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Mazarinade n° C_7_67

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Anonyme [1649], L’ENFER REVOLTÉ, SVR L’ESTRANGE DESORDRE qui y est arriué depuis peu, par les Tyrans & les Fauoris des premieres Siecles. OV PAR VNE MERVEILLEVSE application, toute l’Histoire du temps present se trouue parfaitement bien representée. , françaisRéférence RIM : M0_1218. Cote locale : C_7_67.


pour se plaindre du mauuais traittement qu’il
auoit receu d’vn Prince si cruel, si vindicatif, & sanguinaire
que le sien : Il me fist ietter, dit-il, par vne fenestre,
afin d’estre le funeste spectacle de tout le peuple.
 
Mais, comme ce miserable infortuné vouloit continuer
à se plaindre, on vid venir vn certain Belifaire fauory
de Iustinian, lequel s’estoit rendu redoutable aux plus
grands de la terre, qui s’auance en murmurant, pour demander
audience, & pour plaider sa cause luy-mesme
contre la tyrannie des Princes.
Il y a bien, dit-il, plus d’infamie entre vous autres,
Messieurs les lasches Potentats de la terre, d’estre les
bourreaux de ceux que vous auez iugez dignes de vous
soulager en la grandeur de vos affaires, qui vous sçauent
genereusement appuyez de leur conseil, & de leur
courage, contre tout ce qui se pourroit opposer à la felicité
de vostre Regne, qui sont d’autres vous-mesmes,
sans l’aide desquels vous demeurerez accablez sous la pesanteur
de vos charges, que vous auez esleuez dans les
honneurs, & dans les fortunes, & que mille raisons d’Estat
attachent si fort à vostre personne, que la necessité
de vos abominables maximes ne sçauroit destruire qu’en
vous destruisant vous-mesme, que non pas en nous autres
fauoris, d’vser de precaution contre les abominables
effets de vostre cruauté, & de vostre inconstance. Se peut-il
voir vne perfidie plus grande, que celle de Iustinian,
iadis Empereur de Constantinople, lequel apres que ie
luy eus surmonté les Perses en Orient, les Goths en Italie,
les Vvandales en Affrique, & les Huns en Thrace,
pris Gilimer Roy de Cartage, battu Vitiges Roy des
Goths, & chassé Totilla de Rome, me fit arracher les
yeux, & me reduit à mandier mon pain au coin des ruës,
sur vn faux doute qu’il eut de ma fidelité, à cause des
grandes prosperitez, qui accompagnoient toutes mes
entreprises. Et ce Belisaire, qui portoit autresfois la terreur
dans toutes les prouinces estrangeres, fut reduit à
des necessitez, qui n’en eurent iamais de pareilles, par
la foiblesse du plus ingrat de tous les Princes de la terre.