Anonyme [1650 [?]], A NOSSEIGNEVRS DE PARLEMEMT. , françaisRéférence RIM : M0_6. Cote locale : C_9_16.
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A NOSSEIGNEVRS DE PARLEMEMT.

SVPPLIE humblement François de Vendosme, Duc de Beaufort,
Iean François Paul de Gondy, Archeuesque de Corinthe,
Coadjuteur en l’Archeuesché de Paris, & Pierre de Broussel,
Conseiller en la Cour, Disans par addition à la requeste de recusation
par eux presentée, & dont lecture fut faite le dernier iour 24.
du present mois, qu’ils s’estoient contentez de marquer que dans
les informations on auoit fait dire aux tesmoins qu’il y auoit vne
conjuration contre la personne de Monsieur le premier President,
estimans qu’il ne voudroit estre Iuge d’vne accusation, de
laquelle l’vn des principaux Chefs est vn pretendu attentat à sa
vie, parce qu’il n’est pas natureliement possible dans vn interest
si proche & si sensible, de conseruer l’indifference du iugement :
mais puis que ledit sieur a affecté de demeurer Iuge iusqu’à descendre
de sa place pour passer derriere le Barreau, contester & se
deffendre auec chaleur contre la validité des recusations, pretendant
qu’elles concernent l’honneur de sa Charge, & non l’interest
de sa personne, quoy qu’il n’y ait rien de plus personnel
que l’interest de la vie, ils sont obligéz de declarer les autres causes
de recusation qu’ils auoient dissimulées par retenuë & par
moderation, qui sont,

Qu’au mesme temps du retour de la premiere Conference de
Ruel, il publia par tout que les Supplians auoient fait dessein
d’esmouuoir vne sedition de plusieurs habitans pour entreprendre
sur sa vie : Quoy que tout Paris sçache qu’en ce temps ils
donnerent tous leurs soins à la conseruation, iusqu’à exposer
leurs propres personnes & leurs propres vies.

Que pour exciter contr’eux vne haine publique il les a designez
en sa Harangue à l’ouuerture du Parlement pour des ennemis
conjurez de l’Estat, par des demonstrations si sensibles, qu’il
ne restoit qu’à les nommer ; ce qui fut trouué si estrange & si esloigné
de son sujet, que son discours passa dans l’esprit de la pluspart
des gens d’honneur pour vne declaration d’inimitié ouuerte contr’eux,
& pour vn dessein de leur faire outrage.

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Que dans la suite de ce mesme dessein il a dit publiquement en
sa place, que c’estoit a sa personne a qui l’on en vouloit, qu’il ne
tenoit plus sa vie que cõme precaire, que depuis long-temps l’on
fomentoit des entreprises funestes, & que les ennemis estoient
mesme dans la Compagnie, Tellement que ce qu’on dit les tesmoins
n’est qu’vne repetition de ce que ledit sieur premier President
a dit en public.

Que ledit sieur a assez declaré ses sentimens, lors que ledit
sieur Coadjuteur voulant parler sur la premiere deposition, il luy
dit que ce n’estoit pas dans sa place qu’il se deuoit iustifier, & que
l’on en verroit bien dauantage : Termes qui marquent assez qu’il
a eu communication du secret des informations, qu’il le tenoit
desia accusé dans son esprit, puis qu’il luy parloit de iustification.

Cette communication d’informations est si veritable (quoy
que ledit sieur premier President aye voulu donner des asseurances
contraires, mesmes auec serment) qu’il est notoire que le nõmé
la Railliere qui s’est fort meslé de cette affaire, comme il sera
verifié en temps & lieu, alloit souuent chez ledit sieur premier
President, pour conferer vray-semblablement auec luy : Et ainsi
il ne peut pas desnier qu’il n’ait esté de sa connoissance, que les
Supplians ayent esté compris dans les informations.

Ce n’est pas en cela seulement que ledit sieur premier President
a tesmoigné sa hayne contre les Supplians, il ne peut pas disconuenir
qu’il n’ait dit plusieurs fois que ledit sieur Coadjuteur
estoit vn esprit hardy & entreprenant, & qu’il falloit arrester le
cours de ses menées & de ses mauuais desseins.

Que ledit sieur Coadjuteur l’estant allé visiter pour luy demander
raison ciuilement de l’entreprise faite sur sa iurisdiction
par Monsieur l’Euesque de Bayeux, il le traitta auec des paroles
indecentes & de mespris, comme s’il eut ignoré sa naissance & sa
dignité.

Qu’ayant esté proposé de renuoyer audit sieur Coadjuteur
l’accommodement d’vn different de deux personnes Ecclesiastiques,
il dit que c’estoit vn beau renuoy de les renuoyer deuant la
Fronde ; tesmoignant en cela le mesme mespris, & la continuation
de sa hayne.

Ledit sieur premier President ne peut pas desnier encores, par

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ce que c’est vn fait dont la connoissance est publique, que ledit
sieur Duc de Beaufort, depuis sa sortie du Bois de Vincennes,
ayant presenté plusieurs Requestes pour sa iustification, elles
ont esté toutes eludées par son authorité & par ses artifices, quoy
que l’Assemblée des Chambres aye esté demandée plusieurs fois
pour ce sujet ; neantmoins il n’a peu obtenir son Arrest de iustification,
que lors que ledit sieur premier President a veu qu’il n’estoit
plus en sa puissance de l’empescher.

 

Sa hayne contre ledit sieur de Brousse a paru si publiquement,
que non-seulement dans sa maison, parmy ses plus particuliers
amis : mais encore dans le Palais Royal, & par tout ailleurs, en
toutes occasions, il a tousiours parlé de luy tres-desauantageusement,
& en tres-mauuaise part ; ce qui obligea au dernier iour ledit
sieur de Broussel de luy declarer publiquement qu’il le tenoit
pour son ennemy, & qu’il ne pouuoit en conscience estre son Iuge.

Tellement qu’apres tant de témoignages d’vne hayne si haute
ment & si constamment declarée contre les Supplians : apres tant
de marques si sensibles & si reïterées d’vn interest personnel &
particulier, il ne seroit pas iuste que ledit sieur premier President
demeurast leur Iuge.

CE CONSIDERE, Nosseigneurs ; attendu ce que dessus,
il vous plaise de vos graces ordonner que ledit sieur premier President
s’abstiendra de la connoissance & de la deliberation des informations
Et vous ferez bien.

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