[retour à un affichage normal]

Accueil > recherche > Affichage d'une occurrence en contexte

Mazarinade n° B_5_56

Image de la page

Anonyme [1652], HISTOIRE DE MAGDELAINE BAVENT, Religieuse du Monastere de Saint Loüis de Louviers. Avec sa Confession generale & testamentaire, où elle declare les abominations, impietez, & sacrileges qu’elle a pratiqué & veu pratiquer, tant dans ledit Monastere, qu’au Sabat, & les personnes qu’elle y a remarquées. Ensemble l’Arrest donné contre Mathurin Picard, Thomas Boullé & ladite Bavent, tous conuaincus du crime de magie. DEDIÉE A MADAME LA DVCHESSE d’Orleans. , françaisRéférence RIM : M0_1640. Cote locale : B_5_56.


qui augmentoient toûjours, & me causoient beaucoup d’ennuy
& de tristesse. Vne fois la Concierge m’ayant presté ses heures, j’y
rencontray vne Hostie dedans : I’eus en l’esprit qu’elle pouvoit
estre consacrée, & par haine, dépit, & aversion de Iesus-Christ, qui
ne m’assistoit point en la façon que je l’eusse souhaitté, il me prit
envie de la piquer, comme on fait au Sabat : Vne vision me parut,
comme de quelque Ange, qui me dit que cette Hostie n’étoit
point cõsacrée, mais que je ne laissois d’estre tres coupable, pour
la méchante volonté que j’avois euë, de laquelle il me reprit &
tança âprement. Si cette vision étoit vraye ou non, d’autres l’examineront :
toûjours elle me fit du bien en m’empéchant ce mal.
Au reste il est certain que l’Hostie n’étoit point consacrée, & la
Concierge l’avoit apprestée (selon qu’elle le dit) pour cõmunier
à la Messe de quelque Chapelain, à qui elle la devoit bailler, parce
qu’il ne s’en rencontre pas toûjours de propre.
 
Vne autre occasion, peut-estre à cinq ou six jours seulement de
la precedente, si je m’en souviens bien, j’eus vne tentation bien
plus furieuse : quand tous les Diables eussent esté aupres de moy,
je croy que je n’aurois pas esté davantage tourmentée en l’interieur.
Il me sembloit estre toute acharnée contre Iesus Christ ; que
luy dis-je, mais que ne luy dis-je point ? Il m’arriva de luy faire des
reproches, de luy prononcer des injures, des blâphemes, des impietez.
Ie le blâmois & le tançois de me faire souffrir pour des
choses dont il devoit sçavoir que j’étois innocente, de m’avoir
mise entre les mains de gens qui ne cherchoient que la perte de
mon ame ; de me vouloir damner ; de me bannir du fruict de sa
Croix ; de m’exclure de sa redemption ; de n’estre point mort pour
moy ; d’avoir répandu son sang pour qui il avoit voulu, sans m’y
donner de part, &c. Aprés en dépit de luy j’invoquois les Demons,
je me promettois à eux de bon cœur, & m’y donnois interieurement :
Ie les conviay à prendre mon ame & mon corps, & à
emporter tout : Ie les solicitois par mes postures sales à jouïr de
moy, si cela servoit de quelque chose pour les attirer. Ie les priois
de me vanger s’ils pouvoient : Et certainement si j’eusse eu le
pouvoir sur eux qu’on m’attribuë, ils auroient fait merveilles :
Comme encore s’ils eussent eu tant de pouvoir sur moy, comme
on le croit, j’aurois esté bien-tost leur proye. Ce n’est pas tout,
car ne voyant, n’oyant, ne trouvant point de Diables qui vinssent