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Mazarinade n° A_2_2

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Brousse, Jacques [?] [1649], ADVIS AVX GRANDS DE LA TERRE. Sur le peu d’asseurance qu’ils doiuent auoir en leurs Grandeurs. Dedié aux Conseruateurs de leurs vies. , français, latinRéférence RIM : M0_487. Cote locale : A_2_2.


iurez, car ils n’en auoient point qui seulement ozassert leur faire
teste & qui au seul bruict de leurs noms, ne se creussent defaits auant mesme
que de donner combat, mais ce qui doit rendre vos conditions odieuses,
& mesprisables dans leurs plus majestueux esclat, chargés de chaisnes
par les Roys, dont ils auoient affermy les throsnes chancellans : mais
pour monstrer qu’il n’y a rien icy bas en qui on se doiue asseurer, traisnez
ignominieusement dans les cachots, par ceux qui peu de temps auparauant
leurs auoient tant fait de carresses, & tant donné de marques. Qu’ils
n’estoient rien moins qu’insensibles aux bons & fidelles seruices qu’ils
leur auoient rendus : mais pour comble de malheur, mis à mort par ceux
qui auoient aduoüez leurs estre redeuable, & de leurs Prouinces, & de
leurs propres vies. la fortune, cette ennemie irreconciliable des longues
felicitez, ne pouuant rien sur eux, par les voyes ordinaires, inspiroit
a leurs Roys qu’ils en vouloient à leurs Sceptres, qu’ils tourneneroient
contre-eux les forces, auec lesquels ils auoient si facilement
domptez les ennemis les plus redoutables ; & que sans difficulté ils les détrosneroient.
Dans ces apprehensions chimeriques, ces Roys sans iustice,
comme sans iugement, commandoient que l’on se saisit de ces innocens
coupables, faisoient enfermer & languir miserablement dans les prisons,
ceux a qui ils deuoient faire part de leurs trosnes, & le plus souuent donnoient
la mort à ceux qui leur auoient sauué la vie. D’où vient ce subit
changement de vos felicitez, Illustres Conquerans, aujourd’huy dans
vn char de victoire, demain dans la fange ; auiourd’huy dans le sein du
bon-heur, demain dans l’horreur des miseres ; aujourd’huy sur le siego
Royal, demain sur vn gibet ; & sans estre coulpable de quoy que ce soit.
Ha ! vous l’estes assez puisque vous auez la fortune pour ennemie.Grande
mortalium scelus sors inimica. Ie pourrois icy vous rapporter de mille sorte
de façons, dont s’est seruy cette Ingenieuse, pour se deffaire de ceux,
qui s’esleuoient trop haut, comme la trahison & l’enuie, par qui nous en
voyons de momens en momens perir. Mais passons aux Monarques, à
qui ie pretends principalement remonstrer la caducité, & l’inconstance
des plus grandes choses du monde ; afin qu’ils ne s’asseurent pas tant sur
leurs puissances, qu’ils ne songent qu’ils sont domptables ; Qu’ils ne tyrannisent
pas tant leurs sujets, qu’ils ne les fassent se reuolter contre-eux : Et
qu’enfin ils ne s’estiment pas si fort releuez au dessus de tout le reste des
hommes qu’ils ne pensent qu’ils ayent par dessus eux la prerogatiue de
l’immortalité.
 
 
Nous courons tous mesme danger,
Nous auons mesmes destinées ;
Et le mesme mal-heur qui pour suit le berger,
Peut attaquer aussi les testes Couronnées :
Nos iours sont filez d’vn fuseau,
Ceux des moindres sujets & des plus graues Monarques ;