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Mazarinade n° A_2_5

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Anonyme [1649], APOLOGIE OV DEFFENCE DV CARDINAL MAZARIN. TRADVITE OV IMITEE DE l’Italien de L. , françaisRéférence RIM : M0_117. Cote locale : A_2_5.


des mesdisans qui font passer cet accommodement pour vne Paix
sourée qui n’estant qu’à mon auantage, fut à la ruyne de tous les deux
partys, il est vray qu’estant plus obligé de procurer mon interest que de
pas vn autre, i’ay pratiqué cette maxime en cette occasion ; mais si ie sçay
l’auantage de la Victoire aux François, qui leur estoit tres-asseurée, i’empesché
les conquestes qu’ils eussent pû faire ensuite dans l’Italie, qui leur
a tousiours esté funeste, ie palliay la honte des Espagnols d’vn specieux
pretexte, & leur fis abandonner leurs pretentions à raison de l’amitié
que ie porte à ma Patrie & la Duché de Mantoue demeura ruinée sans aucune
resources, dans la crainte imaginaire de l’estre encor dauantage : Enfin
n’estoit-ce pas vne adresse admirable, quand mesme i’aurois fait tort à tous
les partys, de leur faire croire que leurs interests estoient entierement
conseruez, il n’importe pourueu que l’on en vienne à bout.Dolus an virtus
quis in [1 mot ill.] requirat.
 
Ce coup d’Estat me fit le passage dans la France, & dans l’esprit du Cardinal
de Richelieu ; ce grand homme de qui l’approbation peut seruir de
bouclier contre la mesdisance, fit eslection de mon Genie pour s’en seruir
dans ses plus secrettes intrigues, sans que l’on ayt pû discuter durant quelques
années, si les principaux succez des affaires de la France se sont faits
par ses ordres ou par le mien, pendant le temps de son ministere.
Ie ne puis pas oster l’opinion que l’on a conceuë, que ie suis l’Autheur
de tous les maux & les miseres qui luy ont acquis, la haine generale de tous
les peuples, & que ie n’ayt esté que le partysan de ses mauuaises actions,
sans participer aux beaux desseins qui la fait quelquesfois reüssir : Mais ne
pouuois-je pas tout hazarder, puis qu’il n’y alloit rien du mien, & quelle
risque pouuois-je courir en le faisant hayr du peuple pour son tyrannique
Gouuernement, qui s’accoustumant petit à petit à souffrir, deuoit estre par
ce moyen plus disposé de patienter les violences de mon Ministere.
Sonescarlate estoit d’vne si bonne teinture, qu’à force de me frotter contr’elle
ma Soutane en prit la couleur, & mon Chapeau rougit de honte de
me voir esleué par son moyen dans cet Eminente splendeur, que ie n’aurois
osé iamais esperer ; en effet, i’aduouë que cette haute faueur estoit
bien au dessus de mes merites : Ie fus donc fait Cardinal moy indigne, &
dés aussi-tost mon extrauagance me fit croire que rien ne m’estoit impossible,
sa mort fortifia cette crece apres m’auoir laissé en bonne posture dans
l’Esprit du feu Roy, à qui ie persuaday facilement par mes adrettes complaisances,
qu’il n’auoit rien perdu au chãge qu’il auoit fait ; mais comme i’auois
quelque peine à posseder entierement son Esprit, la maladie qui l’emporta
bien-tost apres, & que quelques malicieux ont osé dire que i’auois
auancée, me laissa tout à fait absolu. La bonté de la Reyne crut que ie la pouuoit
beaucoup soulager dans sa Regence, & me laissa sans contredit exercer
le Gouuernement, quelques-vns l’approuuerent d’abord, mais la pluspart
en formerent des plaintes qui ne furent point escoutées : Il est vray
qu’elles estoient iniustes, & l’on ne me pouuoit accuser de violence ; puisque
ie ne suiuois que les ordres que m’auoit laissez le deffunt Cardinal, que si