerra on qui sans sortir de leur Palais, puissent
parcourir les terres de leurs voisins, pour les
vnir à leurs Royaumes, & soustenir les attaques de
leurs ennemis Il n’y en a qu’vn dans toute la terre,
& cét illustre Phœnix est dans l’Europe, puis que
l’Europe conte la France entre ses principales Prouinces,
& que la France a vn Paris pour conseruer
son Roy.

 

C’est, SIRE, ce chef-d’œuure de la Toute-puissance,
cette merueille des siecles, qui vous
donne les moyens de mesurer la France par l’estenduë
de toute la Terre, en demeurant dans vostre
Ville.

Si Vostre Majesté considere toute la Terre comme
vne Prouince, qui n’a que Dieu pour Souuerain,
n’aura-Elle pas raison de croire qu’il n’est

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point de Puissance qui luy puisse empescher de
s’en rendre la maistresse, ayant seule vn Paris, c’est
à dire, plus de forces vnies que tous les autres Monarques,
dont les Subjets escartez ne sont rien en
comparaison de ceux dont cette Ville qui n’en
peut conter le nombre en garenty la fidelité. Outre
les interests publics, il en est de particuliers, qui
quelquesfois emporte le dessus ; celuy d’vne Ville
s’oppose souuent à celuy d’vn Royaume : Mais en
France (car Paris merite en porter le nom) le Roy
estant auec le Peuple, & le Peuple auec le Roy, on
n’y voit point de poursuites partagées, puis que
l’vn ne peut trauailler à sa gloire, sans procurer le
bon-heur de l’autre.

 

Il est donc tres-euident que Dieu fait voir sa
puissance en V. M. auec plus d’éclat. que sur toutes
les autres Testes couronnées ; puis qu’on ne
peut dire autre chose de Paris, sinon que c’est vn
commencement qui aura pour fin les bornes de
la terre : pourueu que Vostre Majesté anime par
sa presence ceux qui luy seruiront d’instrumens
pour executer ses hautes entreprises : car ainsi que
le corps n’est qu’vn tronc immobile, s’il n’est vny
à sa teste : Paris n’est point Paris, s’il ne voit son
Roy.

Pleust à Dieu, SIRE, que vous fussiez tesmoin
des douleurs que ses habitans souffrent en
vostre absence, mais que disons-nous ? Nous nous

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contredisons ? Pouuez vous voir des tristesses,
puisque vous apportez la joye par tout ? Vous diriez,
SIRE, que ces effets humains seroient des
desespoirs, s’il n’auoient vne cause diuine, & connoistriez
que le Ciel souffre auec les Parisiens,
quand ils pleurent l’absence de Vostre Majesté,
puisque qu’elle destruit les moyens que vostre sejour
en vostre bonne Ville vous donne, pour signaler
vne veritable Paix de toute la France, par
les hommages que luy rendront tous ses ennemis ;
si durant vostre regne Paris est honoré de
vostre presence, puis qu’il vous a pleu d’éloigner
l’objet des diuisions pour reünir vos Subjets
dans le cœur de vostre Royaume, pacifiant les dissentions
ciuiles, & r’amenant la face d’vn siecle
d’or, & l’image du regne d’Auguste tousiours victorieux
& pacifique ; Certes, les Romains comblerent
ce Prince de benedictions, quand il reuint
à Rome couronné de Lauriers, apres la defaite
de ses competiteurs, & l’execution de sa
vengeance sur les assassiins de son Oncle. Le Sauueur
du monde voulut naistre sous l’Empire de ce
grand Monarque, & honorer de sa presence la
terre qu’il rendit par la paix vniuerselle le vray
prototype du Ciel. La prouidence diuine, SIRE,
vous a choisi pour causer le mesme bon-heur à la
France, & r’amener vne paix glorieuse, pour confondre
ses ennemis, & les faire crever de despit,

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la voyant dans son premier estat, & dans l’éclat
de sa gloire, vous regardant dans la pompe de vostre
Throsne, apres l’onction & les magnificences
de vostre Sacre, comme vn nouueau Salomon
dans celuy de son Pere, c’est ce que vous souhaitent,
de toute l’estenduë de leurs affections, les
Princes de vostre Sang, l’ayans tesmoigné par
leur Declaration derniere du vingt-deuxiesme
Aoust de la presente année, & en particulier.

 

De V. M.

le 23. Aoust
1652.

Les tres-obeyssants
& tres-fidels Subjets
N.P.T.

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