Anonyme [1652], LE CHAT QVI DORT D’VN BON BOVRGEOIS DE PARIS, Par lequel on remarquera les genereuses intentions de Messeigneurs les Princes: Le bon & heureux succés de leurs armes: La Venuë du Roy en bref à Paris. ET LA MORT DE MAZARIN asseurée en peu de temps. Omnes Gentes plaudite manibus iubilate Deo in voce exultationis, Psal. 46. , français, latinRéférence RIM : M0_693. Cote locale : B_12_13.
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LE CHAT QVI DORT
d’vn bon Bourgeois de Paris.

Ceux qui ont voulu employer quelque temps
dans le diuertissement de la lecture des Histoires
passées & presentes, & aux predictions qui en
ont esté faites, & qui se trouuent de iour en iour tres-veritables
ont connu euidemment que les reuolutions
des grands Estats sont ordonnés d’en haut, & signifiées
auparauant qu’ils aduiennent ; c’est pour cela qu’il les
faut supporter comme les vicissitudes des saisons, ne
desesperons pas du salut de la France, carie me promets
que Dieu, differera à vne autre saison. L’execution
que la hache de Mazarin en vouloit faire, car encore
que les signes de la maladie soient mauuaises, la
pluspart mortels, il me semble de ce iour que la nature
commence à s’ayder, & que nos Princes qui en
sont les parties nobles, monstrent à tous les bons François
la force de leur courage pour en supporter les remedes,
ont ils pas laissé (assistez du S. Esprit) meurir
l’humeur, puisque nature opere de soy-mesme, produisant
à la France de salutaires effets, ne voyez-vous pas
le rayon, populaire qui reveille bien le Chat qui dort ?
& la fortune ne nous promet-elle pas en bref de ne fauoriser
pas vn lâche parti ? A-t’il pas esté deliberé de ne
luy faire autre grace, que celle que le cyclope d’Homere
promettoit à Vlysse, sçauoir d’en manger le dernier.
Ie vous promets en bonne politique que le Conseil
de nostre Monarque sera bon s’il a du naturel pour
la France ; & s’il aime ses Peuples, & s’il fait choix de
l’obliger en luy donnant la Paix & le Repos, plustost que

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d’honnir sa memoire en se precipitant en la honteuse
seruitude d’vn estranger, pour y faire trébucher auec
luy ceux qui ont déposé en la foy d’vn ieune Monarque
leur salut & leur vie.

 

Réveillons nostre Chat qui dort, & disons des veritez
sous ce langage qui n’est pas affeté.

Monseigneur le Prince a-t’il pas eu dés ses tendres années
vne bonté, generosité, & clemence naturelle pour
les Conquestes de Louys XIV. que Dieu absolue ?
L’a-t’il pas tousiours euë pour le bien & l’Estat de nostre
Monarque ? Ne nous fait-il pas connoistre de iour
en iour qu’elle passe iusques à l’excez ; & la naissance
& generosité qui reluisent en toutes les parties de sa
vie (de laquelle les Histoires memorables sont remplis)
ne nous font-ils pas iudicieusement connoistre
qu’il luy sera aussi aisé à couper la trame d’vn imposteur,
qu’il a esté aisé à ce mauuais Ministre de se rendre
odieux par vn si malheureux nom à toute la posterité ;
& tous les gens de bien peuuent connoistre aux
prodigieux effets de Mr le Prince, qu’encor que sa fortune
aye esté plus trauersée que de Prince de temps
immemorial, elle ne luy a esté iamais rebelle, l’ayant
fait naistre & triompher dans ses armes, & parmy les
iniures de ses plus determinez Ennemis. Remarque,
remarque, Paris, de ce genereux Conquerant vne
derniere action là où il ne se soucioit de se precipiter
pour te tirer de l’orage qui estoit voisin de tes ruines :
Tous ses motifs ne partent que des esprits inebranlables
& solides, qui ont autant de constance pour reietter
les dards de leurs Ennemis, qu’ils ont de cœur
& de bonheur pour les reduire au neant. Que si Dieu
qui tient le cœur des Roys en sa main a dispose Son Altesse
Royale ; Mr le Prince, Mr de Beaufort, pour tirer
nostre Monarque de la main de ce mauuais Concierge,

