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Mazarinade n° A_7_54

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Anonyme [1649], LE TABLEAV DES TYRANS FAVORIS, ET LA DESCRIPTION des maluersations qu’ils commettent dans les Estats qu’ils gouuernent. ENVOYÉ PAR L’ESPAGNE A LA FRANCE. , françaisRéférence RIM : M0_3746. Cote locale : A_7_54.


premier Ministre vous ont fait voir le contraire. Vous auiez esperé
du bon naturel de cette grande Princesse Anne d’Austriche, vn restablissement
de toutes choses dans son premier Estat ; vous auiez
creu qu’elle seroit bien aise que le Parlement, duquel le Cardinal
auoit opprimé la liberté, & aneanty l’authorité par vn ordre nouueau,
contraire aux Loix fondamentales de l’Estat, & non iamais
vsité, reprit son ancien credit pendant sa Regence, & qu’elle ne
souffriroit iamais les desordres qu’auoit causé vn Fauory ambitieux,
& remply de conuoitise. Enfin, vous auiez iugé auecques
raison que cette Auguste Reyne n’authoriseroit pas les actions
qu’elle auoit blasmées pendant le gouuernement du deffunt Cardinal :
mais sur tout, qu’elle ne consentiroit iamais qu’vn nouueau
Ministre d’Estat, prist sous sa Regence le pouuoir qu’auoit vsurpé
l’ancien, auec lequel il auoit si hardiment & insolemment entrepris
sa persecution. Ce sont là les raisons à ce que m’ont fait entendre
mes Politiques, qui ont porté cét Auguste Senat à defferer à
elle seule la Regence absoluë du Royaume, que le feu Roy luy
auoit donnée, limitee, & conditionnée : mais il s’est bien trouué
trompé dans ces esperances.
 
Ne s’est-il pas rencontré que Iules Mazarin, plus fourbe que le
deffunct Cardinal, abusant de la confiance que la Reyne prend en
luy, cét Estranger mon Subjet, que la trahison a eleué à la dignité
de Cardinal, & qui vous a esté laissé par son predecesseur, pour conseruer
sa famille en ses biens, & en ses honneurs, & acheuer vostre
ruine, a marché sur ses pas, & suiuy ses desseins ? Porté d’vne mesme
ambition pour luy en ses parens, & d’vne plus ardente conuoitise,
il s’est emparé de la personne du Roy sous vn nouueau tiltre
d’Intendant de l’Education Royale. Il ne s’est pas contenté de diuertir
vos deniers publics par l’vsage des comptans, pour les employer
à son profit, & celuy de ses parens, tant en Italie qu’en vostre
Royaume : mais encore il a fait verifier au Parlement plusieurs
grandes Listes d’Edicts, & de Declarations, à la foule & oppression
de tous vos Subjets. Il ne s’est pas satisfait de faire enleuer
de vostre Ville de Paris, les Presidens Gayen & Barillon, qui
sont decedez non pas sans soupçon d’vne mort aduancée par poison :
mais encor il a fait aller deux fois le Roy mineur au Parlement,
qui eust bien pû s’opposer à ses venuës & enleuemens, &
empescher l’effet de ces Edits s’il eut voulu. C’est la consideration
de la guerre, qui a empesché, m’a-t’on dit, que ce Senat ne se soit
opposé à des entreprises si preiudiciable à l’honneur du Roy, à la
liberté des Cours Souueraines, & au bien de tout vostre Royaume,
dans l’esperance d’vne prochaine paix entre nos Monarchies, qui
restabliroit l’ordre de nos Estats, & soulageroit la misere du peuple.