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Mazarinade n° A_2_5

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Anonyme [1649], APOLOGIE OV DEFFENCE DV CARDINAL MAZARIN. TRADVITE OV IMITEE DE l’Italien de L. , françaisRéférence RIM : M0_117. Cote locale : A_2_5.


de leur vie, comme si la mienne ne pouuoit pas fournir assez de matiere à
la mesdisance, qu’il suffise de dire que tous les reproches que l’on peur
faire à leur memoire, sont les meilleures pieces de ma iustification, & que
si leurs crimes sont auerez, les miens doiuent estre excusables, estant
formé du mesme sang qui m’a laissé des inclinations toutes semblables.
 
Venons à mon education, dans laquelle si i’ay fait quelque faute de
celles dont on m’accuse, elle doit estre imputée à mes parens, qui deuoiẽt
auoir le soin de me corriger dans cét aage, où ie n’auois encore aucun vsage
de raison, puis que c’est à grand peine que ie le possede à present, il
seroit donc ridicule de me taxer de ces pitits tours d’enfance, mes parens
m’en ont assez donné le foüet, du moins il me souuient fort bien que l’on
a troussé le derriere de ma robbe quantité de fois.
Mais aussi tost que mon aage me permit de connoistre le mal d’auec le
bien, afin de n’estre plus sujet à ces corrections paternelles, ie sortis du
lieu de ma naissance & passay dans l’Italie, pour m’instruire dans l’vn &
dans l’autre. L’on a pû iuger les admirables progrez que ie fis en cette fameuse
escolle, par les actions que i’ay produites du depuis, & si mes accuseurs
veulent dire que ie n’appris que le mal, & que ie n’ay iamais pratiqué
le bien, d’où viennent donc tous les tresors, les palais & les villes
entieres que ie me suis acquis, qu’ils disent plutost que ie suis l’homme de
plus de bien qui soit dans toute l’Europe, & que ces autres mesdisans qui
mettent au iour les honteuses prostitutions que ie ne puis auoir faite
qu’en cachette, pour en amasser vne partie, voyent auparauant s’ils en
sont suffisamment informez, mais comment pourrois ils le sçauoir, puis
que i’oseray bien iurer que ie n’en ay rien veu moy-mesme, qui le doit
sçauoir mieux que personne.
Si i’ay seruy d’Estafier, & si i’ay passé dans toutes les conditions basses
& seruiles chez les Cardinaux & les Prelats, peut-on trouuer mauuais
qu’aspirant à ce mestier Illustre, i’en aye fait auparauant l’apprentissage,
puis que cette maxime est si commune, qu’il faut estre valet auant que
d’estre Maistre, & que l’on ne sçauroit bien commander si l’on ne sçait
parfaitement obeïr.
Ces jeux de hazards, ces bals, farces & mommeries, ausquels ie me suis
rendu tres-expert n’ont esté, que les instrumens pour attraper les dupes &
les faire sages à leurs dépẽs, & ie croy qu’il n’y a pas vn de ceux de qui i’ay
tiré quelque substance qui ne m’ayt de l’obligation pour l’auoir rendu plus
raffiné en les rendant plus indigent. Mais quitõs ces bagatelles pour parler
de mes grãdes actiõs, dont la premiere peut effacer toutes les autres, & fermer
la bouche à tous les Satyriques, cette fameuse paix de Casal que mon
esprit déploye tous ses artifices & ses moyẽs : n’est-elle pas capable d’étonner
la posterité, les courses que ie sis de part & d’autre auec tant de peine &
de fatigues, les pourparlers adrets, les zeles dissimulés pour tous les deux
partys, les bonadies, les reuerẽnces & les complimens, & tous les autres
moyens que i’employay pour en venir à bout, ont-ils merité d’estre si
si mal reconnus, qu’au lieu d’en tirer des celebres loüanges, il faut que i’entende