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par l’Vnion parfaite de tous ses Sujets, & le reste
de toutes les Nations qui corrépondent à vn effet si salutaire,
Qui pourra empêcher ce bon-heur ! & nostre
repos ? La France reduite à la mendicité a-t’elle pas
occasion d’esperer ce bien, qui ne nous pouuoit arriuer
que par l’entreprise & la valeur de ses fortes colomnes,
qui sont nos Princes infatigables, qui feront
tomber les armes des mains des Ennemis de ce Party,
qui rétabliront le Royaume, & qui couuriront de l’ombre
de leur pauois la Couronne du desiré de tous ses
Peuples, qui pourroit agir en cette action, si ce n’est
des cœurs vaillants, des courages inuincibles qui se
sont mocquez dés leur enfance, des labeurs & dangers,
de peur que leur courage ne se relachast par leur
repos, les hazardeuses secousses ne leur ayant esté
qu’vne eschole de vertu, & vne moisson de gloire.

 

Il est facile à croire des armes de Monseigneur le
Prince, dans sa conduite contre Mazarin & son faisseau
d’armes, qu’en bref il fera veoir le spectacle d’vne
valeur estonnante ; Spectaculum erit omnibus. Ne nous
estonnez-donc pas, ô France ! prenez courage, Ville
Capitale, & dites à toutes les Nations ce que i’ay
pris pour theme de ce paranymphe de nos Princes :
Omnes Gentes plaudite manibus. Et loüants tous Dieu
de tant de genereux succez pour le repos de cette
Couronne. L’on ne remarquera aussi de la suite des
temps, & cours des siecles, que les Estats soient renuersées
par les impies qui n’aiment iamais la Paix, lors
que Dieu a enuoyé de tels Princes pour nous conduire
& commander. Les Estats ont esté rudement secoüez
& ébranlez soubs François & Henry second :
mais ils ont esté bien plus fermes par la valeur & prudence
de tels Chefs qu’estoient Henry le Grand, &
Louys XIII. De sorte que ie presume que l’alteration

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& le mouuement que nous sentons n’est pas de
l’extirpation de l’Estat, mais seulement vne incision,
qui se fait auec vn douloureux & rude ferrement de la
Hache de Mazarin ; Ce qui a inuité ma plume à nous
annoncer le iour de son trépas, qui sera au mois d’Octobre
prochain, la Canicule luy laissant ce qu’elle aura
le reste de ses maux, pour le payer subitement selon
ses gestes, qui ont auec trop d’impunité honny la plus
honorable & renommée partie du monde. Dieu nous
veut donc tirer des griffes de ce Barbare : & si nous
l’inuoquons par la pureté de nostre ame de chasser loin
de nous vne si souhaittée horoscope ; En attendant
nons triompherons par la valeur des armes de nos
Princes, des Adherans de ce Tygre, puisqu’en bref
nos Princes nous font esperer que nous irons au deuant
de sa Maiesté pour venir à Paris nous donner la
Paix, de peut qu’il ne soit touché de l’exhalaison d’vn
faineant qui s’est approché trop prés de leze Majesté,
pour laquelle nous faisons tous les iours des prieres,
criants à haute voix ; Domine saluum fac Regem.

 

FIN.

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Anonyme [1652], LE CHAT QVI DORT D’VN BON BOVRGEOIS DE PARIS, Par lequel on remarquera les genereuses intentions de Messeigneurs les Princes: Le bon & heureux succés de leurs armes: La Venuë du Roy en bref à Paris. ET LA MORT DE MAZARIN asseurée en peu de temps. Omnes Gentes plaudite manibus iubilate Deo in voce exultationis, Psal. 46. , français, latinRéférence RIM : M0_693. Cote locale : B_12_13.