[retour à un affichage normal]

Accueil > recherche > Affichage d'une occurrence en contexte

Mazarinade n° D_1_55

Image de la page

Du Tillet [signé] [1652], TRES-HVMBLES REMONSTRANCES PAR ESCRIT FAITES ET PRESENTEES AV ROY PAR MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS EN LA VILLE DE SVLLY SVR LOIRE, CONTRE LE RETOVR ET POVR l’esloignement ou la punition du Cardinal Mazarin. , françaisRéférence RIM : M0_3841. Cote locale : D_1_55.


obligez de les garder, non seulement parce que leur reputation vient
principalement de ces vertus Royales, mais à cause qu’il leur seroit
impossible de traitter auec les Estrangers soit de paix ou de guerre.
 
François I. vn de vos predecesseurs, lors qu’on luy voulut persuader
de faire arrester l’Empereur Charles-Quint, qui prenoit son chemin
sur la seureté d’vn passeport, respondit à ces mauuais Conseillers :
Il faut que les Roys, qui ne sont point arrestez par la crainte des
/> loix & des vengeances humaines, soient retenus par l’estat qu’ils
doiuent faire de leurs promesses, lesquelles ils sont obligez d’executer,
quand tout le reste du monde s’en seroit dispensé.
En effect, SIRE, vostre Majesté iugera bien qu’à l’heure mesme
qu’vn Monarque, qui ne peut estre contraint par les voyes de
Iustice, vient à mespriser sa parole, il ne sçauroit faire vne perte
plus notable que la creance, qui tient les cœurs doucement attachez,
dans lesquels vn Prince sans foy ne reigne plus. Mais les
plus detestables & dangereux Fauoris des Rois, sont ceux qui
apres auoir conseillé d’vser de perfidie, pour se démeler de quelques
rencontres fascheuses, sont assez malicieux pour la vouloir establir
par des maximes generales, & sont si audacieux de les rendre publiques.
Le Cardinal Mazarin qui les a prattiquees, les a aussi enseignees,
en disant plusieurs sois, que la bonne foy ne doit estre en
vsage que parmy les Marchands, que l’honneste homme n’est point
esclaue de sa parole, & qu’il n’y a point de danger de mentir, pourueu
que le mensonge ne soit cognu qu’apres qu’il a reüssi : Si ces
damnables leçons entrent dans l’ame d’vn Prince de vostre aage ?
quels remedes trouuerons nous à vne guerre ciuile ou estrangere ;
Qui seroit l’Ennemy qui se fieroit à vne paix signee ? Qui seroit
le Subjet qui se tiendroit asleuré du pardon, & qui s’appuiroit sur
vne Amnistie ? N’est ce pas les moyens pour rendre les guerres
& les reuoltes desesperees.
Nous pouuons donc sans perdre le respect qui est deu à nos Rois,
& sans violer l’obeyssance que nous auons jurée, prendre toutes
sortes de voyes legitimes, qui les pourront obliger à esloigner ces
esprits pernicieux, qui mesurent la duree des Empires à celle de leur
credit, estant chose certaine que sans la bonne foy il n’est pas seulement
impossible de regner sur les hommes, mais de viure parmy
les hommes, d’où vient qu’vn Sage disoit auec beaucoup de raison,
que celuy qui a renoncé a la bonne foy, n’a rien plus à perdre, estant
asseuré qu’ayant rompu le nœud de la societé, ou vie ciuile, il est en
pire condition, que n’est celuy qui est priué de la naturelle.