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Mazarinade n° C_1_35

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Anonyme [1649], LES CONTENS ET MESCONTENS, SVR LE SVIET DV TEMPS. , français, latinRéférence RIM : M0_782. Cote locale : C_1_35.


qui fut suiuy d’vne risee generale, vn Meusnier qui s’estoit eschauffé dans la
dispute, auoit laissé son mulet derriere luy, chargé de deux sacs de farine,
quelque matois se seruant de l’occasion ayant percé le sac, en tira secrettement
vne bonne partie, & se retira finement apres auoir fait son coup, le Meusnier
en estant aduerty par quelques vns, qui voyoient encor couler la farine par
le trou, s’escria qu’il estoit volé ; Sur quoy la femme d vn solliciteur qui s’escrimoit
fort & ferme de la langue, & qui n’en eust pas donné sa part au chat,
luy dit en le raillant, ha qu’il est bien employé, c’est par mon ame pain benist,
il est bon larron qui larron desrode, vrayment le voila bien malade, quand on
luy en auroit pris vingt fois dauantage, il sçauroit bien ou le reprendre, les premieres
moutures en patirõt sans doute ; à qui en a cette double masque, luy replique
le Meusnier, t’ay je iamais riẽ dérobé, si tu auois fait les pertes que i’ay
fait : Tu n’aurois pas le caquet si afilé, i’ay perdu six asnes, Messieurs, & quatre
mulets, quand les grandes eaux emporterent les moulins, & cette chienne
me viendra reprocher encore, que ie faits de grands profits ; quant tu aurois
esté noyé quant & quant eux, il n’y auoit pas eu grand perte, dit la solliciteuse,
vn Boulanger prenant la parole pour le Meusnier, qui estoit comme ie
croy son compere, dit que cela estoit estrange que l’on blasmoit les personnes
les plus necessaires, & desquelles on ne se pouuoit passer, sçay mon ma foy,
dit vn Relieur, voila des gens bien necessaires : Mais c’est pour tirer l’argent
& ruiner entierement le pauure peuple, que veux tu dire replique le Boulanger,
aurois tu du pain sans eux & sans nous, nous en donne-tu, luy dit l’autre,
& ne deuons-nous point en auoir de l obligation, lors que tu nous rançonne
& vends vne chose six fois au double ; En effet continuë vn Peintre, c’est vne
honte des abus que commettent les Boulangers, ils achetent le bled à bon
prix, & rencherissent tous les iours le pain, de plus en plus, la police y
deuroit donner ordre, & en chastier quelques-vns pour donner exemple aux
autres, cela ne va pas comme tes peintures barboüillées, luy respond le Boulanger,
mesle-toy de vendre tes Vierges Maries borgnesses, ou de faire comme
Iudas en vendant nostre Seigneur pour trente deniers : Il faudroit donc
que ie te le vendisse, car tu as plus la mine d’vn Iuif que d’vn moulin à vent,
dit le Peintre, vn frippier qui auoit la teste tournée d’vn autre costé, creut
que ce mot de Iuif auoit esté dit à son occasion, & sans demander d’où venoit
cette iniure, s’adressa fortuitement à vne Harangere, qu’il trouua la bouche
ouuerte, & iurant par la mort & par la teste, l’apella plus de cent fois Macquerelle,
est-ce à cause, luy dit-il ; en suitte que tu ne vend plus ta maree puante,
depuis que nous auons permission de manger de la viande, te veux tu vanger
sur ceux qui n’en peuuent mais, mort bieu ie t’enuoyray chercher tes Iuifs
où tu les a laissez, & te montreray que ie suis honneste homme ; En as-tu tantost
assez dit, replique l’Harangere, les mains sur les roignons, iour de Dieu
tu t’és bien adressé guieble de receleur, si ie vendons de la marchandise elle
est belle & bonne ; mais pour toy tu te donnerois au Diable pour cinq sols, &
tromperois ton pere si tu pouuois, c’est bien mercy de ma vie de quoy ie me
mets en peine, si i’ay ta pratique, ou si tu vas acheter des tripes cu de la vache
aux Bouchers, sur ce mot de Bouchers, vn qui estoit vn peu derriere s’auança