Voysin, Joseph [?] [1650], HARANGVE FAITE AV PARLEMENT de Paris par Monsieur de Voysin, Conseiller Deputé du Parlement de Bourdeaux. Ensemble l’Extraict des Registres, contenant la Deliberation du Parlement de Paris. , françaisRéférence RIM : M0_1579. Cote locale : D_1_34.
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HARANGVE FAITE AV PARLEMENT
de Paris par Monsieur de Voysin,
Conseiller Deputé du Parlement de Bourdeaux.

Ensemble l’Extraict des Registres, contenant la Deliberation
du Parlement de Paris.

A PARIS,

M. DC. L.

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HARANGVE
FAITE AV PARLEMENT
de Paris par Monsieur de Voysin,
Conseiller Deputé du Parlement
de Bourdeaux.

MESSIEVRS,

Nos maux vous ont esté assés cognus
pendant le temps que les plaintes
de toute vne Prouince, d’vne ville capitalle, & d’vn
Parlement opprimé, vous ont esté portées sur ce
Bureau trés-auguste ; Nos mal-heurs ont esté dans,
cette extrémité, qu’ayans esté seuls à les souffrir,
nous auons aussi esté seuls à nous plaindre ; jusques
à ce que par la faueur de vostre intercession
vous voulustes prendre part dans les interests publics,
dans le repos & la tranquilité des peuples, &
dans le restablissement de l’autorité des Parlemens ;
Cette Declaration qu’il vous pleut faire en nostre

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faueur, arrest le cours de la violence des armes de
Monsieur d’Espernon, & nous procura l’expedition
de plusieurs promesses, l’execution desquelles nous
pouuoit faire esperer quelque douceur, si celuy qui
auoit esté l’auteur & la cause de nos maux n’eust pas
esté maintenu parmy nous dans la Prouince ; Le desir
de conseruer cette paix, l’apprehension de perdre
ce repos, nous obligea de demeurer fermes dãs
la demande du changemẽt de Gouuerneur, c’est le
seul gage de nos asseurances ; & pour le poursuiure
Messieurs les Deputés du Parlement de Bourdeaux
ont esté plus d’vn an aux pieds de leurs Majestés
sans auoir peu rien obtenir, on leur demandoit vn
peu d’obeïssance, (ce sont les termes dont on vsoit)
bien qu’ils ne s’en soient jamais separés, & qu’il soit
de nostre fidelité de la rẽdre toute entiere, par le defaut
qu’ils disoient de ce peu d’obeïssance ; on taschoit
de nous mettre dans le crime, mais pour nostre
justification il me suffira de dire, que dans la dependãce
des sujets enuers leur Roy, il y en a qui s’attachent
à la qualité, laquelle est inseparable de la
personne ; de ceux qui s’attachent à la personne seulement,
il en est commede la mere de ces Apostres,
laquelle de leur consentement ne demandoit au
Fils de Dieu que des hõneurs pour ses enfans qu’ils
fussent assis à ses costés proche de sa personne : Ceux

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qui s’attachent à la qualité, laquelle est tousiours
auec la personne, ont pour tout objet l’honneur &
la gloire de leur Roy, aussi par vn contrecoup sa
Majesté leur cõmunique ce rayon de son pouuoir,
comme fit le Fils de Dieu au premier de ces Apostres,
Pasce ques meas. Dans cette difference d’amour
& de respect pour le Roy, il y en a qui n’ont
d’autre pensée que pour leur interest, que pour se
maintenir dãs leurs Gouuernemẽs, & agrandir leur
fortune ; les autres, comme les Parlemens n’ont
d’autre ambition que de soustenir l’autorité Royale,
c’est pour cette consideration que le soing des
peuples leur a esté commis, & qu’ils doiuent respondre
de l’estat du bien public, & il est à craindre
que, Dispergantur oses si percutiantur pastores, c’est à
quoy on a trauaillé l’espace de plusieurs années, &
voulu affoiblir l’autorité des Parlemens ; & apres
auoir esté se semble remis dans leur premiere autorité
par les dernieres Declarations voyans renaistre
les maux par l’infraction de la paix qu’il auoit
pleu à sa Majesté de nous donner, par les exactions
faites depuis la paix par Monsieur d’Espernon, par
les demolitions & bruslemens des maisons, par les
sacrileges, meurtres des femmes & enfans, par les
assassinats commis en la personne des Huissiers du
Parlement executans ses Arrests, & par les entreprises
des nouueaux Intendants enuoyés dans les Prouinces

