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Mazarinade n° A_5_21

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Anonyme [1649], LE ZELE ET L’AMOVR DES PARISIENS ENVERS LEVR ROY. , françaisRéférence RIM : M0_4082. Cote locale : A_5_21.



Et de fait, si dans la sainte parole les Iuges sont ainsi nommez ; les Rois
qui sont les Souuerains Iuges de la terre ; establie (comme disoit de Salomon
la Reyne de Saba) pour faire iugement & iustice, ne le seront-ils pas
aussi. Ils sont Dieux veritablement en quelque sorte ; le rapport qu’ils ont
auec la Puissance diuine leur permet, peut s’en faut ; cette qualité, aussi
leurs personnes sont-elles sacrées, & ce n’est pas vn moindre sacrilege de les
offencer que de renuerser les Autels.
Ainsi les ames bien instruites, & que la crainte du Dieu souuerain accompagne ;
considerant sa grandeur & sa Maiesté depeinte dans ces Souuerainetez
de la terre ; les respectent & les honorent, & leur conseruent inuiolables
toute sorte de fidelité & d’amour. Tellement que comme nous reconnoissons
ne tenir & ne receuoir rien d’ailleurs que de la main du Premier
de tous les Monarques ; nous donnons tout librement à ces augustes
Lieutenans. S’ils ont besoin des biens que chacun de nous possede, nos
coffres leur sont aussi-tost ouuerts : Et s’il faut ioindre à nos biens nos vies,
& leur consacrer nostre sang & nos richesses, nous n’auons rien que nous
ne leur donnions de bon cœur. Dans les perils les plus euidens nous courons
la teste baisee, & quant ils le veulent & qu’ils nous commandent, la
mort ne nous peut effrayer. Nous voyons mourir deuant nous pour leur
seruice vne infinité de nos compagnons. Le trespas se presente à nos yeux
sous mille sorte d’hideuses images : tantost vne mine esleue contre nous
des montagnes de terre ; cent mousquets esclattent en murmures espouuentans ;
nous ne sentons de toutes parts que pointes d’especs, de picques,
& d’hallebardes ; nous entendons de tous costez gronder le tonnerre du
canon qui vomit les foudres ardans. Celuy-la en est brisé en mille pieces
celuy-cy meurt de son seul vent alumé. L’vn tombe sans dire en mourant
vne seule parole ; l’autre iette des cris sensibles & douloureux. La terre
est couuertes de morts & de mourants. L’air est plein de balles & de boullets,
de flames & de fumée. Le Ciel retentit du bruit des canons & des
plaintes des miserables. En voila vn qui perce la gorge à celuy là d’vn coup
d’espée ; cetuy-cy fend la teste à cét autre d’vn coup de sabre ; ce caualier
tombe percé d’vn coup de picque : Cette descharge de mousquetaires vient
de renuerser par terre tout ce premier rang de gendarmes. Plus ces deux
escadrons s’approchent, & plus ils diminuënt, leurs pistolets sont mortels
aux vns & aux autres. Enfin de toutes parts regne le carnage & l’horrenr.
Dans ces combats tout est formidable, mais n’importe ; c’est nostre
Prince qui nous y enuoye, & nous y faut vaincre ou mourir.
Encore ne sont-ce-là que des ieux, & les moindres des maux que nous
voudrions souffrir pour nostre Monarque. Les grands courages y couroient
de gayeté de cœur. S’il se pouuoit trouuer quelque preuue d’amour
plus signalée à luy rendre, nous sommes prests de la luy donner. Il
n’est point de fatigue imaginable, qui à plusieurs personnes est plus sensibles
& plus à craindre que le danger mesme des batailles ; il n’est point de
nuit à passer ; de froid à souffrir ; de chaud à supporter ; de pluye & de neige
à receuoir. Il n’est point de mauuais pas à franchir 3 de precipices, ny