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Mazarinade n° A_7_44

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Anonyme [1649], LE THEOLOGIEN D’ESTAT A LA REYNE. POVR FAIRE DESBOVCHER PARIS. , français, latinRéférence RIM : M0_3770. Cote locale : A_7_44.


l’abondance. Nous voyons les mains des freres rougies du sang fraternel,
vos Sujets exposez au fer des Barbares, les enuirons de Paris
saccagez, les femmes violées, les maisons bruslées, les Eglises profanées,
les Religieuses qui fuyent comme des Colombes espouuantées,
non plus deuant Attila, mais deuant vos Estendarts, & deuant vos armes.
On ne peut croire que vostre bonté preside à des Conseils si funestes,
nous sentons & touchons nos playes, & nous ne pouuons encore
nous imaginer qu’elles viennent de vos traits, & qu’elles partent
de vostre main. Vostre Majesté sçait, que le Prophete Roy estant extrémement
alteré, ne voulut pas boire vn verre d’eau qui auoit esté
gaigné sur les ennemis par le danger & le sang de trois de ses seruiteurs,
qui s’estoient exposez pour l’enleuer. Et qui oseroit penser que
V. M. voulut achepter la satisfaction d’vne de ses volontez, quand
elle seroit la plus iuste du monde, par les calamitez d’vn million
d’hommes, & la desolation de tout vostre Royaume.
 
2. Reg.
23. 15.
Il est aisé à iuger que V. M. ayant l’ame si bonne & si Chrestienne,
n’a point de mauuaises intentions, mais que se croyant Depositaire
de l’authorité Royalle, qu’elle pense estre blessée, elle a droict de la
maintenir par des exemples d’vne haute seuerité. I’atteste icy le Dieu
des Monarques, que c’est vne illusion d’Estat, de se figurer que l’authorité
du Roy consiste en la rigueur du Gouuernement, & en l’abaissement
des Peuples. C’est le chemin que les violens Fauoris ont pris
de tout temps, pour regner iusques sur leurs Maistres, sous pretexte de
seruice. Ils ont tellement fait valoir cette anthorité Royalle qu’ils
auoient entre les mains, qu’à force de l’esleuer ils l’ont destruite. Ils
ont tout attribué aux Roys, ils n’ont songé qu’à la teste du corps de
l’Estat, & l’ont enfin renduë si grosse & si mõstrueuse, que les pieds ne
l’ont pû supporter, & que fondant sous le poids d’vne grandeur demesurée,
ils l’ont enseuelie dans leur ruyne. On ne voit rien de si ordinaire
dans les Histoires que des Couronnes cassées & des Sceptres
brisez, pour auoir indignement traicté les peuples. Ce n’est
point vne authorité Royale que d’aller par tout enuironné de terreurs ;
que de faire gemir des peuples innocens sous le ioug d’vne
amere seruitude, que de marcher sur les ruynes des Villes fumantes,
que de dresser des gibets, que d’ensanglanter des eschaffauts, & allumer
des brasiers comme ont fait les Herodes & les Nerons. L’authorité
Royale est vn rayon de la face de Dieu, vne haute estime, vne
veneration tres-grande, imprimée dans le cœur des peuples, qui
vient de la vertu, de la saincte puissance & de la capacité des Roys :
mais sur tout de la bonté & de la clemence, qui fait que leur Trône est
soutenu par les mains de l’amour des peuples enuers eux, plus que par
les armes, par les Regimens & par les Citadelles. C’est cette vertu,
MADAME, que nous auons tousiours reconnuë en V. M. &
dont vous auez ietté les semences dans le cœur de nostre ieune Roy
pour les faire esclore sur le Trône.
A Dieu ne plaise que vous gastiez les ouurages de vos mains sur la