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comme du sieur Foulé, lequel sans aucun
respect de ses Loix veut autoriser ses injustices : Nous
auons esté contraints de reprendre les premieres
voyes de nos plaintes ordinaires, jusques à present
on a voulu estouffer la liberté de dire nos douleurs,
on ne veut pas ouïr parler de celuy qui est la cause
de nos maux, ny nous descharger du poids qui nous
accable. Ces delais de justice, MESSIEVRS, sont
ce que les Anciens appelloient afflictiones judicij,
lesquels estans suiuis du voyage que le Roy fait en
Guyenne ont tellement effrayé les peuples, qu’ils
croyent que sa Majesté ne peut auoir d’autre objet
que de remettre & de faire recognoistre dans Bourdeaux
Monsieur d’Espernon, qui a trouué toute sorte
de support prés de Monsieur le Cardinal Mazarin,
& de se deffaire des gens de bien qui se sont opposés
à ses oppressions ; ce qui seroit ruiner entierement
la Prouince si on ne nous estoit pas celuy
qui l’ayant desolée s’est rendu l’objet de l’auersion
des peuples, & de la haine legitime de l’Eglise.

 

Pendant tous ces desordres, pendant le souuenir
de nos malheurs, nous nous sommes trouués dans
vne admirable conjoncture, Nous auons veu dans
vne mesme année nostre Bureau seruir d’Autel
pour y mettre le sacré Corps du Fils de Dieu, qui
auoit esté foulé aux pieds par des Soldats impies de
l’armée de Mõsieur d’Espernõ, qui venoiẽt de piller

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& de prophaner vne Eglise ; & ayant esté porté par
vn Prestre sur le Bureau de la Chambre ou le Parlement
estoit assemblé, nous auons veu nostre Dieu
nostre Iuge venir demander justice aux hommes de
tous ces sacrileges, la justice ne luy a pas encore esté
faite, nous auons veu en suitte le sang Royal, j’en
dois parler auec toute sorte de respect, nous auons
veu Madame la Princesse & Monsieur le Duc d’Anguien
son fils venir au bout du Bureau demander
d’estre mis sous la sauuegarde du Roy & de sa Iustice ;
de sorte que ie puis dire que nostre Bureau a esté
le lieu ou le Ciel s’est venu joindre à la terre ; dans la
deliberation qui fut prise sur la Requeste presentée
par Madame la Princesse, le Registre a esté fait & m’a
esté mis en main pour vous le presenter : Dans ce
temps que nous nous promettions de pouuoir jouïr
d’vne paix si justement establie, la detention de
Messieurs les Princes a esté le sujet de nouueaux desordres,
vne si longue prison sans vouloir permettre
qu’on examine leurs actions, contre les termes de la
derniere Declaration, a fait naistre diuers partis qui
se sont formés dans la Prouince & dans le Royaume,
& font apprehender vn desordre general s’il
n’estoit pas loisible de justifier ou condamner s’ils
sont coupables, des personnes si cheres & si considerables
à l’Estat, lesquels estans nais sujets du Roy,
sont nais sujets aux Loix, & doiuent estre jugés par

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leurs Iuges naturels.

 

Ce sont les chefs de nos plaintes que le Parlement
de Bourdeaux m’a fait l’honneur de me commettre
pour les porter à ce Parlement tres auguste, les oppressions
faites par le Gouuerneur de la Prouince,
qui nous forcent d’en poursuiure le changement,
les contreuentions aux Declarations & volontés du
Roy concernant la detention de Messieurs les Princes,
& touchãt les Intendans, nous obligent de vous
demander qu’il vous plaise de vous joindre & vnir à
nos justes plaintes, de promouuoir l’execution de
la Declaration, & prendre cognoissance d’vn affaire
qui regarde de si grands Princes, & qui pourroit
causer des suittes si dangereuses & si prejudiciables
à l’Estat ; Enfin nous esperons que par ce moyen
vous procurerés la paix & le repos General à toute
la France, qui est sur le poinct d’estre deschirée par
les sujets du Roy, & que nous obtiendrons le changement
d’vn Gouuerneur, de qui nous ne sçaurions
attendre que des cruautés & des vengeances.

EXTRAIT

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