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Mazarinade n° C_10_29

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Anonyme [1649], LE THEOLOGIEN D’ESTAT, A LA REYNE. POVR FAIRE DESBOVCHER PARIS. , français, latinRéférence RIM : M0_3770. Cote locale : C_10_29.


des Villes entierement, sans de grands & enormes pechez, dont elles
estoient couuertes. Il fit pleuuoir le feu & le souffre sur Sodome & Gomorrhe,
auec les villes qui leur estoient complices ; mais ce fut pour
chastier des vices abominables qui font horreur à la Nature. Il cõmanda
à son peuple de perdre sans ressource les Iebuzeens, les Phereseens,
les Amalechites : mais c’estoient des adorateurs du Diable, & des mangeurs
de chair humaine. Il se trouue aussi en l’Euangile la Parabole
d’vn Roy qui fait brusler vne ville ; mais c’est pour auoir tué ses Ambassadeurs
d’vn commun consentement. Iamais Dieu tout absolu qu’il
est, n’entreprend ces grandes ruines sans de grands suiets. I’appelle icy
vostre Iustice, MADAME, i’appelle vostre Prudence & vostre consideration :
Paris estoit-il entaché de crimes si abominables, qu’il le falust
esteindre par le fer & par la faim ? Il s’agissoit de mettre sur le peuple
des charges & des imposts insupportables à sa foiblesse ; le Parlemẽt s’est
assemblé là dessus ; les autres Cours Souueraines ont embrassé le mesme
dessein, selon les Loix & selon les formes ordinaires, quoy que vostre
Conseil n’en fust pas d’auis. Plusieurs ont dit leurs suffrages auec
la liberté que la conscience commande, & que l’Estat du Gouuernement
de France permet : mais peut-estre auec plus de chaleur que vostre
Conseil n’en desiroit : Et pour cela on a soüillé la réjoüissance publique
d’vn iour consacré aux Triomphes par des emprisonnemens de
Magistrats, qui estoient estimez gens de bonne vie & d’entiere reputation.
Le peuple s’en est émeu, & le Bourgeois craignant la sedition & le
saccagement des maisons, s’est mis en armes, plustost pour vous defendre
que pour vous resister. Et pour monstrer qu’il n’en vouloit point à
vostre authorité, il vous a rendu ses obeissances desarmées, aussi-tost
que V. M. luy a rendu la Iustice. Toutes les furies de cette grosse mer,
qui sembloient vouloir engloutir vn monde, se sont arrestées à vn grain
de sable. Vous auez vous-mesme, MADAME, loüé & approuué cette
moderation & cette fidelité. Vous auez agreé qu’on publiast iusques
dans les Chaires de verité, qu’il ne vous restoit aucun ressentiment contre
Paris de tout ce qui s’estoit passé. Vous auez protesté publiquement
vne cordiale bien-veillance enuers vostre bonne Ville, auec des complimens
releuez, & des paroles dignes de la bouche d’vne Reine. Apres cela,
MADAME, enleuer le Roy de nuit, auec l’estonnement de tout
le monde, engager les Princes du Sang à vne action funeste, inuestir Paris,
luy prononcer vn triste Arrest de mort par le fer & par la famine, n’auoir
point d’esgard à tant de gens d’honneur & de merite qui vous ont
si dignement serui, à tant de personnes innocentes, à tant d’ames Religieuses
qui s’affligent, & qui se sanctifient pour vous iour & nuit : vouloir
que tout perisse plustost, que de laisser perir la satisfaction d’vn desir.
Qui pourroit accorder cela auec la Religion, la pieté & la conscience ?
Et qui ne void que ces pensées ne conuiennent point à vostre naturel,
mais qu’elles sont inspirées par les mauuais genies de la France ?