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Mazarinade n° C_9_45

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Anonyme [1649], REMONSTRANCES A LA REYNE REGENTE, SVR LE GOVVERNEMENT DE L’ESTAT. , françaisRéférence RIM : M0_3334. Cote locale : C_9_45.


REMONSTRANCES A LA REYNE
Regente, sur le gouuernement de l’Estat.

MADAME,
Ce ne sont plus les paroles ny la voix, ce ne sont plus les simples accens de
la France desolée, qui frappent les aureilles de V. Majesté, ce sont ses larmes,
ses miseres & son sang qui se presentent à vos yeux, & qui se sont vnis pour
combatre cette austere, pour ne pas dire, inhumaine resolution de punir la
Ville de Paris par le sac & les desordres d’vn siege. Ce ne sont plus quelques
particuliers qui vous forment des plaintes, ce sont vniuersellement tous les
Subjets du Roy qui gemissent & qui crient, afin de vous rendre sensible à
leurs mal-heurs : C’est la plus belle Ville du Royaume ; c’est le lustre & l’ornement
de la France ; c’est la plus auguste demeure de nos Roys, qui se vient
rendre aux pieds de V. M. afin d’implorer la protection de vostre main, qu’vn
conseil mal-heureux a osé armer pour sa ruine. Ce sont les vertus, les vœux
& la pieté que cette Ville enferme ; ce sont les Cloistres & les Vierges, les
Autels, les Hospitaux & les Temples, & tout ce qui se trouue de plus innocent
& de plus sacré, qui sollicite la pieté d’vne Reyne : laquelle ayant fait
paroistre jusques à maintenant tant de zele & de constance au seruice de
Dieu, doit veiller jusques à la perte de sa vie à la conseruation de tant de bonnes
Ames, comme autant de tresors de grace & de saincteté, que Dieu luy a
voulu confier. Enfin, c’est la France toute entiere, laquelle abatuë soubs le
faix d’vne si longue guerre, toute chargée de playes que luy ont fait ses ennemis,
n’ayant plus en son corps de parties qu’elle puisse dire saines, que son
cœur ; Conjure V. M. par tout ce qu’il y a de plus sensible à vne Mere, & de
plus cher à vne Regente, de ne luy point donner ce dernier coup dont vostre
main la menace. Et comme elle publie hautement, qu’elle ne veut se conseruer
de vie que pour vous, c’est à vostre bonté d’arrester ce coup, qui la faisant
mourir, la reduira dans l’impuissance absoluë de rendre à V. Majesté
les seruices qu’elle luy a voüez.
Vous ne pouuez pas ignorer, MADAME, que vous n’estes que depositaire
du Royaume, & que dans peu d’années vous vous verrez obligée d’en
rendre compte au Roy vostre fils, & à Dieu à la fin de vos iours : Or vous sçauez
que pour lors sa justice, qui n’aura plus de veuë ny de choix pour les
Couronnes & pour les Sceptres, ne pourra plus estre esblouye de l’esclat de la
pourpre, ny surprise par les intrigues d’vn Ministre, ny intim dée par les menaces
d’vn jeune victorieux, ny arrestèe par l’authorité d’vne Regence. Cette
pensée vous doit rendre sensible aux miseres de cét Estat, lequel se voyant