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Mazarinade n° B_5_56

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Anonyme [1652], HISTOIRE DE MAGDELAINE BAVENT, Religieuse du Monastere de Saint Loüis de Louviers. Avec sa Confession generale & testamentaire, où elle declare les abominations, impietez, & sacrileges qu’elle a pratiqué & veu pratiquer, tant dans ledit Monastere, qu’au Sabat, & les personnes qu’elle y a remarquées. Ensemble l’Arrest donné contre Mathurin Picard, Thomas Boullé & ladite Bavent, tous conuaincus du crime de magie. DEDIÉE A MADAME LA DVCHESSE d’Orleans. , françaisRéférence RIM : M0_1640. Cote locale : B_5_56.


1647. quelque temps apres la mort de Monsieur d’Evreux.
 
Les chifõniers
trouvent
le
corps de
Picard
jetté à
la voirie.
Ce ne fut pas vne petite humiliation pour moy, qui suis de la
ville : Le peuple me regardoit comme la plus horrible Magicienne
qui ait jamais esté au monde : mais sa voix en cecy, non plus qu’en
plusieurs autres choses, n’est pas, à mon avis, celle de Dieu. Ie suis
grande pecheresse, & non pas grande Magicienne. Si les personnes
qui font profession de cét art Diabolique, n’en sçavoient point
davantage que moy, la terre n’en recevroit pas de grands maux.
On me conduisit à la prison de l’Archevesché, sans m’ordonner
vn morceau de pain seulement pour ma nourriture. Tout le
mon de m’y venoit voir par curiosité ; & je pense qu’on prenoit
garde si on ne voyoit point des Diables à mes côtez. I’oyois des
discours, qui ne me consoloient gueres ; car on n’en disoit pas
moins qu’ailleurs : Que je meritois d’estre brûlée à petit feu toute
vive : Qu’il falloit inventer pour moy de nouveaux supplices, &c.
Dieu ne laissa pas d’inspirer quelque personne de condition, de
m’envoyer quelque petit ordinaire pour me sustenter.
Entre les Ecclesiastiques qui prirent la peine de me visiter, je
suis grandement obligée à la charité de M. le Penitencier de
Roüen : Il daigna se charger de la conduite de mon ame, & parce
que ses occupations ne luy permettoient pas de me parler autant
qu’il jugeoit que j’en avois besoin, il pria vn Prestre de la Congregation
de l’Oratoire, de l’aider en ce rencontre. C’étoit tout ce
que je demandois, & ma seule apprehension eust esté que M. le
Penitencier d’Evreux me fust venu encor tourmenter. S’il s’en
fust meslé, comme il le pretendoit bien, & m’en parloit quelques
fois, j’étois mal. Il faut avoir confiance aux personnes qui dirigent
la conscience, & je ne sçaurois luy en avoit. L’apparence, si
on sçavoit les choses ; outre ce que j’ay déja dit de sa procedure
vers moy, mes mécontentemens s’étoient accreus contre luy par
d’autres rencontres : Il m’avoit fait visiter à Evreux deux fois au
corps, à cause que les filles de Louviers disoient que j’étois grosse,
bien qu’en ce temps là je ne voyois personne. Il avoit esté present
à Louviers, pour voir visiter ma teste : & luy-mesme, qui me
confessoit, prenoit la peine de leur marquer divers endroits à
piquer ; dequoy je le tançay âprement. Sur le rapport des filles
il étoit venu autre fois me demander froidement ce que j’avois
fait de mes enfans venus à terme ; & je le frapay de colere, le renvoyant