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Mazarinade n° A_3_52

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Anonyme [1649], L’ENTRETIEN FAMILIER DV ROY, AVEC MONSIEVR LE DVC D’ANIOV SON FRERE, à sainct Germain en Laye. Fidelement recueilly par vn des Officiers de sa Majesté. , françaisRéférence RIM : M0_1241. Cote locale : A_3_52.


L’ENTRETIEN FAMILIER DV ROY,
auec Monsieur le Duc d’Anjou son Frere,
à sainct Germain en Laye.

Fidelement recueilly par vn des Officiers de sa Majesté.
BIEN que les Rois soient continuellement obsedez d’vne
trouppe importune de Courtisans, qui sous ombre de faire
leur Cour, destruisent entierement leur liberté ; & que le plus
souuent ceux qui vsurpent leur authorité, leur donnent, sous
ce pretexte de Grandeur, des Gardes qui épient toutes leurs actions : Il
arriue toutefois assez souuent que ces Surveillans sont trompez, & qu’vn
moment de negligence rend toutes leurs precautions inutiles. Tout le
monde sçait que la connoissance que le Cardinal Mazarin a de l’esprit du
Roy, & la crainte qu’il ne soit aduerty par ses plus fideles Subjets de ses
trahisons & de ses tyrannies, l’oblige à le faire obseruer continuellement
par quelqu’vn des siens, lors qu’il est contraint de l’abandonner vn moment :
Il n’a pû toutefois empescher, par ses défiances, que le Roy
n’ait sçeu la verité de ses deportemens ; ses connoissances trouuant vn
esprit plus solide que l’âge ne semble permettre, y ont fait tant d’impression,
qu’il se retire souuent à l’écart pour entretenir ses pensées, &
faire reflexion sur l’estat des affaires presentes.
Vn iour que l’assemblée du Conseil secret l’auoit laissé presque seul, il
s’appuya sur la fenestre d’vne Gallerie qui regarde sur le Parc, & demeura
tellement immobile dans cette posture, que quelques jeunes Seigneurs
qui le suiuoient, se retirerent craignans d’interrompre sa refuerie.
Dans ce mesme moment Monsieur le Duc d’Anjou, qui, suiuant son naturel,
ne peut demeurer long-temps en vn lieu, & qui se dérobe à tous
ses gens pour auoir plus de liberté, vint à passer par cette Gallerie, &
trouuant le Roy en cét estat, demeura quelque temps à le considerer ;
enfin s’approchant doucement de luy, il le saisit par derriere en luy disant,
le vous y prens, mon petit Papa, auoüez-moy que vostre esprit
estoit bien loin d’icy. A ce bruit le Roy se retournant tout à coup, comme
s’il fut sorty d’vn profond sommeil, luy répond ; Il est vray, mon frere,
que vous m’auez surpris, & que vous m’auez en vn moment transporté
de Paris à sainct Germain. Ie voy bien, reprit le Duc d’Anjou,
que vous souhaitez bien d’y estre presentement, & qu’il vous fasche autant