Anonyme [1650], LE FESTIN DES PARTISANS Aduancé par le Chancelier auant son depart, Chef, & Protecteur de la Maltoste. , françaisRéférence RIM : M0_1379. Cote locale : C_5_6.
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Et d’autant qu’apres vn si grand repas ils deuoient
auoir besoin de poudre digestiue, il en fut serui dans
vne boëte d’or vermeil, elle estoit composée de cendre
de tonnerre de la poussiere que fait le mouuement du
Zodiaque, & des essieux surquoy roullent les deux polles
faite durant l’esté, auec vn peu de la suye qu’engendre
le feu elementaire au ciel de la lune son voisin, dont
chacun de ces Messieurs les Partisans prit vne cueilliere
plus par curiosité que par necessité, pensant auoir
tous l’estomach aussi chaud que l’Autriche ayant
tant digeré d’or & d’argent depuis que le monopole

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les employe : mais on trauaille à Paris à faire vn vomitif
compost d’Arrest de Parlement, qui leur fera voir
qu’il est indigeste en leur faisant rendre tout. Ce festin
tout à fait acheué, ce grand Chancelier, ou plustost Archibourbe,
pour leur tesmoigner sa science à la magie,
& asseurer leurs esprits par d’autres prodiges plus recreatifs
que les precedens, s’estant saisi d’vne verge enchantée,
il commanda en frappant quelques personnages
representez dans vne tapisserie de descendre pour donner
la Musique à la compagnie, au defaut de celle de la
Chambre du Roy demeurée icy ; tellement que tout
aussi-tost on vid Tiresias se saisir d’vne vieille, Polipheme
d’vne fluste à trois trous, & d’vn petit tabourin, Annibal
de Carthage des cymballes, Geoffroy à la grand
dent d’vne vessie de porc, au bout d’vn baston, & Meluzine
d’vn tambour de Basque, ils firent merueille
auec ces instrumens, y ayant joint leurs voix pour
chanter vne Hymne à la loüange de la Maltoute & de
ses enfans, & sur l’esperance de la voir vn iour refleurir
apres les pretenduës funerailles du Parlemẽt & des Bourgeois
de Paris. Mais ce qui fut trouué admirable, c’est
que l’asne d’Apulée ayant esté appelé à son tour, quitta
la tapisserie pour venir battre la mesure auec sa verge
naturelle, tantost sur l’espaule de l’vn, tantost sur l’espaule
de l’autre ; ce qui fit vn peu rire l’assistance, toutes fois
du bout des dents, se souuenant toûjours des circonstances
de ce festin, où parmi la rare somptuosité ils
auoient remarqué la malice de celuy qui les traittoit,
qui s’estoit joüé d’eux, en leur imprimant la crainte du
sort qu’ils attendoient, dont il ne sera pas exempt luy
mesme, si on luy fait justice.
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Anonyme [1650], LE FESTIN DES PARTISANS Aduancé par le Chancelier auant son depart, Chef, & Protecteur de la Maltoste. , françaisRéférence RIM : M0_1379. Cote locale : C_5_6.