[retour à un affichage normal]

Accueil > recherche > Affichage d'une occurrence en contexte

Mazarinade n° E_1_78

Image de la page

Anonyme [1649], LE ROMAN DES ESPRITS REVENVS A S. GERMAIN. Burlesque & serieux. Et le QV’AS-TV VEV DE LA COVR, Ou LES CONTRE-VERITEZ. Sur l’imprimé à PARIS. , françaisRéférence RIM : M0_3559. Cote locale : E_1_78.


en beau camp de parler, & elles eussent dit vne quantité d’histoires
par ouy dire sur ce sujet, pour conuaincre Monsieur le
Prince ; mais le Roy apres auoir dit qu’il en auoit quelquefois
ouy quelques vnes en sa chambre, qui l’auoient bien réjouy,
sans iamais l’auoir espouuanté, il pressa le Cardinal
de continuer : ce qu’il fit en ces termes.
 
Encor qu’il n’y ayt personne de vous qui doute de l’existence
des esprits toutes fois ie pense estre le mieux instruit,
& le mieux persuadé de la compagnie, aussi ie croy qu’ils
m’ont joüé leurs plus vilains tours, & qu’ils m’ont pris pour
l’object de toutes leurs funestes recreations. Ils inuentent
tous les iours mille nouueautez, qu’ils apportent de la Cour
infernale, pour me faire enrager : ie croy qu’ils taschent à me
jetter dans le desespoir pour me faire rendre l’ame sans confession.
Les Dames me chantent vn Salue Regina, comme l’on
faict à ceux qui sont prés d’endurer le supplice ; autres vn
Libera comme si i’estois desia mort, quelques-vns me mettent
en poussiere : d’autres se contentent de me porter en terre,
en chantant des Pseaumes de Dauid. Il en vient qui m’honorent
pour se mocquer de moy, & qui me traitent d’Eminence,
& montrent vn precipice où ie suis tout prest de mettre
les pieds, d’autres en forme de Choüettes, & de Hibous, me
predisent plus de mal heurs qu’il n’en est arriué au monde
depuis qu’il subsiste, quelques-vns me déchirent à belles
dents comme des chiens affamés ; il y en a qui se contentent
de me chanter poüille, & de me dire plus d’injure qu’vn million
de harangeres n’en pourroient inuenter toutes ensemble :
D’autres, font des Remonstrances au Parlement, pour
l’animer encor dauantage contre-moy : Quelques-vns me
procurent charitablement la haine du peuple, comme si ie
n’en estois pas desia assez hay ; ceux là font vn bruit de tous
les Diables à mes oreilles, comme s’ils sonnoient le toxin,
pour esmouuoir la populace à se jetter sur moy.
Quelques amateurs de ragousts me mettent au court boüillon,
& puis me laissent là sans me manger, pour me faire plus
grand depit, disant, que ie ne vaut rien ny à rostir, ny à boüillir :
Il en est qui disent de moy toutes les méchancetez imaginables